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POPE, JAMES COLLEDGE, entrepreneur, propriétaire foncier, agent des terres et homme politique, né le 11 juin 1826 à Bedeque, Île-du-Prince-Édouard, deuxième fils de Joseph Pope* et de sa première épouse, Lucy, Colledge, décédé le 18 mai 1885 à Summerside, Île-du-Prince-Édouard.
Né à Plymouth, Angleterre, le père de James Colledge Pope immigra à l’Île-du-Prince-Édouard en 1819. Avec ses frères aînés, il se lança dans l’entreprise forestière à Bedeque, comté de Prince. Élu à la chambre d’Assemblée en 1830, il devint rapidement le chef de file des députés qui s’opposaient à une solution radicale de la question des terres, et il exerça les fonctions d’orateur (président) de 1843 à 1849. Dans les débats, Joseph Pope se fit la réputation d’un homme violent et même ordurier, et, au cours de sa plus sérieuse dispute, qui l’opposa au lieutenant-gouverneur sir Henry Vere Huntley* en 1846–1847, il fit montre d’un esprit rancunier qu’il transmit, semble-t-il, à ses fils William Henry* et James Colledge. Changeant d’allégeance politique en 1849, il se rallia aux réformistes et fut nommé trésorier colonial lors de l’obtention de la responsabilité ministérielle en 1851.
James Colledge Pope étudia en premier lieu dans l’île et, vers l’âge de 14 ans, il fut envoyé suivre des cours à Saltash, près de Plymouth. À son retour, il entra dans l’entreprise que sa famille exploitait à Bedeque. S’il grandit dans un milieu fortement imprégné par la politique, celle-ci ne semble pas l’avoir attiré véritablement avant la fin des années 1850. En 1849, il faisait partie d’un groupe de 40 aventuriers qui quittèrent l’Île-du-Prince-Édouard sur un brick dont ils avaient fait l’acquisition, le Fanny, afin d’aller chercher de l’or en Californie. Dans le vivant récit qu’il fit de ce voyage, Stephen MacCallum, un des participants, décrivit Pope sous les traits d’un « jeune homme solidement bâti, aux cheveux blonds », qui impressionnait vivement ses compagnons de bord par son énergie et son audace. « Fort et résolu, nullement flémard », il n’était « pas homme à abandonner un projet ». Personne ne revint enrichi de cette expédition, et Pope, ayant attrapé « la maladie des camps », rentra chez lui pour se rétablir.
Dans l’île, Pope renoua avec le commerce que son père dirigeait à Bedeque et il ouvrit lui-même un magasin tout près, à Summerside. Il se lança, en outre, dans des entreprises comme l’exploitation d’un « paquebot » entre Bedeque et Shédiac, Nouveau-Brunswick ; il s’agissait d’un contrat lucratif qui suscita une forte concurrence. Grâce à l’appui de son père, sans doute, il obtint plusieurs postes secondaires, et notamment, en 1851, celui de receveur des douanes pour le district de Bedeque (qui comprenait Summerside) ; sa rétribution, fixée à 5 p. cent des droits perçus, s’élevait à environ £100 à £120 par année. Les contemporains de James Colledge Pope lui attribuaient souvent le métier de constructeur de navires, mais il serait probablement plus juste de le considérer comme un entrepreneur de construction navale. Bien qu’il eût travaillé au chantier maritime de son père à Bedeque dans les années 1840, ce qui lui avait donné une bonne connaissance des techniques dans ce domaine, il ne semble pas qu’il se soit occupé lui-même de construction navale après le milieu des années 1850. Il délaissa de plus en plus ce secteur avec le temps et, le 28 janvier 1867, il vendit ses chantiers de Bedeque et de Summerside pour £650 et £2 500 respectivement à des membres de la famille Holman, dont l’importance grandissait à Summerside. Il possédait des actions dans quelque 117 navires hauturiers et côtiers immatriculés entre 1853 et 1877 et il était l’unique propriétaire du plus grand nombre, bien qu’il les gardât rarement durant une longue période. Pope agissait avant tout comme courtier maritime et il vendait fréquemment ses navires à Liverpool, en Angleterre, par l’intermédiaire de son père, qui y vécut de 1853 à 1868. Par exemple, il fit immatriculer 12 navires en 1864 (année où il en fit immatriculer le plus grand nombre) et il vendit dix de ceux-ci grâce au concours que Joseph Pope lui fournissait dans ce pays. Pour ce qui est du nombre de navires et du tonnage total, James Colledge Pope se classait au troisième rang des propriétaires de navires de l’Île-du-Prince-Édouard au xixe siècle.
Bien loin de se limiter au courtage maritime, Pope était engagé financièrement dans presque tous les genres d’activité où il s’avérait possible de faire du commerce et de l’argent : l’agriculture, la pêche, l’immobilier, le transport, la vente au détail, le prêt d’argent, et il posséda même un service télégraphique entre Summerside et le Nouveau-Brunswick. La diversité de ses intérêts dans le seul domaine de l’agriculture peut être illustrée par le fait qu’en 1856 il acheta pour $10 000 le domaine Mann, qui comprenait la moitié nord du lot 27, dont son père avait été longtemps le mandataire ; il servit d’agent des terres auprès de certains autres propriétaires, dont le controversé abbé John McDonald*. Il exploita aussi une ferme où il possédait un gros troupeau de bêtes à cornes et il spécula beaucoup sur les cargaisons de denrées. Dans les années 1860, presque tous les gros marchands et entrepreneurs de Summerside lui devaient de l’argent, et, en 1871, il affirma que la valeur annuelle de ses transactions avec un seul commerçant de Charlottetown, Jedediah Slason Carvell, dépassait le revenu total de la colonie. Dans les années 1870 surtout, il avait également de gros intérêts dans la région voisine de la baie de Cascumpec, à quelque 40 milles à l’ouest de Summerside. « Il donne un travail régulier à des centaines de pauvres gens », rapporta en 1876 un journal qui lui était sympathique. Il se révélait l’un des personnages les plus en vue et les plus influents de la colonie, un homme dont la puissance pouvait inspirer des craintes.
Le 1er juin 1857, Pope fit une entrée sensationnelle en politique en remportant une élection partielle dans le troisième district du comté de Prince, l’ancienne circonscription de son père, contre William Warren Lord, depuis longtemps libéral et membre du Conseil exécutif. L’issue de cette lutte électorale chaudement disputée s’avérait importante, car le gouvernement libéral de George Coles* subissait depuis février de vives critiques du fait, disait-on, qu’il voulait retirer la Bible des maisons d’enseignement soutenues par les fonds publics. Même si Pope n’avait pas traité de la question de la Bible dans son programme électoral, on interpréta son succès comme une première victoire pour l’opposition. À l’Assemblée, son franc-parler lui valut immédiatement une réputation d’esprit belliqueux ; il se montra provocant dans ses accusations et se lança dans de violentes récriminations personnelles contre tous les libéraux en vue. Lorsqu’en 1859 les tories formèrent un gouvernement dirigé par Edward Palmer et que Pope fut nommé au Conseil exécutif, Edward Whelan*, rédacteur en chef de l’Examiner de Charlottetown, déclara qu’il avait « beaucoup de culot et de persévérance, et pas mal de talent ». Pourtant, son rôle politique dans l’île, jusque vers 1865 au moins, fut éclipsé par celui de son frère, le brillant William Henry, son aîné d’un an, qui devint en 1859 secrétaire colonial et rédacteur en chef du principal journal tory, l’Islander. James Colledge Pope créa une plus forte impression par la fougue de son caractère que par son habileté ou son éloquence de parlementaire ; si l’on en croit le sténographe officiel, il aurait tenu plus tard des propos suivant lesquels « il était un piètre orateur et [que] lorsqu’il parlait, il ne le faisait pas toujours de la manière la plus satisfaisante ».
Lorsqu’en avril 1864 on se mit à débattre sérieusement à l’Assemblée la question de l’union des colonies, il apparut que les deux frères ne partageaient pas le même avis. Élu à la législature en 1863, William Henry Pope se révélait un ardent défenseur de l’union des Maritimes, en premier lieu, et de l’union générale des colonies de l’Amérique du Nord britannique par la suite. Dès le début, James Colledge Pope exprima des doutes à ce sujet. Se plaçant d’un point de vue économique, il n’y voyait aucun avantage pour l’île. Il ne fit pas partie de la délégation aux conférences de Charlottetown et de Québec et il ne fut pas mêlé aux vives controverses publiques sur la confédération qui éclatèrent en novembre et décembre 1864 parmi les principaux conseillers exécutifs de l’île. Au cours de la crise ministérielle qui suivit, il appuya le premier ministre John Hamilton Gray, partisan de la confédération, plutôt que le procureur général Edward Palmer, adversaire du projet, mais ce furent peut-être des motifs personnels qui déterminèrent son attitude. William Henry Pope était parfaitement d’accord avec Gray, et, en février et mars 1863, James Colledge Pope avait soutenu ce dernier dans sa décision d’écarter Palmer du poste de chef du gouvernement. La dispute, à la fin de 1864, entraîna finalement la démission de Gray et de Palmer du Conseil exécutif, et James Colledge Pope devint premier ministre le 7 janvier 1865.
Il n’est pas certain que Pope désirait ce poste, lui qui, à ce stade de sa carrière, se révélait avant tout un homme d’affaires ; rien n’indique qu’il ait cherché activement à l’obtenir. Palmer, quant à lui, avait été l’objet de discrédit en perdant une polémique avec William Henry Pope ; celui-ci, pour diverses raisons, ne pouvait se faire accepter par de larges sections de la population, et Gray ne voulait pas diriger un gouvernement incapable de faire adopter les Résolutions de Québec. À la chambre d’Assemblée, tout au moins, Pope ne prit guère d’initiatives, en particulier au cours de la session de 1865. Dans les débats, William Henry Pope défendit avec vigueur le projet de confédération, mais son frère, malgré qu’il donnât son « approbation au principe abstrait de l’union proposée », affirma que « les détails, tels qu’adoptés par la conférence de Québec, n’offr[aient] pas [...] de conditions équitables à la population de l’île ». En 1866, il soumit à l’Assemblée la fameuse « No terms Resolution », qui affirmait qu’aucune union satisfaisante « ne pourrait jamais être conclue », ce qui incita finalement William Henry Pope à quitter le gouvernement. James Colledge Pope eut soin de préciser que son opinion personnelle sur la confédération n’était pas aussi catégorique que la proposition qu’il présentait : « S’il avait pris en considération ses propres vues [...], il aurait modifié [cette proposition...] il estimait toujours possible que l’île se vît offrir des conditions profitables. » Il ajoutait cependant que, en raison de la vive opposition à l’union dans la population et de la crainte que le projet fût imposé aux insulaires sans leur consentement, il avait décidé de soumettre une proposition qui ne prêtait à aucune confusion. À peine quelques mois plus tard, il fit voir à quel point ses vues étaient souples. Il rejeta la suggestion faite par Palmer d’envoyer à Londres, en 1866, un délégué opposé à la confédération en vue d’appuyer Joseph Howe* et, lorsqu’il s’y rendit lui-même en août ou en septembre pour affaires personnelles, il ne chercha pas, semble-t-il, à rencontrer Howe, mais il persuada les délégués de la Nouvelle-Écosse et du Nouveau-Brunswick, à la veille de la dernière conférence sur le projet de confédération, de se prononcer en faveur d’un subside de $800 000 du trésor fédéral pour l’achat des terres de l’île appartenant à des particuliers. Sur le chemin du retour, à la fin de septembre, il écrivit une lettre à Samuel Leonard Tilley*, dans laquelle il laissait entendre qu’« un petit chemin de fer ou un canal » serait peut-être un argument convaincant. À l’Île-du-Prince-Édouard, toutefois, le projet de subside de $800 000 fut considéré par un grand nombre de gens comme une tentative de corruption de dernière heure et il eut surtout pour effet, sur le plan politique, d’accentuer la division chez les tories et de miner le crédit dont jouissait Pope en tant qu’adversaire de la confédération.
Les tories subirent une défaite retentissante aux élections de 1867, auxquelles Gray et les frères Pope ne se présentèrent même pas. Bien des gens, dont Palmer, estimèrent que la défaite du gouvernement s’expliquait avant tout par le fait qu’il avait eu recours aux troupes de Halifax au milieu de 1865 pour supprimer la ligue des locataires (Tenant League) dont les membres s’étaient engagés à s’opposer à la perception des redevances. Lui-même agent foncier et petit propriétaire, Pope n’avait pas la réputation de traiter durement ses locataires, mais il affirma très clairement que le maintien de l’ordre public avait rendu cette mesure nécessaire ; à la session suivante, il avait déclaré que son gouvernement était « prêt à en supporter les conséquences ». Le 1er juillet 1866, le gouvernement de Pope avait cependant acheté – à la suite du décès de sir Samuel Cunard* en avril 1865 – l’immense propriété de la famille Cunard qui comprenait plus de 15 p. cent des terres de l’île, permettant ainsi à environ 1 000 locataires de 20 cantons de devenir francs-tenanciers. Tout bien considéré, ce geste constitua peut-être le point décisif dans la lutte menée sur la question des terres, car les conditions du débat ne furent jamais tout à fait les mêmes par la suite. Le gouvernement de l’île allait effectuer au moins un gros achat de terres au cours de chacune des années suivantes jusqu’en 1871 ; en 1868, il acheta, pour £4 089, les 7 413 acres de la propriété de Pope, sur laquelle vivaient 124 locataires, des catholiques irlandais pour la plupart. Presque toutes ces personnes avaient un bail de 999 ans et devaient payer une redevance annuelle de 1 shilling l’acre. Cette importante décision d’acheter la propriété de la famille Cunard arriva cependant trop tard pour aider le gouvernement aux élections de février 1867, parce qu’il était identifié aux intérêts des propriétaires. À la vérité, les gens n’attribuèrent pas tant le crédit de cet achat au gouvernement qu’à la ligue des locataires, dont la méfiance systématique et calculée rendit difficile la perception des redevances et contribua à persuader la famille Cunard, jusque-là récalcitrante, qu’il s’avérait préférable de vendre.
Les tories qui défendaient la confédération – Pope était généralement considéré comme un de ceux-là – n’eurent pas la tâche facile après les élections. Ils étaient relégués dans l’ombre au sein de leur parti et, après la mort de Whelan en décembre, il ne resta plus aucun libéral en vue qui fût partisan de l’union des colonies ; on ne pouvait pas espérer qu’un réalignement des partis se fit sur cette question. Même les hommes politiques favorables à la confédération qui s’étaient fait élire, comme le nouveau leader tory à l’Assemblée, Thomas Heath Haviland* fils, n’obtinrent ce succès qu’en s’engageant à ne prendre aucune décision avant d’avoir soumis aux électeurs les propositions relatives à l’union. Dans ces conditions, les partisans de la confédération se mirent à chercher un autre thème qui allait leur permettre de reprendre le pouvoir ; l’aide gouvernementale aux écoles confessionnelles fut le sujet qui s’offrit à eux. En 1868, le gouvernement libéral rejeta les demandes faites par l’évêque ultramontain de Charlottetown, Peter MacIntyre*, en vue d’obtenir des subventions publiques aux maisons d’enseignement catholiques. Les membres du parti libéral avaient toujours défendu avec vigueur la non-confessionnalité du système d’éducation, s’opposant en cela le plus souvent toutefois aux ultra-protestants. Lorsque l’évêque et quelques libéraux catholiques, tels George William Howlan*, du Conseil exécutif, firent clairement savoir qu’ils n’étaient pas satisfaits, l’Islander de William Henry Pope prôna une politique de concessions limitées à MacIntyre. Cette décision était particulièrement étonnante car, au début des années 1860, William Henry Pope avait peut-être été celui qui, dans la colonie, s’était révélé le plus vif dénonciateur des doctrines, des pratiques et des objectifs de l’Église catholique. John Hamilton Gray emboîta le pas à William Henry Pope. Lorsqu’à la fin de 1868 le siège de Summerside (cinquième district du comté de Prince) à l’Assemblée devint vacant, James Colledge Pope annonça sa candidature et fit paraître un programme électoral dans lequel il promettait de l’aide à toutes les « écoles valables » acceptant l’inspection gouvernementale, quels que fussent leurs dirigeants ; dans ce même programme, il se déclarait « opposé à la dotation de toute maison d’enseignement confessionnelle ». Bien que l’Islander, Haviland et l’évêque lui accordassent un solide appui, Pope dut s’incliner devant Angus MacMillan, nouveau venu en politique, qui récolta 58 p. cent du vote catholique et 59 p. cent du vote protestant.
Si un réalignement des forces politiques s’avérait prématuré en novembre 1868, James Colledge Pope, moins de deux ans plus tard, devint premier ministre, à la suite d’une alliance entre les conservateurs favorables à la Confédération et les libéraux catholiques. Aux élections tenues le 18 juillet 1870, les libéraux ayant à leur tête Robert Poore Haythorne* obtinrent la majorité des sièges, mais, en raison surtout des maladresses de leur chef, ils se divisèrent, un mois plus tard, sur la question des écoles. Le 10 septembre, James Colledge Pope, qui avait repris la direction de son parti et s’était fait élire dans le quatrième district du comté de Prince, forma un gouvernement de coalition en s’associant avec Howlan et un groupe de députés catholiques qui avaient rompu avec le caucus libéral. Cependant, à cause du byzantinisme qui marquait la vie politique dans l’île, les deux factions étaient liées par un engagement mutuel allant à l’encontre de leurs intérêts particuliers : elles ne devaient prendre aucune décision concernant la Confédération ou les écoles avant d’avoir soumis ces questions aux électeurs. Pope avait donc repris le pouvoir du fait d’avoir manifesté de la sympathie pour le principe de l’aide aux écoles confessionnelles, mais sans avoir eu à s’engager explicitement à poser un geste concret. À la même époque, les adversaires de la Confédération au sein du parti tory avaient été considérablement affaiblis par la défaite que leurs principaux porte-parole, Palmer et David Laird*, avaient subie aux élections. Les frères Pope avaient construit une nouvelle et puissante machine politique qui, de 1870 à 1876, n’allait perdre le pouvoir que durant moins d’une année.
Frank MacKinnon décrivit en ces termes le second gouvernement de Pope : « La religion et l’union étant exclues, ils firent du chemin de fer leur politique. » La construction d’un chemin de fer n’avait pas été sérieusement discutée aux élections de 1870, mais le projet suscita dans la population une ferveur subite au début de 1871. William Henry Pope était depuis longtemps un partisan du chemin de fer et, pendant cette dernière année, James Colledge présenta des projets de loi s’y rattachant. Il exposa longuement et avec enthousiasme les avantages économiques du transport ferroviaire, citant des chiffres et des exemples choisis dans des régions qui allaient du Nouveau-Brunswick à l’île Maurice, prédisant des profits indirects aussi bien que des bénéfices économiques évidents, mettant à contribution sa connaissance de tous les secteurs de l’économie de l’île et l’expérience qu’il avait lui-même acquise au cours de fréquents voyages d’affaires en Angleterre et annonçant même une énorme affluence de touristes américains. Il montrait ce dynamisme que l’on trouve chez certains entrepreneurs du milieu du xixe siècle, et il est évident que le chemin de fer excitait son imagination. Selon lui, « de la façon dont se faisait alors le commerce dans le monde des affaires, aucun pays ne pouvait suivre le rythme de l’époque sans chemins de fer ». Mais il s’avéra bientôt que le Prince Edward Island Railway constituait un fardeau financier trop lourd pour les ressources de l’île, et, au début de 1873, presque tout le monde reconnaissait que l’union avec le Canada constituait, pour la colonie, le seul moyen d’éviter la faillite. Pour James Colledge Pope, la construction du chemin de fer eut des conséquences politiques immédiates qui se révélèrent désastreuses. Avant même l’expiration de la période prévue pour la remise des soumissions, les insulaires commencèrent à manifester leur inquiétude. Le 5 juillet 1871, James Duncan, qui venait d’être nommé président de la commission du chemin de fer, fut battu dans une élection partielle par David Laird, adversaire du projet. Lorsque Pope affronta de nouveau l’Assemblée en mars 1872, il n’avait plus la majorité, et son gouvernement subit la défaite. Aux élections tenues le 4 avril, les libéraux remportèrent une écrasante victoire ; afin de conserver un siège à l’Assemblée, Pope dut abandonner la circonscription de Bedeque, où l’opposition à la Confédération était forte, pour se présenter dans la circonscription tory de Charlottetown, dans laquelle son élection se trouvait presque assurée.
La campagne contre Pope et le chemin de fer fut menée par deux anciens tories, adversaires de la Confédération, Palmer et surtout Laird. Dans son journal, le Patriot, et dans ses discours, Laird lança deux accusations sérieuses, outre celle, indéniable, que la question n’avait jamais été soumise à l’électorat : il affirma que la raison d’être secrète du chemin de fer était d’amener l’île dans la Confédération et que sa construction avait entraîné une vaste corruption et un mépris de l’intérêt public. Les accusations faisant état d’une « clique du chemin de fer » corrompue ne furent jamais étayées, et l’affirmation suivant laquelle les entrepreneurs avaient fait montre d’un manque de jugement, sinon d’incompétence et de cupidité, provoquant ainsi une hausse vertigineuse des coûts, donna lieu à une enquête que menèrent, au milieu de 1872, deux ingénieurs américains désignés par le second gouvernement de Haythorne. Ceux qui les avaient engagés désiraient évidemment obtenir des preuves de malversations, mais les enquêteurs louèrent plutôt la conduite des entrepreneurs de Pope. Il semble que les plus sérieuses critiques qui auraient pu être adressées avec juste raison à l’ancien gouvernement portaient sur le fait qu’il avait procédé aux travaux sans avoir effectué d’arpentage adéquat ; le chemin de fer reliant les terminus de Georgetown et d’Alberton mesurait 27 milles de plus que le total de 120 milles qui avait été prévu selon les calculs annoncés à l’Assemblée et inscrits au contrat.
Peut-être faut-il accorder une plus grande importance, en fin de compte, au fait que l’on peut soupçonner Pope d’avoir su que le coût du projet, si raisonnable qu’il fût, compte tenu du, travail à accomplir, allait amener l’île à adhérer à la Confédération. On ne possède actuellement aucune preuve irréfutable du bien-fondé d’un tel soupçon, mais il est invraisemblable de croire que Pope, homme d’affaires avisé, n’ait pas reconnu ce qui apparut rapidement comme une évidence aux yeux du lieutenant-gouverneur William Cleaver Francis Robinson*, favorable à la Confédération, et de la plupart des hommes politiques opposés à ce régime. Il est certain que William Henry, le frère de James Colledge Pope, était prêt à envisager n’importe quel moyen, sauf une invasion par l’armée, pour obliger l’île à entrer dans la Confédération, et il est également certain que les liens politiques des membres de la famille à cette époque étaient très étroits, puisque l’Islander appuyait James Colledge et que Joseph, ardent partisan de l’union, était devenu trésorier colonial. Néanmoins, James Colledge Pope était un homme d’affaires avant tout, et on peut très bien concevoir qu’il se soit intéressé principalement au chemin de fer en tant que facteur de progrès économique et que, dans cette perspective, l’entrée dans la Confédération lui soit apparue comme une conséquence fortuite. Aurait-il prôné la construction d’un chemin de fer s’il n’avait pas eu l’assurance que le Canada souhaitait l’annexion de l’île (et allait ainsi pouvoir la secourir financièrement en cas de besoin) ? Il s’agit là d’un intéressant sujet de réflexion.
