Provenance : Bibliothèque et Archives Canada/MIKAN 3418752
McMASTER, WILLIAM, homme d’affaires, homme politique, banquier et philanthrope, né le 24 décembre 1811 dans le comté de Tyrone (Irlande du Nord), fils de William McMaster, marchand de toiles, décédé le 22 septembre 1887 à Toronto.
William McMaster reçut une instruction privée sous la direction d’un professeur local estimé ; il se convertit vers l’âge de dix ans et se joignit vraisemblablement à l’Église baptiste à Omagh. Ayant acquis une certaine expérience en tant que commis dans une maison de commerce irlandaise, il vint en Amérique du Nord et, après un bref séjour à New York, déménagea à York (Toronto), Haut-Canada, en août 1833. Selon la version populaire, il serait arrivé à York sans amis ni argent, aurait trouvé de l’emploi comme commis dans le commerce de gros et de détail de « marchandises sèches » de Robert Cathcart, et n’aurait dû sa réussite qu’à son seul mérite. Un autre récit voudrait que Cathcart, qui avait fondé son entreprise en 1828 ou 1829, ait fait venir par la suite ses neveux d’Irlande, parmi lesquels McMaster. Mais les deux interprétations reconnaissent que ce dernier devint rapidement un atout pour son employeur. Un an ou deux après son arrivée, il était un des associés de la firme et, lorsque Cathcart se retira de l’affaire, en juillet 1844, il en prit la direction.
Le succès que connut McMaster par la suite s’explique en grande partie par son habileté à saisir les bonnes occasions et par sa capacité d’agir en accord avec les grandes tendances commerciales. Les décisions qu’il prit en 1844 de se consacrer au commerce de gros des marchandises sèches et de déménager son entreprise dans la rue Yonge s’avérèrent toutes deux judicieuses. Le commerce des marchandises sèches, concentré dans la partie sud de la rue Yonge, allait devenir l’un des plus rentables de Toronto. Une maison comme celle de McMaster répondait aux besoins d’une population qui réclamait à grands cris des marchandises importées. En 1850, la firme réalisait un profit net de $10 000, lequel demeurait, semble-t-il, inférieur à celui des grands grossistes généraux de Toronto, mais les agents de la R. G. Dun and Company (maison de New York déterminant la cote de crédit des compagnies) classaient, en 1853, la fortune de McMaster dans le groupe des $300 000 à $400 000 et, en 1859, dans celui des $600 000 à $800 000. McMaster résista à la tentation de donner à son affaire une expansion dépassant ses capacités financières, et cette prudence lui permit de sortir sans trop de peine de la crise de 1857. Un agent de la maison R. G. Dun and Company avait décrit McMaster dès le début de sa carrière comme étant « probablement l’homme d’affaires le plus sûr de Toronto », et des rapports ultérieurs mentionnèrent à plusieurs reprises qu’on pouvait faire confiance à son jugement pour toute demande de crédit de sa part. En 1860, les négociants de marchandises sèches étaient devenus les commerçants les plus riches de la ville, et la firme de McMaster constituait, selon la R. G. Dun and Company, « la plus grosse entreprise de marchandises sèches du Haut-Canada ».
Sans enfants, McMaster avait engagé deux de ses neveux venus d’Irlande, Arthur Robinson McMaster et James Short McMaster, respectivement comme comptable et comme acheteur pour l’Angleterre. Ils devinrent ses associés dans la firme William McMaster and Nephews, le 1er mars 1859, et James Short McMaster alla s’établir à Manchester pour veiller sur les intérêts anglais de l’entreprise. Des contemporains ont décrit les membres de la famille McMaster comme « des gens secrets, gardant leurs affaires pour eux ».
McMaster fit son entrée en politique sous la bannière libérale, se faisant élire en 1862 comme représentant de la division de Midland au Conseil législatif de la province du Canada. Ses sympathies allaient à des hommes comme George Brown* et d’autres réformistes qui s’intéressaient au progrès commercial de Toronto et du Haut-Canada. Il était également attiré par leur souci de promouvoir des mesures visant à améliorer la situation des non-conformistes évangéliques, dont faisaient partie ses coreligionnaires baptistes. Au printemps de 1867, il fit partie du comité central exécutif de la Reform Association of Upper Canada, récemment remise sur pied, et devint l’un des administrateurs de sa section torontoise. Nommé au premier sénat fédéral, il y siégea jusqu’à sa mort. Lorsqu’il y prenait la parole, ses brèves interventions traitaient en général de sujets le touchant directement : la banque et la finance, les projets de loi concernant des compagnies auxquelles il était associé et des questions l’intéressant en tant que baptiste.
