DOSQUET, PIERRE-HERMAN, sulpicien, prêtre des Missions étrangères et quatrième évêque de Québec, né à Liège (Belgique) le 4 mars 1691, fils de Laurent Dosquet, marchand bourgeois, et d’Anne-Jeanne Goffar, décédé le 4 mars 1777 à Paris.

Nous ne savons rien de la jeunesse de Pierre-Herman Dosquet, sinon qu’en 1715 il entre au séminaire de Saint-Sulpice à Paris, où il est ordonné prêtre l’année suivante. Agrégé à cette société en 1721, il s’offre alors pour la mission du Canada où il arrive en juillet de la même année.

Durant deux ans, à la satisfaction des sœurs de la Congrégation de Notre-Dame à Montréal, il exerce la fonction d’aumônier. Son faible état de santé et le climat le font regagner la France en 1723.

Monsieur Dosquet devient alors supérieur du séminaire de Lisieux, et ce, jusqu’en 1725. À ce moment, la Compagnie de Saint-Sulpice fournit des effectifs au séminaire des Missions étrangères, dont l’abbé Dosquet qui devient un des directeurs du séminaire de Paris et est envoyé à Rome à titre de procureur. Le 25 décembre 1725, il est nommé évêque de Samos in partibus avec le titre honorifique d’assistant au trône pontifical. Il exerce également la fonction de procureur général des vicaires apostoliques des Indes orientales.

Presque deux ans après la mort de Mgr de Saint-Vallier [La Croix*] en décembre 1727, Québec n’a toujours pas d’évêque résidant puisque le coadjuteur, Mgr Louis-François Duplessis de Mornay, n’a jamais mis les pieds au pays. Dosquet est nommé administrateur du diocèse le 25 mai 1729, par le nouvel évêque en titre, Mgr de Mornay, et le pape Clément XII signe, le 24 juillet 1730, la bulle le nommant coadjuteur.

Dosquet, accompagné d’une suite imposante, part de Rochefort à la mi juin 1729, sur l’Éléphant. L’arrivée n’est cependant pas aussi solennelle que prévue car, le 2 septembre, le navire heurte un récif près de l’île aux Grues. Le chanoine Pierre Hazeur de L’Orme fait remarquer à son frère dans une lettre datée du 15 mai 1735 : « Les cloches, le canon, le dais [...] marquent parfaitement la joie que ressentait un chacun de son arrivée, à quoi il n’a pas, selon ce que vous m’écrivez, trop bien correspondu. » ?

Le nouveau coadjuteur devra affronter plusieurs problèmes. Il va d’abord loger au séminaire de Québec, parce que le palais épiscopal est délabré et qu’il n’est pas sûr si l’évêque en est propriétaire. En effet, Mgr de Saint-Vallier, par son testament, tout en faisant des religieuses de l’Hôpital Général ses légataires universelles, donne le palais épiscopal à son successeur à condition qu’il l’entretienne. Cette ambiguïté engendre une querelle qui se réglera sous Mgr de Pontbriand [Dubreil*]. Cependant, après des réparations coûteuses, Mgr Dosquet peut emménager dans le palais épiscopal où, à cause de la présence du chemin de ronde sur lequel se rassemble la population, il ne se sent jamais chez lui.

Au moment où Mgr Dosquet arrive à Québec, certaines communautés de femmes, notamment les hospitalières et les ursulines, vivent des situations difficiles engendrées par les troubles survenus à la mort de Mgr de Saint-Vallier [V. Claude-Thomas Dupuy* ; Étienne Boulard*]. Mgr Dosquet juge très sévèrement ces communautés, ce qui ne lui attire guère de sympathie, d’autant plus que le gouverneur Beauharnois* et l’intendant Hocquart ne partagent pas cet avis. L’évêque exige même des ursulines qu’elles détruisent environ 25 pages de leurs annales à la suite d’un conflit avec le chapitre au sujet de leur confesseur.

Les relations de Mgr Dosquet avec le chapitre de Québec ne sont pas meilleures ; ce n’est qu’accusations de part et d’autre. De plus, l’évêque prend presque systématiquement le contre-pied des décisions du chapitre. Cependant, ce n’est ni de la mesquinerie ni de vulgaires rivalités de personnes qui expliquent l’attitude de l’évêque. D’après l’opinion de ses contemporains et de Beauharnois, « le coadjuteur est un saint homme [...] qui s’occupe à mettre tout en règle ». Il lui manque seulement un peu de tact et de diplomatie, comme lorsqu’il se met à dos le gouverneur et l’intendant en leur faisant interdire par le ministre le libre accès aux couvents.

Mgr Dosquet partage cependant l’avis de ses prédécesseurs en ce qui concerne la traite de l’eau-de-vie. Par ailleurs, il ne visite qu’une fois son diocèse à l’été de 1731 et il en profite pour faire signer à ses prêtres une condamnation des idées jansénistes. Lors de cette visite, il se rend compte des difficultés matérielles de ses curés, à la suite de quoi il demande une réforme de la dîme – au treizième minot à la place du vingt-sixième – refusée par le roi au grand soulagement des colons canadiens. La situation financière du coadjuteur est difficile puisqu’il ne touche pas les bénéfices attachés à l’évêché de Québec. Mgr Dosquet décide donc de repasser en France pour obtenir soit la démission de Mgr de Mornay, soit sa venue au Canada. Le 15 octobre 1732, il s’embarque sur le Rubis, après avoir vendu une partie de ses biens car, en cas de refus, il ne veut pas revenir au Canada comme coadjuteur.

En France, Mgr Dosquet s’emploie à clarifier la situation du siège épiscopal de Québec. À l’automne de 1733, Mgr de Mornay démissionne et Mgr Dosquet obtient la succession avec diverses gratifications accordées par le roi. Le nouvel évêque en titre quitte La Rochelle le 31 mai 1734, accompagné d’une suite de 11 personnes. Le 8 août, le chanoine Eustache Chartier* de Lotbinière, archidiacre du chapitre, prend possession de l’évêché au nom de Mgr Dosquet qui arrive à Québec le 16 août ; on ne trouve nulle description de son arrivée. Beauharnois et Hocquart mentionnent simplement dans une dépêche qu’ « il a été reçu avec toutes les distinctions que mérite sa place ». Mgr Dosquet s’établit alors de façon presque permanente à Samos, une villa qu’il a achetée en 1730, située à Sillery. Cet éloignement du centre de la ville ne favorise sûrement pas les relations entre l’évêque et la population, qui ne le voit pas beaucoup durant son mandat, d’autant plus que l’évêque n’a pas fait de visite épiscopale. D’autre part, certaines de ses décisions déplaisent aux Canadiens : il révoque par mandement, en février 1735. tous les pouvoirs qui ont été accordés par son prédécesseur aux prêtres de son diocèse et, sous prétexte de remédier à certains abus, il interdit aux prêtres de se faire servir par des femmes dans leur presbytère, à moins qu’elles ne soient leurs proches parentes. De plus, il défend à tout ecclésiastique le port de la perruque et interdit aux maîtres d’école d’enseigner aux personnes de sexe différent. Une seule directive est susceptible de lui attirer les louanges de la postérité : il invite les curés, en février 1735, à enseigner le latin aux enfants qui paraîtront avoir la vocation ecclésiastique.

Comme le disent Beauharnois et Hocquart, Mgr Dosquet se sent « peu estimé des populations », et les relations sont devenues tendues entre lui et son clergé. Alléguant que l’air du pays ferait du bien à sa santé et surtout que des affaires financières l’appellent en France, il s’embarque le 19 octobre 1735 sur le Héros. Peu sûr de revenir, il ramène avec lui tout son personnel ; de plus, il a ordonné au concierge du palais épiscopal de vendre ses meubles et, en compensation pour ses dettes, il a cédé Samos au séminaire ainsi que la moitié de sa seigneurie de Bourgchemin qu’il avait achetée de Vaudreuil [Rigaud] en 1731.

En France, durant ses dernières années comme évêque de Québec, Mgr Dosquet voyage. Dès 1736, une correspondance s’établit entre lui et la cour au sujet de sa démission. Ne voulant pas revenir au Canada, il finit par consentir à démissionner, à condition que le roi lui assure des bénéfices intéressants. Après avoir enfin obtenu les revenus de l’abbaye de Breine, située près de Soissons, et réglé la question des réparations au palais épiscopal de Québec, il signe sa démission au début de 1739 ; Mgr François-Louis de Pourroy* de Lauberivière le remplace. Mgr Dosquet habite ensuite alternativement Paris ou Rome. Grand vicaire de l’archevêque de Paris, il a l’occasion de rendre certains services à ses successeurs jusqu’à sa mort, le 4 mars 1777.

Il est difficile de porter un jugement sur le séjour de Mgr Dosquet au Canada. Tous louangent sa piété et son intelligence. Cependant, Beauharnois souligne que « son gouvernement [fut] trop absolu, ce qui a éloigné la confiance que les uns et les autres auraient pu avoir en lui », d’autant plus qu’il était Wallon, donc étranger au royaume. Enfin, cet homme, contrairement à ses prédécesseurs, n’était pas prêt à tous les sacrifices, les questions d’argent l’ayant beaucoup trop préoccupé. Il faut souligner enfin qu’il arriva à Québec à une époque fort difficile pour l’Église canadienne encore troublée par les dissensions qui avaient suivi la mort de Mgr de Saint-Vallier.

Jean-Guy Pelletier

AAQ, 20 A, I : 19 ; 22 A, II : 273, 285, 287, 298, 299, 301–304, 393, 425, 428, 431, 434, 445, 446, 460, 477, 486, 487, 492, 494, 507, 508 ; 10 B, 72, 77, 84 ; 11 B, IV : 45 ; VI : 27, 28, 63, 65, 70, 76, 81 ; VII : 47 ; CD, Diocèse de Québec, I : 39 ; 10 CM, I : 62 ; 91 CM, I : 8 ; 60 CN, III : 83 ; 167 CN, I : 88 ; Dosquet, P.-H., note personnelle de l’archiviste sur son lieu de sépulture.— AN, Col., C11A, 51–72.— ASQ, Chapitre, 146 ; Doc. Faribault, no 230 ; Évêques, no 179a, b ; Fonds Viger-Verreau, Sér.O, 035, p.7 ; Lettres, M, 48, 67, 79, 80, 88, 90, 93, 95, 99 ; R, 8 ; S, 105 ; Y, 75 ; Paroisse de Québec, 19 ; Polygraphie, V : 22, 40 ; IX : 33 ; XI : 3 ; Séminaire, 3, no 51 ; 5, nos 73, 74 ; 12, nos 2a, 2f ; 14/5, nos 16, 27, 28, 33, 35 ; 34, no 137 ; 40, no 71b ; 79, no 4.— AUQ, Annales, I.— Liste des passagers sur la flutte du roy l’Éléphant destinée pour Québec, BRH, XXXVII (1931) : 61s.— Mandements des évêques de Québec (Têtu et Gagnon), I : 529–552.— Mgr Dosquet et le naufrage de l’Éléphant, BRH, XIII (1907) : 315s.— APC Rapport, 1886, xcvi–cxl ; 1904, app.k, 108–269.— DBF, XI : 631.— Le Jeune, Dictionnaire.— P.-G. Roy, Inv. concessions, IV : 108–111, 114s., 237s. ; V : 276s. ; Inv. jug. et délib.,1717–1760, II : 77.— Tanguay, Répertoire.— Louis Bertrand, Bibliothèque sulpicienne, ou histoire littéraire de la Compagnie de Saint-Sulpice (3 vol., Paris, 1900), III : 168–184.— P.-J.-O. Chauveau, Bertrand De La Tour (Lévis, Québec, 1898).— A.-H. Gosselin, L’Église du Canada jusqu’à la Conquête, II : 48–363.— O’Reilly, Mgr de Saint-Vallier et l’Hôpital Général, 280–304.— Rochemonteix, Les jésuites et la N.-F. au XVIIIe siècle, I : 157–168.— P.-G. Roy, La ville de Québec sous le Régime français (2 vol., Québec, 1930), II : 129–132.— The storied province of Quebec ; past and present, William Wood et al., édit. (5 vol., Toronto, 1931–1932), I : 490–496.— L.-É. Bois, Mgr Duplessis-Mornay, BRH, XVIII (1912) : 311–319.— [P.-] P.-B. Casgrain, L’habitation de Samos, SRC Mémoires, 2e sér., XII (1906), sect. : 3–35.— Micheline D’Allaire, Les prétentions des religieuses de l’Hôpital Général de Québec sur le palais épiscopal de Québec, RHAF, XXIII (1969–1970) : 53–67.— N.-E. Dionne, Le naufrage de l’Éléphant, BRH, XI (1905) : 119–121.— A.-H. Gosselin, Mgr Dosquet et M. Voyer, BRH, VII (1901) : 366s. ; Québec en 1730 [...], SRC Mémoires, 2e sér., V (1899), sect. : 62.— Têtu, Le chapitre de la cathédrale, BRH, XIII : 225–243, 257–283, 289–307, 321–327, 353–361 ; XIV : 3–21, 33–39, 65–79, 97–109.

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Jean-Guy Pelletier, « DOSQUET, PIERRE-HERMAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/dosquet_pierre_herman_4F.html.

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Auteur de l'article:    Jean-Guy Pelletier
Titre de l'article:    DOSQUET, PIERRE-HERMAN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
Année de la révision:    1980
Date de consultation:    1 décembre 2024