Quoi qu’il en soit, le gouvernement de Haythorne sentit le besoin, en février 1873, d’envoyer une délégation à Ottawa en vue de négocier les conditions d’entrée dans la Confédération. Compte tenu des circonstances, le gouvernement du dominion traita l’île avec générosité : il allait établir un « lien permanent » avec le continent, se charger du chemin de fer, régler la question des terres, prendre à son compte les dettes de la colonie et accroître, par rapport à la dernière offre qui avait été faite, le montant de la subvention annuelle. Les libéraux décidèrent de soumettre ces conditions à la population et fixèrent des élections pour le 2 avril. James Colledge Pope, qui avait discrètement tenté de séduire les membres dissidents du caucus libéral en faisant des concessions à l’Église catholique sur la question des écoles, usa d’une stratégie brillamment adaptée à la situation nouvelle. Il se porta à l’attaque en déclarant que les conditions proposées n’étaient pas assez bonnes et qu’elles avaient été obtenues par des méthodes peu recommandables ; il accusait les libéraux de conspirer en vue d’amener les insulaires dans la Confédération d’une manière précipitée. Il affirma qu’il pouvait obtenir bien davantage pour l’île, puisque ses associés conservateurs et lui-même étaient des amis et des collègues en politique de sir John Alexander Macdonald*. Pope remporta 20 des 30 sièges de l’Assemblée et, après avoir refusé de garantir au lieutenant-gouverneur Robinson qu’il ferait entrer l’île dans la Confédération, quels qu’allaient être les résultats des futures négociations, il se rendit à Ottawa en compagnie de Haviland et de Howlan. Grâce à leur obstination, ils obtinrent la promesse que la subvention annuelle à l’île allait être augmentée de $25 500.
L’Île-du-Prince-Édouard se joignit au dominion du Canada le 1er juillet 1873. Pope fut élu député de la circonscription de Prince à la chambre des Communes le 17 septembre. À Ottawa, il appuya le gouvernement de Macdonald en voie de s’écrouler. Or, à cette époque, la précaire démarcation des partis politiques de l’île avait été sérieusement ébranlée par l’évêque MacIntyre. La question des écoles avait provoqué une hausse générale de la tension au cours de la première moitié de l’année. Comme on prévoyait dans les circonscriptions protestantes que MacIntyre allait tenter d’obtenir des concessions en profitant du fait que, suivant l’article 93 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, tout ce qui avait force de loi avant l’union avec le Canada allait tomber sous la protection du gouvernement fédéral, celles-ci, aux élections d’avril, avaient arraché à leurs candidats la promesse de maintenir le statu quo. Néanmoins, Pope se trouvait avantagé sur le plan politique par le fait qu’il avait publiquement exprimé, par le passé, sa sympathie pour la position des catholiques relativement à la question scolaire. Les 12 députés catholiques élus en avril lui accordèrent donc un appui qui s’avéra décisif. Pendant un certain temps, Pope bénéficia du soutien des catholiques sans avoir à passer aux actes, grâce à l’engagement qu’il lui avait fallu prendre envers ses électeurs de Charlottetown. Mais il entra bientôt en conflit avec MacIntyre : ayant appris que l’évêque, à la mi-mai, avait essayé de convaincre les députés catholiques de faire échec à la Confédération à l’Assemblée, tant que la question des écoles n’aurait pas été réglée à sa satisfaction, Pope retira sa promesse officieuse d’attribuer $10 000 aux écoles de l’évêque, laquelle avait été faite, dit-il plus tard, « sans la moindre intention de reconnaître le principe des écoles confessionnelles ». MacIntyre protesta à huis clos d’une manière si véhémente, semble-t-il, que le groupe dirigé par Pope et Howlan lui fit le 19 juin un don privé de $5 000. Mais l’évêque, d’après Pope et Howlan, n’en fut pas satisfait, car il attendait un second montant de $5 000 qui ne venait pas. En août, MacIntyre dénonçait ses anciens alliés politiques du haut des chaires de son diocèse. Avec son appui, les libéraux obtinrent quatre des six sièges en jeu aux élections partielles fédérales du 17 septembre. Pope refusa de se présenter aux élections fédérales du début de 1874, qui virent les libéraux remporter les six circonscriptions de l’île ; il expliqua son abstention en disant que tous les catholiques qui lui donneraient leur appui allaient encourir la « censure épiscopale » et qu’il ne voulait pas mettre ses amis dans une telle situation.
Pope retourna à l’Assemblée provinciale le 5 avril 1875, ayant été choisi sans opposition député de Summerside lors d’une élection partielle. Il ne fit cependant pas partie du cabinet de son successeur au poste de premier ministre, Lemuel Cambridge Owen*, et il maintint une attitude relativement indépendante. La principale question débattue au milieu des années 1870 fut celle des écoles, et des alliances politiques continuèrent à se former. Les libéraux n’entendaient faire aucun compromis sur le principe des écoles intégrées et non confessionnelles, et, à la suite de leur succès aux élections fédérales, ils avaient renoncé à leur alliance de raison avec l’évêque MacIntyre, dont ils avaient retiré tous les avantages qu’ils pouvaient, sans rien donner en retour. Au cours du mandat de l’Assemblée, on en arriva à s’entendre sur la nécessité d’une réforme en profondeur du système d’éducation, qui était en stagnation depuis plusieurs années ; les avis étaient cependant partagés quant à savoir si l’enseignement de la religion dans les écoles publiques se trouvait compatible avec cet objectif.
Les élections provinciales d’août 1876 portèrent uniquement sur la question des écoles ; les insulaires étaient divisés en deux groupes : les « Free Schoolers » (partisans de l’école non confessionnelle), en majorité des libéraux, et les « Denominationalists » (promoteurs de l’école confessionnelle) comprenant presque exclusivement des tories. À la tête de ceux-ci, Pope se trouva dans une situation difficile, car les simples membres de son groupe ne s’entendaient pas sur la quantité d’écoles « séparées » qu’il fallait instituer. Il reprit le programme électoral qu’il avait adopté dans Summerside en 1868 et qui consistait à « accepter d’aider les écoles privées » et à « payer pour les résultats ». Mais il se produisit bientôt des divergences d’opinions entre ses partisans catholiques et protestants, et les Free Schoolers remportèrent une victoire décisive. Pope et son principal lieutenant, Frederick de St Croix Brecken*, se virent infliger tous deux une défaite personnelle dans Charlottetown par le leader des Free Schoolers, Louis Henry Davies*, et par le tory George Wastie DeBlois. Outre la division qui régnait chez les Denominationalists, trois raisons expliquent ce résultat : le grand talent oratoire du jeune Davies ; le fait que le parti de celui-ci ait mieux réussi au cours de la campagne à obtenir la faveur des deux camps en ralliant à sa cause des vieux tories comme Haviland et DeBlois (qui avaient jadis appuyé le programme électoral de Pope dans Summerside, mais qui étaient maintenant déçus) ; et – ce qui fut peut-être le plus important – le sentiment général dans la population que le temps était venu de résoudre la question scolaire puis, par voie de conséquence, l’impatience que l’on ressentait de ce que Pope cherchait à gagner du temps alors que Davies ne tergiversait pas.
Le 22 novembre 1876, à peine plus de trois mois après sa défaite dans Charlottetown, Pope remporta une élection partielle dans la circonscription fédérale de Queens, à l’issue d’une campagne qui donna aux insulaires une première occasion de voter au scrutin secret. À Ottawa, il montra l’humeur belliqueuse qui avait marqué son entrée à l’Assemblée de l’île et il inquiéta les principaux membres du gouvernement libéral et l’orateur, semble-t-il, par les excès de langage auxquels il se livra en exigeant fermement que l’île fût représentée au cabinet et que les communications hivernales avec la terre ferme fussent améliorées. Sans doute était-il judicieux qu’en 1878, lorsque les tories reprirent le pouvoir, Pope obtînt le poste de ministre de la Marine et des Pêcheries, et qu’il ait eu, entre autres tâches, celle de préparer un rapport sur le rendement du Northern Light, vapeur tout à fait inadéquat qu’il avait déjà dénoncé avec la plus grande vigueur et qui ne fut pas remplacé ni même transformé par le gouvernement de Macdonald pendant que Pope était en poste. En tant que ministre, au dire de son neveu Joseph*, qui lui servait aussi de secrétaire particulier, « il n’aimait pas le travail de bureau et n’était pas enclin à tenir une correspondance régulière et méthodique ». Un grand nombre des lettres qui sont restées de lui portent sur des affaires de favoritisme, dont une tentative qu’il effectua en 1879 pour obtenir que son père fût nommé lieutenant-gouverneur de l’île. À la chambre des Communes, avant et après son arrivée au pouvoir, Pope défendit la politique tarifaire des conservateurs comme moyen d’exercer des pressions sur les États-Unis en vue de parvenir au libre-échange, même s’il reconnaissait qu’il était improbable que les Américains acceptent. Il continua de se présenter comme un libre-échangiste par goût et, en privé, il fit part à Macdonald du ressentiment que les insulaires éprouvaient de la répartition inégale des coûts et des bénéfices de la Politique nationale.
Il semble que le décès de son frère William Henry, survenu en octobre 1879, ainsi que de lourdes pertes subies dans le transport maritime et par le feu à la fin des années 1870, contribuèrent à la détérioration de la santé mentale et physique de Pope ; il s’agissait peut-être de la récurrence de troubles qui étaient apparus au milieu des années 1870 à la suite de certains échecs en affaires. Après la session de 1881, il prit congé du cabinet ; à cette époque, d’après son fils aîné, Percy, ses affaires étaient « dans un état tout à fait désespéré ». Malgré un repos à l’Île-du-Prince-Édouard et les soins médicaux qui lui furent prodigués, entre autres, par le docteur Charles Tupper*, il ne parvint pas à se rétablir, bien que Macdonald et ses collègues eussent décidé, par égard pour lui, de lui conserver son poste ministériel. Il ne se présenta pas aux élections de 1882 et, l’année suivante, à la demande de son fils aîné, on le déclara privé de raison au regard de la loi et incapable de gérer ses propres affaires. Il mourut en 1885, laissant derrière lui son père, sa femme, Eliza Pethick, qu’il avait épousée le 12 octobre 1852, et cinq de leurs huit enfants. Quoiqu’il eût été baptisé selon le rite méthodiste, il était de religion anglicane depuis plus de 30 ans.
Pope était un homme peu compliqué même s’il modifia plusieurs fois son attitude à l’égard des principales questions politiques qui, en son temps, agitèrent l’Île-du-Prince-Édouard. Le juge en chef sir Robert Hodgson* le dépeignit un jour à Macdonald de façon juste en disant qu’il était « un homme de gros bon sens, pas très instruit, d’un courage indomptable, persévérant et énergique, fier et ambitieux – ce que le docteur Johnson appelle un « good hater » [c’est-à-dire] très rancunier par nature – et assez bon débatteur ». Comme son frère aîné William Henry, il avait une volonté de fer ; moins vif d’esprit que celui-ci, il lui était largement supérieur dans le maniement des hommes et la conduite des affaires. Entrepreneur très prospère et personnellement connu presque à la grandeur de l’île, Pope fit valoir en politique les qualités qui lui permettaient de jouer un rôle de premier plan dans la vie économique de la colonie. Il eut comme atout politique principal, semble-t-il, d’être un meneur d’hommes et, en particulier, de communiquer une impression de vigueur à ceux qui l’entouraient. Manquant de raffinement, Pope n’était guère patient avec les gens qu’il ne pouvait soumettre à sa volonté ; à l’Assemblée, il faillit plus d’une fois en venir aux coups avec un autre entrepreneur agressif, George Coles, et, en 1876, il se battit avec un député libéral sur une tribune.
En 1927, William Lawson Cotton*, un vieux journaliste de l’île qui avait intimement connu Pope dans ses beaux jours, écrivit que, après Coles et Whelan, il « fut le leader politique qui exerça la plus forte influence sur les événements dans l’Île-du-Prince-Édouard ». Toutefois, sa carrière ne fut pas une suite ininterrompue de succès. La proposition d’une subvention à l’île de $800 000 qu’il fit en 1866, l’élection partielle qui eut lieu dans Summerside deux ans plus tard et la stratégie qu’il adopta aux élections provinciales de 1876 constituèrent peut-être des occasions où il manqua de sens politique. Mais on peut avancer que, dans le second cas au moins, il prenait un risque calculé qui allait permettre des réussites subséquentes. Dans plusieurs affaires locales où Pope joua un rôle prépondérant – le chemin de fer, les écoles confessionnelles, la Confédération – ses relations avec son frère entrèrent largement en ligne de compte et donnèrent lieu à bien des conjectures. Il ne fait aucun doute que les deux frères Pope étaient en désaccord sur plusieurs points importants : James Colledge eut soin de ne pas s’associer aux charges à fond de train auxquelles William Henry se livra publiquement contre les croyances catholiques au début des années 1860 et il refusa de suivre son frère aîné dans le désert politique auquel le confinèrent ses prises de position sur la confédération après la conférence de Québec. Comme il avait davantage le souci de ne pas fermer les portes derrière lui et de ne pas se faire d’ennemis irréductibles sans raison, c’est lui, plutôt que William Henry, qui fut en mesure de prendre une part active au gouvernement au milieu des années 1860. S’étant lancé dans la politique à la fin des années 1850, il ne devint un leader tory qu’en 1865. Dès lors, l’activité politique suscita chez lui un enthousiasme grandissant et, au cours des années 1870, il fut le plus important personnage de l’île dans ce domaine. Les deux frères Pope reconstruisirent ensemble le parti tory, qui s’était écroulé en 1864–1865, et ils s’en servirent pour amener le chemin de fer dans l’île et celle-ci dans la Confédération. Sans que l’on puisse dire qui des deux était le maître d’œuvre, il est sûr que James Colledge, avec son magnétisme personnel, joua un rôle indispensable.
La sincérité des frères Pope et les motifs de leurs gestes furent souvent tenus pour suspects. Sur la question des écoles, à la solution de laquelle sa contribution fut négative dans une large mesure, James Colledge se montra très souple, car son adhésion à une ligne de conduite particulière était entièrement déterminée par l’époque, les circonstances et les hasards de la politique. Pendant des années, la confédération ne fut pour lui que l’occasion d’arracher à Ottawa des conditions suffisamment favorables. S’il y avait une idée à laquelle il était fortement attaché, c’était celle du « progrès » économique. Voilà ce qu’entendaient divers journalistes de son temps lorsqu’ils écrivaient que James Colledge Pope, un tory, était « un homme aux vues libérales et progressistes ». Et un chemin de fer, quels qu’en puissent être les effets, était un élément indispensable de toute collectivité progressive dans la dernière partie du xixe siècle. James Colledge Pope incarnait avant tout l’entrepreneur dynamique manifestant « une grande hardiesse et une grande énergie » en affaires et en politique.
L’auteur adresse ses remerciements au professeur Lewis R. Fischer et à Marven Moore qui lui ont fourni des renseignements sur les intérêts de James Colledge Pope dans le commerce maritime, à Robert Allan Rankin pour ses informations sur l’histoire de Summerside, Île-du-Prince-Édouard, et à Mme Irene L. Rogers qui a mis à sa disposition l’album de coupures de journaux de Bertie McCallum, qui contient le récit du voyage en Californie sur le brigantin Fanny en 1849 ; une version abrégée de ce récit, éditée par Mme Rogers, parut dans l’Island Magazine (Charlottetown), no 4 (printemps-été 1978) : 9–14. L’unique collection connue des papiers Pope est constituée d’une maigre correspondance (7 lettres) échangée les 15 et 16 avril 1873 entre Pope et le lieutenant-gouverneur William Cleaver Francis Robinson ; il existe des copies de cette correspondance au PRO, CO 226/111 : 90–98, et ces lettres parurent dans W. L. Cotton, Chapters in our Island story (Charlottetown, 1927), 66–71. V. aussi PAPEI, « Scrapbook containing papers relating to Joseph Pope, W. H. Pope, and J. C. Pope ».
Des indications sur les opinions politiques de Pope et sur la qualité de son style de débatteur se trouvent dans Î.-P.-É., House of Assembly, Debates and proc., 1858–1866, 1871–1873, 1875–1876 ; Canada, chambre des Communes, Debates, 1877–1881. On peut trouver des renseignements sur sa carrière publique, ses antécédents familiaux, son activité d’homme d’affaires et sa personnalité dans : Examiner (Charlottetown), 20 nov. 1854, 11 févr. 1856, 18 mai, 1er, 8 juin 1857, 7 mars, 11 avril 1859, 24, 31 mars 1862, 6 août, 1er oct., 31 déc. 1866, 4 févr. 1867, 2 févr. 1874, 5, 19 avril 1875, 31 juill. 1876, 17 avril, 14, 19 sept. 1878, 17 sept. 1879, 18, 19, 21 mai 1885, 30 avril 1889, 3 sept. 1895 ; Herald, 20, 27 mai, 17 juin 1885 ; Island Argus (Charlottetown), 12 mars, 16 avril 1872, 11 mars 1873, 4 juill., 22 août 1876 ; Islander, 15 oct. 1852, 19 juin 1857, 28 mars 1862, 23 mars, 3 août, 12 oct. 1866, 25 janv. 1867, 16 oct., 27 nov. 1868, 6 août 1869, 8 juill., 21 oct. 1870 ; Monitor (Charlottetown), 3, 27 juin 1857 ; Patriot (Charlottetown), 30 juin, 18 août 1876, 17 mars 1877, 18 mai 1885, 3 sept. 1895 ; Pioneer (Alberton, Î.-P.-É.), 29 nov. 1876 ; Pioneer (Montague, Î.-P.-É.), 1er mai 1880 ; Pioneer (Summerside, Î.-P.-É.), 19, 26 mai 1885 ; Presbyterian and Evangelical Protestant Union (Charlottetown), 21 mai 1885 ; Progress (Summerside), 2, 9 nov. 1868 ; Protector and Christian Witness (Charlottetown), 27 mai 1857 ; Summerside Journal and Western Pioneer (Summerside), 21 mai 1885 ; Watchman (Charlottetown), 5 sept. 1895.
On trouve des références à Pope, ici et là, dans les collections suivantes : les papiers de la famille Tilley au musée du N.-B. (photocopies aux PAPEI) ; les papiers sir John Alexander Macdonald aux APC (MG 26, A) (mfm aux PAPEI) ; la coll. Hunt, les papiers de la famille Palmer, et les papiers d’Edward Palmer aux PAPEI. Parmi les autres sources manuscrites importantes, citons : APC, RG 42, sér.I, 150–171 ; 391–394 ; 462–463 ; PAPEI, RG 1, Commission books, III : 1, 84–85 ; RG 6, Court of Chancery, Case papers, J. C. Pope, 1883 ; RG 9, Impost account, District of Bedeque, 1854 ; RG 15, Pope estate rent books, Lot 25, 1843–1863 ; Lot 27, 1860–1868 ; Lot 67, 1843–1863 ; RG 16, Land registry records, Conveyance registers, liber 80 : f.251 ; liber 82 : ff.112, 556 ; liber 86 : f.21 ; liber 87 : ff.151, 231, 691 ; liber 89 : f.904 ; liber 93 : f.701 ; liber 97 : f.846 ; Conveyance registers, Queen’s County ser., liber 9 : f.142 ; liber 14 : f.821 ; Land title docs., Lot 27, Leases, doc.314, 26 janv. 1856 ; « List of rents due on township no 27 » (1868) ; « List of tenants on half lot 27, with quantity of land held by each » (1868) ; PRO, CO 226/88 : 197–199 ; CO 226/104 : 286s., 312, 333s. Citons parmi les principales sources imprimées : CPC, 1876 ; Î.-P.-É., House of Assembly, Journal, 1873, apps A, EE ; 1875, 29, app.E ; Joseph Pope, Public servant : the memoirs of Sir Joseph Pope, Maurice Pope, compil. et édit. (Toronto, 1960), 19–23, 27–34, 69.
Les études suivantes se sont avérées les plus importantes pour la rédaction de cette biographie : F. W. P. Bolger, Prince Edward Island and confederation, 1863–1873 (Charlottetown, 1964) ; et Robertson, « Religion, politics, and education in P.E.I. » ; consultez les pages 225s. de ce dernier pour combler certaines lacunes, notamment sur la question des relations de Pope avec ses partisans catholiques, du compte rendu de l’ouvrage précédent en ce qui concerne l’interaction de l’avènement de la Confédération et la question scolaire dans les années cruciales 1872 et 1873. V. aussi : W. L. Cotton, Chapters in our Island story (Charlottetown, 1927), 137–140 ; Creighton, Road to confederation, 222, 263, 307s. ; E. D. Ives, Lawrence Doyle : the farmer poet of Prince Edward Island ; a study in local songmaking (Orono, Maine, 1971), 71s., 81–84 ; G. A. Leard, Historic Bedegue : the loyalist at work and worship in Prince Edward Island : a history of Bedeque United Church (Bedeque, Î.-P.-É., 1948), 20, 22, 40, 54s., 61s. ; MacKinnon, Government of P.E.I., 87s., 93, 127, 132–136, 307 ; W. E. MacKinnon, The life of the party : a history of the Liberal party in Prince Edward Island (Summerside, 1973), 42s., 47–51, 53–55, 58–60 ; G. R. Montgomery, « Voyage of the brig « Fanny », Past and present of P.E.I. (MacKinnon et Warburton), 356a–359a ; J. C. Macmillan, The history of the catholic Church in Prince Edward Island from 1835 till 1891 (Québec, 1913), c.23 ; « The Pope family », Past and present of P.E.I. (Mackinnon et Warburton), 397a–400a ; Moncrieff Williamson, Robert Harris, 1849–1919 : an unconventional biography (Toronto et Montréal, 1970) L. R. Fischer, « The shipping industry of nineteenth century Prince Edward Island : a brief history », Island Magazine, no 4 (printemps-été 1978) : 15–21 ; D. C. Harvey, « Confederation in Prince Edward Island », CHR, 14 (1933) : 143–160 ; J. A. Maxwell, « Prince Edward Island and confederation », Dalhousie Rev., 13 (1933–1934) : 53–60 ; I. R. Robertson, « The Bible question in Prince Edward Island from 1856 to 1860 », Acadiensis, 5 (1975–1976), no 2 : 3–25 ; « Party politics and religious controversialism in Prince Edward Island from 1860 to 1863 », Acadiensis, 7 (1977–1978), no 2 : 29–59. [i. r. r.]
Ian Ross Robertson, « POPE, JAMES COLLEDGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/pope_james_colledge_11F.html.
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Auteur de l'article: | Ian Ross Robertson |
Titre de l'article: | POPE, JAMES COLLEDGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |