CROSSKILL, JOHN HENRY, éditeur, officier de milice, journaliste et fonctionnaire, né le 4 mars 1817 à Halifax, fils de Henry Crosskill et de Catherine Charlotte Weeks ; le 30 septembre 1847, il épousa Sarah Ann McIntosh, de Halifax, et ils eurent trois enfants ; décédé le 13 février 1857 dans cette ville.
John Henry Crosskill était issu d’une famille en vue de la Nouvelle-Écosse. Son arrière-grand-père maternel, John Fillis*, marchand de Halifax, siégea à la première chambre d’Assemblée de la province en 1758, et son grand-père paternel, John Crosskill*, fonda Bridgetown, en Nouvelle-Écosse. John Henry, dont le père était un sportif et un boxeur, fit son apprentissage chez William Gossip* et John Charles Coade, éditeurs du Times (Halifax), publia un numéro d’une revue littéraire en octobre 1837 et servit comme officier de milice à partir de 1839. En 1838, il avait compilé et publié à Halifax un des premiers manuels dans la province, A comprehensive outline of the geography and history of Nova Scotia […], dont 1 000 exemplaires, écrivait-il dans la préface de la deuxième édition en 1842, furent écoulés en « quelques mois ». Inspiré de l’ouvrage de Thomas Chandler Haliburton*, An historical and statistical account of Nova-Scotia, paru à Halifax en 1829, ce manuel mettait l’accent sur le potentiel économique et culturel de la province.
Le 1er octobre 1840, Crosskill lança le Halifax Morning Post & Parliamentary Reporter. Il s’agissait du deuxième journal à un penny et, à partir d’octobre 1844, du premier quotidien de la Nouvelle-Écosse. Disposant d’une abondance de nouvelles apportées par les vapeurs océaniques que venait de mettre en service Samuel Cunard*, et aidé par une presse mécanique, le Post introduisit un nouveau journalisme décrit par Daniel Cobb Harvey* comme n’ayant « aucun principe, sauf celui de pourvoir aux plaisirs de la population, et aucune politique, sauf celle d’augmenter le tirage ». De 1843 à mai 1844, il publia aussi le journal Olive Branch, lequel était associé au mouvement de tempérance.
Crosskill publia dans le Post, en janvier 1844, The prince and his protégé, une satire anonyme qui était due à la plume du réformiste George Renny Young et qui avait pour cible le lieutenant-gouverneur, le vicomte Falkland [Cary*]. Puis, en février, lorsque John Sparrow Thompson* résigna ses fonctions comme imprimeur de la reine pour une question de principe, Crosskill accepta ce poste qui comportait la charge de rédacteur en chef de la Royal Gazette. Il consentit apparemment à mettre la Gazette au service de Falkland et des conservateurs dirigés par James William Johnston*. Cet été-là, Crosskill se déclara d’« une grande neutralité », mais il se lança dans un journalisme violemment partisan au moment où les réformistes préconisaient la cause d’un gouvernement responsable. Leur chef dans cette lutte, Joseph Howe*, avait repris en mai ses fonctions de rédacteur en chef du Novascotian et déjoua Crosskill.
