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BETHUNE, JOHN, ministre de l’Église d’Écosse, né en 1751 à Brebost (probablement dans les environs d’Orbost, Écosse), fils d’Angus Bethune et de Christian Campbell ; le 30 septembre 1782, il épousa à Montréal Véronique Waddens, fille de Jean-Étienne Waddens*, et ils eurent neuf enfants ; décédé le 23 septembre 1815 à Williamstown, Haut-Canada.
John Bethune était issu d’une famille respectée dans l’île de Skye, en Écosse, son père étant le descendant d’un des lairds de Balfour. Néanmoins, il vécut, semble-t-il, toute son enfance dans la pauvreté : il obtint une bourse d’études lorsqu’il était en troisième année au King’s College, et le synode de Glenelg, à la demande du consistoire de Skye, accorda £5 à sa famille en 1770 pour l’aider à payer ses études. Après avoir obtenu une licence ès lettres du King’s College en 1769 et une maîtrise ès lettres en 1772, Bethune retourna à l’île de Skye et fut reçu ministre de l’Église d’Écosse. En juillet 1774, le synode critiqua le consistoire de Skye pour avoir autorisé Bethune à devenir ministre avant qu’il n’eût été présenté à la réunion de ce même synode. D’après le consistoire, cependant, on avait dû faire vite. En effet, peu après son retour d’Aberdeen, Bethune avait décidé d’émigrer avec quelques membres de sa famille en Caroline du Nord, colonie qui était devenue un refuge pour des milliers de Highlanders durant les années qui suivirent le soulèvement jacobite de 1745–1746. Il semble donc très probable qu’en autorisant précipitamment Bethune à devenir ministre le consistoire avait voulu le préparer pour son ministère en Amérique.
La famille Bethune arriva en Caroline du Nord en 1773. Le 14 juin 1775, John fut engagé comme aumônier du 1er bataillon des Royal Highland Émigrants (connu plus tard sous le nom de 84e régiment), unité loyaliste levée dans la province de Québec par Allan Maclean*. Avant d’assumer cette fonction, il participa à la bataille de Moores Creek Bridge (près de Wilmington) en février 1776, probablement au moment où il exerçait les fonctions d’aumônier dans la milice royale de la Caroline du Nord. Comme des centaines d’autres Highlanders lors de cet engagement, Bethune fut capturé par les rebelles victorieux et emprisonné. Il fut détenu pendant un certain temps à Philadelphie, et c’est de là que, le 31 octobre 1776, lui et un groupe de compagnons prisonniers demandèrent la permission de rejoindre leurs familles. Bien qu’il n’y ait pas de preuve certaine, il est probable qu’il fut relâché à ce moment-là, et qu’il se mit en route pour New York. Quoi qu’il en soit, on n’entend plus parler de lui avant la fin de 1778, quand il arriva à Halifax où le 2e bataillon des Royal Highland Émigrants était cantonné.
Après son arrivée en Nouvelle-Écosse, Bethune assuma la fonction d’aumônier du 1er bataillon, aida au recrutement des Highlanders et exerça son ministère auprès des colons loyalistes. Son séjour dans la colonie fut cependant de courte durée. En août 1779, il était installé à Montréal pour s’acquitter de sa charge d’aumônier du le` bataillon de son régiment. Il y exerça ses fonctions ordinaires d’aumônier, célébrant les cérémonies de mariage et de baptême pour le personnel militaire du 84e et des autres régiments. Étant donné que les presbytériens de la ville n’avaient pas d’église à eux, Bethune assistait aux offices dirigés par le rector anglican de Montréal, David Chabrand* Delisle. C’est ce dernier qui célébra le mariage de Bethune et de Véronique Waddens en septembre 1782.
De 1783 jusqu’au licenciement du 84e régiment l’année suivante, Bethune demeura en poste dans la garnison de l’île Carleton (New York). Une fois démobilisé, il passa un an au fort Oswegatchie (Ogdensburg, New York) avant de retourner à Montréal en 1786, où il vécut de sa demi-solde tout en continuant à célébrer des mariages et des baptêmes pour le personnel militaire. D’autres Montréalais se groupèrent autour de lui : des Écossais presbytériens, des Loyalistes hollandais et allemands, ainsi que des amis anglicans. Comme ils étaient assez nombreux pour former une congrégation, les fidèles de Bethune louèrent une grande salle, rue Notre-Dame, où Bethune célébra un office presbytérien le 12 mars 1786. Il continua à desservir sa « petite mais intéressante » congrégation jusqu’à ce qu’il s’installât en mai 1787, à la demande d’un groupe de colons des Highlands, dans la région ouest de la province de Québec, laquelle allait bientôt devenir le Haut-Canada. Bien que sa congrégation de Montréal eût une existence éphémère, il convient de noter qu’elle fut la première congrégation presbytérienne à l’ouest de la ville de Québec et qu’elle devait plus tard donner naissance à l’église St Gabriel Street, église mère du presbytérianisme au Canada.
Bethune consacra le reste de sa vie à son ministère auprès des colons des Highlands du comté de Glengarry, dans le Haut-Canada, et à sa famille de six fils et de trois filles. Son aptitude à prêcher en gaélique le rendit fort utile à ses nouvelles ouailles et, en retour de l’accueil qu’on lui fit, il se dévoua durant des années. Il organisa à Williamstown, son lieu de résidence, une congrégation presbytérienne et eut bientôt la satisfaction de voir bâtir une église en bois rond, qui fut remplacée avant sa mort par un bâtiment en pierre. Il prêcha, mit sur pied des congrégations et encouragea la construction d’églises en bois dans les agglomérations avoisinantes de Lancaster, de Martin-town et de Cornwall. En dehors du soutien financier que sa congrégation lui accordait, il reçut 2 000 acres de terre à titre d’aumônier retraité, puis obtint en 1811 une parcelle de terrain dans le village de Cornwall, qui vint s’ajouter à ses autres propriétés. En 1789, il commença de toucher un traitement annuel de £50 du gouvernement provincial. Son salaire cessa de lui être versé peu après la création de la nouvelle province du Haut-Canada, mais on recommença bientôt à le payer, après que 150 presbytériens des comtés de Glengarry et de Stormont eurent signé une pétition soutenant que Bethune n’était « pas un aventurier de fraîche date, mais un gentleman d’une loyauté reconnue » et qu’il avait besoin de son salaire du gouvernement pour « ne pas vivre dans la misère et, par conséquent, dans le mépris ».
Les rapports de Bethune avec le lieutenant-gouverneur Simcoe se compliquèrent par suite de la controverse entourant le Marriage Act de 1793, lequel réservait la célébration des mariages aux ministres de l’Église d’Angleterre et aux juges de paix. En mars 1796, les presbytériens du comté de Grenville rédigèrent une pétition dénonçant cette loi qui faisait d’eux des « étrangers dans leur propre pays ». Dans sa réponse aux pétitionnaires, Simcoe déclara que leur demande était « l’œuvre d’un esprit pervers et d’un cœur des plus déloyaux ». Il prévint plus tard le secrétaire d’État à l’Intérieur qu’après avoir critiqué la loi sur le mariage on en viendrait à exiger le partage des terres réservées au « clergé national ». Simcoe, qui avait admis que Bethune était « un homme au caractère des plus loyaux », fit également remarquer que ce dernier « avait signé la pétition, et qu’on prétend[ait] même qu’il en [était] l’auteur ».
Bethune fut un des rares ministres de l’Église d’Écosse qui œuvra dans le Haut-Canada avant la guerre de 1812. Il n’était pas toutefois complètement isolé des autres ministres, presbytériens ou autres. Il retournait souvent avec sa famille à Montréal pour des séjours prolongés lorsqu’un baptême ou des affaires ecclésiastiques l’y appelaient et, dans ces occasions, il rencontrait des collègues, dont John Young*, ministre presbytérien qui lui avait succédé à Montréal. Il vivait en paix avec le prêtre catholique du comté de Glengarry, l’abbé Alexander McDonell*, mais il eut soin d’avertir ses ouailles qu’elles devaient, tout en demeurant en bons termes avec leurs voisins catholiques, « fuir leurs principes comme la peste ». Il s’était en outre lié d’amitié avec le ministre anglican John Strachan*. Lorsque celui-ci enseigna à Cornwall de 1803 à 1812, Bethune lui confia la garde de ses fils et, plus tard, il permit même à deux d’entre eux, John* et Alexander Neil*, de recevoir les ordres dans l’Église d’Angleterre, n’ayant pas les moyens de les envoyer étudier en Écosse.
On n’en connaît guère plus sur Bethune. Il semble avoir enseigné à Cornwall de 1812 à 1814 ; il se peut qu’il ait participé à titre d’aumônier à l’attaque lancée par George Richard John Macdonell* contre Ogdensburg en février 1813. Au mois de juin 1815, il fut nommé commissaire de la voirie pour le district d’Eastern. Quelques jours avant sa mort en 1815, il prononça un discours devant sa congrégation de Williamstown où il mentionnait sa « santé précaire » et soulignait la nécessité d’avoir un assistant. Faisant remarquer que « cette mesure essentielle rencontrait] une apathie si grande, tant on était convaincu qu’[il] survivrait à toute la congrégation », il avertit ses paroissiens que s’il mourait avant qu’un assistant n’eût été désigné, ceux-ci tomberaient bientôt dans le « piège » tendu par l’Église catholique, « religion arrogante » dont les membres se croyaient « les seuls élus de Dieu ». Il déclara également qu’il y avait des « gentlemen » au Bas-Canada qui leur « apporteraient volontiers toute l’aide qui était en leur pouvoir » pour trouver un ministre des Highlands. Mais « sans un effort prompt et vigoureux de votre part, ajoutait-il, le problème va traîner en palabres inutiles, erreur très fréquente dans toutes vos transactions publiques ».
John Bethune est le ministre le plus honoré et le plus respecté parmi les pionniers de l’Église d’Écosse au Canada, et ses enfants lui firent honneur. John et Alexander Neil occupèrent des postes élevés dans la hiérarchie de l’Église d’Angleterre, le premier comme doyen de Montréal et le second comme évêque de Toronto. Parmi ses autres fils, James Gray* devint banquier, Angus* fut nommé agent principal de la Hudson’s Bay Company, et Donald* fonda une importante compagnie de navigation. Une de ses filles, Cecilia, épousa John Kirby*, marchand de Kingston et conseiller législatif. Le plus connu de ses descendants est Norman Bethune*, l’un des héros de la Révolution chinoise.
L’adresse de John Bethune, To the members of the Presbyterian congregation at Williamstown, and of the other Presbyterian congregations connected with them in Glengary, a été imprimée à Montréal en 1815. Une copie est disponible aux AO dans la Church records coll., MU 545, no 34 (Martintown, St Andrew’s Presbyterian).
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Elizabeth Ann Kerr McDougall, « BETHUNE, JOHN (1751-1815) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/bethune_john_1751_1815_5F.html.
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Auteur de l'article: | Elizabeth Ann Kerr McDougall |
Titre de l'article: | BETHUNE, JOHN (1751-1815) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |