Titre original :  Photograph Père Albert Lacombe, Quebec City, QC, about 1895 Livernois About 1895, 19th century Silver salts on paper mounted on card - Gelatin silver process 14 x 9 cm Gift of Mrs. Mount Duchett MP-0000.132 © McCord Museum Keywords:  male (26812) , Photograph (77678) , portrait (53878)

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LACOMBE, ALBERT, prêtre et oblat de Marie-Immaculée, né le 28 février 1827 à Saint-Sulpice, Bas-Canada, fils d’Albert Lacombe et d’Agathe Duhamel, dit Sansfaçon, fermiers ; décédé le 12 décembre 1916 à Midnapore, Alberta.

Albert Lacombe, un des missionnaires les plus illustres de l’Ouest canadien, étudia au collège de L’Assomption et continua sa théologie au palais épiscopal de Montréal. C’est là qu’il rencontra George-Antoine Bellecourt*, missionnaire venu de la Rivière-Rouge (Manitoba) recueillir des fonds pour les missions de l’Ouest. Il se montra intéressé à travailler dans cette région et, peu après son ordination à Saint-Hyacinthe le 13 juin 1849, il fut envoyé à Pembina (Dakota du Nord), qui était desservi par des religieux de la Rivière-Rouge. Il y seconda Bellecourt et, en 1851, accompagna des chasseurs métis dans les plaines.

Lacombe retourna dans l’est du pays pour occuper une fonction de vicaire à Berthier-en-Haut (Berthierville, Québec) en 1851–1852, mais, comme il souhaitait toujours œuvrer dans l’Ouest, l’évêque de Montréal, Ignace Bourget*, l’autorisa à retourner à la Rivière-Rouge en 1852 avec Mgr Alexandre-Antonin Taché*. En 1853, il fut affecté à la mission du lac Sainte-Anne (Lac-Sainte-Anne, Alberta). Il entreprit son noviciat chez les oblats en 1855 sous l’autorité de René Rémas et devint membre de cette congrégation le 28 septembre 1856. Au cours de ses années au lac Sainte-Anne, il visita Jasper House, le fort Edmonton (Edmonton), le lac la Biche, le Petit lac des Esclaves et le fort Dunvegan (Dunvegan).

Dès 1860, on dut conclure que la mission du lac Sainte-Anne ne pouvait plus servir de mission centrale. En janvier 1861, Taché et Lacombe choisirent, un peu au nord du fort Edmonton, un nouvel emplacement que Taché baptisa Saint-Albert en l’honneur du saint patron de Lacombe. Le sol y était plus fertile qu’au lac Sainte-Anne et l’exposition au gel, plus faible ; en outre, l’évangélisation des Cris et des Pieds-Noirs serait plus facile, car Saint-Albert était proche du fort Edmonton, où ils allaient faire de la traite. En tant que supérieur de la mission, Lacombe construisit un moulin à farine et un pont sur la rivière Sturgeon, fonda une école au fort Edmonton, inaugura une piste de charrettes jusqu’au lac la Biche et organisa le ravitaillement à partir de la Rivière-Rouge.

Hélas, le zèle de Lacombe, ses talents de missionnaire et son amitié avec Taché, Canadien lui aussi, faisaient des jaloux parmi les oblats français, Rémas par exemple. Lacombe demanda donc à Taché de le relever de ses fonctions de supérieur et de l’autoriser à œuvrer au milieu des Cris et des Pieds-Noirs. Taché lui confia la tâche d’entreprendre au début de 1865 un apostolat itinérant auprès des Cris. Lacombe établit une mission parmi eux, Saint-Paul-des-Cris (Brosseau), la première mission catholique chez des Amérindiens de l’Alberta. Comme elle se trouvait sur la rivière Saskatchewan-du-Nord, non loin de la mission méthodiste Victoria (Pakan), Lacombe était en bonne position pour combattre les efforts de George Millward McDougall* et de John Chantler McDougall. Saint-Paul-des-Cris était aussi la première colonie agricole fondée par des catholiques pour des autochtones de la région. La terre fut subdivisée en parcelles que les Cris ensemençaient avant de partir pour la chasse estivale. Ils revenaient pour les moissons, puis repartaient pour la chasse hivernale. Lacombe les accompagnait et les instruisait dans leurs campements. D’autres oblats créèrent de telles missions ambulantes.

La vie d’un missionnaire itinérant était périlleuse. De violentes épidémies ravageaient l’Ouest ; l’une d’elles faillit emporter Lacombe. En 1865, Jean L’Heureux le trouva à l’article de la mort et le soigna jusqu’à sa guérison. Plus tard la même année, Lacombe fut pris dans un épisode de la guerre entre Pieds-Noirs et Cris. Pendant qu’il campait avec les Pieds-Noirs au bord de la rivière Battle, les Cris attaquèrent. Une de leurs balles le frôla tandis qu’il incitait les belligérants à cesser le feu.

En 1869, au cours d’un séjour de trois semaines dans un campement pied-noir près de Rocky Mountain House, Lacombe instruisit les Amérindiens et apprit leur langue. La même année, il se rendit au fort Benton (Fort Benton, Montana) et à St Louis, au Missouri, pour étudier la possibilité de ravitailler les missions de l’Ouest à partir de ces endroits. Il fut nommé au Bureau de santé des Territoires du Nord-Ouest pendant la terrible épidémie de variole de 1871. Fait vicaire général du diocèse de Saint-Albert en 1872, il fut envoyé dans la province de Québec la même année afin de recueillir des fonds pour les missions. En 1873, il alla en Europe assister au chapitre général des oblats à la place de Taché, dont la santé était précaire.

Lacombe fut muté en 1874 à l’archidiocèse de Saint-Boniface, pour aider Taché à promouvoir la colonisation canadienne-française. À Winnipeg, il devint curé de la paroisse Sainte-Marie, supérieur de la résidence Sainte-Marie et aumônier de la prison, mais en fait, comme l’a signalé l’écrivain James Grierson MacGregor, son rôle consistait à être l’homme à tout faire de Taché. Il fit plusieurs tournées dans l’Est pour inciter les Canadiens français et les Franco-Américains à s’établir dans l’Ouest. Il seconda l’archevêque dans ses efforts en vue d’obtenir une amnistie pour les participants à l’insurrection de la Rivière-Rouge. Cependant, il refusa d’aider des hommes politiques de l’Est à dissuader Louis Riel* de se présenter au scrutin fédéral de 1874 dans la circonscription de Provencher, au Manitoba. En 1879, il reçut le titre de vicaire général de Saint-Boniface, puis représenta à nouveau Taché au chapitre général des oblats. (Au cours de ce voyage, il fut mortifié de découvrir qu’on lui avait volé son portefeuille pendant qu’il assistait à une messe à la basilique Saint-Pierre de Rome.) L’année suivante, il exerça son ministère auprès des ouvriers affectés à la construction d’une section du transcontinental à l’est de Winnipeg. Après avoir constaté que le blasphème, l’ivrognerie et l’immoralité régnaient dans leurs camps, il nota dans son journal : « Mon Dieu, renvoyez-moi à ma vieille mission indienne. »

Entre-temps, l’évêque de Saint-Albert, Vital-Justin Grandin*, réclamait le retour de Lacombe dans son diocèse parce que le sort des missions amérindiennes était menacé. Au nord, Saint-Paul-des-Cris avait été abandonné ; au sud, Constantine Michael Scollen avait déserté les missions des Pieds-Noirs. Taché souhaitait garder Lacombe, qui était pour lui un aide et un conseiller précieux, mais il finit par se rendre à la décision du supérieur des oblats, et Lacombe regagna Saint-Albert en 1882. Ce dernier fut nommé supérieur du district diocésain de Calgary et fut curé de la paroisse Sainte-Marie de Calgary en 1883.

La Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique consulta Lacombe sur le tracé de certaines de ses lignes. En 1883, Lacombe usa de son influence pour empêcher un affrontement entre des autochtones et des arpenteurs de la compagnie qui jalonnaient l’emprise du chemin de fer près de Blackfoot Crossing. Par l’entremise de Pied de Corbeau [Isapo-muxika*], il convoqua une rencontre de chefs pieds-noirs, leur fournit d’amples provisions de sucre, de tabac, de thé et de farine, et leur dit que le lieutenant-gouverneur Edgar Dewdney prêterait une oreille attentive à leurs revendications. Rassurés, les autochtones laissèrent les arpenteurs continuer leur travail. Pour exprimer sa gratitude à Lacombe, la compagnie tint une cérémonie dans un wagon allant de Calgary à Blackfoot Crossing et le nomma président du consortium pour une heure. Il reçut également un laissez-passer valide à vie sur la ligne et d’autres privilèges de la part des administrateurs de la compagnie, qui contribuaient généreusement à ses multiples œuvres.

En 1879, dans un rapport au gouvernement fédéral, Nicholas Flood Davin* avait recommandé que le Canada tente de créer des écoles professionnelles pour les jeunes autochtones, comme les Américains l’avaient fait. Avec Mgr Grandin, Lacombe conçut une proposition (probablement formulée en 1882) selon laquelle les jeunes Amérindiens des Plaines recevraient un enseignement professionnel sous supervision catholique. Probablement pendant l’hiver de 1883–1884, Grandin l’envoya à Ottawa négocier cette affaire avec les autorités fédérales. Lacombe choisit l’emplacement de la St Joseph’s Industrial School – à Dunbow (Alberta) – et dirigea cette école à compter de l’inauguration en 1884 jusqu’en 1885. Il n’oublierait pas de si tôt l’indiscipline des premiers élèves, un groupe de jeunes garçons : « Il suffisait d’ouvrir les portes et de jeter un coup d’œil pour voir– Pendant ce premier hiver, [c’était] infernal. » De 1886 à 1892, il appartiendrait au Bureau d’éducation des Territoires du Nord-Ouest.

Pendant la rébellion du Nord-Ouest en 1885, tant les autorités territoriales que fédérales pressèrent Lacombe de visiter les Cris et les Pieds-Noirs afin de les dissuader de soutenir Louis Riel. Il se rendit dans la réserve des Pieds-Noirs, dont les résidents ne semblaient pas désireux de prendre les armes aux côtés de leurs vieux ennemis, puis se hâta vers le nord pour inciter à la paix les habitants des réserves cries situées à proximité de la rivière Battle. À la fin des hostilités, il fit des recommandations en vue du règlement des griefs amérindiens, et Ottawa le chargea d’enquêter sur des questions autochtones. Pour récompenser les chefs restés loyaux pendant l’insurrection, le gouvernement les invita à visiter l’est du pays. En 1886, Lacombe organisa le voyage des neuf chefs de l’Ouest, dont Pied de Corbeau, et les accompagna avec l’interprète Jean L’Heureux.

Lacombe, dit-on, fut curé au fort Macleod (Fort Macleod, Alberta) de 1887 à 1889. Las des voyages et de la vie publique, il résolut en 1890 de se retirer jusqu’à la fin de ses jours au ruisseau Pincher, près duquel il bâtit l’ermitage Saint-Michel. Cependant, on ne pouvait se passer de ses services, et il était plus souvent sur les routes que dans sa calme retraite. Ainsi, en 1892, on lui demanda d’organiser une excursion de Montréal à Vancouver pour des prélats et des prêtres de l’Est. À sa demande, la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique mit à leur disposition un wagon Pullman de première classe. Leur destination finale était Mission (Mission City, Colombie-Britannique), où Mgr Paul Durieu* avait organisé un congrès eucharistique pour les Amérindiens catholiques de la province. En 1893, Lacombe était de retour au ruisseau Pincher, « à nouveau seul au sommet de [sa] colline avec [son] chien et [son] chat », comme il l’écrivit à un collègue.

Cependant, Lacombe retourna à Saint-Boniface dès le début de 1894 afin d’aider Taché à obtenir la restitution des droits scolaires retirés à la minorité catholique du Manitoba par le gouvernement de Thomas Greenway*. Comme Taché était gravement malade, ce fut Lacombe qui alla superviser à Montréal la publication d’un mémoire de l’archevêque sur la question. En juillet, il fut nommé titulaire de la paroisse Saint-Joachim d’Edmonton, mais il n’en avait pas fini avec la question des écoles. À la fin de 1895, le successeur de Taché, l’archevêque Adélard Langevin, l’envoya dans l’Est discuter avec des membres de la hiérarchie catholique et des hommes politiques au sujet du projet de loi réparatrice que le gouvernement conservateur d’Ottawa envisageait de faire adopter pour restaurer les droits scolaires. De décembre 1895 à mars 1896, Lacombe négocia avec le premier ministre du Canada, sir Mackenzie Bowell, le chef de l’opposition, Wilfrid Laurier, et des hommes politiques de la province de Québec. À mesure que sa mission avançait, les circonstances l’obligèrent à appuyer le projet de loi jusque dans ses moindres détails et à devenir l’intermédiaire du gouvernement auprès de la hiérarchie, qui s’opposait à certaines modalités. La Presse de Montréal publia une lettre personnelle dans laquelle il insistait auprès de Laurier pour que les libéraux appuient le projet de loi réparatrice et ne proposent pas la création d’une commission d’enquête. Pour sa part, Laurier se plaignit que Lacombe s’était compromis et avait lancé un ultimatum aux libéraux : soit appuyer le projet de loi réparatrice, soit encourir le blâme des évêques. Grâce aux efforts de Lacombe, la hiérarchie et Langevin acceptèrent finalement le projet de loi. Cette mission fut la plus lourde de toutes celles qu’il accepta. Au milieu des intrigues de parti, la tranquillité de son ermitage lui manquait beaucoup.

Lacombe accomplit aussi des tâches moins importantes dans les années 1890. Il dut organiser le voyage des évêques et des prêtres qui assisteraient au sacre de l’archevêque Langevin en mars 1895. La même année, il fut invité à accompagner le maire d’Edmonton à Ottawa, afin de presser le gouvernement de construire un pont sur la Saskatchewan-du-Nord qui relierait Edmonton et le chemin de fer. (Ils obtinrent des promesses, mais le pont fut construit seulement en 1913.) Son affectation à Edmonton prit fin en 1897 et il retourna au ruisseau Pincher. L’année suivante, il dut encore quitter son ermitage pour exercer son ministère auprès des ouvriers qui construisaient le tronçon du chemin de fer canadien du Pacifique dans la passe du Nid-du-Corbeau, puis pour faire une tournée de collecte dans l’est du pays. Au printemps de 1899, il se mit en route avec la commission qui se préparait à négocier avec les autochtones le traité no 8 applicable à ce qui est maintenant le nord de l’Alberta et les régions adjacentes [V. Mostos ; James Andrew Joseph McKenna]. Les revendications des Métis devaient être traitées en même temps, et il tenta, avec d’autres, de les convaincre d’accepter des indemnités sous forme de certificats de concession de terres non transférables, mais ils refusèrent.

Lacombe avait beaucoup réfléchi à l’avenir des Métis. Dans ses premières années à l’ermitage, il avait conçu le projet de fonder une colonie pour eux et, en 1895, avait demandé au gouvernement fédéral de concéder quatre cantons à cette fin. Une fois les terres obtenues, il invita les Métis de l’Ouest canadien et du Montana à s’établir dans cette colonie qui devint Saint-Paul-des-Métis (St Paul). Le directeur en était Adéodat Thérien, et elle fut dotée d’un pensionnat en 1897. Malgré les appels de fonds lancés par Lacombe, la situation financière de la colonie fut toujours précaire, ce qui décourageait les Métis. Des étudiants mécontents mettraient le feu à l’école en 1905, et la colonie ne se remettrait jamais de cette perte. Elle serait dissoute en 1909 et la région serait ouverte aux colons canadiens-français.

Entre-temps, en 1900, les évêques Grandin, Langevin et Albert Pascal envoyèrent Lacombe exposer en Europe les besoins des immigrants ruthéniens de rite oriental qui vivaient dans l’Ouest canadien. Le principal souci de Lacombe était d’obtenir les services de communautés religieuses et de prêtres ruthéniens. Il s’adressa au supérieur général des oblats, au pape Léon XIII et à l’empereur d’Autriche, François-Joseph 1er. Au cours de ce voyage, il se rendit trois fois en Belgique afin de promouvoir l’immigration dans l’Ouest canadien, trouver une communauté de religieuses qui s’occuperait du pensionnat de Saint-Paul-des-Métis et recruter des communautés d’enseignants pour les écoles diocésaines. Il occupa à nouveau la cure de Sainte-Marie à Calgary en 1902–1903, mais en 1904, il accompagna Langevin en Europe et en Terre sainte, où il prit la parole dans divers centres et recueillit des fonds pour les missions et les établissements de l’Ouest canadien.

À la fin du xixe siècle, les supérieurs de Lacombe l’avaient encouragé à rédiger ses mémoires : il était missionnaire depuis 50 ans et avait été associé à certains des principaux événements de l’histoire de la région. Il commença à compiler de la matière en 1899 mais, comme on le dérangeait constamment, il ne réussit à produire qu’un compte rendu incomplet de ses activités jusqu’en 1864. Il fit appel en 1904 à une journaliste du Daily Edmonton Bulletin, Katherine Angelina Hughes*, mais ce n’est qu’en 1907 qu’elle accepta de passer quelque temps en sa compagnie au ruisseau Pincher pour examiner ses documents et discuter avec lui. Deux ans plus tard, comme elle avait du mal à achever le manuscrit, Lacombe la pressa de trouver quelqu’un d’autre pour cette tâche, car il était question de lui présenter le livre cette année-là, à l’occasion de ses 60 ans de sacerdoce. Toutefois, Katherine Angelina Hughes continua le travail en étroite collaboration avec lui. Au printemps de 1911, inquiet parce que le manuscrit – « notre livre », disait-il – avait été modifié à son insu et même amputé de moitié à la demande d’un éditeur new-yorkais, il menaça de rédiger une version française dans laquelle il mettrait les choses au point pour les lecteurs de la province de Québec. Le livre sortit en anglais plus tard dans l’année et, apparemment, il en fut satisfait. Bien que Katherine Angelina Hughes ait peut-être brossé de lui un portrait trop flatteur, Father Lacombe, the black-robe voyageur rapporte avec exactitude ses activités et les étapes de sa vie sacerdotale.

En 1908, Lacombe avait commencé à mettre sur pied sa dernière œuvre : un foyer pour orphelins, vieillards et handicapés à Midnapore. Il obtint le terrain de Patrick Burns*, homme d’affaires de Calgary qui avait contribué à l’ermitage Saint-Michel, et convainquit les Sœurs de la Charité de la Providence de construire le foyer et de l’administrer. En outre, il fit une tournée en Alberta et dans l’est du Canada afin de recueillir des fonds pour l’établissement. Après l’avoir rencontré à Edmonton, son vieil ami lord Strathcona [Smith] lui donna 10 000 $. Inauguré le 9 novembre 1910, le Lacombe Home abritait, six mois plus tard, 40 résidents. Lacombe veillerait à ce que Jean L’Heureux y soit plus tard admis. En 1911, il fit son dernier voyage dans l’Est afin de recueillir de l’argent pour cet établissement. Il s’éteignit le 12 décembre 1916 au foyer dont il était le fondateur. Les funérailles eurent lieu en la cathédrale St Mary à Calgary. La Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique transporta la dépouille dans un wagon spécial jusqu’à Edmonton, puis jusqu’à Saint-Albert, où elle fut inhumée à côté de celle de Mgr Grandin.

En tant que missionnaire, Lacombe avait fait preuve d’une grande ingéniosité dans la préparation de matériel scolaire. Selon un auteur, il transforma l’« échelle catholique » en « un petit chef-d’œuvre de pédagogie ». Ses dessins montraient les deux voies que peut suivre un individu : celle du mal, représentée par l’idolâtrie, le paganisme et les sept péchés capitaux, et celle du bien, symbolisée par l’Ancien et le Nouveau Testament, les vertus et les sacrements de l’Église catholique. Il contribua également à la pédagogie apostolique en réalisant un catéchisme illustré en cri et un catéchisme illustré pour l’enseignement aux Amérindiens. Le catéchisme cri, plus détaillé que son échelle, était destiné à ceux qui connaissaient bien les rudiments de la foi catholique. En 1874, Lacombe publia un dictionnaire et une grammaire cris qui s’avérèrent d’une grande utilité pour les oblats. Il prépara le manuscrit d’un dictionnaire français-pied-noir et collabora avec Émile-Joseph Legal à la compilation d’un vocabulaire des langues des Pieds-Noirs, des Gens-du-Sang et des Peigans. En outre, il réalisa de nouvelles éditions de la grammaire et du dictionnaire de Frederic Baraga* sur la langue des Sauteux, traduisit en cri le Nouveau Testament et de nombreux cantiques, et publia dans cette langue des instructions et des sermons.

Par certains côtés, Albert Lacombe était l’archétype des missionnaires oblats qui œuvrèrent dans l’Ouest et le Nord canadiens. Cependant, plusieurs traits le distinguaient : sa passion du voyage et de l’aventure, le degré de son dévouement pour les Amérindiens et les Métis, son aptitude à nouer des relations. Il était à l’aise parmi les rois, les évêques et les cardinaux, les paroissiens blancs ou les autochtones. En cette époque de profondes dissensions religieuses et ethniques, il eut des amitiés durables avec maints protestants de langue anglaise. En tant que missionnaire, il partageait les préjugés de ses contemporains à l’égard des Premières Nations ; les civiliser, les christianiser et les incorporer au monde capitaliste et progressiste des Blancs lui semblait une tâche nécessaire. Néanmoins, il se préoccupait sincèrement de leur sort et tenta d’améliorer leurs conditions de vie. Les autochtones comprenaient ce sentiment, comme en témoignent les noms qu’ils lui donnèrent. Pour les Cris, il était Kamiyoatchakwêt, « l’âme noble » ; pour les Pieds-Noirs, il était Aahsosskitsipahpiwa, « le bon cœur ».

Raymond Huel

On trouve des documents concernant Albert Lacombe aux Arch. Deschâtelets, Oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), aux Arch. des oblats de Marie-Immaculée (Montréal), aux Arch. de la prov. Grandin (Saint-Albert, Alberta), aux Arch. of the Oblates of Mary Immaculate, Prov. of Alberta-Saskatchewan (conservées aux PAA), et aux Arch. of the Sisters of Providence (Edmonton).

Grace Ballem, « The Lacombe Home », Alberta Hist. (Calgary), 28 (1980), no 3 : 1–6.— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989) ; « le Père Albert Lacombe, o.m.i., et le Pacifique Canadien », Rev. de l’univ. d’Ottawa, 37 (1967) : 287–321, 510–539, 611–638 ; 38 (1968) : 97–131, 316–350.— P. E. Crunican, « Father Lacombe’s strange mission : the Lacombe–Langevin correspondence on the Manitoba school question, 1895–96 », SCHÉC, Report, 26 (1959) : 57–71.— P. M. Hanley, History of the Catholic ladder, E. J. Kowrach, édit. (Fairfield, Wash., 1993).— R.[-J.-A.] Huel, « Jean L’Heureux : canadien errant et prétendu missionnaire auprès des Pieds-Noirs », dans Après dix ans [...] bilan et prospective, sous la dir. de Gratien Allaire et al. (Edmonton, 1992), 207–222.— K. [A.] Hughes, Father Lacombe, the black-robe voyageur (New York, 1911).— J. G. MacGregor, Father Lacombe (Edmonton, 1975).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Raymond Huel, « LACOMBE, ALBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lacombe_albert_14F.html.

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Auteur de l'article:    Raymond Huel
Titre de l'article:    LACOMBE, ALBERT
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    28 novembre 2024