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BUELL, WILLIAM, journaliste et homme politique, né à Elizabethtown (Brockville), Haut-Canada, le 28 février 1792, fils aîné de Martha Naughton et de William Buell*, loyaliste et fondateur de Brockville ; il épousa en premières noces Mary-Ann Angelica Story dont il eut trois enfants, puis Déborah Dockstader qui lui donna quatre enfants et enfin, en troisièmes noces, Catherine Dockstader ; décédé le 29 avril 1862 à Brockville.
William Buell fréquenta une école locale financée en grande partie par son père et un établissement aux Cèdres, dans le Bas-Canada. S’il fut anglican dans son jeune âge, adulte, c’est surtout à l’Église presbytérienne qu’il adhéra. Il fut décoré pour avoir pris part, en 1813, à la bataille de Crysler’s Farm et à l’attaque d’Ogdensburg, New York, menée par « Red George » Macdonell.
Buell hérita 125 acres de terre fertile dans la région de Brockville, exploita une librairie dans la ville, de 1830 au moins à 1852 et fut, de 1823 à 1849, rédacteur en chef du Brockville Recorder. Sous sa direction et avec l’aide de son frère, Andrew Norton Buell*, le Recorder devint un journal célèbre, qui donna son appui à des causes réformistes et exposa les opinions d’une bonne partie de l’est du Haut-Canada. Au cours des années 20 et au début de la décennie suivante, il se fit tout spécialement le porte-parole des intérêts des expansionnistes de Brockville, dont James Morris, qui s’efforçaient de créer sur le Saint-Laurent un réseau de canaux pour que Brockville fût en mesure de rivaliser avec d’autres centres commerciaux, tels Kingston et York (Toronto). Lorsque, à la fin des années 30 et 40, le gros du commerce du Haut-Canada quitta le Saint-Laurent pour le canal Érié et Toronto, le Recorder exposa de plus en plus les vues des milieux commerciaux et agricoles relativement statiques du comté de Leeds. Buell finit par admettre que Brockville allait être supplantée par d’autres centres et que la construction de canaux et de voies ferrées coûtait terriblement cher. Il s’opposa à la mise en œuvre de travaux publics coûteux qui, selon lui, pressuraient les pauvres et favorisaient la corruption.
Buell maintint la vieille rivalité locale que lui avait léguée son père et qui l’opposait aux familles loyalistes et tories de Solomon* et Ephraim Jones* et de Levius Peters Sherwood*. L’animosité personnelle semble avoir compté pour très peu dans cette rivalité qui, généralement, était le résultat de différends idéologiques très marqués, de fortes ambitions politiques et de luttes pour s’approprier les faveurs gouvernementales. Aussi virulentes que fussent ces querelles, entre 1820 et 1860, les quatre vieilles familles réussirent assez souvent à les oublier pour collaborer à des entreprises économiques et sociales, particulièrement au début des années 30, où elles militèrent en faveur de l’autonomie accrue de Brockville (qui devint, en 1832, la première ville du Haut-Canada sous la juridiction d’un Bureau de police), de la mise en chantier de navires à vapeur qui appartiendraient à des propriétaires locaux et de l’amélioration du transport sur le Saint-Laurent. William Buell joua un rôle de premier plan dans ces efforts conjugués.
Cette collaboration fréquente n’engendra cependant pas d’harmonieuses relations politiques. De 1801 aux années 60, les quatre familles se disputèrent la suprématie politique dans la région de Brockville ; les Jones et les Sherwood s’unirent souvent pour contrecarrer les Buell. William Buell était un chef solide et compétent ; son habileté permit fréquemment à sa famille et aux réformistes de Leeds de tenir tête aux forces tories.
L’arrivée, au cours des années 20 et 30, de milliers d’immigrants protestants irlandais qui s’établirent dans les cantons de l’intérieur, ne fit que compliquer les luttes politiques du comté de Leeds. Ces Irlandais, que les colons plus anciens considéraient avec méfiance et qui connaissaient mal les institutions économiques, sociales et politiques de la colonie, constituèrent bientôt un élément de discorde dans la région. Groupés en loges orangistes, ils formèrent, sous la direction d’Ogle Robert Gowan*, un puissant bloc électoral conservateur. Buell et Mathew H. Howard, qui s’étaient tous deux présentés dans Leeds comme candidats réformistes aux élections provinciales de 1830, battirent Gowan et Henry Sherwood* mais Gowan recueillit plus de votes que ce dernier et 70 seulement de moins que Buell. À la chambre, Buell se fit l’ardent défenseur de l’enseignement décentralisé, de lois sur la tempérance, d’une expansion économique prudente et d’une réforme politique libérale.
Entre les élections, Buell se servait du Recorder pour combattre Gowan qui, lui, utilisait une série de journaux en difficultés financières qu’il exploitait à Brockville. Buell et Howard se trouvèrent confrontés à Gowan et au procureur général Robert Sympson Jameson* au cours des élections de 1834, qui eurent lieu au village de Beverly, citadelle orangiste. Ces élections furent marquées de beuveries, d’actes de violence et de menaces à l’endroit des électeurs réformistes surtout. Buell et Howard se retirèrent et firent appel à l’Assemblée qui, composée surtout de réformistes, ordonna de nouvelles élections, mais Beverly fut de nouveau choisi par le lieutenant-gouverneur sir John Colborne comme lieu de vote. Lors des élections de mars 1835, Buell et Howard, sous prétexte de nouvelles menaces, en appelèrent à la chambre qui adopta une loi électorale spéciale ordonnant la création de quatre bureaux de scrutin dans le comté de Leeds, ce qui rendait difficile aux partisans de Gowan de troubler les élections. Buell et Howard gagnèrent aisément l’élection partielle du 28 mars 1836. Au cours de l’été de 1836, sir Francis Bond Head* déclencha de nouvelles élections générales. Pour lui venir en aide, Gowan et les vieilles familles tories firent taire leurs différends et formèrent une puissante coalition antiréformiste à Brockville et dans le comté de Leeds. Les élections du comté, qui eurent lieu à Beverly, se soldèrent par la cuisante défaite de Buell et des réformistes.
Après ce renversement, Buell entra dans une période d’inactivité politique relative. C’était un monarchiste convaincu et un partisan du libéralisme britannique de Robert* et William Warren Baldwin*. Il se déclara en faveur de l’extension du droit de vote, d’un gouvernement responsable, d’une réforme de l’enseignement et il prôna une participation plus grande de la presse à l’enseignement. À l’instar des Baldwin de Toronto, il abandonna le mouvement réformiste lorsqu’il vit William Lyon Mackenzie et d’autres radicaux prendre de l’influence. Lorsque la rébellion éclata en 1837, Buell fut le premier officier de la milice locale à se présenter pour lutter contre les rebelles. En 1838, il conduisit son bataillon à Prescott afin d’arrêter l’invasion des Patriotes.
Après la rébellion, Buell entreprit une longue campagne pour faire renaître la cause réformiste dans le comté. Le Recorder se fit de plus en plus le porte-parole des opinions des fermiers de l’est du Haut-Canada, et Buell insista sur la nécessité d’une réforme agraire, de la diminution des dépenses du gouvernement, de la mise en valeur et de l’autonomie des régions. Même si ses efforts pour obtenir un siège à Brockville furent vains, sa campagne fut couronnée de quelque succès en 1848 car son neveu, William Buell Richards* remporta une victoire facile dans le comté de Leeds. Richards et son frère Albert Norton Richards allaient devenir d’importants hommes politiques réformistes au cours des années 50 et 60.
William Buell vendit le Recorder en 1849 à David Wylie et à William Sutton et passa la majeure partie de son temps à Brockville comme gentleman-farmer. Il fut maire de la ville en 1856 et 1857 ; son mandat se distingua par de prudentes dépenses et une sage administration. En 1858, Buell se retira dans sa ferme, où il mourut en 1862.
APC, MG 24, B75.— PAO, Buell (Andrew Norton) papers.— Brockville Recorder (Brockville, Ont.), 1830–1849.— Gazette (Brockville, Ont.), 1828–1832.— T. W. H. Leavitt, History of Leeds and Grenville, Ontario, from 1749 to 1879, with illustrations and biographical sketches of some of its prominent men and pioneers (Brockville, Ont., 1879).— G. R. I. MacPherson, The code of Brockville’s Buells (thèse de m.a., University of Western Ontario, London, 1966).— Hereward Senior, Orangeism, the Canadian phase (Toronto, 1972).— E. M. Richards, The Joneses of Brockville and the Family Compact, OH, LX (1968) : 169–184.
Ian Macpherson, « BUELL, WILLIAM (1792-1862) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/buell_william_1792_1862_9F.html.
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Auteur de l'article: | Ian Macpherson |
Titre de l'article: | BUELL, WILLIAM (1792-1862) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1977 |
Année de la révision: | 1977 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |