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VIAU, CHARLES-THÉODORE, homme d’affaires, né le 17 mars 1843 à Longueuil, Bas-Canada, fils de Marc Viau, dit Cinq-Mars, charretier, et de Florence Deniger ; le 18 mai 1868, il épousa à Montréal Marie-Émilie Deguise, et ils eurent plusieurs enfants dont certains moururent en bas âge et dont trois fils et quatre filles survécurent à leur père ; décédé le 10 décembre 1898 à Longue-Pointe (Montréal).
Venu à Montréal à l’âge de 15 ans, Charles-Théodore Viau fut embauché à titre de commis dans une épicerie. Il y apprit les secrets du métier et en serait devenu le propriétaire en 1866. Chose certaine, à compter de cette année-là, il dirigea avec un associé, sous le nom de Dufresne et Viau, une entreprise d’épicerie en gros située rue des Commissaires, dans le quartier des affaires. Il choisit assez rapidement de se spécialiser dans le commerce de la farine. Dès l’année suivante, il prolongea cette spécialisation en se lançant dans la boulangerie ; il commençait peu après la production de biscuits, qui allait devenir son principal secteur d’activité. En 1870, Viau changea d’associé et l’entreprise prit le nom de Viau et Viger ; trois ans plus tard, il en devint le seul propriétaire et fit dès lors affaire sous la raison sociale de Viau et Frère. À la même époque, il abandonna son magasin de la rue des Commissaires. Installée rue Sainte-Marie (rue Notre-Dame), dans l’est de Montréal, l’usine Viau fut agrandie à quelques reprises et de façon plus substantielle après avoir été détruite par un incendie en 1875.
Viau fut d’abord et avant tout un industriel, consacrant toute sa vie adulte à bâtir et à développer son entreprise. Au fil des ans, il augmenta et diversifia sa production. S’il laissa tomber le secteur de la boulangerie en 1890, il conserva celui de la farine et développa la fabrication d’une grande variété de biscuits ainsi que la production de bonbons et de chocolats. À l’affût des innovations technologiques, il chercha à doter son usine de machines modernes. En 1894, l’entreprise employait 125 personnes et déclarait des ventes de 300 000 $ ; on la considérait comme l’une des plus importantes biscuiteries du pays, avec un marché qui couvrait principalement le Québec et une partie de l’Ontario.
Comme beaucoup d’hommes d’affaires de son époque, Viau investit dans la propriété foncière. Il possédait des terrains dans l’est de Montréal, mais son geste le plus important fut l’acquisition, entre 1884 et 1886, de très vastes terres agricoles situées en partie à Maisonneuve et en partie à Longue-Pointe, dans la banlieue montréalaise. Il y entretenait un troupeau de vaches dont le lait était destiné à la biscuiterie. À une époque où la production laitière présentait des problèmes de qualité, il s’assurait ainsi un approvisionnement qu’il pouvait contrôler et fournissait un intéressant exemple d’intégration verticale. Il installa sa résidence familiale en bordure du fleuve, à Longue-Pointe. Au cours des années 1890, il décida de mettre en valeur sa propriété à des fins urbaines et s’entendit avec le conseil municipal de Maisonneuve pour y faire ouvrir des rues.
Viau souhaitait cependant faire plus qu’un simple lotissement et il élabora le projet d’une ville modèle à laquelle il donna le nom de Viauville. Affichant des préoccupations urbanistiques alors peu fréquentes chez les promoteurs francophones, il exigea des acheteurs de lots qu’ils érigent des maisons qui ne dépassent pas deux étages, en retrait du trottoir et dotées d’une façade en pierre. Il réserva les terrains sis en bordure du fleuve pour l’aménagement d’un parc. Il obtint de l’archevêché la création, en 1898, de la paroisse Saint-Clément dont le territoire correspondait aux limites de son domaine. Comme la population était encore peu nombreuse, il s’engagea à y assurer l’entretien et le logement du curé et contribua largement à financer la construction de l’église. Au moment de sa mort, il caressait aussi le projet de faire ériger ce territoire en municipalité distincte. Même si Viauville demeura finalement partie intégrante de Maisonneuve, le projet de développement qu’il avait conçu fut poursuivi par sa succession après 1898 et les façades de pierre grise du quartier Viauville témoignent encore aujourd’hui de son originalité.
Devenu un homme d’affaires respecté, Charles-Théodore Viau fut membre du Bureau de commerce de Montréal et, à partir de 1895, de la Chambre de commerce du district de Montréal. Conservateur reconnu, il ne semble cependant pas avoir participé très activement à la vie politique. À sa mort, il laissa une entreprise importante à laquelle la famille Viau serait associée pendant près d’un siècle et un nom devenu presque synonyme de biscuit au Canada.
AC, Montréal, Minutiers, M.-G. Ecrement, nos 222, 252, 523.— ANQ-M, CE1-12, 19 mars 1843 ; CE1-51, 18 mai 1848, 14 déc. 1898.— Arch. de la ville de Montréal, Fonds de la ville de Maisonneuve, dossier 1-1.— BE, Hochelaga, reg., A5 : 27 ; D 10 : 715.— La Patrie, 12, 14 déc. 1898.— La Presse, 12, 14 déc. 1898, 6 mai 1899.— Montreal directory, 1865–1898.— Montreal illustrated, 1894 [...] (Montréal, [1894]).— P.-A. Linteau, Maisonneuve ou Comment des promoteurs fabriquent une ville, 1883–1918 (Montréal, 1981).— [Roger Viau], Un siècle de progrès ; historique de Viau Ltée (Montréal, 1967).
Paul-André Linteau, « VIAU, CHARLES-THÉODORE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/viau_charles_theodore_12F.html.
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Auteur de l'article: | Paul-André Linteau |
Titre de l'article: | VIAU, CHARLES-THÉODORE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 12 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1990 |
Année de la révision: | 1990 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |