CLAUS, WILLIAM, officier dans l’armée et dans la milice, fonctionnaire, juge de paix et homme politique, né le 8 septembre 1765 à Williamsburg (près d’Amsterdam, New York), fils de Christian Daniel Claus* et d’Ann (Nancy) Johnson ; le 25 février 1791, il épousa Catherine Jordan, fille de Jacob Jordan*, et ils eurent trois fils et deux filles qui atteignirent l’âge adulte ; décédé le 11 novembre 1826 à Niagara (Niagara-on-the-Lake, Ontario).

Homme aux aptitudes modestes, William Claus eut la chance de naître dans une famille en vue, riche et influente. Son grand-père maternel, sir William Johnson*, possédait de vastes propriétés dans la vallée de la Mohawk et occupait le poste de surintendant des Affaires des Indiens du Nord. Son père exerçait également des fonctions importantes au département des Affaires indiennes. Pour le doter d’une instruction convenable, ses parents voulaient l’envoyer dans une école new-yorkaise, mais l’éclatement de la guerre civile et le soulèvement des colonies américaines les en empêchèrent ; à la fin du printemps de 1775, ils furent donc obligés de se réfugier dans la province de Québec.

Le jeune Claus entreprit sa carrière militaire vers 1777 en s’enrôlant comme volontaire dans le King’s Royal Regiment of New York, sous les ordres de son oncle, sir John Johnson. Au cours de l’été de 1782, il aurait participé à l’incursion que Joseph Brant [Thayendanegea*] mena avec succès contre les établissements du fort Dayton (Herkimer, New York) et, non loin de là, du fort Herkimer. À la fin de la guerre, il avait déjà le grade de lieutenant. En octobre 1787, il obtint le même grade dans un régiment des troupes britanniques, le 60th Foot ; en février 1795, il fut promu capitaine.

Depuis 1788, sir John Johnson, devenu surintendant général des Affaires indiennes, tentait d’obtenir que Claus soit nommé dans son département. Il le recommanda pour le poste d’agent adjoint auprès des Six-Nations au Canada et fut apparemment soutenu dans sa tentative par l’ancien gouverneur, sir Frederick Haldimand*. Toutefois, lord Dorchester [Guy Carleton*], qui était alors gouverneur, rejeta sa requête en raison du jeune âge de Claus. En 1795, après la mort de John Campbell*, Johnson essaya vainement d’obtenir que l’on confie à Claus la responsabilité des Indiens du Bas-Canada. Finalement, en 1796, la mort de John Butler* libéra un poste, que Johnson parvint à obtenir pour Claus. Celui-ci fut nommé surintendant adjoint des Six-Nations au fort George (Niagara-on-the-Lake, Ontario) et avait ainsi la responsabilité des Indiens de la rivière Grand, entre autres.

Claus entra en fonction en octobre 1796 et fut immédiatement mêlé à un conflit opposant le gouvernement et Joseph Brant, qui prétendait que les Six-Nations de la rivière Grand avaient le droit de vendre des parcelles de leurs terres si elles le désiraient. Claus, qui défendait le point de vue gouvernemental, affirma que les Indiens n’étaient pas les maîtres absolus de ces terres, qu’ils n’avaient pourtant jamais cédées, et qu’en vertu de la Proclamation royale de 1763 la vente des terres appartenant aux Indiens ne pouvait s’effectuer que par la couronne. Brant continua de plaider sa cause auprès des autorités du Haut-Canada et, en 1797, il obligea l’administrateur Peter Russell* à reconnaître la validité des ventes déjà conclues. Claus fut nommé membre du conseil d’administration qui eut pour tâche de gérer le produit des ventes au profit des Indiens.

Le 30 septembre 1800, Claus gravit un autre échelon au département des Affaires indiennes quand il fut choisi comme successeur d’Alexander McKee*, surintendant général adjoint du Haut-Canada ; il devait conserver ce poste jusqu’à sa mort. Un nouveau conflit l’opposa cependant à Brant, qui défendait toujours le droit des Indiens des Six-Nations à vendre leurs terres et qui, en 1803, résolut de court-circuiter les autorités provinciales. Brant chargea le chef de guerre John Norton de s’adresser directement au gouvernement britannique. Claus parvint toutefois à réunir un conseil (comptant, selon Brant, plusieurs chefs venant de la rive américaine du Niagara), lequel contesta l’autorité de Norton et prétendit avoir destitué Brant. Il fit envoyer une copie du procès-verbal à Londres et fit ainsi échouer la mission de Norton.

Durant les premières années où Claus était en poste, la frontière des États-Unis était plutôt tranquille ; mais, en 1807, l’affaire du Chesapeake [V. sir George Cranfield Berkeley*] fit craindre une invasion américaine et les autorités cherchèrent à faire renaître l’alliance entre Britanniques et Indiens. Claus réunit les chefs indiens aux endroits cruciaux, notamment au fort George et à Amherstburg, pour « s’entretenir en privé » avec eux et leur rappeler la « façon adroite et clandestine dont les Américains [avaient] pris possession de leurs terres ». La démarche générale s’avéra un tel succès que les tribus du Nord-Ouest américain devinrent trop impatientes d’affronter l’ennemi et que le lieutenant-gouverneur Francis Gore* dut presser Claus de les retenir.

En juin 1812, les États-Unis déclarèrent finalement la guerre à la Grande-Bretagne, et Claus fit preuve de dignité et d’efficacité dans l’acquittement de ses fonctions jusqu’à la fin du conflit. Il avait été nommé lieutenant du comté d’Oxford en juin 1802 et avait dès lors pris part aux activités de la milice. Il fut nommé colonel du 1 st Lincoln Militia en juin 1812 et, le mois suivant, il prit le commandement de réguliers britanniques et de miliciens du Haut-Canada au fort George et à Queenston Heights. Il consacrait une bonne part de son temps à restreindre la désertion. De plus, il participait sans cesse à des conseils avec les Indiens. À la fin de mai 1813, les Américains lancèrent une grande attaque amphibie contre le fort George. Après une résistance opiniâtre, les défenseurs se replièrent sur Burlington Heights (Hamilton). On raconte que Claus fut le dernier officier à quitter le fort endommagé ; en décembre, quand les Américains se retirèrent, il faisait partie des troupes qui réintégrèrent les lieux.

En 1814, la plus dure bataille que Claus avait encore à livrer fut l’âpre dispute qui continuait de l’opposer à John Norton. Par sa conduite durant la guerre, particulièrement à la bataille de Queenston Heights, Norton avait gagné la faveur des hautes autorités britanniques. En octobre 1813, le département des Affaires indiennes avait reçu ordre de collaborer avec tout « chef de renom », comme Norton, qui avait la confiance des Indiens. Puis, en mars 1814, Norton fut autorisé à distribuer des présents aux guerriers qui combattaient avec lui. Claus lutta pour que le département conserve ses prérogatives, et de nombreux échanges de lettres acerbes s’ensuivirent. Avec la fin de la guerre et la mise à la retraite de Norton, la rivalité entre les deux hommes s’atténua et, au début des années 1820, le jeune John Brant [Tekarihogen] succéda à Norton comme principal porte-parole des Indiens de la rivière Grand.

Durant l’après-guerre, Claus et le département connurent un revirement soudain de la politique britannique à l’égard des autochtones du Haut-Canada. Avec le retour à la paix, les autorités souhaitaient permettre au plus vite un libre développement de la province et proposaient des projets faisant en sorte que les Indiens ne soient plus des guerriers, mais qu’ils soient placés sous la tutelle de l’État. Les principaux moyens utilisés pour ce faire étaient l’extinction du droit de propriété territoriale des Indiens et leur établissement dans des villages particuliers ou réserves. Au cours de la décennie qui suivit la guerre, les Sauteux du Haut-Canada firent sept cessions de terres importantes et Claus joua un rôle de premier plan dans chacune des négociations. L’entente signée à York (Toronto) en février 1820 par les Mississagués en est un bon exemple. Claus leur donna, en guise de conclusion, l’assurance suivante : « tous les bénéfices des cessions [...] seront employés à instruire vos enfants et à vous enseigner les principes de la religion chrétienne [et] une certaine partie dudit territoire sera réservée pour votre habitation et celle de vos familles, et des cabanes y seront construites dès que possible ».

Comme le département des Affaires indiennes ne se consacrait plus à des activités militaires, Claus dut passer beaucoup de temps à aider les Indiens à s’adapter à leur nouveau mode de vie et à obtenir les fonds nécessaires pour payer les services que le département leur fournissait. Il se montra méticuleux et méthodique ; sa détermination l’amena parfois à s’opposer à ses supérieurs et, en une occasion, ceux-ci menacèrent de le destituer. Il semble qu’il aimait sincèrement les autochtones. « J’espère qu’en fin de compte les Indiens ne seront pas perdants, écrivait-il à George Ironside, car j’ai confiance que Sa Majesté [montrera] de la bienveillance et de la considération pour de pauvres gens si loyaux. »

Outre son poste au département des Affaires indiennes, Claus exerça quelques autres fonctions. En 1812, il fut nommé au Conseil législatif ; en 1816, il fut fait membre honoraire du prestigieux Conseil exécutif pour en devenir membre à part entière deux ans plus tard. En 1816, avec Thomas Clark entre autres, il avait été nommé au sein de la commission qui négocia avec des représentants du Bas-Canada le partage du revenu des droits de douane entre les deux provinces. En outre, il était juge de paix depuis 1803. Il fut également commissaire de l’école publique de Niagara et commissaire des douanes pour le district du même nom.

William Claus assumait son rôle de père de famille avec fierté et attachait une grande importance à la vie domestique. Son potager et son jardin de fleurs étaient parmi les plus beaux de la région et ses vergers étaient réputés. En fait, ses observations minutieuses sont une excellente source de renseignements sur l’horticulture du Haut-Canada. Après avoir souffert d’un cancer de la lèvre pendant environ cinq ans, il mourut le 11 novembre 1826 et fut inhumé au cimetière Butler, situé à l’extérieur de la ville de Niagara.

Robert S. Allen

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Robert S. Allen, « CLAUS, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/claus_william_6F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
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