COSSIT (Cossitt), RANNA (Rene), ministre de l’Église d’Angleterre et homme politique, né le 29 décembre 1744 à North Granby, Connecticut, deuxième fils de Rene Cossitt et de Phoebe Hillyer ; en juin 1774, il épousa à Claremont, New Hampshire, Thankful Brooks, et ils eurent 13 enfants ; décédé le 13 mars 1815 à Yarmouth, Nouvelle-Écosse.
Ranna Cossit obtint une licence ès lettres du Rhode Island College en 1771 ; il étudia ensuite la théologie en Angleterre, où il fut ordonné par l’évêque de Londres au début de 1773. Il commença immédiatement à exercer son ministère à Claremont, comme missionnaire de la Society for the Propagation of the Gospel in Foreign Parts. En conséquence de sa position fermement loyaliste pendant la période qui conduisit à la Révolution américaine, le comité de sécurité local avait ordonné, en avril 1776, qu’il fût enfermé et désarmé ; il refusa néanmoins de signer la Déclaration d’indépendance des habitants du New Hampshire, au mois de juillet de la même année. Malgré les soupçons qu’entretenaient les Américains sur la loyauté de tous les anglicans et malgré la diminution de sa propre congrégation, Cossit resta à Claremont pendant toute la durée de la guerre. En 1782, il fit un voyage dans la province de Québec pour renseigner les autorités britanniques sur les conditions qui prévalaient en Nouvelle-Angleterre. À son retour à Claremont, il correspondit avec les émissaires britanniques et les ravitailla en journaux américains.
Après la révolution, Cossit chercha à intéresser Haldimand, gouverneur de Québec, à un projet d’établissement de colons de la Nouvelle-Angleterre dans les Cantons de l’Est. Devant le refus du gouverneur d’approuver le projet, Cossit tenta d’obtenir de la Society for the Propagation of the Gospel un poste dans les Maritimes. En avril 1785, William Morice, secrétaire de la société, lui proposa un salaire de £50 pour exercer son ministère à Sydney, capitale de la colonie nouvellement créée de l’île du Cap-Breton, et lui offrit, plus tard dans l’année, un supplément régulier de £50 ; en outre, le gouvernement lui verserait un salaire de £100 comme aumônier de la garnison. Cossit accepta et arriva à Sydney le 2 juin 1786. Comme ni presbytère ni église n’existaient, Cossit construisit lui-même un presbytère en 1787 et entreprit les travaux de la future église au cours de la même année ; nommée St George, l’église ne fut pas terminée avant 1805 au moins. Il visita aussi des établissements éloignés, comme Louisbourg, Main-à-Dieu et Cow Bay (Port Morien), puis engagea le premier instituteur de la colonie, Hiram Payne.
Cossit fut nommé membre du Conseil exécutif de l’île du Cap-Breton, le 29 août 1786, et s’engagea de plus en plus profondément dans les affaires politiques de la colonie. Il collabora avec les lieutenants-gouverneurs Joseph Frederick Wallet DesBarres* et William Macarmick, mais il se querella vivement avec David Mathews*, qui allait devenir administrateur de la colonie après le départ de Macarmick en mai 1795. La querelle tenait apparemment au fait que Mathews n’avait pas réussi à se faire élire marguillier de l’église St George et qu’il en rejetait le blâme sur Cossit. Mais il faut plutôt chercher la cause première du conflit dans l’appui qu’accordait Cossit à DesBarres et à Macarmick dans leurs mésententes avec Mathews et son collègue loyaliste, Abraham Cornelius Cuyler. Après le départ de Macarmick, l’opposition à Mathews se concentra autour de Cossit et de James Miller, surintendant des mines, que Mathews qualifiait de malhonnête et d’incompétent. À l’automne de 1795, lorsque Cossit, comme c’était son droit à titre de missionnaire de la Society for the Propagation of the Gospel, nomma un nouvel instituteur en remplacement de Payne et obtint l’approbation de l’évêque Charles Inglis, Mathews essaya d’empêcher cette nomination. Cossit permit que les classes fussent données chez lui ; voyant cela, Mathews fit arrêter le maître d’école pour dettes. Il alla même jusqu’à nommer son propre instituteur, un catholique.
Cette querelle plaça Cossit à la tête des adversaires de Mathews. Au cours de 1797, Mathews trouva moyen de congédier les alliés de Cossit, Ingram BALL et William McKinnon, de leurs postes gouvernementaux. Craignant les plaintes que ceux-ci pourraient faire auprès du ministère de l’Intérieur, il fit circuler une pétition dans laquelle on le louait comme un « gouvernant populaire ». En juin, Cossit et quelques autres adressèrent un mémoire au gouvernement britannique pour demander la nomination d’un nouveau lieutenant-gouverneur. Ce geste paraît avoir amené le remplacement de Mathews, comme administrateur, par le major général James Ogilvie, au mois de décembre suivant. Mais, avant l’arrivée d’Ogilvie en juin 1798, Mathews fit emprisonner Cossit pendant trois mois pour une dette de £25 qu’il était censé devoir au fils de Mathews.
Pendant son mandat, Ogilvie en vint à la conclusion que Mathews était responsable des querelles de factions - opinion que partagea son successeur, le général de brigade John Murray*. L’hostilité de Mathews envers Murray contraignit ce dernier à s’allier avec Cossit et ses partisans, et Murray congédia Mathews et ses fidèles de divers postes, les remplaçant par des alliés de Cossit. La faction de Mathews s’efforça immédiatement de faire révoquer Murray, en invoquant le fait que le duc de Kent [Edward Augustus], résidant à Halifax, lui était antipathique. Murray fut en effet remplacé ; mais à l’arrivée de son successeur comme administrateur, le major général John Despard*, en juin 1800, Murray refusa de lui remettre le commandement civil. Il eut, en cela, l’appui de Cossit, pendant que Mathews et ses fidèles se ralliaient derrière Despard. Celui-ci établit finalement son autorité en novembre, puis il en appela au gouvernement britannique pour faire expulser Cossit de l’île du Cap-Breton et avoir ainsi la paix. Cossit ne retrouva pas sa puissance politique. Après la mort de Mathews en juillet 1800, un des partisans de ce dernier, Archibald Charles Dodd*, continua de tourmenter le ministre.
En 1801, Cossit était prêt à partir : il demanda à Inglis un poste en Nouvelle-Écosse. Mais, au moment où Inglis lui offrit le choix entre deux paroisses au printemps de 1803, Cossit avait changé d’idée et désirait rester dans l’île. Les plaintes continuelles de Despard amenèrent finalement Inglis au Cap-Breton en juillet 1805. Après trois jours de discussions, Inglis convainquit Cossit de partir s’il voulait éviter que le scandale de ses conflits politiques ne portât les colons à devenir « méthodistes, catholiques ou infidèles ». Cossit démissionna officiellement de sa mission de Sydney le 18 juillet 1805, et Inglis le nomma à Yarmouth où il fut installé comme rector de la nouvelle paroisse, le 23 janvier 1807. Il entreprit peu après la construction d’une église, qui fut terminée pour Noël, et desservit avec ardeur les établissements avoisinants de Chebogue, de Plymouth et de Tusket. Après son départ de Sydney, il ne se trouva plus mêlé aux questions politiques. Décédé le 13 mars 1815, il fut enseveli à Yarmouth.
Tout, chez Ranna Cossit, respire l’individualisme et la vitalité : sa façon toute personnelle d’écrire son nom, son comportement loyaliste sans détour, le fait qu’il implanta l’Église d’Angleterre dans l’île du Cap-Breton et à Yarmouth, et son rôle actif dans la vie politique de Sydney. Il inaugura le système officiel d’éducation à Sydney et fut un des fondateurs de la franc-maçonnerie dans l’île du Cap-Breton. Cossit fut un homme engagé dont on a reconnu l’importance dans l’histoire de la colonie du Cap-Breton : le 29 août 1977, le Nova Scotia Museum ouvrait sa maison, Cossit House.
APC, MG 11 [CO 217], Cape Breton A, 8 ; MG 23, C6, sér. 1, 6.— Cossit House (Sydney, N.-É.), Ranna Cossit, letterbook.— PRO, CO 217/112–138.— USPG, Journal of SPG, 27–29 (mfm aux APC).— Genealogical and family history of the state of New Hampshire : a record of the achievements of her people in the making of a commonwealth and the founding of a nation, E. S. Stearnes et al., compil. (4 vol., New York et Chicago, 1908), 1.— Morgan, « Orphan outpost ».— O. F. R. Waite, The early history of Claremont, New Hampshire ; a paper read before the New Hampshire historical society [...] at a meeting held at Claremont on September 29, 1891 (Concord, N. H., 1894) ; History of the town of Claremont, New Hampshire, for a period of one hundred and thirty years from 1764 to 1894 (Manchester, N. H., 1895).— Mason Wade, « Odyssey of a loyalist rector », Vt. Hist. (Montpelier), 48 (1980) : 96–113.
Robert J. Morgan, « COSSIT (Cossitt), RANNA (Rene) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/cossit_ranna_5F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
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