HÉBERT, LOUIS-PHILIPPE (il signa aussi Philippe), dessinateur, sculpteur et professeur, né le 27 janvier 1850 à Sainte-Sophie-d’Halifax (Sainte-Sophie-de-Mégantic, Québec), troisième des 13 enfants de Théophile Hébert, cultivateur, et de Julie Bourgeois ; le 26 mai 1879, il épousa à Montréal Maria Roy, nièce de l’architecte Victor Roy, et ils eurent huit enfants, dont Henri*, sculpteur, et Adrien*, peintre ; décédé le 13 juin 1917 à Westmount, Québec, et inhumé le 16 au cimetière Notre-Dame-des-Neiges, à Montréal.

Dès l’enfance, rien ne passionne autant Louis-Philippe Hébert que de sculpter des chevaux de bois ou des personnages sortis de son imagination. Entre l’âge de 6 et 13 ans, il fréquente l’école de façon intermittente, puis il travaille tour à tour au magasin général d’un de ses oncles, à la ferme familiale et pour le chemin de fer du Grand Tronc. À la fin de septembre 1869, Louis-Philippe quitte sa famille et le Canada pour Rome avec le cinquième détachement des zouaves pontificaux [V. Édouard-André Barnard* ; Ignace Bourget*]. Il profite de son séjour de 11 mois dans la Ville éternelle pour visiter les musées, les églises et les différents autres monuments « qui se rencontrent à chaque pas dans cette ville des Arts ». Il écrira plus tard dans son autobiographie : « Si la vue de toutes ces merveilles ravivait mes aspirations vers le beau, aiguisait mon désir de faire de la sculpture, elle me décourageait souvent. Toutes ces belles œuvres me semblaient comme des défis jetés à mon impuissance. » De retour à Sainte-Sophie-d’Halifax à l’automne de 1870, le jeune homme s’essaie à l’agriculture, puis décide d’aller aux États-Unis apprendre l’anglais. Quelques mois plus tard, il revient chez lui et s’improvise vendeur itinérant, sans grand succès semble-t-il, puisqu’il retourne sur la terre de ses parents peu après.

C’est en 1872 ou en 1873 que, durant un bref séjour à Bécancour, Hébert s’initie à la sculpture sur bois auprès d’Adolphe Rho*, « homme honorable, ingénieux, très adroit, malheureusement sans études et mal entouré », comme le rapportera Hébert, qui « visait plus haut ». Son premier véritable apprentissage artistique, il le devra à Napoléon Bourassa, l’un des artistes montréalais les plus polyvalents et les plus en vue à l’époque. Celui-ci, qui a remarqué à l’Exposition provinciale de Montréal tenue à l’automne de 1873 un petit buste qu’il a exécuté, décide de le prendre comme apprenti « pour en faire un Phidias en chair et en os ». Les premières des six années qu’Hébert passe chez Bourassa sont principalement consacrées à l’apprentissage du dessin et du modelage, tant à l’atelier du maître, situé rue Sainte-Julie à Montréal, qu’à l’école du Conseil des arts et manufactures de la province de Québec où, par ailleurs, dès l’automne de 1875, Hébert se voit confier un cours de dessin à main levée. C’est à la même époque que, selon les plans et sous la direction de Bourassa, commence la réalisation du décor intérieur de la chapelle Notre-Dame-de-Lourdes à Montréal, à laquelle sera étroitement associé Hébert. Dès le printemps de 1876, ce dernier s’annonce dans les journaux en tant qu’« artiste, sculpteur, dessinateur, exécutant statues, bustes originaux, portraits au crayon ». Au printemps de 1879, les deux hommes travaillent ensemble à la maquette d’un monument à Paul de Chomedey* de Maisonneuve.

À la fin de l’été de 1879, de retour d’un bref séjour aux États-Unis à la recherche de contrats, Hébert se lance à son compte. Il partagera pendant quelques années un atelier avec Bourassa. C’est à la fin de 1879 que s’amorce sa fructueuse collaboration avec le prêtre-architecte Georges Bouillon*, qui lui commandera une soixantaine d’œuvres sur bois pour le décor du chœur de la cathédrale Notre-Dame d’Ottawa. Entrés respectivement à l’atelier d’Hébert en 1881 et en 1882, les sculpteurs Olindo Gratton* et Philippe Laperle collaboreront de très près à cet ensemble monumental, dont Hébert recevra le paiement final en février 1887.

L’année 1880 s’avère particulièrement importante dans la carrière d’Hébert. Non seulement est-il nommé membre associé de la nouvelle Académie royale des arts du Canada [V. John George Edward Henry Douglas Sutherland Campbell ; Lucius Richard O’Brien*] ais c’est également à ce moment qu’il reçoit la première commande d’un monument commémoratif en bronze dédié à Charles-Michel d’Irumberry* de Salaberry et inauguré à Châteauguay le 7 juin 1881. Dans son compte rendu de l’événement, le rédacteur du journal la Minerve (Montréal) souligne : « C’est la première fois qu’une statue représentant un personnage d’illustration purement canadienne est érigée sur une place publique, et cela à l’aide d’une souscription nationale. » En 1882, le gouvernement canadien lance un concours international pour l’érection d’un monument dédié à sir George-Étienne Cartier*, le tout premier destiné à la colline parlementaire à Ottawa. Pas moins d’une vingtaine d’artistes originaires du Canada, des États-Unis et d’Europe font parvenir des maquettes, et c’est celle d’Hébert qui est retenue. L’inauguration du monument, qui a lieu en janvier 1885, est suivie, en septembre de la même année, par celle du monument à Mgr Joseph-David Déziel* commandé à Hébert par un comité de citoyens de Lévis. Parallèlement à cette production à caractère commémoratif, Hébert travaille depuis 1883 à la chaire de l’église Notre-Dame de Montréal. Cette réalisation colossale, qui l’occupera jusqu’en 1887, doit être considérée comme l’apogée de sa carrière de sculpteur sur bois. En mai 1884, le rédacteur du journal le Monde illustré (Montréal) constate que « [l’]atelier [d’Hébert] est trop étroit, et [que] quatre années lui suffiront à peine pour exécuter les commandes qu’il a en ce moment ». C’est précisément à cette époque que le sculpteur se fait construire un studio au 34, rue Labelle, à Montréal, où il allait dorénavant travailler. À toutes ces occupations s’ajoute l’enseignement, car Hébert a repris en 1882 ses cours au Conseil des arts et manufactures, où il donnera, de façon intermittente jusque vers la fin du siècle, des leçons d’anatomie, de modelage et de sculpture sur bois. À compter de 1898, il assumera la vice-présidence de cet organisme.

En 1886, s’amorce un tournant décisif dans la carrière d’Hébert. À la suite d’un programme établi conjointement par l’architecte Eugène-Étienne Taché et Bourassa, il offre « d’entreprendre l’œuvre de composer, modeler et faire fondre en bronze les statues dont l’exécution est projetée pour l’ornementation du nouveau Palais législatif de cette province ». Le sculpteur se voit confier l’exécution de dix de ces statues. Toutefois, il est entendu qu’« afin de pouvoir se procurer tous les renseignements qui lui seront indispensables pour le fidèle et consciencieux accomplissement de son travail, et aussi pour avoir l’avantage de consulter et suivre à l’œuvre les grands artistes sculpteurs qui honorent de leur talent [l’]ancienne mère-patrie », Hébert devra faire « un séjour d’au moins dix-huit mois à Paris ». C’est ainsi que, le 21 février 1887, il quitte le Canada pour la France. De retour à Montréal dès le mois de juillet de la même année, il est aussitôt invité à présenter à l’Exposition provinciale de Québec « les modèles des statues » réalisés à Paris. Bourassa, qui voit les œuvres, est déçu du travail de son protégé et convainc les autorités de faire en sorte que, « pour acquérir la science et le goût nécessaires à la production d’œuvres remarquables », Hébert puisse effectuer un nouveau séjour de trois ans en France. Après le départ de ce dernier avec sa famille au printemps de 1888, les commandes seront exécutées par Gratton et Laperle, qui dirigeront ainsi, entre autres, les travaux du monument d’Édouard-Joseph Crevier à Marieville (1888).

