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REDPATH, JOHN, entrepreneur et industriel, né en 1796 à Earlston, Berwickshire, Écosse, décédé à Montréal le 5 mars 1869.
Tout ce que nous savons de la vie de John Redpath en Écosse avant qu’il n’émigre à l’âge de 20 ans c’est qu’il fut apprenti maçon. Au début des années 1820, on le comptait parmi les principaux entrepreneurs de construction de Montréal, et c’est lui et son associé Thomas McKay* qui fournirent la pierre nécessaire à la construction de la nouvelle église Notre-Dame et du canal de Lachine. Le canal fut l’un des travaux publics les plus importants effectués au Bas-Canada au début du xixe siècle, et c’est en construisant ces écluses que Redpath acquit une solide réputation. En 1827 et 1828, McKay et Redpath construisirent les écluses de Jones Falls sur le canal Rideau, « la plus vaste construction jamais entreprise d’un bout à l’autre du canal ». Il semble que Redpath soit revenu ensuite à Montréal tout en conservant, du moins jusqu’en 1831, certains intérêts dans une association qui regroupait les principaux entrepreneurs du canal, dont McKay, Thomas Phillips et Andrew White.
On ne saurait préciser dans quel genre d’entreprise Redpath s’engagea après son retour à Montréal. Il était déjà à l’aise et ne tarda pas à entrer dans les milieux de la grande finance montréalaise. En 1833, il fut élu au conseil d’administration de la Banque de Montréal, l’institution financière la plus importante de la ville ; il en fut un des administrateurs puis, à partir de 1860, vice-président et en demeura un des gros actionnaires jusqu’à sa mort. Mais à l’instar de la plupart de ses collègues bien nantis, Redpath plaça de l’argent dans bon nombre d’entreprises pendant les années 40, 50 et 60, au cours desquelles Montréal connut un essor économique considérable. En plus de placer des capitaux dans la Compagnie d’assurance de Montréal contre les accidents du feu et dans la Compagnie de télégraphe de Montréal, au sein desquelles il était administrateur, il investit également des sommes considérables dans des entreprises minières canadiennes dont certaines étaient situées dans les Cantons de l’Est, entre autres la Compagnie pour l’exploitation et la fonte des minerais de Belvédère, la Bear Creek Coal, la Rockland Slate et la Capel Copper. Il détenait aussi des actions dans une fonderie de cuivre, une part importante dans l’Association de placement de Montréal et une grande partie des propriétés les plus recherchées au flanc du mont Royal ; il avait aussi des intérêts dans des entreprises de transport maritime, la Montréal Towboat Company et la Compagnie du Richelieu [V. Jacques-Félix Sincennes*]. Il participa également à la création de la Compagnie d’assurance maritime du Canada, de la Compagnie métropolitaine d’assurance contre le feu et de la Canada Peat Fuel Company.
Malgré tous ses intérêts financiers et son importante fortune, Redpath ne se serait pas distingué de ses pairs s’il n’avait pas décidé, en 1854, d’entreprendre la construction de la première raffinerie de sucre de la province du Canada. Ses installations dépassaient en importance les 20 et quelques nouveaux établissements de la zone industrielle qui venait de s’ouvrir le long du canal de Lachine. Plusieurs années auparavant, Redpath avait commencé d’acheter aux sulpiciens des terres en bordure du canal, peu de temps avant que l’Assemblée provinciale n’autorise l’utilisation des eaux du canal à des fins industrielles. Son usine de sept étages, dont les imposantes cheminées devinrent une des caractéristiques de la ville, représentait une mise de fonds énorme pour Redpath qui en était le seul propriétaire. Il investit £40 000 dans l’achat du terrain, des bâtiments et de la machinerie et consacra une somme identique au fonds de roulement. En moins d’un an, l’entreprise comptait plus de 100 employés et produisait 3 000 barils de sucre raffiné par mois, qu’elle écoulait au Canada. L’usine de Redpath ne traitait que du sucre de canne importé des Antilles et transporté en grande partie par ses propres navires, le Helen Drummond et le Grace Redpath, nommés d’après ses filles. En 1862, il importait environ 7 000 tonnes de sucre brut par an. Grâce aux tarifs préférentiels établis fort à propos par le gouvernement canadien en 1855, année où Redpath inaugura son usine, l’entreprise se révéla prospère. Au milieu des années 60, une autre raffinerie était établie à Montréal pour faire concurrence à celle de Redpath. En 1859, Redpath avait fait entrer dans la compagnie son fils aîné Peter et son gendre George Alexander Drummond*, jeune ingénieur d’Écosse, et il prit des dispositions pour se retirer graduellement de l’affaire à mesure que ses autres fils atteindraient leur majorité, pour profiter peut-être de sa nouvelle maison de campagne, Terrace Bank, érigée sur un de ses terrains du mont Royal dominant la ville où il avait édifié son immense fortune.
