DEGEAY, JACQUES, prêtre, sulpicien et curé, né dans la paroisse Saint-Nizier de Lyon, France, le 31 mars 1717, fils de Henri Degeay et de Marie Bournicat, décédé à Montréal le 6 août 1774.

En février 1740, Jacques Degeay, déjà tonsuré, entrait au séminaire Saint-Irénée de Lyon, dirigé par les sulpiciens. Ses maîtres le trouvèrent tout à la fois bonasse et un peu opiniâtre, deux traits de caractère qui se manifesteront toute sa vie, et qui expliquent peut-être qu’en janvier 1742 le conseil de Paris demanda un supplément d’information avant de l’accepter dans la Compagnie de Saint-Sulpice. Il semble avoir été ordonné prêtre au printemps de cette même année.

Arrivé à Montréal le 21 juillet suivant, Degeay fit d’abord du ministère à la paroisse Notre-Dame jusqu’en octobre. Dès novembre, il succédait à Pierre Le Sueur* comme curé de Saint-Pierre-du-Portage (L’Assomption, Québec). Il devait y rester 32 ans, y déployant son activité non seulement comme missionnaire, mais aussi comme bâtisseur, brasseur d’affaires et apôtre auprès des petites gens. Les modestes installations paroissiales de Le Sueur menaçaient ruine. Degeay assainit les finances, acheta un terrain avec ses propres deniers, consulta ses paroissiens et, malgré l’opposition de quelques récalcitrants, commença, en 1750, la construction d’une église et d’un presbytère de pierres, et ouvrit un nouveau cimetière. Tous ces travaux avaient été approuvés par Mgr de Pontbriand [Dubreil*] lors de sa visite pastorale en juin de l’année précédente. Le 23 juin 1750, Louis Normant* du Faradon bénissait la pierre angulaire. Degeay compléta l’église par l’addition d’un clocher à trois cloches, dont l’une était sa propriété, et par une ornementation digne de ce lieu. Jusqu’à sa mort il employa, à différents moments, les sculpteurs Gilles Bolvin*, Philippe Liébert* et François Guernon*, dit Belleville. Dans ce milieu à croissance rapide – la paroisse passe de 500 âmes environ en 1742 à plus de 3 000 en 1774 – il exerça son ministère avec dévouement, tout en faisant preuve de remarquables qualités d’organisateur. Il se fit le promoteur du développement du village, encouragea l’enseignement dans les écoles, aida de son argent ses paroissiens et leur céda des lopins de terre qui lui appartenaient.

Degeay fut la providence des Acadiens qui vinrent s’établir dans la seigneurie de Saint-Sulpice. Après entente avec le gouvernement, les sulpiciens avaient offert des terres à ces déportés errant depuis dix ans en Nouvelle-Angleterre. En septembre 1766, un groupe d’environ 80 personnes arrivait à Saint-Pierre-du-Portage, suivi, un an plus tard, de 37 familles. Ils s’établirent à une douzaine de milles au nord de Saint-Pierre et ce fut là le noyau de la future paroisse de Saint-Jacques-de-l’Achigan. En plus de leur fournir tout ce qui était nécessaire à leur vie matérielle, Degeay procéda à la validation des mariages et compléta les cérémonies de baptême.

Le caractère opiniâtre de Degeay lui attira des ennuis avec les autorités civiles de Québec. Ayant marié un individu qu’il ignorait être un déserteur de l’armée britannique, il s’attira les foudres du lieutenant-gouverneur Guy Carleton* en 1766. Il s’ensuivit un échange de lettres assez vives entre les deux hommes et, finalement, le curé dut s’excuser auprès de Carleton du ton de ses propos. Ce fut l’occasion pour Étienne Montgolfier d’écrire à Mgr Briand qu’il se défiait du « caractère un peu bouillant de ce curé ».

Dès 1771, Degeay ressentit les atteintes du mal qui devait l’emporter et fit un premier séjour à l’Hôtel-Dieu de Montréal. Il y retourna au début de juillet 1774 et fit son testament, laissant, entre autres, sa cloche à l’église de Saint-Jacques-de-l’Achigan, ce qui devait soulever une querelle entre les habitants de cette paroisse et ceux de Saint-Pierre-du-Portage. Il mourut le 6 août et fut inhumé le 8, sous l’église Notre-Dame, laissant, selon l’historien Christian Roy, « des œuvres personnelles extrêmement fécondes, une seigneurie presque entièrement colonisée, et une paroisse probablement unique en son genre ».

J.-Bruno Harel

ACAM, 355.114.— Archives du séminaire Saint-Irénée (Lyon, France), Registre des ordinations, 1740–1741.— Archives municipales, Lyon (dép. du Rhône, France), État civil, Saint-Nizier, 31 mars 1717.— Archives paroissiales, L’Assomption-de-la-Sainte-Vierge (L’Assomption, Québec), Registre des baptêmes, mariages et sépultures, 1742–1774.— ASSM, 15, testament de Jacques Degeay ; 24, Dossier 6, passim.— Sur deux retables de l’église de L’Assomption, Raymond Douville, édit., RHAF, XII (1958–1959) : 30–34.— Guy Courteau et François Lanoue, Une nouvelle Acadie, Saint-Jacques de L’Achigan, 1772–1947 ([Montréal, 1947]).— Christian Roy, Histoire de l’Assomption ([L’Assomption, 1967]).

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J.-Bruno Harel, « DEGEAY, JACQUES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/degeay_jacques_4F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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