RHO (Raux, Rheault), ADOLPHE, sculpteur, portraitiste et peintre, né le 30 mars 1839 à Gentilly (Bécancour, Québec), fils d’Alexis Raux et de Marie des Anges Girouard ; le 6 février 1865, il épousa à Bécancour, Bas-Canada, Philomène Boisvert, et ils eurent dix enfants, dont deux moururent en bas âge, puis le 13 juillet 1885, à Cap-Rouge, Québec, Éléonore Boisvert, sœur de Philomène ; décédé le 7 avril 1905 à Bécancour, Québec.

Fils de cultivateur, Adolphe Rho s’initie très tôt aux travaux de la ferme. Quand son père n’en a pas besoin pour certaines tâches saisonnières, il fréquente l’école du village. Olivier Aubry, maître d’école, lui apprend les rudiments du savoir et sans doute encourage-t-il son élève, plus habile en dessin que ses compagnons, à développer son talent naturel. Aussi, quelques années plus tard, il prendra « des leçons de dessin et de perspective » à Trois-Rivières. Durant les longs mois d’hiver où les travaux de la ferme sont au ralenti, Rho s’adonne à la sculpture. Il se montre sûrement doué et même habile puisque, le 10 janvier 1860, on l’engage comme apprenti architecte et sculpteur pour parachever l’église paroissiale ; il n’est âgé que de 20 ans. « La sculpture figurative, notamment les bas-reliefs appliqués au sanctuaire » de l’église est la première œuvre connue du jeune homme.

Lorsque le 6 février 1865 Rho épouse Philomène Boisvert, il s’inscrit au registre comme sculpteur et signe Rheault. Le jeune couple s’établit à Bécancour. Au baptême de son premier enfant, le 25 février 1866, il signe Rho et toujours ainsi par la suite. On ne sait presque rien des premières années qu’il passe à Bécancour, sinon qu’il continue à « pratiquer la sculpture dans sa boutique aménagée en atelier », tout en s’imposant bien des sacrifices. Habile et ingénieux par nature, il exerce sans doute mille métiers qui lui permettent de joindre les deux bouts.

À l’automne de 1870, Rho annonce l’ouverture d’un atelier rue Saint-Jean, à Québec, dans la galerie du photographe George William Ellisson. Il a mis au point un « nouveau procédé » pour faire des portraits. La méthode est simple : une photographie est agrandie mécaniquement et les traits sont repris par l’artiste au pastel, au fusain ou aux crayons. Ainsi le portrait donne l’illusion d’être entièrement fait à la main, « d’un fini à presque défier la peinture ».

Rho fait des séjours prolongés à Québec, car le succès est inespéré et les commandes affluent. Évêques et curés, hommes politiques et hommes d’affaires requièrent ses services ; de nombreuses lithographies des portraits originaux sont mises sur le marché. Les journaux ne tarissent pas d’éloges et l’on voit en lui le « génie qui s’annonce ». En 1871, il expose chez les libraires de Montréal et présente quelques dessins au crayon à l’exposition de Québec.

Portraitiste à succès, Rho se tourne en 1878 du côté de la peinture à l’huile. Quelques mois d’apprentissage et déjà sa toile Marie Madeleine dénote, selon le Journal des Trois-Rivières, « le feu sacré de l’inspiration servie par un talent plus qu’ordinaire ». L’artiste est sans doute moins enthousiaste devant ses premières toiles et sait qu’il a beaucoup à apprendre. Il s’embarque pour l’Europe le 19 octobre afin de perfectionner son art au contact des maîtres français. Charles Huot*, élève d’Alexandre Cabanel, l’introduit auprès des peintres parisiens et l’accompagne dans les musées et galeries d’art. Malheureusement, la maladie d’un membre de sa famille l’oblige à revenir au Canada. Ce contretemps fâcheux ne l’abat pas et, dès son retour, il se remet à la tâche avec une vigueur nouvelle. En mai 1879, il expose pour la première fois une de ses toiles dans la boutique de Jean-Moïse-Arthur Lavigne*, de Québec. Il s’agit d’une huile d’après une copie d’un tableau célèbre appartenant aux ursulines, Mme Vigée-Lebrun par elle-même. Un pastel du même tableau est aussi en montre.

Le 23 août 1881, à peine un an après la naissance de son dernier enfant, Rho perd son épouse. Il va sculpter dans le granit une pierre tombale à sa mémoire.

Rho rêve de retourner en Europe et plus particulièrement en Italie. Il sera du premier pèlerinage canadien en Terre sainte que prépare son cousin par alliance, l’abbé Léon Provancher*. Mais où trouver l’argent nécessaire ? Il peint ses premières fresques pour l’église de Nicolet, restaure quelques peintures dans son église paroissiale et prend de nouveau commande de portraits au crayon ou à l’huile.

Après avoir confié ses enfants à sa belle-sœur, Éléonore Boisvert, qui habite chez lui depuis la mort de son épouse, Rho quitte New York le 27 février 1884. Il séjourne plus de trois mois à Rome et à Florence après avoir visité Paris, Alexandrie, Le Caire et Jérusalem. Le voyage est très fructueux : il fréquente assidûment artistes et musées, et il peint. C’est à Rome qu’il fait les ébauches du plus célèbre de ses tableaux, le Baptême du Christ, qui est encore aujourd’hui exposé dans l’église tenue par les franciscains, à Ein Karem, près de Jérusalem.

Le 13 juillet 1885, à Cap-Rouge, Rho épouse Éléonore Boisvert. Les années qui suivent sont très productives. Il peint une soixantaine de tableaux religieux, et sculpte statues et retables. Souvent aidé de ses quatre fils, Rho restaure une trentaine d’églises et de chapelles. En 1886, il passe quelques mois à Québec et termine les portraits de Léon XIII et du cardinal Elzéar-Alexandre Taschereau* qui ornent le salon de l’archevêché. Durant les premiers mois de 1889, il donne des leçons de dessin et de peinture à Trois-Rivières. Le même été, sort de son atelier le haut-relief la Cène d’après Léonard de Vinci. Cette sculpture demeure la pièce maîtresse de l’artiste et sera reproduite à plusieurs exemplaires.

Rho a fait presque exclusivement des tableaux religieux destinés aux églises et des portraits au goût de l’époque. Ceux-ci font partie de collections privées souvent inconnues alors que ceux-là ont été détruits ou sont disparus. Les décorations à fresque n’ont pas survécu aux rénovations des églises. Les bas-reliefs et le monumental chandelier pascal de l’église de Gentilly demeurent les témoins privilégiés de son œuvre sculpturale.

Adolphe Rho meurt d’une pneumonie à Bécancour le 7 avril 1905, moins de deux ans après le décès de sa seconde épouse. Portraitiste, peintre et sculpteur, il fut un autodidacte rarement audacieux, mais toujours consciencieux. Louangé par ses contemporains, il résiste mal à la critique moderne. Il demeure un sculpteur habile, un portraitiste recherché et un copiste honnête. Artisan plus qu’artiste, il a mis son talent au service d’une époque qui attendait encore ses génies.

Denis Fréchette

Le relevé des œuvres d’Adolphe Rho ainsi qu’une bibliographie complète sur le personnage figurent dans : Denis Fréchette, « Adolphe Rho, l’homme et l’œuvre », les Cahiers nicolétains (Nicolet, Québec), 6 (1984) : 3–62.

AC, Québec, État civil, Catholiques, Cap-Rouge, 13 juill. 1885.— ANQ-MBF, CE1-4, 6 févr. 1865 ; CE1-9, 30 mars 1839.

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Denis Fréchette, « RHO (Raux, Rheault), ADOLPHE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/rho_adolphe_13F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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