Titre original :  Mgr. Émile Legal, OMI, [1897-1920]. (OB3272 - Oblate Collection at the PAA)

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LEGAL, ÉMILE-JOSEPH, prêtre, oblat de Marie-Immaculée et évêque, né le 9 octobre 1849 à Saint-Jean-de-Boiseau, France, fils de Julien Legal et de Perrine David, meuniers ; décédé le 10 mars 1920 à Edmonton.

Émile-Joseph Legal étudia au petit et au grand séminaires de Nantes, au collège de Machecoul et à l’université de France. Ordonné le 29 juin 1874, il servit dans le diocèse de Nantes avant d’entrer au noviciat des oblats à Nancy en 1879. En raison des lois restrictives de l’État sur les communautés religieuses, il fut envoyé à Lachine, au Québec, où il termina son année de probation et prononça ses vœux perpétuels le 24 septembre 1880. Avant d’être affecté dans le Nord-Ouest canadien, il œuvra à Plattsburgh, dans l’État de New York, à Montréal et à Buffalo, aussi dans l’État de New York, où il étudia l’anglais.

Legal arriva à Saint-Albert (Alberta) en août 1881 et fut envoyé en octobre auprès des Peigans. Il passa l’hiver de 1881–1882 dans leur réserve et visita d’autres campements pieds-noirs dans les mois d’été tout en exerçant son ministère auprès des catholiques du fort Macleod (Fort Macleod, Alberta), non loin de là. En 1886, il ouvrit une petite école dans la réserve des Peigans ; deux ans plus tard, il organisa des missions chez les Gens-du-Sang. En 1889, il fonda la mission de Saint-François-Xavier à Stand Off, dans la réserve Blood. Il réussit à convaincre le département des Affaires indiennes de bâtir un hôpital à cet endroit en 1893 et en confia l’administration aux sœurs grises de Nicolet, au Québec.

Vers 1895, la santé de l’évêque de Saint-Albert, Vital-Justin Grandin*, inquiétait le clergé de son diocèse, qui jugeait essentielle la nomination d’un coadjuteur. Déjà, le père Albert Lacombe avait proposé la candidature de Legal. Le 29 mars 1897, Legal fut nommé évêque titulaire de Pogla et coadjuteur de Saint-Albert. Il apprit sa nomination le 6 mai, peu après avoir enterré de ses mains un jeune résident de la réserve Blood ; cela explique pourquoi la Croix, influent journal parisien, l’appela « l’évêque fossoyeur ». Sacré à Saint-Albert le 17 juin 1897, il adopta comme devise épiscopale Nos autem in nomine Domini (« Quant à nous, nous parlons au nom du Seigneur »). Les Pieds-Noirs l’appelèrent Sspomitapi, c’est-à-dire « celui qui occupe un siège élevé ». À la mort de Grandin, le 3 juin 1902, Legal devint évêque de Saint-Albert ; il accéderait à l’archiépiscopat d’Edmonton le 30 novembre 1912.

À la fois en tant que missionnaire et prélat, Legal manifesta de remarquables dons intellectuels et créateurs. Il dessina et construisit maints édifices pendant qu’il desservait les missions des Gens-du-Sang et des Peigans. En tant qu’évêque, il dressa les plans de nombreuses églises et examina à la loupe ceux que lui soumettaient des curés. Il conçut les plans des pensionnats de Brocket, de Stand Off, de Blackfoot Crossing et de Saint-Paul-des-Métis (St Paul). En outre, il jalonna des emplacements, acheta des matériaux et obtint les permis de construire. Ses plans de la cathédrale de Saint-Albert mariaient les styles gothique, néo-roman, néo-baroque et mauresque. Les travaux commencèrent en 1902, mais la situation économique de la région l’obligea à modifier ses plans pour réduire les coûts. La création de l’archidiocèse d’Edmonton en 1912 et le transfert du siège épiscopal dans cette ville en 1917 rendirent inutile une cathédrale à Saint-Albert. Legal s’occupa dès lors d’en construire une à Edmonton.

La créativité de Legal s’exprima en outre dans de nombreuses études des traditions, des mœurs et de la langue des Pieds-Noirs, et notamment dans des articles parus dans les Missions catholiques de Lyon, la Catholic encyclopedia de New York et le Bulletin de la Société de géographie de Paris. Il collabora avec Lacombe à la composition d’un vocabulaire de la langue des Pieds-Noirs, des Gens-du-Sang et des Peigans. Par ailleurs, il entreprit des études de géologie et correspondit avec la Smithsonian Institution. En 1915, la University of Alberta lui décerna un doctorat honorifique en droit.

En 1897, dès sa nomination au poste de coadjuteur, Legal avait assumé la responsabilité de superviser l’expansion du diocèse de Saint-Albert, et en particulier la création des nouvelles paroisses et nouveaux établissements nécessaires pour desservir les immigrants, de plus en plus nombreux. Par la suite, il rendit compte de ces activités dans Short sketches of the history of the Catholic churches and missions in central Alberta. Une fois qu’il fut devenu évêque, le statut des écoles catholiques de son diocèse et les relations avec les autorités fédérales et territoriales s’ajoutèrent à ses préoccupations. En 1904, à la veille de la création des provinces de l’Alberta et de la Saskatchewan, le délégué apostolique, Donato Sbarretti y Tazza, lui demanda de rédiger, pour les projets de loi constituant ces provinces, une clause sur la sauvegarde du principe des écoles confessionnelles. Selon Legal, la clause de compromis négociée par le délégué apostolique et le premier ministre du Canada, sir Wilfrid Laurier, ne convenait pas : même si elle conférait à la minorité religieuse de tout district le privilège d’avoir des écoles séparées, elle ne définissait pas avec précision le système scolaire qui serait établi. Néanmoins, comme le délégué apostolique l’approuvait, Legal jugea qu’il fallait la laisser telle quelle. En février 1905, en accordant une entrevue à un journal d’Ottawa, le United Canada, il déclara espérer que les écoles séparées seraient maintenues et que les catholiques prendraient des mesures pour les soutenir. Cependant, le texte de l’entretien indiquait qu’il était satisfait de la clause sur les écoles, ce qui irrita d’autres membres de la hiérarchie, dont Adélard Langevin, archevêque de Saint-Boniface. Les évêques n’étaient sûrement pas contents que Legal ait accordé une entrevue sur une question aussi délicate à un journal non catholique. De plus, ils tenaient à se montrer tous d’accord en public.

Dans les dernières années de la vie d’Émile-Joseph Legal, ses collègues prélats francophones s’inquiétèrent de sa succession. La nomination d’un évêque de langue anglaise à Calgary en 1913, John Thomas McNally*, puis la création de l’archidiocèse de Winnipeg à même une partie de l’archidiocèse de Saint-Boniface en 1915 avaient montré que les nominations épiscopales dans l’Ouest donnaient lieu à des rivalités ethniques. Malgré sa santé déclinante – il souffrait du diabète –, Legal ne s’était pas fait nommer de coadjuteur et, en 1920, on craignait que Rome, plutôt que l’évêque, lui choisisse un successeur ou lui adjoigne un auxiliaire anglophone. Après le décès de Legal, survenu le 10 mars 1920, les représentants francophones et anglophones de la hiérarchie firent chacun de leur côté des pressions à Rome en faveur de leur propre candidat. La nomination de Henry Joseph O’Leary* à l’archiépiscopat d’Edmonton en septembre mina sérieusement l’hégémonie de l’élément francophone dans les diocèses de l’Ouest.

Raymond Huel

La compilation des Short sketches of the history of the Catholic churches and missions in central Alberta, d’Émile-Joseph Legal, a été publié à Winnipeg vers 1914. On trouve des documents concernant Legal aux Arch. Deschâtelets, Oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), aux Arch. générales des oblats de Marie-Immaculée (Rome), aux Arch. des oblats de Marie-Immaculée (Montréal), aux Arch. de la prov. Grandin (Saint-Albert, Alberta), et aux Arch. of the Oblates of Mary Immaculate, Prov. of Alberta-Saskatchewan (conservées aux PAA).

Gilles Cadrin, « Émile Legal : de l’architecture des missions à l’architecture monumentale », dans Études oblates de l’Ouest 2 : actes du deuxièmes colloque sur l’histoire des oblats dans l’Ouest et le nord canadiens [...], R.[-J.-A.] Huel et Guy Lacombe, édit. (Lewiston, N.Y., 1992), 237–249.— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989).— R.[-J.-A.] Huel, « The Irish French conflict in Catholic episcopal nominations : the western sees and the struggle for domination within the church », SCHÉC, Study sessions, 42 (1975) : 51–70.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Raymond Huel, « LEGAL, ÉMILE-JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/legal_emile_joseph_14F.html.

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Auteur de l'article:    Raymond Huel
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
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