Redpath siégea au conseil de ville de Montréal la durée d’un mandat bref et sans éclat, de 1840 à 1843 ; par contre, il rendit d’excellents services à la province. À la fin des années 30, il fut membre de la commission du canal de Lachine. En 1839, il fut nommé au bureau des Travaux publics qui venait d’être fondé ; il en démissionna le 24 avril 1840. En 1845, il participa avec William Cayley*, Frédéric-Auguste Quesnel, George Sherwood et Moses Judah Hayes [V. Hamilton Hartley Killaly*] à la commission d’enquête sur l’administration du bureau des Travaux publics.
En 1849, Redpath fut président de l’Association d’annexion de Montréal qui reçut l’appui massif, encore que bref, de nombreux hommes d’affaires montréalais bien en vue. Les demandes d’appui d’autres annexionnistes, entre autres celle de Hugh Bowlby Willson*, rédacteur en chef de l’Indépendant de Toronto, étaient transmises à Redpath. Il est fort possible que celui-ci, industriel ambitieux, vraisemblablement intéressé par les marchés de produits manufacturés, fût partiellement responsable de l’accent mis par l’association dans son manifeste sur les prétendus avantages pour les fabricants canadiens d’une union avec les États-Unis. C’est probablement ce qu’il voulut faire sentir aux annexionnistes lorsqu’il déclara, en octobre 1849, que des milliers d’artisans canadiens qualifiés partaient s’installer aux États-Unis. En 1850, le mouvement annexionniste de Montréal périclita rapidement, et Redpath canalisa son intérêt pour la chose publique vers des sentiers moins périlleux.
Dans la meilleure tradition chrétienne, il s’était toujours montré charitable. Il accorda son soutien à des institutions en place comme le Montréal Général Hospital, le Montréal Presbyterian College et l’Institut des artisans de Montréal, à titre d’administrateur ; on le vit également, à la tête d’un petit groupe, demander l’aide du gouvernement pour lutter contre la traite des blanches à Montréal et, par l’intermédiaire du Magdalene Asylum, essayer de racheter ces « malheureuses filles, dont beaucoup [étaient] de pauvres immigrantes entraînées à leur insu dans les lieux de honte et d’infamie qui pullul[aient] dans la cité ». C’est aussi du gouvernement qu’il obtint de l’aide pour l’asile d’aliénés. Il collabora à la création de la Maison protestante d’industrie et de refuge de Montréal. Fervent presbytérien de l’Église libre, Redpath fut l’un des fondateurs des Presbyterian Foreign Missions, de la Labrador Mission, de la Sabbath Observance Society et de la Société missionnaire canadienne-française à laquelle il légua une forte somme.
Redpath eut dix enfants de sa première femme, Janet McPhee, qu’il avait épousée en 1818. Après sa mort, en 1834, il épousa Jane Drummond qui lui donna sept enfants. Deux de ses fils seulement, Peter et John James, travaillèrent, semble-t-il, à la raffinerie. Une des filles de Redpath épousa John Dougall*, rédacteur en chef du Montreal Witness, une seconde épousa Henry Taylor Bovey, professeur bien connu de McGill University, et une autre épousa George Alexander Drummond qui devint l’une des personnalités dominantes de la raffinerie ainsi qu’un éminent homme d’affaires montréalais.
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Gérald Tulchinsky, « REDPATH, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/redpath_john_9F.html.
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Auteur de l'article: | Gérald Tulchinsky |
Titre de l'article: | REDPATH, JOHN |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |