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FitzROY, sir CHARLES AUGUSTUS, officier et administrateur colonial, né le 10 juin 1796 en Angleterre, fils aîné du général lord Charles FitzRoy (deuxième fils du 3e duc de Grafton) et de Frances Mundy, qui mourut un an après la naissance de Charles Augustus ; le 11 mars 1820, il épousa lady Mary Lennox (décédée en 1847), fille aînée du 4e duc de Richmond et Lennox [Lennox*] et de Charlotte Gordon, fille du 4e duc de Gordon, et ils eurent trois fils et une fille, puis en secondes noces, le 11 décembre 1855, Margaret Gordon Hawkey, née Milligan ; décédé le 16 février 1858 à Londres.
Charles Augustus FitzRoy étudia à Harrow et, en avril 1812, on lui acheta un brevet d’enseigne dans les Royal Horse Guards. Après avoir été promu au grade de lieutenant en octobre 1812, il servit à Waterloo (Belgique), puis accompagna le duc de Richmond au Canada en 1818. Issu d’une famille de ducs, FitzRoy, en épousant la fille du duc de Richmond, lady Mary Lennox, en mars 1820, s’allia à deux autres familles ducales. Le mois suivant, il devint capitaine et, en juin 1825, major, mais par la suite on le mit à la demi-solde. En octobre 1825, il était nommé lieutenant-colonel et envoyé à la colonie du Cap (Afrique du Sud) à titre d’adjudant général adjoint des forces armées. Il exerça également d’autres fonctions peu importantes dans cette colonie et fut quelque temps rédacteur en chef de la Cape of Good Hope Government Gazette (Le Cap). Il aimait l’Afrique du Sud, mais il y contracta d’énormes dettes une fois son poste d’adjudant général adjoint aboli. En 1831, il retourna en Angleterre et fut élu député de Bury St Edmunds à la chambre des Communes, siège que son père avait occupé et qui était le fief électoral du duc de Grafton. Mis à part le fait d’avoir voté pour le Reform Bill de 1832, FitzRoy semble ne pas avoir joué un rôle important en politique ; il abandonna son poste de député cette année-là, son siège étant réclamé pour son beau-frère. Il quitta l’armée en 1833, vendant probablement son brevet pour payer ses dettes, et attendit que les gens influents de son entourage lui trouvent un emploi. Grâce à leur concours, il fut nommé, le 19 mars 1837, lieutenant-gouverneur de l’Île-du-Prince-Édouard. Avant son départ, il fut fait membre du Royal Hanoverian Guelphic Order (section civile) et créé chevalier par Guillaume IV au St Jame’s Palace.
Le 25 juin 1837, FitzRoy arriva à l’Île-du-Prince-Édouard et prit la direction du gouvernement des mains de l’administrateur George Wright*. L’île avait connu avant sa venue une certaine agitation, provoquée par un mouvement populaire exigeant la confiscation par la couronne des grandes propriétés domaniales, dont l’origine remontait au début de la colonie. Bien que FitzRoy ait été au courant, les dépêches de son prédécesseur, sir John Harvey, l’avaient amené à croire que l’agitation était en train de se calmer. Il perdit bientôt ses illusions. Dans certaines parties de l’île, il était en effet de plus en plus difficile de percevoir les redevances. La situation était particulièrement inquiétante dans le nord du comté de Kings. Pendant l’été de 1837, on empêcha à deux reprises le shérif de saisir la propriété de locataires récalcitrants et il fut « chassé par un groupe de personnes armées, qui mutilèrent cruellement ses chevaux ». La nouvelle de cet incident parvint aux oreilles de FitzRoy pendant qu’il effectuait une longue tournée de l’île, et celui-ci se rendit rapidement à Bear River dans le comté de Kings où il reçut une pétition adressée par une grande assemblée publique qui recommandait l’escheat.
La réponse de FitzRoy était prévisible. Descendant d’une des grandes familles aristocratiques d’Angleterre, bien qu’il n’en ait été qu’un parent pauvre, il s’éleva contre l’escheat en se fondant « sur le principe général du droit garanti de toute propriété ». L’Assemblée de l’époque, qui siégea en janvier 1838, s’opposait à l’application généralisée de l’escheat, et FitzRoy réitéra, dans son discours inaugural comme dans son discours de clôture, son opposition à toute mesure qui menaçait de déposséder les propriétaires de leurs terres. Harvey avait caressé l’idée d’établir un tribunal pour examiner les titres des propriétaires, mais FitzRoy rejeta cette proposition parce qu’elle « aurait fait naître des espoirs qui ne pourraient jamais se réaliser et aurait augmenté ainsi le mécontentement ». Il appuya vigoureusement une loi électorale révisée, votée en 1838, divisant les comtés en plus petites circonscriptions et augmentant le nombre de sièges, car il espérait que cette loi contrarierait le parti de l’escheat. Mais ce parti remporta une victoire décisive aux élections de 1838, raflant 18 des 24 sièges de l’Assemblée, et son chef, William Cooper*, fut élu président de la chambre. Tout en maintenant de bonnes relations avec la nouvelle Assemblée, FitzRoy travailla assidûment dans les coulisses à ébranler le parti de l’escheat. Lorsque Cooper alla à Londres présenter une pétition au ministère des Colonies en 1839, FitzRoy fit en sorte qu’elle soit rejetée « de façon catégorique ». En mars 1839, il divisa le conseil nommé en un conseil législatif et un conseil exécutif, et il choisit pour chacun d’eux un certain nombre de personnes qui n’étaient pas associées au family compact de l’île, tout en s’assurant que les deux conseils soient formés de membres opposés à l’escheat. Pendant les trois années qui suivirent, presque toutes les mesures votées par l’Assemblée se heurtèrent à l’opposition du Conseil législatif ou furent altérées jusqu’à devenir méconnaissables. FitzRoy, en homme astucieux, nomma également au Conseil législatif « le seul homme instruit » parmi les partisans de Cooper, Charles Young, l’évinçant ainsi de l’Assemblée et limitant son efficacité en tant que défenseur de l’escheat. En partie à cause des agissements de FitzRoy, le parti de l’escheat s’effondra aux élections de 1842.
Ce serait toutefois une erreur de croire que FitzRoy cherchait uniquement à protéger les intérêts des propriétaires terriens. Il condamna fréquemment la « politique malheureuse » qui abandonnait l’île entière aux propriétaires et comprit peut-être plus clairement que tous les gouverneurs de cette période les problèmes des fermiers à bail. Il fit remarquer que, bien que les loyers aient pu être plus élevés en Angleterre, « ce loyer pes[ait] plus lourdement sur le fermier à bail dans l’île », puisque « seul le travail des colons donne de la valeur à la terre inculte ». La Royal Gazette de Charlottetown, reflétant les aspirations de l’élite de la colonie, saluait FitzRoy comme l’homme qui « n’allait point être influencé par la crainte ou le favoritisme, ou par aucun des propriétaires » et prévoyait que « par l’entremise de sa propre famille et de ses relations », il serait capable d’agir au ministère des Colonies comme contrepoids aux grands propriétaires absentéistes. FitzRoy fit de son mieux pour se montrer à la hauteur de ces espérances. En octobre 1837, peu après la réunion de Bear River, il envoya une circulaire aux propriétaires, les accusant de ne pas offrir des baux à plus long terme et des loyers plus bas à leurs locataires. La lettre, publiée sans l’approbation de FitzRoy dans la Royal Gazette, souleva une tempête de protestations chez les propriétaires. Mais FitzRoy ne battit pas en retraite et persuada finalement un certain nombre de propriétaires qu’il était dans leur intérêt de traiter leurs locataires avec plus d’indulgence. Lorsque les propriétaires revendiquèrent les réserves de pêche rattachées aux terres en bordure des côtes, il insista pour que ces réserves soient ouvertes au public. En 1837, le projet de loi sur l’évaluation foncière, destiné à encourager le peuplement et à recueillir des fonds pour la colonie, souleva l’opposition de la Prince Edward Island Association, qui représentait plusieurs propriétaires absentéistes de Grande-Bretagne. Néanmoins, en 1838, avec l’aide de lord Durham [Lambton*], FitzRoy persuada le ministère des Colonies de permettre l’entrée en vigueur de la loi et reprocha à ses supérieurs à Londres de retarder sa mise en application. L’année suivante, il proposa même un prêt impérial pour permettre au gouvernement de la colonie d’acheter des domaines non exploités ainsi qu’une lourde taxe pénale sur les terres non cultivées pour forcer les propriétaires à vendre. Aucune de ces suggestions ne fut jugée acceptable par le secrétaire d’État aux Colonies, lord John Russell.
Les actions de FitzRoy, notamment sa lettre circulaire envoyée en 1837, ont pu sans doute à court terme encourager le mouvement en faveur de l’escheat, comme le prétendirent plusieurs propriétaires et leurs agents. Mais à la longue, ses efforts en vue d’améliorer les conditions de travail des cultivateurs à bail contribuèrent à désamorcer une situation potentiellement explosive. L’escheat, comme le maintenait FitzRoy, était une cause « désespérée » parce qu’elle préconisait une mesure que le gouvernement britannique n’approuverait jamais. En incitant leurs partisans à retenir le paiement de leur loyer et à résister à la mise en vigueur de la loi, les leaders du mouvement en faveur de l’escheat, conscients ou non des conséquences de leur geste, encourageaient de fait un affrontement avec le gouvernement. Heureusement, FitzRoy agit avec prudence. Tout en insistant sur le fait que la « loyauté impliqu[ait] le respect des lois et [que] la résistance violente [était] un acte de rébellion », et tout en augmentant les effectifs de la garnison provinciale, il avertit les propriétaires dans sa circulaire de ne pas « s’attendre à ce que, dans les coins les plus reculés de l’île, le gouvernement puisse intervenir en tout temps et en toute occasion avec une force armée pour soutenir [leurs] représentants ».
La violence était sur le point d’éclater à l’Île-du-Prince-Édouard en 1838, mais FitzRoy ne réagit pas avec excès. Bien qu’il ait été résolu à faire en sorte que la loi soit « rapidement et dûment respectée », il n’utilisa que le minimum de force nécessaire pour maintenir l’ordre. Dans une certaine mesure, FitzRoy agissait simplement comme un représentant astucieux de la classe des propriétaires terriens, maintenant le statu quo en se servant avec circonspection de son autorité et en tempérant la force par la bienveillance. Mais ce serait trop vite le juger que de ne pas tenir compte de sa compassion. FitzRoy, qui fut le lieutenant-gouverneur le plus aristocratique à être envoyé à l’Île-du-Prince-Édouard, manifesta clairement son peu de sympathie à l’égard des propriétaires qui semblaient considérer leurs propriétés uniquement comme un investissement et qui refusaient de s’acquitter des obligations sociales qui, pour un vrai descendant de l’aristocratie, allaient de pair avec la propriété d’un domaine. Sa sympathie à l’endroit des locataires était sincère : il était motivé par l’altruisme ou, tout au moins, par un paternalisme bien ancré ainsi que par l’intérêt. De plus, sa compassion s’étendait à la personne comme aux groupes dans le besoin, tels les Indiens, dont la survie était menacée [V. Thomas Irwin*]. Parce qu’il était soucieux de convaincre les habitants de l’Ile-du-Prince-Édouard que « la couronne s’intéress[ait] à leur bien-être », la violence dans la colonie demeura un phénomène localisé, dirigé contre les agents fonciers et les propriétaires plutôt que contre le gouvernement. La popularité personnelle de FitzRoy ne décrut jamais, particulièrement parmi l’élite résidant dans l’île. Bien des membres de cette élite, quoique opposés à l’escheat, partageaient le dédain de FitzRoy à l’égard des propriétaires qui n’avaient pas établi de colons sur leurs terres et qui souhaitaient ne pas avoirs à contribuer au progrès de la colonie. FitzRoy comptait en particulier sur l’appui et les conseils de fonctionnaires tels que Thomas Heath Haviland* et Robert Hodgson*, dont il favorisa les demandes d’avancement.
En récompense de ses bons services, FitzRoy fut nommé lieutenant-gouverneur des îles Leeward et partit pour Antigua le 28 septembre 1841, confiant à George Wright l’administration de la colonie jusqu’à l’arrivée de sir Henry Vere Huntley*. À l’Île-du-Prince-Édouard, FitzRoy, qui avait fait la belle vie mais avait souffert d’un manque de revenus, s’était plaint amèrement de l’insuffisance de son salaire et s’était à nouveau endetté ; dans les îles Leeward, où son salaire était plus substantiel et ses dépenses moins grandes, il put toutefois rembourser ses créanciers. Le secrétaire d’État aux Colonies, lord Stanley, lui offrit en 1845 le poste de gouverneur de la Nouvelle-Galles du Sud (Australie), qu’il assuma en août 1846. Le 7 décembre 1847, la femme de FitzRoy, qui avait été une épouse parfaite pour le lieutenant-gouverneur de l’Île-du-Prince-Édouard, dirigeant sa résidence et participant à des œuvres charitables au sein de la communauté, fut tuée dans un accident de voiture, alors que son mari conduisait. Après la mort de sa femme, FitzRoy se fit une réputation de coureur de jupons, devint l’objet de constants commérages et semble avoir perdu une partie de sa vitalité en tant qu’administrateur. Néanmoins, en 1851, il devint le premier gouverneur général des colonies australiennes et, en 1854, il fut nommé chevalier commandeur de l’ordre du Bain. Il retourna en Angleterre en 1855 et épousa le 11 décembre à Londres la veuve d’un agent foncier australien, Margaret Gordon Hawkey. Il mourut à Londres le 16 février 1858.
En Australie, Charles Augustus FitzRoy avait parrainé un bon nombre de projets importants. Il était un conciliateur efficace et un administrateur compétent, mais le secrétaire d’État aux Colonies, lord Grey, s’opposa à plusieurs de ses décisions et le décrivit comme « un gouverneur des plus incompétents dans une colonie aussi importante ». On ne peut pas dire qu’il fut un gouverneur remarquable, si on le compare à son successeur, sir William Thomas Denison, et on le taxa souvent par ailleurs d’aristocrate oisif. Ce jugement est injuste, comme l’est celui de James Stephen, sous-secrétaire d’État aux Colonies, qui compara FitzRoy à son ancêtre, Charles II, auquel apparemment il ressemblait physiquement de façon troublante : « indolent, de bonne humeur, plutôt charmant et à qui on reconnaissait aisément du talent ». L’historien John M. Ward en est venu à la conclusion que FitzRoy était « au moins l’égal de n’importe lequel gouverneur australien de son époque » ; on peut dire de lui la même chose et même davantage en ce qui concerne sa carrière antérieure à l’Île-du-Prince-Édouard.
APC, MG 24, A 17, sér. ii, 3 : fos 384–387, 477–487 ; 4 : fos 1371–1378 ; B13, 1 : fos 1286–1339.— PRO, CO 226/54–62 ; 227/8 ; 229/9–10 ; WO 25/758 : 125.— Australie, Parl., Historical records of Australia (sér. 1, 26 vol., Sydney, 1914–1925), 25 : ix–xiv ; 26 : v–xvii.— Royal Gazette (Charlottetown), juin 1837–sept. 1841.— ADB.— Boase, Modern English biog., 1 : 1063.— Burke’s peerage (1967), 1076.— DNB.— Dictionary of South African biography, W. J. de Kock et al., édit. (4 vol. parus, Pretoria, Afrique du Sud, 1968- ), 2 : 238–239.— Canada’s smallest prov. (Bolger), 107–114.— S. G. Foster, Colonial improver : Edward Deas Thomson, 1800–1879 (Melbourne, Australie, 1978), 84–106.— J. M. Ward, Earl Grey and the Australian colonies, 1846–1857 ; a study of self-government and self-interest (Melbourne, [1958]), 281.— T. J. Barron et K. J. Cable, « The diary of James Stephen, 1846 », Hist. Studies (Melbourne), 13 (1969) : 518.
Phillip Buckner, « FitzROY, sir CHARLES AUGUSTUS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/fitzroy_charles_augustus_8F.html.
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Auteur de l'article: | Phillip Buckner |
Titre de l'article: | FitzROY, sir CHARLES AUGUSTUS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |