YOUNG, JOHN, ministre presbytérien et instituteur, né vers 1759 à Beith, Écosse, fils unique de James Young, instituteur ; décédé le 10 mars 1825 à Sheet Harbour, Nouvelle-Écosse.

John Young fit ses études à l’University of Glasgow et reçut du consistoire d’Irvine, le 29 novembre 1785, l’autorisation de prêcher. Comme l’Écosse offrait peu de places vacantes, il choisit d’émigrer avec sa femme, Mary Kerr, et leur fille qui était encore bébé. En 1787, le consistoire de New York l’accepta pour suffragant et l’envoya visiter des congrégations qui manquaient de pasteurs, au nord et à l’ouest d’Albany. Bientôt invité, il fut ordonné puis nommé ministre des congrégations unies de Schenectady et Currie’s Bush en 1788. En octobre 1790, le consistoire de New York se scinda, et Young et sa congrégation se trouvèrent affiliés au nouveau consistoire d’Albany. Presque immédiatement, Young demanda la dissolution de ses liens pastoraux avec sa congrégation. On l’avait accusé d’un manquement grave, l’ivrognerie probablement. En ce moment critique, et à l’insu de sa congrégation, il se rendit à Montréal, où les presbytériens n’avaient pas de ministre. En décembre 1790 eut lieu une enquête consistoriale sur la conduite de Young ; il fut de nouveau admis à son poste, mais seulement à titre d’« intérimaire avec autorisation », c’est-à-dire en probation jusqu’à la prochaine réunion du consistoire, en mars suivant.

À Montréal, les presbytériens avaient célébré le culte avec les anglicans jusqu’à ce que le révérend John Bethune* fonde une petite congrégation séparée en mars 1786. Apparemment, après le départ de Bethune en 1787, les presbytériens réintégrèrent la congrégation protestante, groupe anglican qui devint plus tard, sous la direction de David Chabrand* Delisle, la Christ Church. Ils continuaient cependant de chercher un autre ministre tandis que, de son côté, Young cherchait une autre congrégation. Lorsque le consistoire d’Albany lui communiqua, à son assemblée de mars 1791, l’invitation de deux congrégations relevant de sa compétence, Young refusa donc, afin de demeurer libre pour Montréal où Duncan Fisher*, entre autres, était en train d’organiser une congrégation pour lui. En septembre, Young rapporta au consistoire d’Albany qu’il s’adonnait à la prédication à Montréal et demanda d’y être nommé à titre d’intérimaire avec autorisation. Four sa part, la congrégation montréalaise appuya sa requête et demanda d’être affiliée au consistoire d’Albany. Les marchands de cette ville entretenaient des relations avec ceux de Montréal depuis des années, ce qui explique sans doute pourquoi la demande fut acceptée.

L’affectation de Young fut probablement le seul lien officiel qui exista entre un consistoire américain et une congrégation bas-canadienne jusqu’à la fondation de la congrégation American Presbyterian à Montréal en 1822. Toutefois, cette union fut éphémère et stérile. En 1792, le consistoire ne reçut aucun compte rendu de Young ou de sa congrégation, même s’ils avaient construit une église, ouverte au culte le 7 octobre, sur la rue Saint-Philippe (rue Saint-Gabriel). L’année suivante, la nouvelle congrégation Scotch Presbyterian, connue par la suite sous le nom de St Gabriel Street, obtint d’être séparée du consistoire d’Albany pour se joindre à celui de Montréal, qui avait été formé par Young, Bethune et Alexander Spark*, de Québec. Cependant, le nouveau consistoire fut dissous peu de temps après, apparemment par suite d’une altercation entre Young et Spark.

En plus de desservir sa propre congrégation, Young faisait de temps en temps des visites missionnaires qui le menaient jusqu’aux seigneuries Saint-Armand et Caldwell’s Manor, ou Foucault, dans la baie de Missisquoi. À Montréal, il célébrait à l’occasion les offices pour les anglicans car leur pasteur, James Marmaduke Tunstall, avait parfois l’esprit dérangé ; il entretint aussi d’excellentes relations avec le successeur de Tunstall, Jehosaphat Mountain*, qu’il assista à l’occasion. Par ailleurs, il était aumônier des soldats presbytériens de la garnison, fonction pour laquelle le gouvernement lui versait £50 par an. Ce salaire devait être le bienvenu : les appointements que Young recevait de sa congrégation étaient modestes et, n’ayant pas de presbytère, il devait louer un logement. Son maigre revenu suffisait à peine aux besoins de sa famille ; de plus, Young continuait à boire et avait peut-être un penchant pour le jeu. Le fardeau s’avérait apparemment trop lourd, et Young avait constamment des difficultés financières.

Malgré ses problèmes personnels, Young donna dans l’ensemble satisfaction à sa congrégation au moins jusqu’en 1800, année durant laquelle sa position fut ébranlée lors d’une lutte de pouvoir opposant le comité des affaires séculières, jusqu’alors inactif, et le tribunal ecclésiastique, qui avait comblé le vide et gérait l’ensemble de la vie de la congrégation. Young ne pouvait manquer d’être identifié à ce tribunal dont le secrétaire de toujours, Duncan Fisher, était son proche collaborateur. Les élections de 1800 au tribunal se soldèrent par un balayage, et Fisher se trouva parmi les candidats défaits. En novembre, quelques membres de la congrégation, dont deux marchands influents, Isaac Todd* et Alexander Henry, proposèrent le renvoi de Young, mais la congrégation rejeta leur motion sans équivoque. L’année suivante, le comité des affaires séculières commença de déposer des plaintes sur la conduite personnelle de Young auprès du tribunal qui lui interdit d’administrer les sacrements tant qu’il ne se serait pas disculpé. Young refusa l’interdiction et, en août 1802, le tribunal, dont Fisher était redevenu secrétaire, lui ferma la porte de l’église. Cette fois, une écrasante majorité de la congrégation vota son renvoi, tandis que Fisher s’abstenait. Young fut remplacé temporairement par Robert Forrest, puis définitivement par James Somerville*. Cependant, l’engagement de ce dernier révéla au sein de la congrégation de profondes divisions socio-ethniques [V. Robert Easton] qui avaient peut-être contribué à la chute de Young.

Après son renvoi, John Young se rendit à Niagara (Niagara-on-the-Lake, Ontario), mais il dut bientôt quitter la congrégation qu’il desservait, à cause de son alcoolisme. Il alla ensuite à Stamford (Niagara Falls) où, jusque vers 1804, il prêcha le dimanche et enseigna la semaine. Vers 1813, il fut pendant peu de temps ministre d’une congrégation établie près du lac Champlain puis, peut-être l’année suivante, il s’installa à Lunenburg, en Nouvelle-Écosse. Finalement, il s’établit en 1821 à Sheet Harbour, où il reprit la prédication et l’enseignement ; l’école servait d’église et il y logeait. En dépit de son alcoolisme, il avait l’estime générale de la population dans ce tout nouveau village. Grand et gras (il mesurait six pieds six pouces et sa femme était aussi d’une taille exceptionnelle), cet homme « au regard d’aigle » était, selon le ministre presbytérien John Sprott*, « un prédicateur réfléchi et rigoureux ». Toutefois, il mourut moins de cinq ans après son arrivée. Sa tombe fut creusée, signale Sprott, « sur le rivage battu par les flots, à quelques verges de la mer et à quelques verges de la forêt ». L’Acadian Recorder, qui notait en Young la présence des « faiblesses de la nature humaine », ajoutait : « peu de gens ont davantage connu les vicissitudes du sort pendant leur passage sur cette terre ». Quatre de ses huit enfants étaient morts en bas âge ; deux autres avaient été laissés à Montréal en 1802 et un troisième peut-être ailleurs ; à sa mort, rapportait encore l’Acadian Recorder, Young laissait à Sheet Harbour « une veuve âgée et une fille sourde et muette ».

Elizabeth Ann Kerr McDougall

ANQ-M, CE1-126, 1791–1802.— Acadian Recorder, 19 mars 1825.— R. Campbell, Hist. of Scotch Presbyterian Church.— Gregg, Hist. of Presbyterian Church (1885).— H. S. M’Collum, « Canadian Presbyterian history, no. ii », Canada Presbyterian (Toronto), nouv. sér., 1 (1877–1878) : 434–435.— E. A. [Kerr] McDougall, « The American element in the early Presbyterian Church in Montreal (1786–1824) » (thèse de m.a., McGill Univ., Montréal, 1965), 37–38, 59–73, 170.— J. S. Moir, Enduring witness ; a history of the Presbyterian Church in Canada ([Hamilton, Ontario, 1974]).— J. E. Rutledge, Sheet Harbour, a local history (Halifax, 1954), 80.

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Elizabeth Ann Kerr McDougall, « YOUNG, JOHN (mort en 1825) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/young_john_1825_6F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
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