GENDREAU, EDMOND, prêtre, curé, oblat de Marie-Immaculée, missionnaire et administrateur, né le 3 avril 1840 à Saint-Pie, Bas-Canada, fils de Pierre Gendreau, forgeron, et d’Adélaïde Normandin ; décédé le 11 septembre 1918 à Cap-de-la-Madeleine, Québec.

Après ses études classiques et théologiques au séminaire de Saint-Hyacinthe, Edmond Gendreau fut ordonné prêtre le 5 octobre 1862 par Mgr Joseph La Rocque*, évêque de Saint-Hyacinthe. Il n’avait que 22 ans alors qu’il en fallait 24, mais il avait obtenu une dispense en raison du manque de prêtres et de ses grands talents. Pendant ses années au séminaire, Gendreau, à la suite d’une conférence de Mgr Alexandre-Antonin Taché*, évêque de Saint-Boniface, s’était mis à rêver d’aller œuvrer dans les missions amérindiennes du Nord-Ouest. Une fois ordonné, il voulut réaliser ce rêve et fit même des arrangements avec Mgr Taché, mais l’évêque de Saint-Hyacinthe, qui avait un grand besoin de prêtres et appréciait hautement un sujet si prometteur, lui fit remettre à plus tard ses projets d’apostolat et le nomma missionnaire dans les Cantons-de-l’Est.

D’abord vicaire à Saint-Thomas, dans le canton de Compton, l’abbé Gendreau eut ensuite à desservir les cantons environnants : Clifton, Auckland, Hereford et Barford. En 1864, il fut nommé curé de Saint-François-Xavier et desservant de Saint-Joachim, dans le canton de Shefford. L’année suivante, il devint le premier prêtre résidant de Saint-Bernardin (à Waterloo) et desservant de Knowlton, postes qu’il occupa jusqu’en 1868. Enfin, de 1868 à 1874, il fut curé de Saint-Camille (à Cookshire) et desservant de Bury. C’est de ce dernier endroit qu’il dirigea, à compter de 1871, un mouvement de colonisation des cantons de Ditton, de Chesham et d’Emberton. En 1873, le gouvernement canadien le nomma agent spécial chargé de visiter les Canadiens français émigrés aux États-Unis et de lui faire des recommandations pour favoriser leur rapatriement. Il obtint des subsides du gouvernement fédéral, ce qui lui permit de rapatrier 300 familles. Pendant les 18 ans qu’il passa dans les Cantons-de-l’Est, l’abbé Gendreau construisit chapelles, églises et presbytères. Ami de tout le monde, il était considéré comme « l’un des hommes les plus influents de sa région ». En 1874, le séminaire de Saint-Hyacinthe, aux prises avec des difficultés financières, fit appel à son talent d’administrateur et le nomma procureur de l’établissement. En quelques années, l’abbé Gendreau rétablit la situation ; l’édifice fut transformé à l’intérieur comme à l’extérieur : chauffage, aqueduc, éclairage, bibliothèque, portique, parterre, chapelle, tout fut revu, amélioré ou construit.

Une fois sa mission terminée au séminaire en 1880, le désir de l’abbé Gendreau d’œuvrer dans les missions du Nord-Ouest refit surface. Son évêque, Mgr Louis-Zéphirin Moreau*, bénit son projet d’entrer au noviciat des pères oblats et l’encouragea, tout en lui rappelant que s’il voyait qu’il n’était pas appelé par Dieu à cette vocation, il pourrait revenir dans son diocèse et serait « traité comme un fils dans la maison de son père ». L’abbé Gendreau entra donc au noviciat des oblats à Lachine, le 5 décembre 1880, et fit profession perpétuelle le 8 décembre 1881. Toutefois, son rêve d’être missionnaire fut une autre fois relégué à plus tard, car les oblats avaient un urgent besoin de bons administrateurs. Après une année comme économe au noviciat de Lachine, il se vit confier la charge de procureur à l’université d’Ottawa, poste qu’il occupa de 1882 à 1891. Durant ces années, il fit construire une annexe considérable à l’édifice, une splendide chapelle et une vaste salle de spectacle. Il présida également à la construction du scolasticat Saint-Joseph à Archville (Ottawa-Est) et jeta les bases de l’église du Sacré-Cœur à Ottawa.

Le zèle du père Gendreau ne se borna toutefois pas à la capitale. Les oblats étaient alors engagés dans un projet de colonisation au Témiscamingue. Un des leurs, le frère convers Joseph Moffet, avait amorcé un projet à Ville-Marie. Il avait besoin du soutien d’un homme d’envergure, d’un bon organisateur pour mettre sur pied des organismes capables d’en assurer le développement. L’homme tout désigné était le père Gendreau, qui avait acquis une expérience consommée dans ce genre de ministère au moment de son séjour dans les Cantons-de-l’Est. À l’évêché d’Ottawa, en 1884, on fonda la Société de colonisation du Témiscamingue, et le père Gendreau en devint président et l’âme dirigeante. Il commença par établir des communications par terre et par eau. Par l’entremise du ministre des Chemins de fer et Canaux, John Henry Pope*, il obtint du gouvernement fédéral en 1887 la création de la Compagnie du chemin de fer du lac Témiscamingue. Encore une fois, il en fut nommé président. La société de colonisation eut un grand succès et, selon Arthur Bures*, elle n’avait de comparable que l’entreprise du curé François-Xavier-Antoine Labelle*.

Au même moment, à l’autre bout du pays, les missionnaires oblats étaient aux prises avec des tracasseries des agents du gouvernement fédéral qui portaient atteinte à leurs droits et à ceux des Amérindiens. Mgr Vital-Justin Grandin*, évêque de Saint-Albert (Alberta), le père Albert Lacombe et d’autres firent appel au père Gendreau, procureur de l’université d’Ottawa, pour seconder leurs efforts auprès du gouvernement à Ottawa, dans la revendication de leurs droits. En 1888, le premier ministre sir John Alexander Macdonald* proposa d’envoyer le père Gendreau faire une enquête chez les Amérindiens afin de vérifier la légitimité des griefs contre les agents du gouvernement. Le père Gendreau constata la vérité des assertions des missionnaires et voulut présenter un mémoire écrit au gouvernement, mais ce dernier jugea prudent de n’autoriser qu’un rapport oral qui, à toutes fins utiles, n’eut aucune suite.

Après l’université d’Ottawa, ce fut au tour de la direction provinciale des oblats de réclamer les services du père Gendreau comme économe provincial, poste qu’il occupa de 1891 à 1893. Installé alors à Montréal, il agit aussi comme agent des évêques du Nord-Ouest auprès du gouvernement canadien. De 1893 à 1898, il occupa les fonctions de supérieur et de curé à Mattawa, en Ontario. Pendant les années où il dirigea la paroisse, le père Gendreau déploya le plus grand zèle et s’acquit l’estime de tous les paroissiens. La population fut unanime à demander son maintien avec insistance et à regretter vivement son départ.

Le père Gendreau fit un bref séjour à la paroisse Notre-Dame-de-Grâce de Hull avant de se voir confier de nouvelles responsabilités. On assistait à cette époque à la ruée vers l’or du Klondike. Les pères jésuites, missionnaires en Alaska, avaient entrepris le ministère auprès des nombreux chercheurs d’or dans la région du Yukon. Quand une enquête du gouvernement canadien montra que le Klondike faisait partie des Territoires du Nord-Ouest, Mgr Émile-Jean-Baptiste-Marie Grouard, vicaire apostolique d’Athabasca-Mackenzie, constata que ce territoire relevait de sa compétence. En 1898, il fit appel au père Gendreau pour remplir les fonctions de vicaire général et de supérieur des missions du Yukon. Le père Gendreau s’établit à Dawson et, pendant cinq ans, déploya tous ses talents et tout son zèle pour organiser cette région où affluaient de partout les chercheurs d’or. De piètres conditions de vie altérèrent toutefois sa santé ; souffrant de problèmes aux yeux, il dut mettre fin à ses activités au Yukon.

De 1902 à 1913, le père Edmond Gendreau remplit différents ministères : à Kenora en Ontario, à l’académie Sainte-Marie de Winnipeg, à l’hôpital de la Miséricorde de la même ville et à Saint-Charles au Manitoba. Finalement, épuisé, il dut abandonner complètement la vie active et demanda de finir ses jours à Cap-de-la-Madeleine, au Québec. Affligé de paralysie et de cécité, il fut, pendant les dernières années de sa vie, confiné entre les quatre murs d’une chambre. Il mourut en 1918 après une carrière diversifiée et très féconde, marquée par un zèle ardent, une grande générosité et un détachement remarquable. Bilingue, administrateur compétent, fin diplomate, il laissa, partout où il passa, le souvenir d’un homme dévoué à son Église et à ses semblables, et d’une personnalité attachante.

Romuald Boucher

Arch. Deschâtelets, oblats de Marie-Immaculée (Ottawa), Dossier Gendreau ; HE 1981.L27L, n52 (Augustin Gaudet à Adélard Langevin).— Arch. des oblats de Marie-Immaculée (Montréal), Codex historicus ; Corr., lettre de Mgr L.-Z. Moreau à Edmond Gendreau, 29 nov. 1880 ; lettre de J.-E. Antoine à Edmond Gendreau, 25 juin 1892.— Arch. générales des oblats de Marie-Immaculée (Rome), Corr., G LPP 2048 (Adélard Langevin à Louis Soullier, 31 juill. 1893) ; 2088 (Adélard Langevin au vicaire général, 19 févr. 1898) ; 2120 (Adélard Langevin à Cassien Augier, 14 juin 1900).— J.-B.-A. Allaire, Dictionnaire biographique du clergé canadien-français (6 vol., Montréal et Saint-Hyacinthe, Québec, 1908–1934).— Arthur Buies, l’Outaouais supérieur (Québec, 1889).— Gaston Carrière, Dictionnaire biographique des oblats de Marie-Immaculée au Canada (4 vol., Ottawa, 1976–1989), 2 : 75–77.— « Feu le R.P. Edmond Gendreau, o.m.i., ancien curé de Kénora et de Saint-Charles », les Cloches de Saint-Boniface (Saint-Boniface, Manitoba), 17 (1918) : 246–249.— Athanase Francœur et al., Notices nécrologiques de la province du Canada-est (15 vol., Ottawa, 1957–1990), 2 : 138s.— Arthur Joyal, « le Rév. Père E. Gendreau, o.m.i. », Annales du T. S. Rosaire (Cap-de-la-Madeleine, Québec), 3e sér., 3 (1918) : 420–426, publié par la suite sous le titre Annales de Notre-Dame du Cap, 3e sér., 4 (1919) : 21–26.— « Jubilé d’or sacerdotal du R.P. Edmond Gendreau, o.m.i. ». les Cloches de Saint-Boniface, 11 (1912) : 309–315.— Missions de la Congrégation des missionnaires oblats de Marie Immaculée (Paris), 24 (1886) : 322–329 ; 31 (1893) : 355–358 ; 37 (1899) : 118–121, 219–248 ; (Rome) 65 (1931) : 229–233.

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Romuald Boucher, « GENDREAU, EDMOND », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gendreau_edmond_14F.html.

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Auteur de l'article:    Romuald Boucher
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    28 novembre 2024