HILLAIRE (Hilaire) DE LA ROCHETTE, ALEXANDRE-ROBERT (d’), agent des trésoriers généraux de la Marine, fils de Charles-Robert Hillaire de Moissacq et de La Rochette, et d’Élisabeth Martin, de la paroisse Notre-Dame de Versailles, France ; il épousa à Montréal le 21 novembre 1760 Marie-Anne Levasseur ; décédé en ou après 1772.

Alexandre-Robert Hillaire de La Rochette paraît pour la première fois au Canada en 1755, à titre de secrétaire d’André Doreil*, nommé commissaire en chef de l’expédition de Dieskau*. À Québec, Montcalm* et Bigot, de même que Doreil, s’intéressèrent à sa carrière et, quelques mois après le départ pour la France de Doreil, à la fin de 1758, La Rochette succéda à Jacques Imbert* en qualité d’agent des trésoriers généraux de la Marine. Il conserva ce poste du 16 octobre 1759 à la cession officielle de la colonie à la Grande-Bretagne, en 1763. Ses principaux patrons, Claude Baudard de Sainte-James et Noël-Mathurin-Étienne Perichon, avaient acheté leur office pour la somme énorme de 600 000# et étaient entrés en fonction le 31 janvier 1758, au moment précis où commençait la crise financière occasionnée par la guerre de Sept Ans. Les principales tâches de La Rochette étaient de faire les paiements de la couronne au moyen des diverses sortes de monnaie de papier en usage au Canada et de maintenir la confiance publique dans cette monnaie en la convertissant annuellement en lettres de change tirées sur ses patrons, à Paris. Exécuter ces tâches, pendant les années de guerre, avec l’inflation, les manœuvres des profiteurs et les pertes fréquentes du courrier transporté par bateau, s’avérait extrêmement difficile, comme Imbert l’avait expérimenté avant de quitter son poste. En outre, le 15 octobre 1759, à l’époque où La Rochette entra en fonction, le gouvernement français rendit son rôle impossible en suspendant le remboursement des lettres de change tirées dans les colonies sur les trésoriers généraux. On parla beaucoup de La Rochette, on le disait incompétent – et c’était la moindre des accusations portées contre lui – mais l’homme le plus parfait n’aurait pu qu’échouer dans un tel poste à une pareille époque.

Le ministre, en tout cas, avait une haute opinion de La Rochette et, à son retour en France, il le nomma agent des colonies, le 16 octobre 1763, pour surveiller l’achat des marchandises destinées aux colonies et au service colonial. Il le chargea de plus de la liquidation des papiers du Canada ; pour ce faire, La Rochette devait recevoir, examiner et vérifier toutes les réclamations privées, non encore réglées, à l’adresse de la couronne, en particulier les lettres de change et les billets de monnaie ; quand, enfin, ces réclamations auraient été officiellement approuvées (et réduites, après un délai de plusieurs années), il devait effectuer les paiements nécessaires [V. Bernard Cardeneau*]. Il travailla sous la direction de la commission Fontanieu (du nom de son président, Gaspard-Moïse-Augustin de Fontanieu, marquis de Fiennes), créée le 18 octobre 1758 sous le nom de commission de liquidation des dettes de la Marine et des Colonies, et qui reçut l’ordre, le 28 novembre 1761, de délaisser les dettes concernant le ministère de la Marine en général pour se tourner vers celles du Canada. Le travail des commissaires ne prit fin qu’en 1768, lorsque, le 20 février, la couronne publia un Arrêt qui annulle tous les billets de monnoie, lettres de change et autres titres de créance du Canada qui n’ont pas été produits dans les délais fixés. En 1772, toujours agent des colonies, La Rochette prit les mesures nécessaires pour son remplacement temporaire, afin de passer une année ou deux en Inde. On perd ensuite sa trace.

Les relations familiales de La Rochette jettent une lumière révélatrice sur sa carrière et montrent avec une rare précision par quelle protection un fonctionnaire pouvait, sous les Bourbons, avancer dans la vie. Du côté maternel, sa famille comptait deux hommes d’affaires de Marseille qui s’établirent à Québec, comme banquiers et négociants, à la fin des années 1740, Barthélemy*, fils de Vincent Martin, et Jean-Baptiste-Tropez, fils de Charles-Bruno Martin. Les familles Martin et Hillaire s’entraidaient, bien sûr, mais des membres de l’une et l’autre famille entrèrent, par des mariages, dans une famille dont on pouvait attendre davantage encore, les Levasseur, alliés à de riches et puissants fermiers généraux. Barthélemy Martin, en 1752, et La Rochette, en 1760, épousèrent tous deux des filles de René-Nicolas Levasseur, chef des constructions des vaisseaux du roi, en poste à Québec, dont le frère, Louis-Armand, un officier de carrière dans la marine, était commissaire ordonnateur à Rochefort quand il mourut le 9 août 1760. Beaucoup plus tard, le 18 janvier 1771, Jean-Baptiste-Tropez Martin, alors à Paris, épousa la sœur de La Rochette, Barbe-Madeleine ; parmi les invités à la noce, se trouvaient Élisabeth-Françoise Ferrand, née Levasseur, cousine germaine du père de Mme de Pompadour, et son mari, Laurent-René Ferrand, un fermier général. Il est évident que La Rochette bénéficia d’influences, tant à Paris qu’à Québec. Il avait d’importants intérêts en France pendant les années 1760, en société avec son futur beau-frère, Jean-Baptiste-Tropez Martin, plaçant plus de 20 000# dans la seule Société de Guadalcanal ; mais il n’est pas certain s’il profita de sa brève carrière à Québec, d’autant qu’il ne fut pas arrêté dans l’Affaire du Canada. Sans doute ses puissantes relations de famille le protégèrent-elles.

J. F. Bosher

AN, Col., E, 257 (dossier La Rochette) ; Marine, C7, 167 (dossier La Rochette) ; Minutier central, IV, no 693 (contrat de mariage), 18 janv. 1771.— Yves Durand, Les fermiers généraux au XVIIIe siècle (Paris, 1971), 75s.— John Keyes, Un commis des trésoriers généraux de la Marine à Québec : Nicolas Lanoullier de Boisclerc, RHAF, XXXII (19781979) : 181202. Henri Legohérel, Une commission extraordinaire du Conseil d’Etat du roi : la commission de liquidation des dettes de la Marine et des Colonies (17581768), Université de Dakar, faculté de Droit et des Sciences économiques, Publications, 1968, 132.

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J. F. Bosher, « HILLAIRE (Hilaire) DE LA ROCHETTE, ALEXANDRE-ROBERT (d’) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hillaire_de_la_rochette_alexandre_robert_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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