À leur arrivée à Paris, les Hébert s’installent dans Montparnasse, où un grand nombre d’artistes ont leur atelier, dont les sculpteurs Frédéric-Auguste Bartholdi, Jules Dalou et Auguste Paris avec lesquels Hébert se liera d’amitié ; il entretiendra aussi des liens très étroits avec les Canadiens de passage à Paris pendant ces années. C’est véritablement dans la capitale française que le sculpteur affine son métier de modeleur et se familiarise avec les techniques complexes de la fonte du bronze, principalement avec la commande pour l’Hôtel du Parlement de Québec. Hébert réalise d’abord le groupe de l’entrée représentant une Famille d’Abénaquis. Également connue sous le titre de Halte dans la forêt, cette œuvre est présentée à l’Exposition universelle de Paris en 1889 et mérite au sculpteur la troisième médaille d’honneur, une première pour un artiste canadien. Coulée en bronze, la sculpture arrive à Québec en août 1890 après avoir été exposée au Salon de la Société des artistes français. L’année suivante, c’est au tour de la version en bronze du Pêcheur à la nigogue destinée à la fontaine à être exposée au célèbre Salon parisien, où l’artiste envoie annuellement des œuvres jusqu’à son départ en 1894, année où il présente au public les sculptures de Salaberry et de François de Lévis*. Celles-ci seront respectivement installées dans la façade de l’Hôtel du Parlement en septembre et en novembre 1894, rejoignant ainsi celles de Frontenac [Buade*] (installée en septembre 1890), de lord Elgin [Bruce*] (installée en février 1892), de Louis-Joseph de Montcalm* et de James Wolfe* (installées en mai 1894). Les deux groupes allégoriques, Poésie et Histoire et Religion et Patrie, couronnant les avant-corps gauche et droit de l’édifice, sont également réalisés et coulés à Paris durant la même période. Il en est ainsi du monument à la mémoire de Charles John Short et de George Wallick – morts en héros durant l’incendie de Saint-Sauveur en 1889 –, inauguré à Québec en novembre 1891, du monument de Maisonneuve, livré à Montréal en septembre 1893 et considéré comme le chef-d’œuvre d’Hébert, de même que du monument de sir John Alexander Macdonald* dont le modèle est exposé dans l’atelier parisien de l’artiste en juin 1894. Si l’on excepte quelques brefs voyages d’affaires au Canada – en septembre et octobre 1890, en mai et juin 1892 et en février 1894 –, Hébert aura séjourné plus de six ans à Paris quand, en octobre 1894, il revient s’établir à Montréal avec sa famille. Dans son autobiographie, il décrira ces années comme les plus belles de sa vie, les plus profitables pour sa carrière.

Exception faite de la livraison de l’imposant ange en bronze du monument funéraire de la famille Valois au cimetière Notre-Dame-des-Neiges, l’année 1895 est avant tout marquée par l’inauguration, en juillet, des monuments de Macdonald à Ottawa et Maisonneuve à Montréal. Pour 1896, on retient le monument du père André-Marie Garin à Lowell, au Massachusetts, et le buste en bronze de Louis-Adélard Senécal*, qui couronne le monument de ce dernier au cimetière Notre-Dame-des-Neiges, à Montréal. À cet endroit, on retrouve quelques autres bustes d’Hébert dont ceux de Cartier (1888), de Charles-Séraphin Rodier* (1891) et de Guillaume-Alphonse Nantel* (1894). En 1898, Hébert accepte de sculpter dans le bois une Sainte Philomène qui sera offerte au couvent d’Hochelaga, dirigé par les Sœurs des Saints-Noms de Jésus et de Marie. La fortune lui sourit de nouveau un peu plus tard dans l’année quand il signe coup sur coup, en octobre et en novembre, les contrats des monuments de la reine Victoria et d’Alexander Mackenzie* que l’on projette d’ériger sur la colline parlementaire à Ottawa. Dans ce dernier cas, pour ménager certaines susceptibilités, le contrat est signé conjointement avec le sculpteur canadien-anglais Hamilton Thomas Carleton Plantagenet MacCarthy bien que, dans les faits, Hébert réalise seul le travail, qui sera terminé à la fin de 1899. Pour exécuter cette double commande, le sculpteur retourne à Paris, où ses deux monuments sont d’ailleurs présentés lors de l’Exposition universelle de 1900. Du second séjour parisien de la famille Hébert, qui se prolongera jusqu’en octobre 1902, date également le monument de Mgr Bourget commandé par l’archevêque de Montréal, Mgr Paul Bruchési*.

C’est dans son atelier montréalais qu’Hébert travaille, en février 1903, à la maquette du monument d’Octave Crémazie* qui sera inauguré le 24 juin 1906 au carré Saint-Louis. Il en a été de même pour le monument de Joseph Howe* dévoilé à Halifax le 13 décembre 1904. Dans le cas du monument érigé à la mémoire de Mgr François de Laval*, commandé à Hébert en mars 1905 pour souligner le troisième centenaire de la ville de Québec, le contrat stipule que le sculpteur doit aller à Paris pour « exécuter son modèle en plâtre ou maquette ». De plus, l’artiste est tenu de « fournir un certificat de trois sculpteurs de Paris donnant leur approbation à son modèle ». À peine quelques mois avant de partir pour Paris, Hébert a la chance de signer, en juin 1906, le contrat pour un nouveau monument à la reine Victoria, destiné cette fois-ci à la ville de Hamilton, en Ontario. Les années 1908, 1909 et 1910 laissent croire à une nouvelle période d’accalmie dans la carrière d’Hébert, mais c’est pourtant durant ce temps que sont réalisés le monument de Charles-Théodore Viau* au cimetière Notre-Dame-des-Neiges (1908), le monument de Jeanne Mance* à l’Hôtel-Dieu de Montréal (1908), le monument de Pierre-Marie Mignault* à Chambly (1909), le monument de sir Samuel Leonard Tilley* à Saint-Jean, au Nouveau-Brunswick (1910) et, enfin, le monument de Pierre Legardeur* de Repentigny à Saint-Henri-de-Mascouche (Mascouche, Québec) (1910).

En 1911 et 1912, Hébert décroche trois contrats importants pour des monuments publics qui viennent couronner sa brillante carrière et lui permettent d’effectuer, à compter de la fin de l’année 1911, un dernier séjour à Paris en compagnie de sa famille, séjour qui se terminera au printemps de 1914 par un voyage en Italie. Au début de l’année 1911, l’artiste signe d’abord le contrat pour le Boer War Memorial de Calgary, le seul monument équestre qu’il ait jamais réalisé (inauguré en juin 1914). À la fin de la même année, il signe le contrat de son plus imposant monument, celui de Marie-Madeleine Jarret* de Verchères ; l’héroïne, coulée dans le bronze, mesure plus de 20 pieds de hauteur (dévoilement à Verchères, Québec, le 21 septembre 1913). Enfin, en juillet 1912, le sculpteur a le plaisir de voir son projet de monument à Édouard VII préféré à ceux de George William Hill*, Alfred Laliberté* et Cœur-de-Lion MacCarthy, trois sculpteurs qui, avec son fils Henri, prennent peu à peu la relève dans le domaine du monument commémoratif. C’est à Henri d’ailleurs, et sans doute faute de temps, que Louis-Philippe confie, en 1913, le soin d’exécuter le monument de Camille Lefebvre* à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Le 1er octobre 1914, à la suite de l’inauguration du monument à Édouard VII par le gouverneur général du Canada au carré Phillips à Montréal, en présence d’une foule énorme, Louis-Philippe Hébert écrit dans son journal : « ce monument est le plus important et le dernier travail que j’ai exécuté ». Effectivement, à compter de cette date, le sculpteur diminue considérablement ses activités. Il meurt d’un cancer de la gorge le 13 juin 1917, à l’âge de 67 ans.

Outre les quelque 50 monuments commémoratifs et funéraires qui jalonnent la carrière d’Hébert, son œuvre compte un grand nombre de statuettes, de bustes, de médaillons et de médailles représentant aussi bien des personnages historiques que des contemporains de l’artiste : hommes politiques, hommes de lettres, riches financiers, membres du clergé et intimes. Le sculpteur est également reconnu pour ses groupes illustrant des épisodes tirés des débuts héroïques de l’histoire du Canada, comme son célèbre Sans merci présenté à l’Exposition universelle de Paris en 1900. Souvent coulées dans le bronze en de multiples exemplaires, les statuettes d’Hébert représentant de charmantes figures féminines telles Fleur des bois (1897) ou Soupir du lac (1903) correspondent tout à fait au goût de l’époque et concourent également à la célébrité du sculpteur. Cette renommée sera confirmée tout au long de sa carrière par diverses récompenses : Ottawa lui décerne la médaille de la Confédération en 1894, Paris le fait chevalier de la Légion d’honneur en 1901, Londres, compagnon de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges en 1903, et Rome, chevalier de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand en 1914. Excessivement préoccupé par la diffusion de son œuvre, Hébert tire avantage de toutes les occasions qui s’offrent à lui pour présenter au public sa production la plus récente. Si, au début de sa carrière, l’artiste se contente des vitrines de commerçants pour ce faire, son association avec l’Académie royale des arts du Canada lui permet, dès 1880, d’exposer ses œuvres dans les plus importants musées d’Ottawa, de Montréal et de Toronto. À compter de 1895, ses œuvres sont aussi régulièrement présentées aux Salons du printemps de l’Association des beaux-arts de Montréal. Il participe également à plusieurs expositions universelles ou internationales : Philadelphie (1876), Boston (1883), Anvers (1885), Paris (1889 et 1900) et Glasgow (1901).

L’image la plus connue d’Hébert est sans doute le portrait qu’a laissé de l’artiste le peintre Joseph Saint-Charles au tout début du siècle, quand son modèle était âgé d’une cinquantaine d’années. D’après ce tableau, conservé au Musée du Québec, il ne fait aucun doute qu’Hébert était particulièrement soigneux de son image. Les très nombreuses photographies qui subsistent laissent même à l’occasion croire à une certaine suffisance de sa part. À l’occasion d’une visite de l’atelier d’Hébert en 1910, un journaliste ne notait-il d’ailleurs pas que le sculpteur « parl[ait] de lui avec un plaisir évident » ? Les contemporains d’Hébert s’entendaient toutefois pour lui reconnaître les plus grandes qualités. Ainsi, pour le sculpteur Lauréat Vallière, Hébert était « le plus charmant garçon du monde. Grand, instruit, fin, bon causeur il plaisait au premier abord ». Pour Edmond Dyonnet, « c’était un travailleur infatigable et ayant du plaisir à son travail ». Alfred Laliberté abondait dans le même sens en le reconnaissant comme « un grand travailleur et un affiné finaud qui avait acquis ces qualités au contact des artistes et hommes de lettres qui furent ses amis ». Parmi eux, on comptait les peintres Marc-Aurèle de Foy Suzor-Coté*, Henri Julien* et Maurice Galbraith Cullen*, ainsi que les écrivains Ernest Gagnon, Benjamin Sulte* et Louis Fréchette*. Nul doute qu’Hébert fut un ami fidèle, tout comme il fut un fils respectueux, un frère serviable, un mari affectueux et un père plein d’attention pour ses enfants, qualités qui transparaissent toutes abondamment dans sa correspondance.

Au décès de Louis-Philippe Hébert, qui laissa à ses héritiers une fortune évaluée à près de 100 000 $, on avait un peu oublié les modestes débuts du sculpteur qui, à l’égal d’un Louis Jobin*, gagna longtemps sa vie à décorer des églises. Selon le Devoir du 14 juin 1917, « Philippe Hébert a été le grand imagier de notre histoire. Son œuvre en est le commentaire héroïque et impérissable. » La Presse du même jour affirme : « ses monuments lui survivent et rappelleront aux générations futures le souvenir de ce citoyen intègre et de cet artiste dont nous avons le droit d’être fiers ». En effet, si Hébert est passé à l’histoire, c’est pour avoir été « le premier statuaire commémoratif canadien ». Comme le note Bruno Hébert, biographe de l’artiste, Hébert « a eu la chance d’avoir du talent, mais il a aussi eu le talent d’avoir de la chance. Quand les occasions se sont présentées, il était prêt. En quelques années de travail acharné, il a pu assimiler l’essentiel de la tradition sculpturale européenne. Il [a] port[é] au Canada un art jusque-là réservé aux vieux pays. En ce sens, il [a] fait [...] œuvre nouvelle et inaugur[é] aussi une étape importante de l’histoire de l’art au Canada. » C’est effectivement à Hébert que la sculpture canadienne doit son entrée dans la modernité. Il a tracé la voie à une nouvelle génération de sculpteurs qui abandonneraient le bois pour le bronze, tout comme ils délaisseraient les églises au profit des places publiques et des musées.

Yves Lacasse

La présente biographie a été constituée à partir de l’ensemble de la documentation amassée depuis quelques années dans le cadre des recherches préparatoires à la rétrospective Louis-Philippe Hébert que nous préparons en vue d’une présentation au Musée du Québec (Québec) à l’été de 1999 et au musée des Beaux-Arts de Montréal à l’automne suivant. Notre travail de dépouillement n’est toutefois pas encore terminé. Une bibliographie exhaustive sur Hébert paraîtra dans le catalogue d’exposition, qui sera publié conjointement par les deux musées en 1999.

Hébert a gardé, sa vie durant, la plupart des documents qui le concernaient. Ces archives sont conservées à différents endroits : au Musée du Québec, dans le fonds L.-P. Hébert (H1990), où l’on trouve, entre autres, de la correspondance, 1870–1917, la liste de ses œuvres et son testament ; à la Bibliothèque de la ville de Montréal, Salle Gagnon, dans le fonds L.-P. Hébert, où sont principalement conservés de la correspondance, 1900–1908, et son journal, 2 oct. 1886–31 déc. 1901 ; deux descendants de l’artiste, Angèle Hébert-Coulombe, de Saint-Jean-sur-Richelieu, Québec, garde plus particulièrement des contrats, des documents financiers et un exemplaire dactylographié de l’autobiographie de L.-P. Hébert, « Étapes de ma vie », publiée sous ce titre par Bruno Hébert dans les Cahiers de Cap-Rouge (Cap-Rouge, Québec), 8 (1980), no 1 : 16–55), et Bruno Hébert, de Joliette, Québec, conserve notamment un carnet de notes, circa 1873–1879, et un journal. L’acte de mariage d’Hébert se trouve aux ANQ-M, CE1-33, 26 mai 1879.

Parmi plus de 40 périodiques (surtout québécois, mais aussi ontariens, néo-brunswickois, londoniens et parisiens) où nous avons trouvé des renseignements sur Hébert, mentionnons ceux où les références sont les plus abondantes : le Courrier de Saint-Hyacinthe (Saint-Hyacinthe, Québec), 1879–1900 ; le Courrier du Canada (Québec), 1881–1900 ; l’Électeur (Québec), 1881–1896 ; la Minerve, 1875–1898 ; le Monde illustré (Montréal), 1884–1901 ; le Montreal Daily Star, 1881–1906 ; l’Opinion publique (Montréal), 1875–1883 ; Paris-Canada (Paris), 1885–1907 ; la Patrie, 1892–1913 ; et la Presse, 1887–1917.  [y. l.]

Sylvain Allaire, « les Artistes canadiens aux salons de Paris, de 1870 à 1914 (salons des artistes vivants – des artistes français, salons de la nationale des beaux-arts, salons des artistes indépendants, salons d’automne) » (mémoire de m.a., univ. de Montréal, 1985).— Annuaire, Montréal, 1876–1917.— N[apoléon] Bourassa, Lettres d’un artiste canadien : N. Bourassa, Adine Bourassa, édit. (Bruges, Belgique, et Paris, 1929).— F.-L. Desaulniers, les Vieilles Familles d’Yamachiche (4 vol., Montréal, 1898–1908), 4 : 77s.— A dictionary of Canadian artists, C. S. MacDonald, compil. (7 vol. parus, Ottawa, 1967–  ), 2.— Edmond Dyonnet, Mémoires d’un artiste canadien, préface de Jean Ménard (Ottawa, 1968).— Romain Gour, Philippe Hébert, sculpteur et statuaire (Montréal, 1953).— [T. G. Guernsey], Statues de la colline du Parlement ; histoire illustrée (Ottawa et Hull, Québec, 1986).— Bruno Hébert, « Hommage à Philippe Hébert », les Cahiers de Cap-Rouge, 8 (1980), no 1 : 7–15 ; Philippe Hébert, sculpteur (Montréal, 1973).— Karel, Dict. des artistes.— Alfred Laliberté, les Artistes de mon temps, Odette Legendre, édit. (Montréal, 1986).— Bernard Mulaire, « Olindo Gratton et Louis-Philippe Hébert : une relation professionnelle entre deux sculpteurs à la fin du xixe siècle », Annales d’hist. de l’art canadien (Montréal), 12 (1989) : 22–47 ; Olindo Gratton, 1855–1941 ; religion et sculpture (Montréal, 1989).— Le Musée du Québec : 500 œuvres choisies (Québec, 1983).— [Luc Noppen et Gaston Deschênes], l’Hôtel du Parlement, témoin de notre histoire (Québec, 1986).— Normand Pagé, la Cathédrale Notre-Dame d’Ottawa ; histoire, architecture, iconographie (Ottawa, 1988).— Souvenir de Maisonneuve : esquisse historique de la ville de Montréal [...] (Montréal, [1894 ?]).

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Yves Lacasse, « HÉBERT, LOUIS-PHILIPPE (Philippe) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hebert_louis_philippe_14F.html.

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Auteur de l'article:    Yves Lacasse
Titre de l'article:    HÉBERT, LOUIS-PHILIPPE (Philippe)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    28 novembre 2024