LOVETT, PHINEAS, fermier, marchand, officier de milice, fonctionnaire, juge de paix, juge et homme politique, né le 15 mai 1745, probablement à Milford, Massachusetts, deuxième enfant de Phineas Lovett et de Beulah Morse ; le 6 avril 1768, il épousa à Mendon, Massachusetts, Abigail Thayer, et de ce mariage naquirent 11 enfants ; décédé le 17 juin 1828 à Annapolis Royal, Nouvelle-Écosse.
Phineas Lovett arriva en Nouvelle-Écosse avec les colons d’origine américaine qui s’installèrent sur les terres fertiles abandonnées par les Acadiens lors de la Déportation. Il semble que son père occupa une terre en Nouvelle-Écosse dès 1760 ; en octobre 1765, le père et le fils figuraient sur la liste des concessionnaires du canton d’Annapolis. En 1770, Lovett était déjà établi à Round Hill, dans le comté d’Annapolis, dans la grande ferme qu’il devait habiter jusqu’à la fin de ses jours.
Comme bien des Néo-Écossais de son temps, Lovett était à la fois fermier et marchand. À la fin des années 1780, il possédait un navire qui faisait du commerce avec les Antilles ; plus tard, semble-t-il, il allait consacrer plus de temps aux affaires qu’à l’agriculture. Il profita pleinement des possibilités de commerce lucratif qu’offrait l’embargo imposé en 1807 par les Américains sur les importations britanniques. En fait, pendant la guerre de 1812, il passa tellement de temps au Nouveau-Brunswick pour faire du commerce avec les États-Unis qu’on lui reprocha de négliger ses fonctions de magistrat en Nouvelle-Écosse.
Lovett faisait peut-être un voyage d’affaires en Nouvelle-Angleterre quand, en 1775, il rencontra un espion rebelle et connut une brève notoriété pour avoir prévenu les autorités néo-écossaises des plans d’invasion qui se tramaient dans ce foyer de rébellion qu’était Machias (Maine). Parti de Salem, dans le Massachusetts, pour se rendre à Machias, Lovett se fit interroger sur la capacité de résistance des forts de la rivière Saint-Jean et d’Annapolis Royal. Il prétendit ne rien savoir sur le sujet mais, dès son arrivée à Machias, on le questionna sur la réaction probable des habitants d’Annapolis Royal à une attaque américaine. Encore une fois, Lovett feignit l’ignorance : comme il avait quitté la province depuis quelque temps, répondit-il, il n’avait aucune idée de ce que la population, pensait de la cause rebelle. Une fois en Nouvelle-Écosse, il se rendit à Halifax pour rapporter ces conversations au conseil. Son attitude montrait qu’il appuyait le gouvernement sans réserve, contrairement à nombre de ses compatriotes venus de Nouvelle-Angleterre, dont son père, qui favorisaient les rebelles. Le fort Frederick (Saint-Jean, Nouveau-Brunswick), qui était situé à l’embouchure de la rivière Saint-Jean, fut détruit par des hommes de Machias plus tard au cours de l’année, mais Annapolis Royal ne fut attaqué qu’en 1781 par deux corsaires américains qui firent une incursion dans la ville. Selon des comptes rendus de l’attaque, la milice locale n’avait pris aucune mesure pour défendre la ville, allégation que Lovett, lieutenant-colonel du régiment, démentit vigoureusement. D’après une tradition locale qui circulait encore un siècle plus tard, le courage personnel de Lovett fut également mis en doute.
Au cours de sa longue existence, Lovett occupa de nombreux postes publics dans le comté d’Annapolis. Il y fut shérif en chef en 1781 et 1782 ; puis, en décembre 1794, il fut nommé juge de paix. En 1810, il devint juge à la Cour inférieure des plaids communs. Il siégea également à la chambre d’Assemblée à plusieurs reprises. Lors d’une élection partielle tenue en 1775, il devint député du canton d’Annapolis. Comme nombre de députés vivant dans les régions rurales avant l’instauration d’un régime de rémunération à l’Assemblée, Lovett n’assistait pas régulièrement aux séances et, en novembre 1783, son siège fut déclaré vacant pour cause d’absence prolongée. Réélu dans le canton d’Annapolis en 1799, il ne prit cependant guère part aux débats houleux de la huitième législature [V. William Cottnam Tonge] ; il siégea rarement dans des comités et se rallia presque toujours du côté des partisans de l’exécutif. Apparemment, il ne se présenta pas aux élections de 1806. Il fut élu encore une fois dans la circonscription d’Annapolis lors d’une élection partielle tenue en 1808 pour remplacer le député, qui était décédé, mais sa présence ne fut pas plus régulière, probablement à cause de ses activités commerciales.
Phineas Lovett est un exemple type des nombreux « gentlemen campagnards »qui jouèrent un rôle prépondérant dans la Nouvelle-Écosse rurale des xviiie et xixe siècles, et qui maintinrent la tradition familiale en occupant des postes de fonctionnaires, tant sur le plan local que provincial ; ainsi, le père et les fils de Lovett furent à leur tour députés et magistrats. De même, les Lovett furent souvent les hôtes de dignitaires en tournée ; Phineas Lovett eut à plusieurs reprises l’honneur de recevoir chez lui un visiteur de sang royal en la personne du prince Edward* Augustus. Bref, à titre de marchands, de fermiers ou de propriétaires de navires, les Lovett faisaient partie intégrante de la communauté qu’ils représentaient.
PANS, RG 1, 168–169, 171, 173, 189, 225, 278.— PRO, CO 217/51.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1775–1783 ; 1800–1811.— Nova-Scotia Gazette, and the Weekly Chronicle (Halifax), 4 sept., 2 oct. 1781.— W. A. Calnek, History of the county of Annapolis, including old Port Royal and Acadia [...], A. W. Savary, édit. (Toronto, 1897 ; réimpr., Belleville, Ontario, 1972).
Judith Tulloch, « LOVETT, PHINEAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lovett_phineas_6F.html.
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Auteur de l'article: | Judith Tulloch |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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