EDWARD AUGUSTUS, duc de KENT et STRATHEARN, officier, né le 2 novembre 1767 à Buckingham Palace, Londres, quatrième fils de George III, roi de Grande-Bretagne et d’Irlande, et de Charlotte-Sophie de Mecklembourg-Strelitz ; décédé le 23 janvier 1820 à Sidmouth, Angleterre.

Edward Augustus perdit très tôt la faveur de son père et ne la recouvra jamais. Le roi le détestait profondément et, pendant de nombreuses années, maintint sa décision de le tenir éloigné de l’Angleterre. Destiné à la carrière des armes, comme plusieurs de ses frères, Edward Augustus fit ses études secondaires et reçut sa formation militaire à Hanovre et à Lunebourg (République fédérale d’Allemagne), ainsi qu’à Genève (Suisse). Il y fut profondément malheureux et commença à contracter les dettes qui devaient empoisonner toute son existence. De surcroît, la mauvaise fortune s’attachait à lui ; c’est ainsi qu’il perdit en mer, à sept reprises, de coûteux ensembles d’uniformes et d’équipage militaires. Le 30 mai 1786, il reçut le grade de colonel et, en avril 1789, il devint colonel du 7e d’infanterie. L’année suivante, lorsqu’il quitta Genève sans permission pour retourner à Londres, son père s’empressa de l’envoyer à Gibraltar prendre le commandement de son régiment. On ne tarda pas à s’apercevoir que le prince était partisan d’une discipline très rigoureuse, même selon les normes de l’époque, et qu’il se montrait très pointilleux sur les moindres détails relatifs à l’uniforme et au décorum. Les membres du 7e d’infanterie, qui rongeaient leur frein sous sa conduite, furent envoyés à Québec en 1791. De sang royal, Edward Augustus fut, bien entendu, introduit dans les plus hautes sphères de la société locale et il se lia particulièrement d’amitié avec d’éminentes familles canadiennes. Il allait d’ailleurs correspondre sa vie durant avec Ignace-Michel-Louis-Antoine d’Irumberry* de Salaberry et manifester un vif intérêt pour la carrière militaire des trois fils de Salaberry, dont Édouard-Alphonse et Charles-Michel*. En 1792, il fit un bref séjour à Newark (Niagara-on-the-Lake, Ontario) pour rendre visite au lieutenant-gouverneur Simcoe.

En 1793, lorsque la guerre avec la France éclata, Edward Augustus, promu major général le 2 octobre, s’empressa de se porter volontaire. Il commanda une brigade lors de la réduction de la Martinique et de Sainte-Lucie en 1794. Il se rendit ensuite à Halifax, où il fut nommé commandant des forces armées en Nouvelle-Écosse et au Nouveau-Brunswick. Le prince adopta une attitude sévère envers l’ivrognerie et le jeu, et, selon le témoignage de contemporains, il s’opposa irréductiblement à ce qu’il considérait comme le relâchement des mœurs de la société en général. Il avait pris l’habitude de faire défiler la garnison de Halifax, tous les matins à cinq heures, et d’assister à la revue. La sévérité des sanctions disciplinaires qu’il imposait constamment aux soldats pour des écarts de conduite le rendit très impopulaire. Cependant, il était capable en même temps de gestes humanitaires remarquables envers ses hommes.

En raison de la guerre qui sévissait avec la France, Edward Augustus amorça un ambitieux projet de reconstruction des fortifications de Halifax qui étaient passablement délabrées depuis la Révolution américaine. Une nouvelle citadelle destinée à remplacer l’ancienne fut construite, et on empiéta même sur l’espace de Citadel Hill pour faciliter les travaux de construction. On construisit d’autres batteries et d’autres fortifications, dont plusieurs tours. On installa aussi une estacade flottante à travers le Northwest Arm afin d’empêcher toute flotte ennemie d’y pénétrer pour bombarder la ville par l’arrière. La mise sur pied d’un système de signalisation destiné à faciliter les communications entre Halifax et les postes éloignés constitua une innovation. Le coût des travaux dépassa largement le montant prévu, et, malgré cela, à peine dix ans plus tard, un grand nombre de constructions tombaient presque en ruine.

En 1798, le prince se blessa à la jambe en tombant de son cheval, et c’est avec empressement qu’il accueillit la suggestion de ses médecins, dont William James Almon et John Halliburton, de poursuivre sa convalescence en Angleterre ; il quitta donc Halifax en octobre. En mars 1799, le Parlement lui accorda un revenu annuel de £12 000, et, le mois suivant, il fut fait duc de Kent et Strathearn. En mai, il fut également promu au grade de général et créé commandant en chef des forces armées de l’Amérique du Nord britannique. En septembre, il retourna à Halifax, mais des ennuis de santé interrompirent son séjour. Il repartit en août 1800, mettant ainsi fin à son expérience nord-américaine. Il ne devait jamais réaliser son ambition de devenir gouverneur en chef de l’Amérique du Nord britannique. Une brève et malheureuse affectation à Gibraltar, la deuxième, de mai 1802 au printemps de 1803, mit un point final à sa carrière militaire active ; on l’avait rappelé, car le bruit courait que la discipline qu’il imposait était beaucoup trop rigoureuse. En septembre 1805, il fut nommé maréchal, par ancienneté. Si ses frères aînés réussirent à le protéger un peu contre le parti pris profondément enraciné de son père, il se vit refuser les charges importantes. Il vécut retiré pendant la plus grande partie du reste de sa vie dans sa propriété d’Ealing, en Angleterre. Il devint président ou bienfaiteur d’un très grand nombre d’associations de bienfaisance, en plus de s’intéresser vivement aux doctrines socialistes de Robert Owen. Pour des raisons pécuniaires, il habita Bruxelles de 1815 à 1818.

À Halifax, le nom d’Edward Augustus est associé à l’établissement des plans de construction de la tour de l’Horloge, au pied de Citadel Hill (bien qu’elle ne fût commencée qu’après son départ), et à la construction de l’église St George’s Round. On reconnaît également l’empressement que le prince manifesta pour venir en aide à des Néo-Écossais qu’il avait connus pendant son séjour. La résidence Prince’s Lodge dans le bassin de Bedford, qu’Edward Augustus loua du lieutenant-gouverneur John Wentworth, avec qui il continua d’entretenir des relations étroites et amicales, est également célèbre. C’est là qu’il habita avec Thérèse-Bernardine Mongenet*, dite Mme de Saint-Laurent, mieux connue sous le prénom de Julie. Elle était venue à Gibraltar en 1790, à sa demande, et l’avait fidèlement suivi lors de son périple à Québec, Halifax, Ealing, et enfin à Bruxelles où ils se séparèrent. Il ne fait point de doute que le prince fut très attaché à cette compagne qui partagea pleinement sa vie. En 1818, après 27 ans de vie avec elle, il se vit dans l’obligation de songer à un mariage pour éviter une éventuelle rupture dans la succession de la famille royale. Il céda donc aux pressions de la famille et du public. Après avoir gratifié Mme de Saint-Laurent d’une généreuse somme, il épousa, le 29 mai 1818, à Cobourg (République fédérale d’Allemagne), Victoria Mary Louisa, veuve du prince de Leiningen. Un an plus tard, la naissance de la princesse Victoria, future reine, venait combler les attentes du public. Fier de sa fille, le duc, en compagnie de la duchesse, ne manquait pas une occasion de la produire en public. En décembre 1819, il emmena sa famille dans une maison de campagne, dans le Devon, où il mourut d’une pneumonie un mois plus tard.

Le voile n’a pas encore été entièrement levé sur la vie d’Edward Augustus. Le bruit courut qu’il aurait eu des enfants avec Mme de Saint-Laurent et avec d’autres femmes, rumeurs qui déplaisaient beaucoup à la reine Victoria qui s’efforça de les faire taire. Sir William Fenwick Williams* se complaisait à ne pas nier qu’il était le fils du duc.

En collaboration avec W. S. MacNutt

The later correspondence of George III, Arthur Aspinall, édit. (5 vol., Cambridge, Angl., 1962–1970).— The life of F.M., H.R.H. Edward, Duke of Kent, illustrated by his correspondence with the De Salaberry, family, never before published, extending from 1791 to 1814, W. J. Anderson, édit. (Ottawa et Toronto, 1870).— Royal Gazette and the Nova-Scotia Advertiser, 1794–1800.— DNB. G.-B., WO, Army list, 1786–1820.— David Duff, Edward of Kent : the life story of Queen Victoria’s father (Londres, 1938 ; réimpr., 1973).— Mollie Gillen, The prince and his lady : the love story of the Duke of Kent and Madame de St. Laurent (Toronto, 1971).— Erskine Neale, The life of Field-Marshall His Royal Highness, Edward, Duke of Kent, with extracts from his correspondence, and original letters never before published (Londres, 1850).— Harry Piers, The evolution of the Halifax fortress, 1749–1928, G. M. Self et al., édit. (Halifax, 1947).

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En collaboration avec W. S. MacNutt, « EDWARD AUGUSTUS, duc de KENT et STRATHEARN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/edward_augustus_5F.html.

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Année de la publication:    1983
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