Provenance : Avec la permission de Wikimedia Commons
BURTON, RALPH, officier, lieutenant-gouverneur de la ville de Québec, du gouvernement de Trois-Rivières et du gouvernement de Montréal, brigadier (commandant en chef) du département du Nord, décédé en 1768 à Scarborough, Angleterre.
On ne sait à peu près rien des origines de Ralph Burton, y compris la date et le lieu de sa naissance. On croit qu’il était le fils d’un avocat du Yorkshire, et son testament nomme un de ses cousins, Robert Burton, son exécuteur testamentaire. Il est question de lui pour la première fois lors de la guerre de Sept Ans en Amérique du Nord. En 1754, il reçut une commission de lieutenant-colonel dans le 48e régiment ; servant sous les ordres du général Edward Braddock, il fut blessé lors de la défaite de la Monongahéla, le 9 juillet 1755. En 1756 et en 1757, il servit sous les ordres de lord Loudoun [Campbell] qui fit son éloge, le disant « un homme actif et doué de bon sens ». En 1758, il commanda la 3e brigade à Louisbourg, île Royale (île du Cap-Breton), et, en juillet 1759, il accompagna Wolfe lors d’une reconnaissance devant Québec. Burton fut blessé à la fin de juillet au cours de l’attaque aux chutes Montmorency, mais sans doute pas très sérieusement, puisqu’il commandait un bataillon de réserve du 48e régiment sur les plaines d’Abraham où il reçut des lèvres de Wolfe mourant l’ordre de couper la retraite française à la rivière Saint-Charles.
Burton passa l’hiver de 1759–1760 à Québec en qualité de lieutenant-gouverneur sous les ordres de James Murray*, gouverneur militaire. Le 28 avril 1760, Murray à la tête de son armée se porta à la rencontre des troupes françaises sous le commandement de Lévis* à Sainte-Foy et Burton commandait l’aile droite. Dans le feu de l’engagement, l’aile droite s’enfuit en désordre et les forces de Murray échappèrent de justesse à une désastreuse défaite. À ce moment-là, Murray n’en blâma pas Burton, pas plus que ne le firent les deux autres officiers, le capitaine John Knox* et le major Patrick Mackellar*, qui laissèrent des comptes rendus de la bataille. Plus tard, à la suite d’une mésentente entre Murray et Burton, Murray déclara que ce dernier était bel et bien responsable et qu’il avait eu tort de sauver son subalterne du conseil de guerre.
Peu de temps après la bataille de Sainte-Foy, les renforts anglais arrivèrent et Burton remonta le fleuve avec Murray pour rejoindre Jeffery Amherst* à Montréal où, le 8 septembre 1760, l’armée française, sous les ordres du gouverneur général, Pierre de Rigaud* de Vaudreuil, capitula, remettant aux Anglais la colonie tout entière y compris les postes de l’Ouest. Avant de regagner New York, Amherst, à titre de commandant en chef, prit des dispositions pour assurer l’administration militaire de la colonie. Il conserva les régions administratives de Québec, Trois-Rivières et Montréal telles qu’elles avaient été établies par les Français ; il nomma Thomas Gage* lieutenant gouverneur de Montréal, confia le poste semblable de Trois-Rivières à Burton et confirma Murray dans sa charge de gouverneur de Québec. Tous trois, par principe et pour des raisons de prudence, adoptèrent une ligne de conduite conciliante à l’égard des Canadiens, ligne de conduite approuvée par Amherst et qu’avait déjà suivie Murray au cours de l’hiver précédent à Québec. On maintint scrupuleusement la liberté de culte ; les réquisitions auprès des habitants bien qu’obligatoires étaient rémunérées ; on s’efforça de mettre un frein à la spéculation que suscitait la rareté des vivres et l’on essaya d’obtenir du blé des régions de l’Ouest pour la ville de Québec, qui souffrait toujours des séquelles de la campagne de 1759. Des tribunaux militaires administraient la justice avec l’aide de capitaines de milice canadiens et conformément aux coutumes locales établies.
Burton quitta Trois-Rivières en 1762 pour une période de service de 10 mois aux Antilles. Quelques mois après le retour de celui-ci en 1763, Gage fut envoyé à New York pour occuper la charge de commandant en chef intérimaire pendant le congé d’Amherst, et Burton fut muté à Montréal ; Frederick Haldimand* lui succéda à Trois-Rivières.
Selon Murray, Burton et Gage espéraient tous deux être nommés gouverneur civil de la nouvelle province de Québec, telle qu’établie en août 1764, et se sentirent lésés lorsque Murray fut désigné. On offrit plutôt à Burton la fonction de lieutenant-gouverneur civil de Trois-Rivières. Il refusa le poste et sollicita la permission de rentrer en Angleterre pour s’occuper de sa santé et de ses affaires personnelles. Il appert, d’après la correspondance de Murray, que Burton envisageait sans beaucoup d’enthousiasme la retraite en Angleterre avec demi-solde et qu’il fut bien content d’échapper à ce sort par suite des nouvelles dispositions qu’entraîna la décision d’Amherst de ne plus revenir en Amérique du Nord. Gage fut confirmé dans sa charge de commandant en chef des forces d’Amérique avec résidence à New York et, en octobre 1764, Burton fut informé par Gage qu’il recevrait une commission de brigadier (commandant en chef) du département du Nord dont le siège était à Montréal. Sous le commandement de Gage, il était maintenant à la tête de toutes les troupes de la province de Québec nouvellement délimitée et des postes des pays d’en-haut. Il avait donc un grade plus élevé que celui de Murray sous les ordres duquel il avait servi au cours de la campagne de Québec et qui était maintenant gouverneur civil sans commandement militaire.
Cette situation embarrassante mécontenta grandement Murray qui s’attendait à ce qu’on lui confie le commandement des troupes de la province. Murray déclara qu’on aurait dû s’en tenir à la tradition qui voulait que le gouverneur général de la Nouvelle-France soit en même temps commandant en chef. Non seulement Murray condamna dans le cas particuler de Québec la disposition qui avait cours en Amérique de dissocier les commandements civil et militaire mais sa vanité en fut profondément blessée et la chaude amitié qui le liait à Burton se transforma en suspicion et en haine amère.
La position de Burton à Montréal était particulièrement difficile. Son titre de brigadier du département du Nord lui conférait la responsabilité de la défense de toute la province et en particulier des postes de Michillimakinac, de Détroit et autres postes sur les Grands Lacs. Les commandants de ces postes avaient en définitive la responsabilité de la bonne conduite des trafiquants de fourrure, des relations avec les Indiens et, de façon générale, de la sécurité intérieure de la colonie. Tant que dura le gouvernement militaire, Burton put réquisitionner des hommes, des charrettes et des canots pour le transport des provisions essentielles à ces postes éloignés. Sous une administration civile, cette pratique devenait d’une légalité douteuse, et Murray, en tant que gouverneur, décida qu’elle devait s’exercer seulement sous son autorité et par l’intermédiaire des juges de paix.
Ces magistrats, toutefois, constituaient un autre des problèmes de Burton. Les Canadiens étant jugés inhabiles, parce que catholiques, à exercer ces fonctions, ceux qu’on nomma étaient ou bien des officiers à la retraite ou des membres du petit clan des marchands anglais. Ces marchands n’avaient pas apprécié l’attitude des officiers lesquels, préoccupés de maintenir les bonnes relations avec les Canadiens, s’étaient montrés, à l’occasion, peu soucieux des droits et des susceptibilités de leurs compatriotes. Les billets de logement pour les troupes à Montréal étaient une cause particulière de mécontentement. Jusqu’en août 1764, les capitaines de milice s’occupaient de trouver des logements et pouvaient exiger de n’importe quel chef de famille qu’il donne l’hospitalité à des soldats. Par la suite, ces marchands, qui étaient aussi juges de paix, devaient trouver les logis mais ils étaient eux-mêmes dispensés de recevoir ces hôtes rarement bienvenus.
Dans ces deux cas, Burton devait donc avoir recours à l’autorité de Murray et devait agir par l’intermédiaire de civils qui, par tradition, acceptaient mal l’autorité militaire et dont certains pouvaient avoir encore en mémoire quelques manques d’égards ou mauvais traitements. Les réquisitions de transport et les billets de logement donnèrent lieu à des conflits, compliqués de problèmes d’ordre juridique et juridictionnel, entre Murray et Burton, et ces conflits étaient envenimés par leur mésentente personnelle. Murray accusa Burton de s’immiscer dans les questions civiles et de mécontenter les commerçants ; Burton rétorqua que Murray lui refusait la collaboration qu’il était en droit d’attendre, de par sa qualité de commandant des troupes, dans l’exercice de ses fonctions militaires essentielles.
Il est difficile de juger équitablement de cette affaire, étant donné que la principale source de renseignements est constituée par les lettres de Murray à ses supérieurs et à ses amis. Les quelques lettres de Burton qui ont été conservées sont peu révélatrices à ce sujet et, pour l’instant, toute tentative de reconstitution touchant son caractère et sa conduite est fondée en grande partie sur des hypothèses. En janvier 1765, le comte de Halifax écrivit à Burton à titre de secrétaire d’État et lui enjoignit de ne pas se mêler des affaires civiles. Dans la colonie, où les marchands anglais et américains étaient tapageurs, une étroite collaboration entre le gouverneur et le commandant en chef était de première importance ; manifestement cette collaboration n’existait pas. En 1766, Murray et Burton en étaient arrivés à pouvoir à peine se parler, et les rapports entre l’armée et les commerçants étaient si mauvais qu’on pouvait craindre des désordres. Cette même année les deux hommes furent rappelés en Angleterre. Ce rappel marqua pour Burton la fin de sa carrière. Il mourut à Scarborough en 1768. Dans son testament, portant la date du 7 février 1767, il est fait mention de sa femme, Margaret, d’un fils et d’une fille ; il semble qu’il ait été beaucoup plus âgé que sa femme. À cette date, il possédait un domaine dans la paroisse de Cottingham, Yorkshire, et une maison à Londres.
Burton semble avoir gagné mérité la confiance des officiers qui l’eurent sous leurs ordres, avec l’exception possible de Murray à la bataille de Sainte-Foy, mais les dix années qu’il avait passées dans le service actif ne l’avaient sans doute pas préparé aux lourds problèmes auxquels il eut à faire face à Québec au moment de la conclusion de la paix.
APC, MG 23, GII, 1 ; RG 1, E1, 1–6 ; RG 4, A1, 2–16.— PRO, CO 5 ; CO 42/1–42/26 ; Prob. 11/948, f. 152.— Knox, Historical journal (Doughty), passim.— Frégault, La guerre de la conquête, 138–140.— Neatby, Quebec, passim.— S.M. Pargellis, Lord Loudoun in North America (New Haven et Londres, 1933).
Hilda Neatby, « BURTON, RALPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/burton_ralph_3F.html.
Information à utiliser pour d'autres types de référence bibliographique:
Permalien: | http://www.biographi.ca/fr/bio/burton_ralph_3F.html |
Auteur de l'article: | Hilda Neatby |
Titre de l'article: | BURTON, RALPH |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1974 |
Année de la révision: | 1974 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |