Titre original :  Louis Normand de Faradon., BM1,S5,P1579

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NORMANT DU FARADON, LOUIS, prêtre, sulpicien, procureur et directeur, et, par la suite, supérieur du séminaire de Saint-Sulpice de Montréal, vicaire général, né le 18 mai 1681 à Châteaubriant, France, fils de Charles Normant, médecin, et de Marie Legrand, dame Du Faradon, décédé à Montréal le 18 juin 1759.

Après ses études secondaires à Nantes, France, Louis Normant Du Faradon étudia la théologie au séminaire sulpicien d’Angers et fut admis dans la Compagnie de Saint-Sulpice à Paris le 2 novembre 1706. Il se vit confier d’abord divers emplois importants dans l’administration de sa communauté, dont l’économat du séminaire de Paris. En 1722, Normant insista pour se rendre au Canada et le supérieur général, François Lechassier, y consentit d’autant plus volontiers que François Vachon* de Belmont, supérieur de Montréal, était déjà avancé en âge et que Normant avait toutes les aptitudes requises pour le seconder. Aussi, peu de temps après son arrivée à Montréal, fut-il nommé procureur et directeur (vice-supérieur) de la Compagnie de Saint-Sulpice au Canada.

Le séjour du nouveau procureur à Montréal fut marqué à ses débuts par deux événements. À Québec, le 25 février 1725, muni d’une procuration du séminaire de Saint-Sulpice de Paris, seigneur et propriétaire de l’île de Montréal et de Saint-Sulpice, Normant Du Faradon jura foi et hommage au gouverneur général, Philippe de Rigaud* de Vaudreuil. Par la suite, le 1er septembre 1731, il comparut devant l’intendant Hocquart* pour présenter l’aveu et le dénombrement de ces mêmes seigneuries, document d’une très grande importance pour l’histoire de l’île de Montréal.

À la mort de Vachon de Belmont, le 22 mai 1732, Normant Du Faradon devint supérieur du séminaire de Montréal. Peu de temps après, il entreprit de résoudre le problème difficile du bon fonctionnement et du maintien de l’Hôpital Général de Montréal, fondé en 1692 par les Frères hospitaliers de la Croix et de Saint-Joseph [V. François Charon* de La Barre]. Vers 1735, aux prises avec de graves difficultés financières et à court de sujets, cette communauté menaçait de disparaître. En 1747, à bout de ressources, les frères Charon donnèrent leur démission [V. Jean Jeantot]. Le supérieur de Saint-Sulpice, qui prévoyait cette issue depuis longtemps, n’avait pas attendu cet événement pour leur préparer des successeurs. Il suggéra aux autorités de la colonie de les remplacer par les sœurs grises.

Monsieur Normant avait pris une part active à la fondation de cette nouvelle institution, en 1738, par Marie-Marguerite Dufrost* de Lajemmerais, veuve de François-Madeleine d’Youville. Il avait exhorté la fondatrice à se consacrer au service des pauvres et des malades. Après que la communauté se fut installée avec quelques pauvres dans une maison sise à proximité de l’église Notre-Dame, il la visita souvent, l’encouragea à persévérer, rédigea même à son intention un règlement qui est à l’origine des constitutions des sœurs grises. Le supérieur croyait que la nouvelle communauté offrait les garanties suffisantes pour assumer la direction de l’Hôpital Général. Mais le gouverneur Charles de Beauharnois, Mgr de Pontbriand [Dubreil] et l’intendant Hocquart n’en étaient pas aussi convaincus. Ils s’opposèrent d’abord au projet du supérieur mais, en 1747, forcés par les circonstances, ils finirent par accepter de confier temporairement à madame d’Youville et à ses sœurs la direction de l’hôpital.

Cependant l’essai fut de courte durée car, en 1750, l’intendant Bigot*, de concert avec Mgr de Pontbriand et le gouverneur La Jonquière [Taffanel], émit une ordonnance qui supprimait l’institution et transférait tous ses biens aux religieuses de l’Hôpital Général de Québec. C’est alors que les interventions du sulpicien se firent plus nombreuses et plus pressantes. Dès avant l’ordonnance, prévoyant une solution défavorable, Normant Du Faradon avait rédigé une requête, signée par les sœurs grises, dans laquelle il signalait aux autorités le tort considérable que la suppression de l’Hôpital Général allait causer aux habitants de Montréal. Après l’ordonnance de Bigot, devant le mécontentement croissant des citoyens, Normant prit l’initiative d’adresser en leur nom à Antoine-Louis Rouillé, ministre de la Marine, une supplique en leur faveur. En même temps, il mettait au courant de toute l’affaire le supérieur général de Saint-Sulpice, Jean Couturier, très influent à la cour de France. Grâce à ces multiples démarches, Normant finit par obtenir la solution la plus favorable que l’on pût espérer. En 1753, par lettres patentes, Louis XV remettait madame d’Youville en possession de l’Hôpital Général et approuvait définitivement la communauté qu’elle avait fondée.

L’action de Normant Du Faradon ne devait pas se limiter à la seule ville de Montréal. Comme représentant du supérieur général de Paris, il était responsable de l’administration de tous les domaines que le séminaire de Saint-Sulpice possédait au Canada et qui comprenaient trois seigneuries : celle de l’île de Montréal, celle de Saint-Sulpice et celle du Lac-des-Deux-Montagnes. En 1735, à la demande de M. Normant, les sulpiciens obtinrent qu’on augmentât de plus de moitié cette dernière seigneurie, afin de mettre à la disposition des Indiens du lac des Deux-Montagnes un territoire de chasse plus étendu. La même année, ils agrandirent leur domaine en acceptant la moitié du fief de Saint-Herman et la moitié du fief de Bourgchemin, que Mgr Dosquet*, ancien sulpicien, leur avait données avant son départ définitif pour la France. Ces fiefs étaient situés au sud de la seigneurie de Sorel, de part et d’autre de la rivière Yamaska. Si les guerres de la fin du régime français empêchèrent l’établissement de colons sur ces terres et sur celles du lac des Deux-Montagnes, Normant Du Faradon avait réussi par contre à mettre en valeur, dans presque toute leur étendue, la seigneurie de Saint-Sulpice et celle de l’île de Montréal.

En 1726, Mgr de Saint-Vallier [La Croix*] l’avait nommé vicaire général pour la région de Montréal ; Mgr Dosquet l’avait confirmé dans cette charge en 1729 et il le nomma administrateur du diocèse de Québec durant ses longues absences, de 1732 à 1733 et de 1735 à 1739. C’est pendant cette dernière période que le sulpicien exerça certaines fonctions qui normalement relevaient de l’évêque. C’est ainsi qu’en 1738 et en 1739, il fit la visite canonique des paroisses Saint-Pierre-de-Sorel et La Visitation-de-l’Île-Dupas, Saint-Charles-de-Lachenaie où il prit les mesures nécessaires à la reconstruction du presbytère, Sainte-Trinité-de-Contrecœur et Saint-Joseph-de-Chambly où il ordonna la reconstruction des églises, et de Pointe-Olivier (Saint-Mathias) où il fit construire une chapelle.

Le 20 août 1740, jour de la mort de Mgr de Lauberivière [Pourroy*], le chapitre de Québec prit sur lui de ne pas renouveler à Normant Du Faradon son mandat de vicaire général. Mais un an après, Mgr de Pontbriand le rétablit dans ses fonctions qu’il exerça jusqu’en 1759. Pendant ce deuxième mandat, Normant Du Faradon s’occupa surtout de construction d’églises. Il était devenu nécessaire de renouveler les édifices religieux dans la région de Montréal par suite de l’accroissement de la population et des progrès réalisés depuis 30 ans dans le domaine de la colonisation. Le nombre des habitants et l’étendue des terres défrichées avaient plus que doublé. Il fallait agrandir ou démolir les anciens bâtiments devenus insuffisants et en rebâtir d’autres plus spacieux. De plus, les terres nouvellement défrichées se trouvaient surtout à l’arrière des anciennes seigneuries, loin des églises situées généralement à l’autre extrémité sur le bord des cours d’eau ; celles-ci étaient devenues pratiquement inaccessibles aux habitants qui demandèrent la fondation de nouvelles paroisses. C’est ce que Mgr de Pontbriand constata lors de sa première visite pastorale en 1742, et il émit plusieurs ordonnances obligeant les paroissiens à renouveler ou à agrandir leurs églises. Le vicaire général avait ensuite pour tâche d’appliquer les ordonnances, de choisir le site des nouveaux édifices s’il y avait lieu, d’approuver les plans des architectes, de trouver les moyens de subvenir à l’entretien des curés et d’inaugurer les nouveaux temples.

Pour le sulpicien, cette tâche n’était pas nouvelle. De 1729 à 1740, il avait déjà présidé à la construction de plusieurs églises : Notre-Dame-de-Lorette du Lac-des-Deux-Montagnes, Saint-Louis-de-Terrebonne, Saint-Laurent, île de Montréal, Saint-Denis (Saint-Denis-sur-Richelieu), Saint-Joseph-de-Chambly, Pointe-Olivier, le presbytère-chapelle de Sainte-Geneviève-de-Pierrefonds. En 1742, le vicaire général surveilla la construction de deux églises sur l’île Jésus : Saint-Vincent-de-Paul et Sainte-Rose. En 1744, les paroisses Saint-Constant et Saint-Philippe furent érigées dans les profondeurs de la seigneurie de Laprairie et Mgr de Pontbriand ordonna que les paroissiens obtiennent l’approbation de son vicaire général pour la construction de ces deux églises qu’on bâtira de 1749 à 1751. Enfin, au cours de la visite pastorale de 1749, l’évêque ordonna de reconstruire en pierre quatre églises, toutes situées dans le domaine du séminaire de Saint-Sulpice : Saint-Joachim-de-la-Pointe-Claire, La Visitation-du-Sault-au-Récollet, Saint-Pierre-du-Portage-de-L’Assomption et Sainte-Geneviève-de-Pierrefonds. Ces multiples travaux, exécutés sous la haute direction de Louis Normant Du Faradon, suffisent à justifier le titre de constructeur d’églises qu’on lui a attribué.

En 1753, le supérieur fut atteint d’une maladie grave dont il ne se remit jamais complètement et qui l’obligea à abandonner une partie de ses occupations. Pour l’aider, il fit appel à Étienne Montgolfier*, qu’il avait déjà commencé à initier aux affaires des seigneuries, et, le 21 janvier 1759, quelques mois avant sa mort survenue le 18 juin suivant, il lui confia toute l’administration en démissionnant en sa faveur.

Le séminaire de Montréal perdait en Louis Normant Du Faradon un de ses supérieurs les plus remarquables. Homme de science et de vertu, doué d’un jugement très solide, il se distingua surtout par l’étendue de ses connaissances en droit civil et en droit ecclésiastique qui lui ont permis de conduire avec une grande habileté les affaires temporelles de Saint-Sulpice.

Antonio Dansereau

AD, Loire-Atlantique (Nantes), État civil, Châteaubriant, 20 mai 1681.— ASSM, Catalogue historique et chronologique des prêtres du séminaire de Montréal ; Section des biographies ; Section des concessions de terre d’emplacement de l’île de Montréal ; Section des titres de propriété du séminaire de Montréal.— Aveu et dénombrement pour l’île de Montréal, RAPQ, 1941–1942, 3–163.— Allaire, Dictionnaire.— Le diocèse de Montréal à la fin du dix-neuvième siècle (Montréal, 1900).— Gauthier, Sulpitiana.— P.-G. Roy, Inv. concessions.— É.-J. Auclair, Sainte-Rose-de-Laval : notice historique sur les origines de la paroisse (Montréal, 1940),— C. P. Beaubien, Le Sault-au-Récollet, ses rapports avec les premiers temps de la colonie ; mission-paroisse (Montréal, 1898).— A.-L. Bertrand, Bibliothèque sulpicienne ou histoire de la Compagnie de Saint-Sulpice (3 vol., Paris, 1900).— Azarie Couillard-Després, Histoire de la seigneurie de Saint-Ours (2 vol., Montréal, 1915) ; Histoire de Sorel, de ses origines à nos jours (Montréal, 1926).— J.-U.-A. Demers, Histoire de Sainte-Rose, 1740–1947 (Montréal, 1947).— René Desrochers, Précis historique, deuxième centenaire de la paroisse Saint-Mathias, Souvenir des fêtes du deuxième centenaire de la paroisse Saint-Mathias (Montréal, 1939).— [É.-M. Faillon], Vie de Madame dYouville, fondatrice des Sœurs de la Charité de Villemarie dans lîle de Montréal en Canada (Villemarie [Montréal], 1852).— Gosselin, LÉglise du Canada jusquà la conquête.— Lemire-Marsolais et Lambert, Histoire de la Congrégation de Notre-Dame, III, IV, V, passim.— L.-P. Phaneuf, Historique de Saint-Mathias (« Cahiers de la Société historique de la Vallée du Richelieu », V, Saint-Jean, 1955.— Christian Roy, Histoire de LAssomption (L’Assomption, 1967).— Robert Rumilly, Histoire de Saint-Laurent (Montréal, 1969).— Émile Salone, La colonisation de la Nouvelle-France ; étude sur les origines de la nation canadienne française (Paris, 1906 ; Trois-Rivières, 1970).— Trudel, LÉglise canadienne.— Jacques Viger, Archéologie religieuse du diocèse de Montréal, 1850 (Montréal, 1850).— J.-J. Lefebvre, Saint-Constant et Saint-Philippe de Laprairie, 1744–1946, RSHÉC, 1945–1946, 125–158.

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Antonio Dansereau, « NORMANT DU FARADON, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/normant_du_faradon_louis_3F.html.

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Auteur de l'article:    Antonio Dansereau
Titre de l'article:    NORMANT DU FARADON, LOUIS
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    28 novembre 2024