Au Post et à la Gazette, Crosskill avait pris l’habitude de discréditer ses ennemis et de justifier son propre comportement erratique, mais lui-même fut impitoyablement tourné en ridicule dans le Novascotian. En 1844 et 1845, ce journal relata toute une série d’événements touchant sa vie personnelle. Une domestique à l’article de la mort insinua de façon ambiguë que « Posty [Crosskill] » lui avait donné de l’arsenic, mais ce dernier fut acquitté à l’enquête du coroner tenue en 1844. L’année suivante, il menaça d’une dague un officier qui s’était plaint que Crosskill avait critiqué en public ses manières. Comparaissant en cour pour faire face à cette accusation, Crosskill insulta le maire, Hugh Bell, et 1er conseil, qui l’obligèrent à s’excuser publiquement. Entre-temps, Crosskill cita à son tour un homme en justice à la suite d’une rixe survenue le jour de l’An et provoquée par la cour pressante que Crosskill faisait à la femme du défendeur. William Young*, le président de la chambre d’Assemblée, traîna Crosskill en cour pour avoir diffamé les frères Young en s’attaquant à leur façon de conduire les affaires. Lors de ce procès, Crosskill fut défendu par Johnston, le procureur général. En 1846, Falkland fut rappelé. Le Novascotian rapporta alors les paroles de Crosskill qui accablait Falkland d’injures et qui faisait l’éloge de son successeur, sir John Harvey, sans doute dans l’espoir de conserver son poste. Le Novascotian raconta aussi ce qui fut peut-être la gaffe la plus notoire de Crosskill, soit l’accusation portée contre Mgr William Walsh, évêque de Halifax, selon laquelle celui-ci aurait conseillé aux catholiques, du haut de la chaire de la cathédrale St Mary, de ne pas voter pour les tories aux élections de 1847. Les libéraux l’emportèrent facilement.
À la suite des critiques formulées par les journaux réformistes à l’égard de ses sympathies pour les tories et pour Falkland, Crosskill tenta apparemment au milieu des années 1840 de cacher ses relations avec le Post, dont il fut le rédacteur en chef jusqu’en 1846, ainsi qu’avec le Morning Courier, où il occupa aussi le poste de rédacteur en chef d’octobre à décembre 1848, en obligeant ses employés à prétendre que ces journaux leur appartenaient. Quand il fut contraint de démissionner comme imprimeur de la reine en juin 1848, Crosskill, qui venait de se marier, se trouva dans une fâcheuse situation financière. Longtemps après, George Edward Fenety*, journaliste libéral, l’accusa d’avoir accepté cette fonction parce que « l’argent avait plus d’importance pour lui que les principes politiques » ; ce dernier prétendit alors qu’avoir été imprimeur au service du gouvernement l’avait ruiné, étant donné qu’à chaque session de l’Assemblée son traitement avait été réduit. En fait, Crosskill faisait payer trop cher ses services, et un comité composé de membres des deux partis politiques ramena, en 1847 et 1848, son tarif à celui que Thompson avait fixé. Le journalisme l’épuisa « corps et âme » et, par la suite, ses entreprises vinrent bien près d’être autant d’échecs. D’octobre à décembre 1848, il publia le New Times et le Courier, deux journaux distincts, mais il les fusionna en 1849 sous le nom de Times and Courier, qui parut au moins jusqu’en juin. Un nouveau journal, le British North American, qu’il devait lancer à l’été de 1849, ne fut publié qu’en juillet 1850 et cessa de paraître à la fin de 1855. Auparavant, le Novascotian du 7 janvier 1850 avait publié une lettre de Crosskill dans laquelle il prédisait la ruine imminente de la province, laquelle serait causée, croyait-il, par le libre-échange britannique et le protectionnisme américain. Le seul remède, y lisait-on, était la représentation de la colonie au Parlement impérial. En 1849, 1852 et 1854, Crosskill demanda avec succès qu’on donne suite à ses anciennes réclamations concernant son traitement d’imprimeur, et quand il déclara faillite en 1854 l’Assemblée le nomma sténographe au salaire annuel de £100. Il s’acquitta consciencieusement de ses fonctions jusqu’à sa mort.
John Henry Crosskill contribua à la vie littéraire de la province en publiant les œuvres suivantes : On colonial literature, science and éducation [...] (1842), de G. R. Young ; The praise of water (1843), poème sur la tempérance de John McPherson*, qui valut un prix à son auteur ; Argimou : a legend of the Micmac (1847), roman historique de Samuel Douglas Smith Huyghue*. Dans la vie privée, ainsi que dans un poème dédié à sa femme à l’occasion de leur huitième anniversaire de mariage, Crosskill apparaît comme un homme bon et aimant. Imprimeur compétent et journaliste de talent, il eut le malheur d’être la cible des sarcasmes de ses adversaires et l’honneur équivoque d’avoir été l’un des premiers à profiter du favoritisme mis en place par les partis politiques dans les années 1840. Le 28 septembre 1846, le Novascotian accusa « le favori du gouvernement » de ruiner la réputation de la presse par ses relations avec « le journal ordurier » de Falkland et sa « guerre presque inhumaine ». Malheureusement pour le renom de Crosskill, c’est l’opinion bassement brutale que Howe avait de lui qui prévaut encore aujourd’hui.
John Henry Crosskill a publié un numéro de Literary and Hist. Journal à Saint-Jean, N.-B., en oct. 1837. Il est l’auteur de : A comprehensive outline of the geography and history of Nova Scotia ; from the discovery of America to the reign of Queen Victoria I [...] (Halifax, 1838), la seconde édition de cet ouvrage couvre la période to the sixth year of the reign of Queen Victoria I [...], et a été publiée à Halifax en 1842. Il a aussi écrit un poème, « To my wife, on the anniversary of our marriage day », qui parut dans le British North American (Halifax), 15 oct. 1855. Il a compilé A complete narrative of the celebration of the nuptials of Her Most Gracious Majesty Queen Victoria, with His Royal Highness Prince Albert of Saxe Co[b]urg and Gotha, by the Nova Scotia Philanthropic Society, with introductory remarks on similar celebrations by the other charitable societies in Halifax, and by the people of Nova Scotia generally (Halifax, [1840]).
BLHU, R. G. Dun & Co. crédit ledger, Canada, 11 :222.— PANS, MG 1, 544 ; MG 100, 128, nº 18 ; RG 1, 175 : 297–298, 368, 516 ; RG 5, GP, 2, pétition de J. H. Crosskill, 1er mars 1852 ; RG 22, 26 : 1, 14–15.— Joseph Howe, Joseph Howe : voice of Nova Scotia, introd. de J. M. Beck, édit. (Toronto, 1964), 100–105, 110.— N.-É., House of Assembly, Journal and proc., 1848 : 168 ; app. 82 ; 1849 : 266, 294, 316, 385, 395 ; pétition 46 ; 1852 : 190 ; pétition 64 ; app. 79 : 383–386 ; 1854 : 503, 512, 541 ; app. 23 : 205 ; app. 67 : 304–305.— Acadian Recorder, 14 févr. 1857.— British Colonist (Halifax), 14 févr. 1857.— New-Brunswick Courier, 9 oct. 1847.— Novascotian, 4, 11 mars, 13 mai, 17, 24 juin, 1er, 22 juill., 5 août 1844, 9, 16, 30 juin, 7 juill., 11 août, 15, 22 déc. 1845, 17 août, 28 sept. 1846, 2 août 1847, 7 janv. 1850, 16, 23 févr. 1857 (pour les notices nécrologiques de février 1857, on a consulté des exemplaires reliés aux PANS ; il s’agit d’une édition différente de celle qui se trouve sur les microfilms de la CLA et la formulation diffère légèrement).— An historical directory of Nova Scotia newspapers and journals before Confederation, T. B. Vincent, compil. (Kingston, Ontario, 1977), nos 25, 59, 65, 89, 96, 108, 130.— J. R. Harper, Historical directory of New Brunswick newspapers and periodicals (Fredericton, 1961), 68.— Beek, Joseph Howe.— G. E. Fenety, Life and times of the Hon. Joseph Howe [...] (Saint-Jean, 1896), 24.— W. R. Livingston, Responsible government in Nova Scotia : a study of the constitutional beginnings of the British Commonwealth (Iowa City, 1930).— MacNutt, Atlantic prov., 227–228.— D. C. Harvey, « Newspapers of Nova Scotia, 1840–1867 », CHR, 26 (1945) : 279–301.
George L. Parker, « CROSSKILL, JOHN HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/crosskill_john_henry_8F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1985 |
Année de la révision: | 1985 |
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