La firme William McMaster and Nephews, « entreprenante [et] bitieuse » à ses débuts, en vint à être considérée au début des années 1860 comme une vieille maison ayant une clientèle bien établie. Il se peut fort bien que ce changement ait été à l’origine de la décision de McMaster, qui avait parlé de se retirer des affaires dès 1859, d’agrandir le cercle de ses intérêts commerciaux. Abandonnant la direction de la compagnie en 1863, il en conserva une importante part financière, que l’on évaluait à $400 000 ; la firme prit alors le nom de A. R. McMaster and Brother. Tout en montant son entreprise, William McMaster avait contribué de façon importante à faire de Toronto une métropole commerciale, participant aux efforts de la ville pour enlever à Montréal son rôle prépondérant dans l’économie du Canada central. Il œuvra activement au sein du Board of Trade de Toronto, étant de son conseil jusqu’en 1861 – la durée de huit mandats – après quoi il laissa à d’autres membres de la famille le soin de représenter les intérêts des McMaster. Vers la fin des années 1850 et durant les années 1860, il siégea également aux conseils d’administration de la Banque d’Ontario, de la Wellington, Grey and Bruce Railway, de la Canada Landed Credit Company et de la Toronto and Georgian Bay Canal Company (devenue après 1865 la Huron and Ontario Ship Canal Company). En 1858, il fit partie du premier conseil d’administration de la Compagnie de transport, de navigation et de chemin de fer du Nord-Ouest, qui projetait de relier directement Toronto et Rupert’s Land, dans le but de permettre l’exploitation des matières premières et du marché potentiel que représentait cette dernière région [V. Allan Macdonell].
La rivalité entre Montréal et Toronto joua aussi un rôle important dans la décision de McMaster de se lancer dans le domaine bancaire dans les années 1860. Même s’il accepta de faire partie du conseil d’administration torontois de la Banque de Montréal en 1864, il s’inquiétait beaucoup du pouvoir que cette dernière avait dans le Haut-Canada. Sous la conduite de son directeur général, Edwin Henry King*, la banque resserrait le crédit au Haut-Canada, en retirant des capitaux, afin de faire de plus en plus affaire avec le gouvernement de la province du Canada ; en janvier 1864, le gouvernement lui confia son compte [V. Robert Cassels]. Deux ans plus tard, la Banque de Montréal fut la seule à profiter de la nouvelle loi permettant aux banques d’abandonner leurs billets en faveur de ceux émis par le gouvernement, devenant ainsi le seul agent pouvant émettre les billets du gouvernement. Dans la période d’incertitude qui précéda la faillite de la Bank of Upper Canada, en 1866, et celle de la Commercial Bank of Canada, en 1867, McMaster et la communauté d’affaires de Toronto prirent des mesures pour mettre un terme au pouvoir de plus en plus grand de la Banque de Montréal dans le Haut-Canada. McMaster et Archibald Greer, directeur de la succursale de la Banque de Montréal à Toronto, décidèrent, après avoir lutté en vain contre les mesures de resserrement de crédit de la banque, de s’en retirer pour fonder une nouvelle banque qui répondrait aux besoins en crédit créés par l’action de King. Ils rachetèrent de William Cayley et de ses associés la charte de la Bank of Canada, inactive depuis 1858, et, en août 1866, obtinrent des modifications à cette charte, dont un nouveau nom, Banque canadienne de commerce ; le capital-actions exigé passait de $3 000 000 à $1 000 000. Contrairement à beaucoup de banques qui cherchèrent à voir le jour au cours de cette période, la Banque canadienne de commerce n’eut pas de mal à trouver les actionnaires requis pour démarrer. McMaster apportait avec lui à la fois l’appui de la communauté d’affaires de Toronto et sa propre réputation d’homme d’affaires avisé, qui effectuait des transactions à son propre compte sur les marchés financiers de New York et de Londres. Ses agents, Caldwell Ashworth, à New York, et James Short McMaster, qui déménagea ses bureaux dans le quartier financier de Londres, prirent en main les affaires internationales de la banque.
Le 18 avril 1867, les actionnaires de la banque tinrent leur première réunion. McMaster, détenteur de 500 actions, évaluées à $25 000, fut élu président et Henry Stark Howland*, vice-président. Le conseil d’administration, composé d’hommes d’affaires et financiers en vue de Toronto, comptait des hommes comme John Taylor* et John Macdonald (qui démissionna moins de trois semaines plus tard et fut remplacé par James Austin*). En juin 1869, le capital social de la banque passa à $2 000 000, et, l’année suivante, le parlement approuva une nouvelle augmentation à $4 000 000, à la suite de la fusion avec la Gore Bank. Lorsqu’en 1871 les administrateurs portèrent le capital social à $6 000 000, l’équivalent de celui de la Banque de Montréal et de la Banque des marchands du Canada, le Monetary Times nota que leur politique était « hardie, pour ne pas dire ambitieuse ». Le montant fut atteint dès 1874. Mais tous les administrateurs ne partageaient pas le point de vue de McMaster, qui désirait favoriser l’expansion aux dépens du profit à court terme. Austin quitta le conseil d’administration en 1870 et Howland démissionna en 1874 ; ils optèrent tous deux pour de nouvelles banques, où l’on pouvait espérer un profit plus élevé pour un capital moindre.
McMaster avait fondé la Banque canadienne de commerce dans une période de grande incertitude quant à l’avenir des banques canadiennes. La nouvelle loi proposée en 1868 et présentée l’année suivante par le ministre fédéral des Finances, John Rose, avait été rédigée en collaboration avec King, de la Banque de Montréal. Elle mettait en question la capacité pour les banques d’émettre leurs propres billets, la quantité de titres d’État qu’elles devaient détenir et la continuation du système de banques à succursales. Selon le projet de loi de Rose, toutes les banques canadiennes auraient été obligées d’acheter les billets du gouvernement de la Banque de Montréal. Ce projet souleva des protestations à travers tout le pays, mais McMaster évita de prendre la tête de l’opposition des banques ontariennes, laissant ce rôle à George Hague, caissier (directeur général) de la Banque de Toronto. Il refusa également la présidence du comité sénatorial de la banque, du commerce et des chemins de fer, lorsque Rose la lui offrit en avril 1869. Il repoussa cette offre par crainte que son opposition à la nouvelle législation ne mît en danger ses projets de loi déposés à la chambre touchant la Banque canadienne de commerce ; il pensait aussi que la communauté bancaire devrait user de son influence pour faire modifier une loi apparaissant comme inévitable, plutôt que de risquer de durcir la position du gouvernement en s’y opposant ouvertement. Par la suite, le gouvernement décida de retirer ce projet de loi contesté, et Rose démissionna.
La nomination de Francis Hincks comme ministre des Finances, le 9 octobre 1869, libéra McMaster de sa position embarrassante. Hincks était sympathique au groupe de pression ontarien, et McMaster crut qu’il pouvait accepter la présidence du comité sénatorial, que lui offrit Hincks en 1870. Il apporta un appui fidèle à Hincks, même lorsqu’il eut à faire face à l’opposition de ses collègues libéraux, opposition qu’il dénonça comme étant opportuniste. Il se plongea dans le travail de comité qui, en dépit de moments de lassitude, semble lui avoir beaucoup plu. Il travailla avec Hincks à essayer de rendre le projet de loi sur les banques de ce dernier « aussi parfait que possible ». Pour finir, les lois adoptées en 1870 et en 1871 accordèrent à McMaster et aux autres banquiers ontariens les conditions qu’ils souhaitaient pour assurer le progrès de leurs établissements dans la province.
En 1872, la Banque canadienne de commerce, devenue une « grosse affaire saine », s’était constitué un fonds de réserve de $1 000 000. Elle avait en outre absorbé les coûts d’ouverture de nouvelles succursales : 19 en Ontario, une à Montréal, et une à New York pour faciliter les « opérations de change ». Deux ans plus tard, lorsque la province subit une récession économique, la croissance de la banque connut un ralentissement, mais McMaster et les autres membres du conseil d’administration firent face à la situation avec confiance. Ils adoptèrent une politique de prudence, optant temporairement pour « la sécurité, plutôt que pour les gros profits ». La banque s’en sortit peut-être moins bien lors de la récession de 1882 ; sa direction commençait à vieillir et examinait les comptes avec moins de vigilance. La liquidation, vers le milieu des années 1880, de plusieurs grands domaines appartenant à la banque révéla que son actif avait été surévalué de beaucoup. Une étude ultérieure de la banque décrivit les années 1884 à 1887 comme ayant été « probablement les plus difficiles » de son histoire.
En juillet 1886, prétextant une mauvaise santé ainsi que la nécessité de faire place à des hommes nouveaux, McMaster démissionna de la présidence de la Banque canadienne de commerce lors de l’assemblée annuelle. Il demeura cependant au conseil d’administration et proposa un successeur en la personne de Henry W. Darling ; son départ donna lieu à une importante réorganisation des postes supérieurs. En 1887, la banque dépassait en taille la Banque des marchands du Canada et arrivait au second rang, après la Banque de Montréal. La volonté de McMaster de concurrencer les plus grosses banques canadiennes, qui avait été contestée au début par certains membres du premier conseil d’administration, fut adoptée par ses successeurs et devint le facteur déterminant de leur politique.
Son succès dans les affaires et dans la finance valut à McMaster de nombreux postes d’administrateur. Président du conseil d’administration canadien de la Great Western Railway de 1867, au plus tard, à sa dissolution en 1874, il fut, l’année suivante, le seul Canadien à être nommé au conseil d’administration anglais, lorsque les actionnaires, mécontents de la manière dont la ligne ferroviaire avait été exploitée au Canada, décidèrent de procéder à une réorganisation du chemin de fer ; il fit partie du conseil d’administration anglais jusqu’à l’achat de la ligne par le Grand Tronc en 1882. Il avait apporté une aide précieuse au chemin de fer dans ses négociations financières avec le gouvernement canadien, particulièrement dans le cas des ententes conclues en 1869 pour le remboursement des prêts consentis par le gouvernement. McMaster agit aussi en qualité de président de la Freehold Loan and Savings Company, qui devint sous sa direction très étroitement rattachée à la Banque canadienne de commerce ; il fut également le premier vice-président de l’Association d’assurance sur la vie, dite la Confédération, de sa fondation, en 1871, jusqu’en 1887. Il aida l’association, qui jouissait d’un actif de $100 000 en 1872, à se hisser, en 1885, au second rang parmi les compagnies d’assurances sur la vie possédant leur siège social au Canada. Il fit partie du premier conseil d’administration de l’Isolated Risk Fire Insurance Company (qui devait devenir en 1873 l’Isolated Risk and Farmers’ Fire Insurance Company). Il siégea pendant quelque temps au conseil d’administration de la London and Canadian Loan and Agency Company et à celui de la Toronto General Trusts Company, qui représentaient à l’époque une forme d’investissement relativement nouvelle.
Le succès que McMaster se tailla dans les affaires et la finance fut rehaussé par son œuvre au service de la communauté baptiste du Canada central en matière de religion et d’éducation. Son action subit plus ou moins l’influence du révérend Robert Alexander Fyfe*, qui desservait l’église baptiste March Street (par la suite Bond Street puis Jarvis Street), à laquelle appartenait McMaster. Comme le fit observer Daniel Edmund Thomson, contemporain de McMaster, lui-même baptiste et avocat bien connu de Toronto, McMaster avait la conviction que les baptistes étaient « un peuple élu », et il demeura au sein de cette secte, même si « sur le plan financier et social, il aurait eu tout intérêt à se joindre à un groupe religieux plus puissant et plus important en nombre ». Il y eut, sans nul doute, certains observateurs qui se demandèrent si ses « grandes visées » n’avaient pas trop souvent étouffé sa philanthropie baptiste. Thomson faisait remarquer à une autre occasion que le sénateur n’était « pas, de nature, un homme généreux » et qu’il était devenu « philanthrope sur le tard ». Même lorsque McMaster donnait des fonds à des fins charitables, ses motifs étaient quelquefois mis en doute. Il se peut que les quelques associés de McMaster qui avaient essayé en vain de contrer son ascension continue en affaires aient sympathisé avec William Davies*, propriétaire d’une conserverie de viande de Toronto, appartenant lui aussi à l’Église baptiste. Davies se plaignit en effet du « détestable » esprit de « centralisation » qui avait apparemment poussé McMaster à offrir en 1875 une somme élevée à la prestigieuse église baptiste Jarvis Street de Toronto.
