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MAGUIRE, THOMAS, prêtre catholique, vicaire général et auteur, né le 9 mai 1776 à Philadelphie, fils de John Maguire et de Margaret Swite ; décédé le 17 juillet 1854 à Québec.
Thomas Maguire était le fils d’un Irlandais catholique qui avait d’abord immigré à Philadelphie et qui, à l’instar d’autres loyalistes, s’était installé à Halifax en 1776, où il était devenu commissaire général. En 1788, peut-être déjà destiné à une carrière sacerdotale dans les missions des Maritimes, Thomas Maguire fut envoyé au petit séminaire de Québec. Un professeur signalait en 1791 qu’il était « très digne d’éloges, doué d’un esprit pénétrant », enthousiaste et diligent. En 1794, il occupait le plus haut poste étudiant de la Congrégation de la Bienheureuse-Vierge-Marie-Immaculée à titre de préfet. Apparemment, il entra au grand séminaire en 1795 et, deux ans plus tard, il fut nommé secrétaire du diocèse de Québec, important poste administratif que l’on confiait d’ordinaire à un ecclésiastique prometteur afin qu’il se familiarise avec le diocèse et son fonctionnement. Il fut ordonné prêtre le 11 octobre 1799 et, à peu près à la même époque, nommé premier vicaire de la cathédrale Notre-Dame de Québec par Mgr Pierre Denaut*. Il y apprendrait l’administration aux côtés du curé, Joseph-Octave Plessis*, récemment nommé évêque coadjuteur. Maguire devint si essentiel à Plessis que Denaut le laissa à Notre-Dame pendant six ans. Puis, en octobre 1805, il fut envoyé à Notre-Dame-de-l’Assomption (à Berthier-sur-Mer), petite paroisse de quelque 350 communiants.
En février 1806, Denaut nomma Maguire à Saint-Michel, paroisse agricole prospère située à une vingtaine de milles en aval de Québec. En plus, Maguire eut la charge de Beaumont jusqu’en 1814. Il devait desservir trois fois plus de fidèles qu’à Notre-Dame-de-l’Assomption. Quelques mois après son arrivée, un incendie ne laissa de l’église Saint-Michel que les murs mais, en faisant reconstruire à partir d’eux, Maguire put accueillir ses paroissiens dans un nouvel édifice dès le mois d’août 1807. La construction et la décoration de l’église, ornée de tableaux de Louis Dulongpré* et de William Berczy* ainsi que de toiles européennes tirées d’une collection envoyée à Québec par Philippe-Jean-Louis Desjardins*, ne furent toutefois pas achevées avant 1814 au moins. En dépit des dépenses extraordinaires de reconstruction, Maguire réussit à déclarer chaque année, de 1806 à 1817, un excédent dans le trésor de la paroisse. Il ne se montrait pas moins diligent dans ses fonctions pastorales, puisqu’il visitait ses paroissiens au moins une fois l’an, prêchait régulièrement et dénichait dans ses classes de catéchisme de jeunes candidats prometteurs à la prêtrise, tel Augustin-Norbert Morin*. Dans l’ensemble, sa paroisse était calme, et il y régnait en maître. En 1818, Edmund Burke*, nouveau vicaire apostolique de la Nouvelle-Écosse, demanda qu’on lui envoie Maguire comme coadjuteur ; des bulles furent délivrées en octobre 1819, mais Maguire les refusa.
