BOSCAWEN, EDWARD, officier de marine, parfois surnommé « Wry-necked Dick » (Dick au cou tordu) à cause de son habitude de pencher la tête d’un côté, mieux connu sous le nom de « Old Dreadnought » (vieil intrépide), né le 19 août 1711, fils de Hugh Boscawen, 1er vicomte Falmouth, et de Charlotte Godfrey ; il épousa Frances Evelyn-Glanville le 11 décembre 1742 ; décédé le 10 janvier 1761 à Hatchland’s Park, dans le comté de Surrey, en Angleterre. Les Boscawen appartenaient à une vieille famille dont le nom provenait de leur lieu de résidence à Cornwall, Boscawen Ros ou la vallée des sureaux. La grand-mère maternelle d’Edward était la célèbre sœur du duc de Marlborough, Arabella Churchill.

Edward Boscawen s’engagea dans la marine comme volontaire sur le Superbe, navire de 60 canons, le 3 avril 1726 ; il devint midshipman 19 mois plus tard, alors qu’il se trouvait en service aux Antilles. À l’exception des deux ans et demi qu’il passa sur le Superbe, c’est dans les eaux territoriales anglaises et sur la Méditerranée qu’il fit son apprentissage. Il fut élevé au rang de lieutenant en 1732 et reçut le commandement du Leopard, vaisseau armé de 20 canons, le 12 mars 1737.

Il servait aux Antilles comme commandant du Shoreham, navire de 20 canons, lorsque la guerre éclata en 1739. Il se révéla aussitôt un chef courageux, ne craignant pas de passer à l’offensive. Son action remarquable durant le siège des forteresses espagnoles de Porto Bello, à Panama, et de Carthagène, en Colombie, motiva peut-être sa nomination comme commandant du Prince Frederick, de 60 canons. C’est sur ce bateau qu’il quitta définitivement les Antilles en mai 1742. On le nomma contre-amiral de l’escadre bleue, le 15 juillet 1747, en hommage à sa brillante carrière. Blessé au cours de la bataille victorieuse contre la flotte française au large du cap Finisterre, en Espagne, le 3 mai 1747, il put se remettre à temps pour assumer à l’automne la charge à la fois extraordinaire et délicate de commandant en chef d’une expédition en Inde. Même si le siège du fort français de Pondichéry en 1748 aboutit à un échec, Boscawen en retira une expérience précieuse pour sa mission à Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton), en 1758.

Le 12 mai 1749, Boscawen passait au rang de contre-amiral de l’escadre blanche. À son retour de l’Orient en avril 1750, il demeura en Angleterre durant les cinq années qui suivirent. En tant que membre du conseil de l’amirauté, poste qu’il obtint en 1751, il était intimement associé à la politique et aux affaires de la marine. Le 4 février 1755, on le nommait vice-amiral de l’escadre bleue et on lui confiait le commandement d’une escadre en lui donnant l’ordre secret d’intercepter tous les renforts français « qui pouvaient gêner et compromettre la sécurité des colonies anglaises » en Amérique. Comme la guerre n’avait pas encore été officiellement déclarée, une provocation aussi consciente pouvait engendrer des situations aussi imprévisibles qu’explosives. C’est dans des conditions nettement défavorables que Boscawen dut faire face à cette éventualité. Sa flotte avait été rassemblée à la hâte et ses équipages étaient formés d’hommes ramassés dans les rues, les sergents recruteurs n’ayant pas trouvé suffisamment de marins qualifiés. Au large de Louisbourg, dans des eaux qui ne lui étaient pas familières, il fut aux prises avec les brouillards et « les îles de glaces flottantes dont l’aspect lugubre avait de quoi terrifier le marin le plus hardi ». À part deux vaisseaux, tous les navires français commandés par le comte Dubois de La Motte [Cahideuc] échappèrent à l’escadre britannique. Le typhus faisait tant de morts et d’invalides sur les bateaux de Boscawen qu’il dut faire voile vers Halifax.

Arrivé à Halifax le 9 juillet 1755, il était inévitable qu’il jouât un rôle dans la déportation des Acadiens de la Nouvelle-Écosse. Accompagné de son commandant en second, le contre-amiral Savage Mostyn, Boscawen assista à l’assemblée du conseil du 28 juillet 1755 au cours de laquelle le gouverneur Charles Lawrence fit approuver la déportation des habitants français de la Nouvelle-Écosse. En qualité de commandant en chef et de lord commissaire de l’amirauté possédant des relations influentes, Boscawen, par sa seule présence, ne pouvait manquer d’exercer une certaine influence sur les délibérations. Après que la décision fut prise, la déportation des Acadiens tomba sous la responsabilité de l’armée et de la marine ; plusieurs des capitaines qui se trouvaient sous les ordres de Boscawen, y compris John Rous, y prirent part.

Malgré ce prologue peu héroïque, Boscawen fut acclamé à son retour en Angleterre comme « le sauveur de l’Amérique ». Il fut promu vice-amiral de l’escadre blanche en 1756 et vice-amiral de l’escadre rouge, l’année suivante. Il fut le seul membre du conseil de l’amirauté à conserver son poste lors de la démission du gouvernement de Newcastle en 1756. À titre de commandant en chef à Portsmouth, il dut signer l’ordre d’exécuter l’amiral Byng. Il fut appelé à commander les forces navales chargées du blocus au large de Brest en 1757 et fut fait commandant en second à l’arrivée de l’amiral Edward Hawke.

En 1758, Boscawen fut désigné par Pitt pour prendre le commandement des forces navales réunies en vue de l’attaque contre Louisbourg. Il était promu amiral de l’escadre bleue le 8 février et s’embarquait pour la Nouvelle-Écosse le 19 février. Retardée par le mauvais temps, la flotte n’arriva à Halifax que le 9 mai. On a minimisé le rôle de Boscawen dans la prise de Louisbourg, prétendant qu’il s’était limité à fournir les troupes de couverture dans une opération purement militaire. Sa participation fut en réalité beaucoup plus importante. Il élabora avec James Wolfe et Charles Lawrence le premier plan d’attaque, qui allait être modifié par le commandant de l’armée, Jeffery Amherst*, et prépara les troupes au débarquement par de bons exercices. Il prit la décision de faire débarquer les troupes britanniques et leur prêta main forte en faisant feu de ses vaisseaux. Durant le siège, ainsi qu’il avait appris à le faire à Pondichéry en 1748, il fournit des hommes et de l’équipement pour venir en aide à l’infanterie et soulager les forces terrestres de tâches encombrantes. Il débarqua au moins 4 canons de 32 livres, environ 12 de 24 livres, et plusieurs de 6 livres pour appuyer les opérations terrestres. Des canonniers, des sapeurs, des menuisiers et des pionniers quittèrent leurs vaisseaux pour participer au siège. Boscawen trouva même dans son escadre 188 mineurs prêts à creuser des tranchées.

Le 25 juillet, les capitaines John Laforey et George Balfour, sous les ordres de Boscawen réussirent à capturer les deux derniers navires français du port de Louisbourg qui étaient encore en état de livrer bataille. Le 26 juillet, alors que Boscawen venait de persuader Amherst d’engager le combat à la fois sur terre et sur mer, le commandant Augustin de Drucour [Boschenry] capitula. Comme en 1745, ce fut par des opérations combinées de la marine et de l’armée qu’on réduisit la garnison française.

Puisque la saison trop avancée les empêchait d’attaquer Québec, Boscawen rentra en Angleterre après avoir désigné Philip Durell à sa succession comme officier supérieur à Halifax. Boscawen passa le reste de sa carrière en Méditerranée et comme commandant de l’escadre de l’Ouest chargée de patrouiller l’entrée occidentale de la Manche. En 1759, il anéantissait la flotte française dans la baie de Lagos, au Portugal, victoire pour laquelle il est le plus souvent cité. En 1760, malgré un temps abominable, il réussissait à maintenir l’escadre de l’Ouest à son poste. Épuisé par des états de service difficiles et ininterrompus dans la marine, il contracta en décembre 1760 une fièvre qui l’emporta. Il mourut dans la maison qu’il venait de se faire bâtir à Hatchland’s Park, dans le comté de Surrey. Il laissait sa femme, dont les lettres contiennent un récit charmant de leur vie matrimoniale, et cinq enfants.

Boscawen savait susciter la loyauté chez ses subordonnés ; il était doué d’une imagination fertile et savait parfaitement tirer profit des connaissances de ses subalternes, comme il l’a démontré en particulier dans les campagnes de Pondichéry et de Louisbourg. Comme Nelson, il possédait un esprit d’offensive à la guerre et un rare souci du bien-être des simples matelots. Comme le souligne l’épitaphe affectueuse de sa femme inscrite sur sa tombe à l’église St Michael Penkivel à Cornwall, « il savait allier aux plus hauts gestes de grandeur militaire les actes de bienveillance les plus délicats ».

W. A. B. Douglas

PRO, Adm. 1/480, ff.627, 663 ; 1/481, f.41 ; 1/482 ; 50/3, Boscawen’s journals, 1755, 1758 ; CO 325.— C. F. Aspinall Oglander, Admirals wife, being the life and letters of the Hon. Mrs. Edward Boscawen from 1719 to 1761 [...] (Londres, 1940).— Boscawen’s letters to his wife, 1755–56, p. K. Kemp, édit., The Naval Miscellany (« Navy Records Society publ.», XCII, Londres, 1952), IV.— N.SArchives, I.— Charnock, Biographia navalis, IV.— DNB.— Commissioned sea officers, 16601815.— JS. Corbett, England in the Seven YearsWar : a study in combined strategy (2e., 2 vol., Londres, 1918), I.— Gipson, British empire before the American revolution, VI.— G. S. Graham, British intervention in defence of the American colonies, 1748–1756 (thèse de ph.d., université de Londres, 1969), 309.— G. S. Graham, Empire of the north Atlantic : the maritime struggle for North America (Londres, Toronto, 1950).— McLennan, Louisbourg.— H. W. Richmond, The navy in the war of 1739–48 (3 vol., Cambridge, 1920), I, III – J. M. Hitsman et C. C. J. Bond, The assault landing at Louisbourg, 1758, CHR, XXXV (1954) : 314–330.

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W. A. B. Douglas, « BOSCAWEN, EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/boscawen_edward_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
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