Le favoritisme et la mainmise du parti


Le favoritisme était essentiel à la gestion des partis politiques, la construction de réseaux d’influence et la victoire aux élections. Dans le contexte du gouvernement responsable, John Alexander Macdonald et d’autres hommes politiques, tels William Warren Baldwin et Wilfrid Laurier, en étaient bien conscients [V. Le favoritisme]. Macdonald exprima son opinion à ce sujet en 1870 :

« Je crois que dans la distribution des faveurs gouvernementales nous respectons le vrai principe constitutionnel. Chaque fois qu’un poste est vacant, il revient au parti qui appuie le gouvernement si, à l’intérieur de ce parti, il se trouve une personne apte à effectuer la tâche. La responsabilité ministérielle ne saurait fonctionner à partir d’un autre principe. Toutefois, je ne me soucie pas des antécédents politiques d’un homme si je suis convaincu qu’au moment de sa nomination, il est vraiment et sincèrement du gouvernement. Mon principe est : récompense tes amis et n’achète pas tes ennemis. »

 

Macdonald avait affiné sa vision du favoritisme depuis les années 1850 :

En outre, il centralisa la distribution des faveurs gouvernementales. Macdonald était loin d’être le premier homme politique à faire preuve de favoritisme mais, contrairement à ses prédécesseurs conservateurs, il maintenait une forte emprise personnelle sur la distribution des places quand il était au pouvoir, et il utilisait délibérément des postes, ou des promesses de poste, pour tenter de renforcer le parti au niveau local – son principe était de ne récompenser que des services réels. En veillant à ce que les recommandations de faveurs « ressortissent au bureau du procureur général », comme il le souligna en janvier 1855, et en travaillant dur pour ceux envers qui il s’était engagé, il put accroître, dans toute la province, la loyauté à l’égard du parti et de sa personne.

 

À l’époque de la Confédération, en 1867, le favoritisme était devenu une facette familière du savoir-faire politique de Macdonald :

Sous la direction de Macdonald, la distribution des faveurs prit un tour particulier […] Fondamentalement, c’était au ministre de décider, et Macdonald intervenait rarement. Dans son propre département, à titre de ministre de la Justice de 1867 à 1873, de ministre de l’Intérieur de 1878 à 1883, puis de surintendant général des Affaires indiennes de 1878 à 1887 ou de ministre des Chemins de fer et Canaux de 1889 à 1891, il était prudent dans ses nominations, et il n’acceptait pas que les membres du cabinet ou les députés fassent pression sur son sous-ministre afin d’obtenir des faveurs pour leurs électeurs.

 

Le favoritisme fournissait en effet un moyen de reconnaître la loyauté des lieutenants ou de refuser même des emplois de subalternes aux opposants. Le maître des Postes Alexander Campbell mena ses années les plus actives à titre de responsable du parti de 1867 à 1873 :

Pendant ces années […], il exerça constamment la fonction de maître général des Postes, sauf pendant quatre mois. Il dispensa assidûment, dans l’intérêt de son parti, les faveurs que sa charge lui permettait de distribuer. Les augmentations de salaire des employés des Postes, les congés, les nominations étaient accordés selon des critères partisans […]

Macdonald lui confia le soin d’assurer sa réélection dans Kingston [en 1872], et sans doute s’occupa-t-il aussi des autres circonscriptions du vieux district de Midland. Avant la Confédération, ce territoire avait constitué l’assise du pouvoir de Macdonald mais, à partir du moment où il évolua sur une scène plus vaste, il délégua à Campbell une bonne partie de l’administration du parti dans ce district.

 

Un cabinet fort était également crucial pour le succès du parti, et sa gestion exigeait du doigté et un sens politique considérable :

À l’automne [de 1878, Macdonald] choisit ses ministres, selon les règles habituelles : son cabinet reflétait la composition ethnique et religieuse du Canada et comprenait des représentants des six provinces. Macdonald n’arrivait à faire travailler ensemble des gens d’horizons si différents que grâce à son propre tempérament. D’abord, il croyait en la courtoisie. En demandant à Langevin, en 1879, de commenter une lettre jointe à la sienne, il notait : « Que vais-je répondre ? Que ce soit aimable. » Rien ne servait de se mettre quelqu’un à dos seulement pour obéir à un principe qui, d’ordinaire, ne s’appliquait même pas à la situation. Il y avait cependant des moments où il fallait se montrer dur et exigeant, mais ils étaient beaucoup moins fréquents qu’on ne le pensait. Si Macdonald fut rarement intraitable, il ne fit pas souvent non plus de promesses formelles.

 

Après les élections de 1878, Mackenzie Bowell, ministre des Douanes dans le cabinet de Macdonald, était fort occupé :

Pour ce qui était de l’aspect proprement politique de ses fonctions, Bowell s’occupait principalement de détails : emplois, augmentations de salaire, promotions, faveurs. Il semble avoir observé scrupuleusement les règles gouvernementales, mais pas toujours. Macdonald lui demandait souvent, mine de rien, si et dans quels cas on pouvait contourner ces règles. Ainsi, dans une lettre explicative écrite en 1884, il suggéra une nomination à un poste mineur aux Douanes : « Si vous pouvez faire cela pour l’évêque, faites-le. Il importe au plus haut point, en ce moment précis, de conserver non seulement sa sympathie, mais son zèle pour la cause. »

 

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