Mais, indubitablement, McMaster accordait une grande importance à l’éducation. Le sénateur apporta une aide généreuse au Toronto Mechanics’ Institute. Il fit partie du « sénat » de l’University of Toronto après 1873 et défendit les intérêts des baptistes au conseil de l’Instruction publique, de 1865 à 1875, s’attirant dans ces deux fonctions les éloges d’Egerton Ryerson, surintendant de l’Éducation. Il fut également, pendant de nombreuses années, trésorier de l’Upper Canada Bible Society, organisme non confessionnel.
McMaster s’intéressa particulièrement à la formation professionnelle et pastorale des baptistes. Il semble qu’il ait été affilié à un moment donné aux Disciples du Christ, mais qu’il les quitta parce que ces derniers n’étaient pas en faveur de l’instruction du clergé. On a des preuves que McMaster accepta de participer au financement du collège Maclay, qui devait remplacer le Canada Baptist College de Montréal, lequel avait dû fermer ses portes en 1849, après avoir fait œuvre de pionnier. À la suite de l’échec du projet du collège Maclay, McMaster aida Fyfe à fonder, à Woodstock, Haut-Canada, un collège qui prendrait plus sérieusement la relève de l’école de Montréal. Le Canadian Literary Institute (rebaptisé Woodstock College en 1883), qui ouvrit ses portes en 1860, devait à la fois assurer la formation d’étudiants des deux sexes en lettres et en théologie. Lorsque l’occasion se présenta, à la fin des années 1870, de déménager le département de théologie de Woodstock à Toronto, McMaster s’empressa de la saisir. Sa décision fut en partie inspirée par sa seconde femme, Susan Fraser, née Moulton, veuve d’un homme d’affaires américain, qu’il avait épousée en 1871, trois ans après la mort de sa première femme, Mary Henderson. Susan Moulton Fraser avait été impressionnée par le travail accompli par la Northern Baptist Convention aux États-Unis et souhaitait vivement que la communauté baptiste du Canada rivalisât avec ses coreligionnaires sur le plan de l’enseignement. Une autre personne influença encore davantage sa décision, soit le révérend John Harvard Castle, pasteur américain de Mme McMaster, qui avait accepté, par l’entremise de celle-ci, d’occuper le poste de ministre à l’église baptiste Bond Street.
Un congrès spécial sur l’éducation, tenu par les baptistes en 1879, autorisa le transfert du département de théologie à Toronto, et, en moins d’un an, McMaster avait non seulement fourni un emplacement, dans la rue Bloor, mais avait assuré également une mise de fonds initiale de $100 000 et s’était engagé à fournir une contribution annuelle d’environ $14 000. Bien qu’il se montrât apparemment réticent à ce que son nom fût associé à l’édifice, on passa outre à ce souhait en donnant son nom au McMaster Hall. Il insista néanmoins pour que l’institution portât le nom de collège plutôt que l’appellation américaine de séminaire. C’est peut-être son passé britannique et l’espoir de voir certains cours de lettres s’ajouter un jour au programme de théologie qui l’amenèrent à insister autant sur ce point et qui expliquent pourquoi l’établissement prit le nom de Toronto Baptist College avant d’ouvrir ses portes aux étudiants, à l’automne de 1881.
Tout portait à croire, à un moment, que ce nouvel établissement confessionnel allait se fédérer à l’University of Toronto, et beaucoup de baptistes avaient encouragé cette alliance, pensant que l’enseignement théologique devrait relever de chaque Église tandis que celui des autres matières serait assuré par une université provinciale. Mais McMaster et quelques autres finirent par accepter l’idée d’une institution baptiste indépendante offrant à la fois des cours de théologie et un programme de lettres plus libre et plus étendu que celui qu’envisageait le projet de fédération de 1884–1885. Parmi les meneurs de cette campagne pour le maintien d’une institution séparée, on comptait Castle, président du Toronto Baptist College, et deux de ses collègues de la faculté, Malcolm MacVicar, confident de McMaster, et Theodore Harding Rand*, éminent professeur des Maritimes. Il se peut que Susan Moulton McMaster ait poussé son époux à appuyer cette campagne ou, chose encore plus probable, que lui-même en ait caressé l’idée.
Le projet fut approuvé par les congrès baptistes, et un projet de loi prévoyant la réunion du Woodstock College et du Toronto Baptist College, sous le nom de McMaster University, fut présenté à la législature ontarienne en mars 1887. Avant même l’adoption du projet de loi, le 23 avril 1887, McMaster, qui l’avait défendu devant l’Assemblée, avait rédigé un nouveau testament, daté du 7 avril, dans lequel il faisait don du gros de sa fortune, environ $900 000, à titre de dotation à la nouvelle université. À peine cinq mois plus tard, le 22 septembre 1887, il tombait malade au cours d’une réunion d’affaires concernant l’université et mourait le jour même, laissant derrière lui sa femme, une sœur et des neveux. Après sa mort, Susan Moulton McMaster fit don de la demeure familiale de la rue Bloor à l’université, qui la transforma en école de filles, baptisée Moulton College.
Tout au long des démarches visant à faire du Woodstock College une université, McMaster aurait, semble-t-il, favorisé dans le privé le choix de Toronto, siège du Toronto Baptist College, comme emplacement de la nouvelle institution. L’université s’installa effectivement, en 1888, à McMaster Hall, à Toronto, avant de déménager en 1930 à Hamilton. L’importance qu’elle devait prendre par la suite, parmi les grandes institutions universitaires canadiennes, donne une signification spéciale à l’œuvre philanthropique de McMaster, œuvre qu’il accomplit sur le tard, après s’être rendu célèbre comme banquier et homme d’affaires influent.
Nous remercions Charles M. Johnston et Wendy Cameron pour leur aide dans la préparation de cette biographie.
Baker Library, R. G. Dun & Co. credit ledger, Canada, 26 : 24, 183, 218, 237, 276 ; 27 : 215, 294.— Canadian Baptist Arch., Biog. files, J. H. Castle ; William McMaster ; Malcolm MacVicar ; T. H. Rand ; W. P. Cohoe, « The struggle for a sheepskin » ; McMaster Univ., General corr., 1 951–1 952 (H), 1 957–1 959 (T) ; G. P. Gilmour corr., personal, 1 962 ; Toronto Baptist College, Board of Trustees, Minute book, 12 avril 1881–28 avril 1887 ; Letters, 1880–1886.— Canada, Sénat, Debates, 1867–1884.— The Canadian Bank of Commerce : charter and annual reports, 1867–1907 (2 vol., Toronto, 1907), I.— [William Davies], Letters of William Davies, Toronto, 1854–61, W. S. Fox, édit. (Toronto, 1945).— Toronto Board of Trade, Annual report [...] (Toronto), 1860–1863 ; Annual review of the commerce of Toronto [...], W. S. Taylor, compil. (Toronto), 1867.— Globe, 13, 16 janv., 8 mai 1860, 23 sept. 1887.— Toronto Daily Mail, 23, 26 sept. 1887.— The Baptist year book [...] (Toronto), 1882–1886, spécialement les rapports annuels du président du Toronto Baptist College.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose), II : 286–289.— Dent, Canadian portrait gallery, III : 72–74.— Toronto directory, 1834–1885.— Careless, Brown.— Currie, Grand Trunk Railway.— Denison, Canada’s first bank.— Robert Hamilton, « The founding of McMaster University » (thèse de b.d., McMaster Univ., Hamilton, Ontario, 1938).— Hist. of Toronto and county of York, II : 102–104.— C. M. Johnston, McMaster University (2 vol., Toronto et Buffalo, N. Y., 1976–1981).— Douglas McCalla, « The Toronto wholesale trade in the 1850’s : a study of commercial attitudes and practices » (travail non publié, 1965).— McMaster University, 1890–1940 [...] (Hamilton, 1940).— Masters, Rise of Toronto.— V. Ross et Trigge, Hist. of Canadian Bank of Commerce, II.— C. B. Sissons, Egerton Ryerson, his life and letters (2 vol., Toronto et Londres, 1937–1947).— R. L. Kellock, « The Hon. William McMaster », Canadian Baptist (Midland, Ontario), 90 (1944), no 8 : 1, 4.— D. C. Masters, « Canadian bankers of the last century, I : William McMaster », Canadian Banker, 49 (1942) : 389–396.— D. E. Thomson, « William McMaster », McMaster Univ. Monthly (Toronto), 1 (1891–1892) : 97–103.
En collaboration, « McMASTER, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mcmaster_william_11F.html.
Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique:
Permalien: | http://www.biographi.ca/fr/bio/mcmaster_william_11F.html |
Auteur de l'article: | En collaboration |
Titre de l'article: | McMASTER, WILLIAM |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |