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BELLECOURT (Bellecours, Belcourt), GEORGE-ANTOINE, prêtre et missionnaire, né le 22 avril 1803 à Saint-Antoine-de-la-Baie-du-Febvre (Baieville) dans le Bas-Canada, fils d’Antoine Bellecourt et de Josephte Lemire, décédé le 31 mai 1874 à Shediac, N.-B.
George-Antoine Bellecourt fit ses études au séminaire de Nicolet et fut ordonné prêtre de l’Église catholique romaine le 10 mars 1827. Après avoir été vicaire dans diverses paroisses, il fut nommé curé à Sainte-Martine (comté de Châteauguay) en 1830, où il s’attacha à ses paroissiens. Lorsqu’en 1831 Mgr Bernard-Claude Panet* lui demanda d’aller dans la lointaine région de la Rivière-Rouge, il sollicita la faveur d’en être dispensé. Il s’y rendit, cependant, et commença son travail à Saint-Boniface en apprenant le sauteux, un dialecte dérivé de la langue algique qu’il avait étudiée auparavant à la mission du Lac-des-Deux-Montagnes. La connaissance de cette langue lui donna l’avantage sur les autres missionnaires qui devaient avoir recours à un interprète. En 1839, il fit paraître à Québec sa petite grammaire, Principes de la langue des sauvages appelés Sauteux ; il prépara un Dictionnaire sauteux, que le père Albert Lacombe* devait faire imprimer en 1874, et il aurait traduit en sauteux le catéchisme du diocèse de Québec.
Dans les années 1832–1833, il commença son travail de missionnaire chez les Sauteux, près de la rivière Assiniboine, à l’ouest de la mission métisse de Saint-François-Xavier, sur un territoire donné par la Hudson’s Bay Company. Bellecourt s’efforça de persuader les Sauteux de construire un village semblable à celui que les missionnaires anglicans avaient fondé à St Peter (près de l’actuel Selkirk) dans la basse Rivière-Rouge. Il y travailla lui-même comme fermier, maçon et charpentier. En 1839, le village missionnaire de Baie-Saint-Paul, avec ses champs minuscules bordant la rivière, était tout à fait établi.
Toutefois, Bellecourt exprima alors le désir de revenir dans sa province natale et l’archevêque Joseph Signay* le rappela pour travailler auprès des Indiens du lac Témiscamingue. Mais Bellecourt, manifestement impulsif et émotif, repartit bientôt pour l’Ouest. En 1840, ce prêtre infatigable fonda des missions à Wabassimong (White Dog Falls), sur la rivière Winnipeg, au lac La Pluie et à la baie des Canards, sur le lac Winnipegosis, mais Baie-Saint-Paul et ses habitants n’en demeurèrent pas moins sa principale préoccupation. La Société de la propagation de la foi, le diocèse de Québec et l’évêque de Québec l’aidèrent dans sa tâche.
En 1844, des difficultés surgirent dans la colonie de la Rivière-Rouge. À Pembina, un Américain du nom de Norman Wolfred Kittson* tenta de contester la légalité du monopole de la Hudson’s Bay Company en faisant le commerce des fourrures avec les Indiens. Bellecourt prit part au mouvement contre le monopole de la compagnie. Il n’avait pas été hostile à la compagnie elle-même : lorsque celle-ci avait eu des difficultés avec les Métis dans les années 1834–1835, Bellecourt lui avait accordé l’aide demandée et la compagnie ne l’avait pas oublié. De plus, il est peu probable qu’un homme tel que Bellecourt se soit intéressé au commerce des fourrures. Toutefois, le missionnaire embrassa avec ardeur la cause de ses ouailles, car il pensait que le droit des Métis à leurs terres devait être reconnu, qu’ils devaient être représentés au gouvernement et qu’en tant qu’habitants du Nord-Ouest, ils avaient le droit de faire librement le commerce des fourrures. Des contemporains ont dit qu’il avait approuvé les revendications des Métis contre la compagnie, énumérées dans la publication d’Alexander Kennedy Isbister*, A few words on the Hudson’s Bay Company [...], et qu’il en avait fourni la plupart du contenu. Il dirigea des réunions qui eurent lieu en février 1846 chez Andrew McDermot* dans la Rivière-Rouge et rédigea une pétition en français qui exposait les revendications des colons, des Indiens et des Métis. Cette pétition qui réunit 977 signatures fut envoyée à Londres et donna immédiatement lieu à une vaste enquête sur les activités de la compagnie.
D’avoir participé à cette agitation, valut à Bellecourt d’être regardé comme un homme marqué et anathème par le gouverneur George Simpson*. Celui-ci pria Mgr Signay, archevêque de Québec, de rappeler Bellecourt, mais le rappel avait déjà été fait. À son retour au Canada à l’automne de 1847, le missionnaire, soupçonné d’emporter des fourrures, eut à subir l’affront de voir ses bagages fouillés. Cependant, une pétition fut faite réclamant son retour dans la Rivière-Rouge. De son côté, Bellecourt désirait vivement reprendre sa mission auprès des Indiens et des Métis. Simpson apprit qu’il était possible que le missionnaire vînt s’installer à Pembina, centre de chasse au bison et village métis en territoire américain, à 60 milles au sud d’Upper Fort Garry (Winnipeg). Il invita alors Bellecourt à revenir à la Rivière-Rouge à la condition qu’il « ne se mêlât pas des affaires politiques du pays ». Bellecourt refusa. En 1848, toutefois, il fonda une mission à Pembina qui échappait au contrôle de la compagnie. Bellecourt s’associait en quelque sorte à Kittson contre la compagnie.
Simpson n’eut qu’un recours contre Bellecourt. En 1849, il demanda au nouveau gouverneur d’Assiniboia, le major William Bletterman Caldwell*, d’écrire au chargé d’affaires britannique à Washington pour protester contre l’attitude de Bellecourt qui conseillait aux Métis de résister aux autorités de la Rivière-Rouge. Cette protestation était en partie justifiée. Non seulement Bellecourt essayait de détourner les Métis de la Rivière-Rouge et aidait Kittson à faire de Pembina un poste de traite des fourrures, mais il était le conseiller des Métis dans leur lutte continuelle contre le gouvernement d’Assiniboia. En fait, ce fut Bellecourt qui conseilla à Jean-Louis Riel et à d’autres chefs métis de s’opposer au procès de Pierre-Guillaume Sayer qui avait été accusé de commerce illicite par la compagnie. Il se peut également qu’il les ait assistés dans la rédaction d’une pétition demandant une représentation au conseil d’Assiniboia et la mutation d’Adam Thom*, recorder de Rupert’s Land. De sa base de Pembina, Bellecourt pouvait donc participer aux controverses beaucoup plus efficacement qu’auparavant, alors qu’il se trouvait en territoire britannique.
L’avènement du commerce libre en 1849 rendit inutile l’exode des Métis vers Pembina. De plus, le traité des États-Unis de 1850, qui organisait le transfert des terres au Minnesota, assimilait les Métis aux Blancs, leur refusant ainsi tout droit de propriété. Enfin, la grande inondation de 1852 submergea Pembina, comme la Rivière-Rouge, et les charretiers assurant les échanges commerciaux avec l’Assiniboia se rendaient à St Paul [V. Rolette] sans s’arrêter à Pembina. La mission ne prospéra donc pas. En 1853, Kittson déplaça ses bureaux à St Joseph (Walhalla, North Dakota) et la même année, Bellecourt s’installa sur un escarpement à l’ouest, où une petite colonie métisse prit naissance. Mais les relations entre les Métis et la compagnie étaient excellentes depuis l’avènement du commerce libre. Bellecourt redevint donc un humble missionnaire. À St Joseph, il se dépensa avec son zèle habituel mais des difficultés surgirent avec ses auxiliaires et avec ses supérieurs, en raison peut-être de l’habitude de travailler seul, qu’il avait contractée au cours des années.
Bellecourt quitta le Nord-Ouest en 1859 pour des vacances, et il ne fut pas autorisé à y revenir. À la demande de l’évêque Bernard Donald MacDonald* de Charlottetown, il fut envoyé dans la paroisse de Rustico, chez les Acadiens de l’Île-du-Prince-Édouard. Il s’efforça d’améliorer les conditions de vie de ses paroissiens en les initiant à l’agriculture, comme il l’avait fait pour les Sauteux. Il fut à l’origine de la création de la Farmers’ Bank of Rustico qui fut constituée juridiquement en 1864 et qui subsista jusqu’en 1894. C’était une véritable « banque populaire » ses administrateurs et son premier président, Jérôme Doiron, étaient tous fermiers ; son premier caissier, Marin Blanchard, maître d’école ; le capital initial fut fixé à £1 200. J. T. Croteau écrit « elle fut la première banque du peuple fondée au Canada [...] ; elle est sans contredit la plus petite banque à charte, quant au capital-actions, qui ait jamais fait affaires au Canada [...] ; elle a inspiré Alphonse Desjardins*, le premier organisateur des caisses populaires en Amérique du Nord, et ainsi elle est devenue le précurseur du mouvement des caisses populaires sur ce continent ». Bellecourt fonda également une école et une bibliothèque. Par l’entremise de son ami, l’historien François-Edmé Rameau de Saint-Père, il reçut de Napoléon III une donation annuelle de 1 000 francs pour cette bibliothèque. Bellecourt abandonna sa paroisse en 1869 mais, deux ans plus tard, il fut envoyé à Havre-aux-Maisons (Îles-de-la-Madeleine) où il resta jusqu’à sa dernière maladie.
La ténacité et le courage de Bellecourt dans l’accomplissement de son travail missionnaire sont admirables. Mais peut-être sa carrière illustre-t-elle la difficulté qu’il y a à consacrer aux missions un prêtre destiné à la vie de paroisse. L’erreur fondamentale de Bellecourt fut d’essayer, comme tant d’autres avant lui, de fonder la conversion des nomades sur l’agriculture et la vie sédentaire qu’elle exige. Le père Lacombe fut peut-être plus sage en essayant de rendre nomade la religion elle-même.
Après une courte maladie, Bellecourt mourut près de Shediac, dans une ferme dont il avait fait l’acquisition, et il fut enterré à Memramcook.
On trouve la liste complète des écrits de Bellecourt, en français et en langue algique, dans B. B. Peel, A bibliography of the Prairie provinces to 1953 ([Toronto, 1956]). Pour les références aux sources manuscrites et imprimées, on consultera J. M. Reardon, George Anthony Belcourt, pioneer Catholic missionary to the Northwest, 1803–1874, his life and times (St Paul, Minn., 1955), 205–217 ; cette étude est la plus complète qui existe actuellement sur la vie de G.-A. Bellecourt. [w. l. m.]
HBC Arch. A.11/95, Caldwell au chargé d’affaires britannique (Washington), 31 juill. 1849 ; D.4/35, Simpson à Christie, 18 déc. 1849 ; D.4/37, Simpson à l’archevêque de Québec, 3 mars 1848 ; D.4/45, Simpson à l’archevêque de Québec, 3 mars 1848 ; D.5/20, Christie à Simpson, 30 nov. 1847 ; D.5/21, Bellecourt à Simpson, 28 janv. 1848 ; D.5/25, Christie à Simpson, 29 mai 1849.— HBRS, XIX (Rich, Johnson et Morton), xlix, lxxxviiis.— Hudson’s Bay company, (Red River Settlement) : return to an address of the Honourable the House of Commons, dated 9 February 1849 [...] ([Londres, 1849]).— [A. K. Isbister], A few words on the Hudson’s Bay Company with a statement of the grievances of the natives and the half-caste Indians, addressed to the British government through their delegates now in London (Londres, 1847).— J.-H. Blanchard, The Acadians of Prince Edward Island, 1720–1964 (Ottawa, Ont., et Hull, Qué., 1964).— MacMillan, Catholic Church in PEI, 115s., 264s., 305s.— Morice, Hist. of the Catholic Church, I.— J. T. Croteau, La « Farmers’ Bank of Rustico », une des premières banques du peuple, RHAF, X (1956–1957) : 13–48.
W. L. Morton, « BELLECOURT (Bellecours, Belcourt), GEORGE-ANTOINE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bellecourt_george_antoine_10F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1972 |
Année de la révision: | 1972 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |