RAIMBAULT, JEAN, prêtre catholique, professeur et administrateur scolaire, né le 3 février 1770 à Orléans, France, fils d’Étienne Raimbault, commerçant, et de Françoise Doucet ; décédé le 16 février 1841 à Nicolet, Bas-Canada.
Cadet d’une famille de quatre enfants, Jean Raimbault fait ses études classiques au collège royal d’Orléans et, en 1787, il s’inscrit au séminaire de cette ville, que dirigeaient alors les sulpiciens. « Esprit brillant » et étudiant à « la conduite irréprochable », au dire du supérieur du collège, il est admis à la tonsure le 29 mai 1789. Au lieu de prêter le serment de fidélité à la Constitution civile du clergé tel que requis par le décret de 1790, il quitte le séminaire. Il gagne sa vie à titre de précepteur avant d’être conscrit le 6 octobre 1793. En décembre, il déserte son régiment cantonné à la frontière belge et trouve asile à la Maison du refuge de Forest, séminaire fondé à Bruxelles par des évêques français en exil. De là, on l’aide à se rendre à Londres où, dès son arrivée, Mgr Jean-François de La Marche, évêque de Saint-Pol-de-Léon, en France, l’accueille et lui procure assistance. Sachant qu’il ne pourra retourner en France de sitôt, il décide d’immigrer au Canada. Grâce à François-Emmanuel Bourret, ancien directeur du séminaire d’Orléans chargé par Mgr Jean-François Hubert* de financer le transport d’une douzaine de prêtres vers Québec, il s’embarque à Portsmouth, en Angleterre, le 1er juin 1795 et arrive à Québec le 6 juillet.
Mgr Pierre Denaut*, coadjuteur de l’évêque de Québec, accueille Raimbault à son arrivée. Il l’amène à Longueuil et, le 26 juillet, lui confère le sacerdoce. Il lui confie l’enseignement de la philosophie et des sciences au petit séminaire de Québec. Forcé pour des raisons de santé d’abandonner l’enseignement en 1797, Raimbault est alors nommé vicaire à Château-Richer. En octobre 1797, Mgr Denaut, devenu évêque de Québec, lui octroie la cure de L’Ange-Gardien. En plus de ses fonctions de pasteur, Raimbault tient une école dans son presbytère, ce qui au fil des ans mine sa santé. En septembre 1805, Mgr Denaut lui donne la cure de Pointe-aux-Trembles (Montréal) dans l’espoir qu’il pourra y refaire sa santé.
Raimbault a alors 35 ans. C’est un prêtre d’Ancien Régime : frugal, généreux, opposé à toutes les formes de libéralisme, chatouilleux sur les questions de préséance et peu enclin à déléguer son autorité. On le perçoit comme « un homme de mœurs, de lettres et de goûts ». Mgr Joseph-Octave Plessis* le tient en haute estime. Il voit en lui l’homme capable d’assumer la cure de la paroisse Saint-Jean-Baptiste de Nicolet et de veiller sur le devenir du séminaire qu’il vient d’y mettre sur pied.
C’est sans grand enthousiasme que Raimbault accepte cette charge et entre, à l’automne de 1806, dans son nouveau presbytère, une maison solide mais d’apparence modeste, dont une pièce sert de salle paroissiale. Jusqu’à sa mort, il va y mener une vie routinière. Une ménagère s’occupe de la maison, un engagé cultive le lopin de terre de la fabrique et entretient la grange et l’étable. Lui-même se consacre tout entier à ses devoirs sacerdotaux, mais en gardant ses distances avec les seigneurs, la bourgeoisie locale et les curés canadiens du diocèse. Durant son mandat, Nicolet connaît un essor certain. La paroisse compte 1 200 communiants en 1810 et 2 500 en 1836. Cette croissance démographique, jointe à une dispersion de la population dans la seigneurie, alourdit au fil des ans la tâche du curé.
Raimbault est donc un homme de plus en plus occupé. Son ministère consiste à célébrer les offices liturgiques, à dispenser les sacrements, à tenir les registres de la fabrique et à s’adonner aux bonnes œuvres telles que le soin des malades et l’assistance aux indigents. Il fait montre de zèle dans l’exercice de ses fonctions. Il distribue une partie de sa dîme aux pauvres, prête de l’argent sans intérêt à des paroissiens en difficulté et se soucie de développer le sens liturgique de ses ouailles. En 1817, il achète avec ses propres deniers quelques tableaux de la collection de Louis-Joseph Desjardins, dit Desplantes, afin de créer dans son église un environnement propice à l’élévation de l’âme. Il surveille de près la conduite de ses fidèles et les agissements des protestants.
La renommée du pasteur Raimbault déborde bientôt le cadre de sa paroisse. En 1825, Mgr Plessis le nomme archiprêtre, titre qui l’habilite à conseiller ses confrères, à accorder des dispenses et à absoudre des cas réservés. À plus d’une reprise, il lui confie des missions spéciales relatives à l’érection d’une paroisse ou lui demande son avis sur des projets de loi civils ou sur des amendements à la discipline ecclésiastique. Raimbault est aussi aumônier des ursulines de Trois-Rivières et, durant quelques années, responsable de la desserte de Drummondville. À partir de 1830, le développement des écoles primaires accroît ses tâches. Il est à la fois syndic et visiteur, deux fonctions qui lui donnent la haute main sur le choix des institutrices, le contenu des programmes et la discipline. Ces activités lui laissent quand même quelques loisirs qu’il occupe à correspondre avec sa famille, à lire des ouvrages ecclésiastiques, des revues et des journaux. Il aime aussi visiter ses compatriotes, émigrés comme lui, qu’on retrouve regroupés dans des cures qui, près de Trois-Rivières, constituent une zone qu’on appelle alors « la petite France ». Il consacre le reste de son temps au séminaire dont il est le supérieur.
Dans l’esprit de Mgr Plessis, la tâche du supérieur consistait à cautionner la crédibilité du séminaire « par ses talents, sa science et sa vertu » et à superviser les orientations de cette institution. De fait, ce mandat plutôt vague permet à Raimbault de donner libre cours à son tempérament autoritaire et centralisateur. Rapidement, il en vient à s’immiscer dans tous les aspects de l’administration du séminaire. Il s’occupe de l’agrandissement des locaux de 1806 à 1809, des orientations pédagogiques, voire de l’admission et du progrès intellectuel des étudiants. Entre les directeurs successifs de l’établissement, dont Paul-Loup Archambault*, et le supérieur, les accrochages sont fréquents. Le supérieur se plaint que les prêtres du séminaire ne l’assistent pas suffisamment dans son ministère paroissial et qu’ils ne le tiennent pas toujours au courant de ce qui se passe au séminaire ; de leur côté, les directeurs lui reprochent d’outrepasser son mandat. En 1816, Mgr Plessis entreprend de stabiliser l’institution. Il nomme Joseph-Onésime Leprohon directeur et il met en marche le processus qui débouche en 1821 sur la constitution en corporation du séminaire. C’est l’occasion d’une certaine clarification des fonctions. L’évêque garde la haute main sur le séminaire. Il rédige les instructions du directeur et de l’économe de même que le règlement des élèves, mais se réserve toutefois d’autoriser les projets d’expansion. Le supérieur s’occupe sur place des travaux de construction et supervise la vie intellectuelle, spirituelle et matérielle de l’institution. Le directeur s’occupe de l’application des règlements, du contenu des études et de l’acquisition des équipements scolaires, et doit, tout comme l’économe, faire rapport au supérieur. Durant 25 ans, c’est le tandem Raimbault-Leprohon qui dirige le séminaire. De 1825 à 1830, ils procèdent à la construction d’un nouvel édifice, haut de trois étages et recouvert d’un toit à lucarnes, dont les plans sont de Jérôme Demers*. Par la suite, ils se soucient de doter le séminaire d’un corps professoral et d’un esprit propres à former une élite cléricale et laïque au service de l’Église.
Jean Raimbault meurt le 16 février 1841 en laissant le souvenir d’un pasteur zélé et d’un éducateur dévoué. Il lègue tous ses biens à son ami Leprohon, qui le remplace à sa cure, afin qu’il en fasse bénéficier les jeunes qui fréquentent le séminaire.
Les éléments factuels de cette biographie sont tirés de Louis Martin, « Jean Raimbault, curé à Nicolet de 1806 à 1841 » (thèse de m.a., univ. de Montréal, 1977).
AAQ, 210 A, II-IV, X-XVII.— ANQ-MBF, CE1-13, 19 févr. 1841.— AP, Saint-Jean-Baptiste (Nicolet), Livres des délibérations de la fabrique, 1734–1822 ; Livres de comptes, 1734–1822.— Arch. de l’évêché de Nicolet (Nicolet), Cartable Saint-Jean-Baptiste de Nicolet, corr. Jean Raimbault.— ASN, AO, Polygraphie, I-IV.— Bellemare, Hist. de Nicolet.— [L.-É. Bois], Étude biographique sur M. Jean Raimbault, archiprêtre, curé de Nicolet, etc. (Québec, 1869).— Douville, Hist. du collège-séminaire de Nicolet.— Claude Lessard, « l’Histoire de l’éducation au séminaire de Nicolet, 1803–1863 » (thèse de d.e.s., univ. Laval, 1963).
En collaboration, « RAIMBAULT, JEAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/raimbault_jean_7F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
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Date de consultation: | 1 décembre 2024 |