Maguire s’intéressait à l’éducation et sentait qu’en la favorisant le clergé multiplierait les vocations. En mai 1821, Plessis le nomma au sein d’un comité mis sur pied à Québec et présidé par Joseph-François Perrault*, dont le mandat était de rédiger la constitution de la Société d’éducation de Québec. En 1822, afin de financer l’instruction des séminaristes issus de familles pauvres, il fonda avec plusieurs autres prêtres la Société pour encourager l’éducation ecclésiastique. C’est probablement lui qui, vers 1822, rédigea un mémoire qui attribuait à une éducation déficiente la médiocrité intellectuelle, le manque de civilité et le langage rude de la plupart des membres du clergé, ainsi que la perte de cette importance qui assurait au clergé son nombre « et surtout cette souveraine influence qu’ [ils étaient] à même de tourner non seulement au bien de la Religion, mais encore à l’avantage temporel de [leurs] ouailles cruellement opprimées de toutes parts ». Un programme plus riche en matières profanes attirerait les gens aisés et de professions libérales qui, déjà, glissaient vers les écoles non confessionnelles et même protestantes.
Tout au long des années 1820, Maguire fit de la polémique. Il soutint Mgr Jean-Jacques Lartigue* dans sa lutte contre les sulpiciens dans le district de Montréal. De 1814 environ jusqu’à 1824, il défendit l’idée d’un journal ecclésiastique, mais il ne parvint pas à éveiller l’intérêt du clergé. En 1827, il répliqua anonymement dans la Gazette de Québec à l’ouvrage de William Smith* paru l’année précédente, History of Canada [...], dans lequel il voyait une poursuite « des efforts combinés et constans de la prévention et de la malveillance pour dénigrer les Canadiens, déprimer leurs institutions, et jeter un nuage sur leur religion ». Sa colère contre Smith n’avait d’égale que la consternation dans laquelle le plongeait le fait que des leaders du parti canadien, comme Denis-Benjamin Viger* et Louis-Joseph Papineau*, ne faisaient pas cause commune avec lui, en dépit de « l’étroite liaison qui exist[ait] entre [les] institutions civiles et religieuses ».
Très occupé comme curé de Saint-Michel, Maguire ne pouvait pas se consacrer pleinement à ses activités éducatives et polémiques. En septembre 1827, le successeur de Plessis, l’archevêque Bernard-Claude Panet*, le nomma directeur du collège de Saint-Hyacinthe, fondé en 1809 par Antoine Girouard*. Maguire tenta de hausser les normes du collège, d’encourager les jeunes professeurs dans leurs études théologiques et d’enrichir la bibliothèque. Toutefois, à la suite de plusieurs désaccords administratifs et philosophiques avec lui, Lartigue, supérieur du collège, proposa à Panet en juillet 1828 de démettre Maguire de ses fonctions de directeur et de le nommer rédacteur en chef d’un journal ecclésiastique. « Son genre seroit d’étudier et d’écrire, pensait Lartigue ; ce qu’il pourroit faire avec avantage, s’il était dirigé par quelqu’un qui modérât la chaleur de sa tête et la vivacité de son esprit. »
Panet ne tint pas compte de cette proposition mais, en juin 1829, sur l’insistance de Lartigue, il envoya Maguire et Pierre-Antoine Tabeau* en mission à Londres et à Rome. Leurs objectifs les plus importants étaient de bloquer le transfert des biens du séminaire de Saint-Sulpice à Montréal au gouvernement colonial, opération qui avait été proposée en échange d’une pension pour les sulpiciens [V. Jean-Henry-Auguste Roux*], d’obtenir l’autorisation de délivrer des lettres patentes au collège de Saint-Hyacinthe, de négocier un mode de nomination pour les évêques coadjuteurs de Québec et de Montréal, et de décrocher l’assentiment de Londres à la création du diocèse de Montréal. Ils échouèrent à Londres, tandis qu’à Rome ils gagnèrent seulement la suspension, et non la révocation, d’une autorisation par laquelle la Propagande avait permis aux sulpiciens de transférer leurs biens.
S’arrêtant à Paris pendant son voyage de retour, au début de 1830, Maguire publia un manuel intitulé Recueil de notes diverses sur le gouvernement d’une paroisse, l’administration des sacremens [...], dont le but était de guider les jeunes prêtres dans « le labyrinthe interminable [des] coutumes [de l’Église bas-canadienne] souvent contradictoires [...] qui [faisaient] trébucher à chaque pas ». Cet ouvrage arrivait à point, car la bourgeoisie libérale avait entrepris dans de nombreuses paroisses une campagne vigoureuse en vue de miner l’influence des curés, surtout sur l’administration des fabriques. Le manuel de Maguire informait les membres du clergé de leurs droits. Pendant qu’il préparait son recueil, Maguire avait tenté de consulter les évêques du Bas-Canada, mais ses démarches avaient produit des résultats décevants et même provoqué une certaine hostilité de la part de Lartigue, qui n’aimait guère la façon dont il avait traité certains sujets. Le fait que Maguire avait publié son livre à Paris sans l’autorisation de l’archevêché de Québec accentua probablement l’inimitié entre les deux hommes. Néanmoins, le recueil de Maguire finit par devenir dans le Bas-Canada le vade-mecum de l’administration des paroisses catholiques.
Maguire et Tabeau rentrèrent au Bas-Canada en juillet 1830, et Maguire retourna à Saint-Hyacinthe. Sans tarder, il élabora un programme pour relever la désastreuse situation financière du collège. Dès juin 1831, d’après le professeur Joseph-Sabin Raymond*, Maguire avait « toutes les affaires de la maison en main » et « met[tait] les choses sur un très bon pied ». Pourtant, ses relations avec Lartigue s’étaient encore dégradées et la tension s’était accrue entre lui et les professeurs du collège, des étudiants de théologie pour la plupart. Selon Maguire, ils n’avaient pas assez de maturité et de bases théologiques pour être de bons professeurs et l’enseignement les occupait trop pour qu’ils progressent en théologie. Comme les inscriptions baissaient inexorablement et que des rumeurs persistantes annonçaient des boycottages d’élèves et des révoltes de professeurs, Lartigue démit Maguire de ses fonctions en août 1831. S’estimant victime des adversaires de ses réformes, le directeur fut humilié : « je pars le cœur navré de douleur, & Dieu sait quel en sera le résultat : la vie m’accable ».
Pour sauvegarder la dignité de Maguire, Lartigue lui offrit un poste honorable à Montréal, mais Maguire le refusa et accepta plutôt une affectation temporaire comme professeur de philosophie au séminaire de Québec. En avril 1832, il succéda à Jean-Denis Daulé comme aumônier des ursulines de Québec. Entre-temps, il collabora avec Joseph Signay*, coadjuteur de Panet, à la rédaction d’un rituel diocésain ainsi qu’à la réponse du clergé à un projet de loi déposé à la chambre d’Assemblée par le parti canadien, qui visait à réduire l’influence des ecclésiastiques dans les fabriques. En juillet 1833, il fit paraître le Clergé canadien vengé par ses ennemis [...], dans lequel il s’attaquait à l’ouvrage du littérateur français Isidore-Frédéric-Thomas Lebrun, Tableau statistique et politique des deux Canadas, publié à Paris au cours de la même année. Voyant dans cet ouvrage une tentative des libéraux canadiens d’introduire dans le Bas-Canada, par l’intermédiaire de Lebrun, le « libéralisme irréligieux, et avec lui le fanatisme révolutionnaire » français, Maguire prévenait ses concitoyens de ne pas confier les destinées de la colonie aux hommes politiques libéraux.
Lartigue était impatient de trouver un poste prestigieux à Maguire, de préférence hors du Bas-Canada, et il avait tenté en 1830 de le faire nommer coadjuteur de l’évêque de Kingston, Alexander McDonell*. Il avait prévenu Panet en septembre 1831 que le renvoi de Maguire, qui avait toutes les apparences d’une disgrâce, avait provoqué des plaintes de la part de nombreuses personnes « qui l’estim[aient] avec raison ». Panet, puis son successeur Signay, rejeta la proposition de Lartigue, qui consistait à renvoyer Maguire à Rome pour défendre les positions des évêques contre les sulpiciens, énergiquement représentés par Jean-Baptiste Thavenet*. En 1833, des rumeurs selon lesquelles Rome entendait remplacer le candidat de Signay au poste de coadjuteur, Pierre-Flavien Turgeon*, par Jean-Baptiste Saint-Germain*, prêtre allié aux sulpiciens, incita Signay à reconsidérer sa décision. Le 16 septembre 1833, il fit de Maguire son vicaire général et l’envoya au Vatican à titre de procureur afin qu’il obtienne des bulles nommant Turgeon archevêque coadjuteur de Québec et qu’il résolve d’autres problèmes.
Maguire arriva à Rome le 5 décembre 1833. Le jour, il étudiait des comptes avec Thavenet, qui était le représentant financier des communautés religieuses du Bas-Canada en Europe et avec qui il avait été autorisé par plusieurs d’entre elles à établir une vérification définitive. Les comptes se trouvaient dans un état si lamentable que les deux hommes étaient souvent en désaccord, et ils aboutirent à une impasse en mai 1834. Mais Maguire en avait vu assez pour estimer que, pendant le mandat de Thavenet, les communautés avaient perdu dans l’ensemble de 150 000 à 160 000 francs à cause de la faillite de deux grandes institutions financières européennes. La nuit, souvent à l’aide des renseignements qu’il avait glanés le jour en faisant parler Thavenet, Maguire se préparait à défendre d’autres dossiers devant les cardinaux de la Propagande. Thavenet exerçait auprès d’eux une influence considérable, mais Maguire découvrit qu’un homme important échappait à son emprise : le préfet de la Propagande, Angelo Mai. Maguire perdit presque toutes ses causes au cours des délibérations officielles des cardinaux mais, en présentant de vigoureux mémoires au pape par l’entremise de Mai, qui les défendait, il parvint à faire renverser les décisions défavorables de la Propagande. Les bulles de Turgeon furent délivrées et Maguire obtint une nouvelle suspension de l’autorisation permettant aux sulpiciens d’aliéner leurs biens. De plus, il négocia pour le choix des futurs coadjuteurs de Québec une formule qui contrecarrait les efforts tentés par les sulpiciens en vue de s’assurer une voix déterminante. Enfin, malgré l’opposition de Thavenet, il obtint des bulles qui faisaient de Tabeau l’évêque auxiliaire et le successeur de Lartigue. Maguire échoua seulement sur un point : il ne parvint pas à persuader Rome de négocier avec Londres la création du diocèse de Montréal. Pendant ses moments de liberté, Maguire visitait les environs, faisait des recherches sur l’histoire et la cartographie de l’Amérique française pour Georges-Barthélemi Faribault* et agissait à titre de représentant de Mgr McDonell.
Lartigue fit des pressions afin que Maguire demeure en permanence à Rome pour faire contrepoids à Thavenet, mais Maguire insista pour rentrer, convaincu d’avoir accompli sa mission. Il partit en décembre 1834, laissant derrière lui des mémoires sur les machinations de Thavenet et des sulpiciens. Il arriva à Montréal le 29 mai 1835. Il refusa, comme Lartigue le lui proposait, d’être adjoint administratif et vicaire général de Montréal, à la suite de la mort prématurée de Tabeau ; il accepta par contre les invitations de Signay à devenir son vicaire général et à retourner chez les ursulines comme aumônier. Il avait noué des liens étroits avec les religieuses et leurs jeunes protégées. De Rome, en 1834, il avait assuré ses « enfans du pensionnat » que, même si les écolières de là-bas lui semblaient aimables et bonnes, il « ne troquerait] pas une des [siennes] pour une demie-douzaine de celles-là ».
À titre d’aumônier, et en collaboration étroite avec la supérieure Marie-Louise McLoughlin*, dite de Saint-Henri, Maguire entreprit de secouer le marasme financier dans lequel les ursulines se trouvaient par suite d’une mauvaise administration. Il remit à jour les comptes et les registres fonciers des religieuses, de sorte qu’elles purent percevoir les loyers impayés et les autres revenus de leurs propriétés. Il entreprit plusieurs poursuites judiciaires et pressa les religieuses de faire appel à l’Assemblée pour qu’elle pousse le gouvernement à leur payer l’emplacement de la citadelle, qui, affirmait-il, valait £111 000 et avait appartenu aux ursulines. Au cours des années 1840 et au début des années 1850, il fit construire des édifices qui rapporteraient des revenus de location. Grâce à sa gestion astucieuse et résolue, les ursulines réalisèrent de 1837 à 1853 des profits totalisant £40 000. À peu près pendant la même période, elles purent ajouter trois ailes au couvent.
En outre, Maguire enrichit considérablement la vie spirituelle de la communauté. Frappé par les miracles auxquels il avait assisté en 1834 sur la tombe de sainte Philomène, dans la ville italienne de Naples, il avait fait construire l’année suivante la chapelle Sainte-Philomène, où les ursulines assisteraient désormais aux offices pendant l’hiver. Après une minutieuse étude documentaire, il relâcha leurs habitudes de jeûne afin d’écarter tout risque pour leur santé, mais il eut un débat théologique long et acerbe avec la hiérarchie pour resserrer l’observance des règles du cloître.
Les ursulines dirigeaient le principal établissement d’enseignement pour filles dans la colonie, mais pour plusieurs raisons, dont la pénurie de manuels français et de religieuses capables d’enseigner en anglais, sa popularité avait baissé auprès des parents. Le « Règlement des élèves du pensionnat des Dames ursulines de Québec », rédigé par Maguire sur l’ordre de Turgeon et de concert avec mère Saint-Henri et les religieuses enseignantes, figure parmi les mesures prises pour restaurer le prestige de l’école. Ce règlement codifiait les pratiques existantes et contenait des idées recueillies au cours de visites dans les couvents des ursulines à Lyon, en France, et à Naples, ainsi que dans les grandes écoles de Rome et de Paris. Désormais, au couvent, l’enseignement se ferait selon un certain nombre de principes fondamentaux : les classes regrouperaient des élèves d’égale force, on encouragerait la compréhension plutôt que la mémorisation, les cours seraient brefs afin de maintenir l’intérêt, on manifesterait une patience sans bornes envers les élèves peu brillantes, on ferait régner la discipline en récompensant la bonne conduite au lieu de punir la mauvaise, et les châtiments corporels seraient bannis. Le programme d’études de Maguire détermina pendant des décennies la nature de l’éducation dispensée par les ursulines aux jeunes filles de Québec et reflétait les vues de l’époque sur le rôle social des femmes. Pendant les cours d’arithmétique, les religieuses devaient « écarter [...] tout ce qui [pouvait] nourrir une curiosité, purement spéculative, pour s’attacher aux questions d’une utilité réelle, d’une pratique journalière ». Par ailleurs, l’enseignement de la musique « jet[ait] d’éclat sur l’institution ». On enseignait aussi la chimie, la physique et l’histoire naturelle, en s’en tenant à un niveau « purement élémentaire » ; la composition, la versification et la lecture à haute voix ; le français et l’anglais ; les travaux d’aiguille, la calligraphie, le dessin et la peinture. Les leçons de bienséance constituaient « une partie essentielle d’une éducation soignée ; surtout chez les personnes du sexe ».
L’histoire était un sujet de prédilection pour Maguire. Il correspondit fréquemment avec Jacques Viger sur des questions relevant de ce domaine, il acquit à Paris une collection inestimable de manuscrits concernant les ursulines et rédigea un manuscrit intéressant sur l’évolution physique du couvent de Québec. Son programme d’études prévoyait des cours d’histoire religieuse où les sujets litigieux devaient être évités, car de jeunes protestantes aussi bien que de jeunes catholiques y assistaient, mais dans les classes de catéchisme, qu’il donnait lui-même, il insistait sur des points de controverse afin de contrer l’offensive protestante qu’il percevait dans la colonie. Les cours d’histoire profane plaçaient « au premier rang l’histoire [du] Canada » et comprenaient des extraits de l’ouvrage de Joseph-François Perrault, Abrégé de l’histoire du Canada [...] (4 vol., Québec, 1832–1836).
Tout en exerçant ses activités d’aumônier, Maguire poursuivait son œuvre polémique. En 1838, il publiait Doctrine de l’Église catholique d’Irlande et de celle du Canada, sur la révolte [...], recueil de documents justifiant théologiquement la condamnation prononcée par Lartigue de la rébellion armée dans le Bas-Canada. Trois ans plus tard paraissait Manuel des difficultés les plus communes de la langue française [...], destiné aux grammar schools. Maguire y plaidait pour que le français du Bas-Canada soit conforme à celui de la France, mais sa vigoureuse dénonciation de nombreux canadianismes provoqua dans la Gazette de Québec une réplique ferme, probablement de la part de Jérôme Demers, supérieur du séminaire de Québec, qui défendait l’idée d’un français du Bas-Canada.
En dépit d’une arthrite sérieuse, Maguire demeura en bonne santé jusque dans les années 1840. Mais en 1845, il se disait « chargé d’infirmités » et, en mars 1852, comme une grippe menaçait de l’emporter, il demanda à deux ursulines de « prier fort pour [leur] vieil ami ». En décembre 1853, il légua presque tous ses biens à la mission indienne de la Saint Louis University, au Missouri, à laquelle, semble-t-il, il avait commencé de s’intéresser seulement l’année précédente. Le 17 juillet 1854, il mourut d’une inflammation pulmonaire aggravée par le choléra. Turgeon l’inhuma le lendemain sous le sanctuaire de la chapelle des ursulines.
Thomas Maguire était un faisceau de contradictions : capable d’un enthousiasme comme d’une discipline extrêmes, agité, passionné, il avait aussi de la compassion pour les autres et le don de l’analyse froide, ce qui tempérait son caractère. Malgré toute la véhémence avec laquelle Maguire avait embrassé la cause de l’Église et du peuple canadiens, Lartigue souhaitait l’évincer du Bas-Canada et le nationaliste Viger le considérait comme un étranger, tandis que les cardinaux de Rome voyaient en lui un Canadien encombrant. Une notice nécrologique le décrit comme un ecclésiastique actif, vertueux et accompli pour qui l’étude servait à démontrer que la connaissance et la vie cléricale n’étaient pas incompatibles. Faire reconnaître la nécessité sociale de l’instruction du clergé avait en effet été son principal objectif. Son influence s’étend au delà, cependant, puisqu’il prépara le triomphe des autorités ecclésiastiques sur les sulpiciens et exprima des vues sociales et politiques de plus en plus distinctes de celles de la bourgeoisie libérale canadienne et du gouvernement colonial, protestant. En tout cela, Maguire montra bien qu’il était l’un des nombreux protégés de Plessis qui, à l’instar de Jean-Baptiste Kelly, de Charles-François Painchaud* et de Jean Raimbault*, furent les architectes d’une Église plus présente, sous Mgr Ignace Bourget*, qui comblerait le vide laissé par les nationalistes libéraux après la débâcle de 1837–1838.
L’auteur tient à remercier Christiane Demers pour son aide dans la préparation de cette biographie. [j. h. l.]
Thomas Maguire est l’auteur de : « Observations d’un catholique sur l’Histoire du Canada par l’honorable William Smith », publié dans la Gazette de Québec, 11 janv. 1827 ; Recueil de notes diverses sur le gouvernement d’une paroisse, l’administration des sacremens, etc., adressées à un jeune curé de campagne, par un ancien curé du diocèse de Québec (Paris, 1830) ; le Clergé canadien vengé par ses ennemis ou Observations sur un ouvrage récent, intitulé Tableau statistique et politique des deux Canadas (Québec, 1833) ; et Manuel des difficultés les plus communes de la langue française, adapté au jeune âge, et suivi d’un recueil de locutions vicieuses (Québec, 1841). Il compila Doctrine de l’Église catholique d’Irlande et de celle du Canada, sur la révolte ; recueil de pièces constatant l’uniformité de cette doctrine dans les deux pays, et sa conformité avec celle de l’Église universelle (Québec, 1838).
AAQ, 12A, D : fo 121 ; E : fo 55 vo ; F : fo 157 ; G : fos 13, 20 ; H : fo 155 vo ; I : fo 119 vo ; K : fo 88 vo, 96, 164 vo ; L : fos 20, 93–94, 161 ; 20 A, III : 170 ; VII : 5, 32 ; 210 A, IV : 138, 157, 159, 171, 210 ; XIII : 223, 319, 424, 535 ; XIV : 13, 20, 39–40, 46–47, 60–61, 65, 189, 360, 388, 424, 444, 446, 449, 519 ; XV : 185, 346, 413, 447, 463, 465–467 ; XVI : 163, 191, 273, 461 ; XVII : 38, 47, 59, 512 ; XXIII : 429, 579–580 ; XXV : 486 ; 22 A, VI : 361 ; 1 CB, V : 115, 117, 131 ; 61 CD, Saint-Michel, I : 21, 26, 30, 32, 34 ; 69 CD, III : 165–167, 180–181 ; VII : 118–119 ; VIII : 20 ; 81 CD, I : 48, 52, 57, 59–60, 76–78, 85–86 ; III : 1 ; CD, Diocèse de Québec, I : 141 ; IV : 169 ; VI : 34 ; VII : 2, 34–36, 39, 42, 44, 47, 55–61, 65–68, 70, 72, 74, 77, 79–80, 84–85, 87–90, 92–93, 95–96, 98–99, 101–112, 116–118, 121–124, 126–127, 131–134, 136–139, 141–147, 150–153, 155–156, 159, 169 ; 10 CM, III : 155 ; IV : 80, 95–96, 127, 199, 200, 202 ; 7 CM, I : 114 ; 90 CM, I : 18 ; 312 CN, IV : 136, 138 ; 320 CN, VI : 39 ; 60 CN, I : 30 ; II : 42 ; VI : 58 ; 26 CP, III : 177, C : 139, 141 ; EJ, I : 125–127 ; U, III : 1.— ACAM, 901.017, 823-1 ; 827-1 ; 829-1, -9 ; 830-1, -5–7 ; 832-1 ; 833-1 ; 834-1–6, -8–11, -13, -15–17 ; 835-1 ; 901.028, 827-1 ; 830-2 ; RLB, I : 37 ; RLL, II : 218, 288 ; IV : 225–226, 281–282, 362–365 ; V : 34, 75, 228, 269, 306, 313, 342–343, 364, 378, 391 ; VI : 48–50, 52–53, 58, 69, 230–231 ; VII : 236, 439, 460, 491, 500, 595, 610, 703 ; VIII : 290.— AP, Saint-Michel, Cahiers de prônes, 1810–1836 ; Journal de recettes et de dépenses, 1809–1826 ; Livre de comptes, 1776–1860 ; Travaux, 1757–1872.— Arch. de la chancellerie de l’évêché de Saint-Hyacinthe (Saint-Hyacinthe, Québec), XIII, B.8, 1827–1831.— Arch. du diocèse de Saint-Jean-de-Québec (Longueuil, Québec), 1A/45 ; 5A/40, 6A/86, 117.— Arch. du monastère des ursulines (Québec), Fonds Maguire.— ASQ, Fichier des anciens ; Lettres, Y, 3 ;
James H. Lambert, « MAGUIRE, THOMAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/maguire_thomas_8F.html.
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Auteur de l'article: | James H. Lambert |
Titre de l'article: | MAGUIRE, THOMAS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |