SHAW, ANGUS, trafiquant de fourrures, homme politique, officier de milice et juge de paix, né en Écosse ; il épousa à la façon du pays une Amérindienne, puis le 30 novembre 1802, à la Christ Church de Montréal, Marjory McGillivray, sœur de William, Simon* et Duncan* McGillivray et nièce de Simon McTavish*, et finalement en octobre 1823 à Milford, Connecticut, Julia Agnes Rickman ; il eut au moins trois enfants : Anna, baptisée le 17 octobre 1797, à l’âge de neuf ans, à l’église Scotch Presbyterian de Montréal, William, né le 29 mai 1802 et baptisé à la Christ Church le 4 novembre suivant, et Isabella, née de son dernier mariage ; décédé le 19 juillet 1832 à New Brunswick, New Jersey.

Angus Shaw était originaire de l’Écosse, fort probablement d’un endroit situé dans une zone qui s’étend de l’île d’Islay, où habita sa sœur Marion, à Inverness, en passant par la vallée du Loch Ness. On ne peut déterminer avec précision le début de sa carrière de trafiquant de fourrures. Il paraît avoir été très lié à Roderick McKenzie*, qu’il appelait « Mon cher Rory ». En 1789, il était au service de la North West Company et il construisit cette année-là un poste dont les activités occupaient une vingtaine d’hommes et quatre canots au lac de l’Orignal (désigné en anglais sous le nom de Moose Hill Lake et aujourd’hui sous celui de lac Moose, Alberta, au nord-ouest du lac Muriel). Trois ans plus tard, il établit le fort George (près de Lindbergh, Alberta), sur la rivière Saskatchewan-du-Nord. Ce très important poste de traite employait plus de 100 hommes et plus de 15 canots. En 1795, Shaw fit construire le fort Augustus (Fort Saskatchewan, Alberta), encore plus haut sur la rivière. Associé hivernant avec Donald McTavish* au département de la rivière aux Anglais, il fonda un poste au lac la Biche (Alberta), en 1799, d’où il envoya 20 hommes en édifier un autre à l’embouchure de la rivière des Esclaves. Durant ces années, Shaw livra une concurrence farouche à la Hudson’s Bay Company et à ses employés, notamment à William Tomison.

En 1802, Shaw fut affecté à un autre théâtre d’opérations. La North West Company le chargea des postes du roi qu’elle venait de prendre à bail. Shaw devait résider à Québec et faire une visite annuelle de ces postes. Dès l’année suivante, il apparut clairement que la compagnie voulait intensifier la concurrence avec sa rivale et peut-être l’amener à lui concéder un droit de passage par la baie d’Hudson. Shaw conduisit par voie de terre une expédition composée de cinq canots qui rejoignit à la baie James l’Eddystone, navire arrivé de Grande-Bretagne. Trois postes furent construits sur la rive sud de la baie : à l’île Charlton, à l’embouchure de la Moose et à l’embouchure de l’Eastmain. Ils furent cependant abandonnés trois ans plus tard. En juillet 1806, la compagnie adjoignit à Shaw James McKenzie*, qui devait hiverner aux postes du roi. Puis en 1808, elle décida d’équiper ces postes à partir de Montréal et de ne pas nommer de remplaçant à Shaw à Québec. Au cours de ces années, ce dernier avait aidé et encouragé les missionnaires catholiques dans les postes sous sa responsabilité. Par ailleurs, il avait été admis au Beaver Club en 1796, il appartenait au Beef-Steak Club ou Club des barons de Québec et au Canada Club de Londres, et il avait été député d’Effingham, au Bas-Canada, d’avril 1802 à juin 1804.

Promu au rang d’associé hivernant de la North West Company en 1792, avec 2 actions sur 46, Shaw céda celles-ci en 1808. Deux ans auparavant, la McTavish, Frobisher and Company avait été réorganisée sous le nom de McTavish, McGillivrays and Company, et Shaw y avait été admis comme associé. Il était donc l’un des agents de la North West Company et, à ce titre, il se rendit au fort William (Thunder Bay, Ontario) en 1810, 1811 et 1812 au moins. Il agit aussi en qualité de juge de paix du Territoire indien de 1810 à 1816. Il semble avoir participé à la prise de Michillimakinac (Mackinac Island, Michigan) à l’été de 1812, et, le 3 octobre, il fut nommé major dans le Corps of Canadian Voyageurs. Le 1er novembre 1814, la McTavish, McGillivrays and Company de Montréal fut de nouveau réorganisée. Ayant transféré ses actions à la firme en mai précédent, Shaw n’y détenait plus aucune part mais, grâce à un accord séparé, il continuait de recevoir les revenus de 2 des 19 actions émises par cette compagnie. Il se peut que William McGillivray ait été déçu des capacités d’administrateur de son beau-frère ou encore que les associés aient jugé que Shaw serait beaucoup plus utile s’il reprenait du service. John McDonald* of Garth ne le considérait-il pas comme « un trafiquant de premier ordre, un homme qui dirigeait bien son équipe et les Indiens » ?

Le « Chat », ainsi qu’on le désignait familièrement, prit une part active à la dernière phase de la concurrence que se livraient les deux géants du commerce des fourrures. En 1815, il se trouvait à la Rivière-Rouge (Manitoba) où il semble avoir contribué à la dispersion de la colonie. Pour cette raison, lord Selkirk [Douglas*] ordonna à Colin Robertson* en mars 1816 de l’arrêter. En 1818–1819, Shaw était dans la région de l’Athabasca. Au printemps, lors de son voyage de retour au fort William, il fut arrêté de nouveau, aux rapides Grand (Manitoba), par le gouverneur de la Hudson’s Bay Company, William Williams*. Parce qu’il menaça, si on le relâchait, de revenir répandre la terreur et le sang sur ce territoire, Williams décida de le garder prisonnier. Il le fit transférer à York Factory et de là à Londres, où il fut libéré. Sa femme, Marjory McGillivray, vint le rejoindre ; elle mourut le 27 mars 1820.

Après la fusion des deux grandes rivales en 1821, Angus Shaw prit sa retraite. Il paraît s’être établi aux États-Unis où il se trouvait à l’abri des poursuites relatives au mauvais état des affaires de la McTavish, McGillivrays and Company. Il y mourut en 1832 d’une « maladie pulmonaire ». En l’absence d’inventaire précis, il est difficile d’évaluer sa fortune, et ses testaments de 1799 et de 1810 ne figurent plus dans les minutiers des notaires de Montréal. Chose certaine, Shaw était loin de la pauvreté. À sa mort, il détenait des actions de la Banque de Montréal et de la Hudson’s Bay Company et avait des propriétés à Montréal, à Québec et aux États-Unis. En août 1832, George McDougall fut nommé curateur de sa succession, laquelle fit l’objet de litiges pendant plusieurs années. Encore en 1905, l’un des descendants de Marion Shaw faisait des recherches à ce sujet.

Gratien Allaire

ANQ-M, CC1, 3 août 1832 ; CE1-63, 4, 30 nov. 1802 ; CE1-126, 17 oct. 1797 ; CN1-29, 25 mars 1799, 29 nov. 1802, 18 mai 1810 ; CN1-185, 16 mars 1810.— AO, MU 2117, 1872, no 3.— APC, MG 30, D1, 27.— Musée McCord, Beaver Club minute-book.— Univ. of Toronto, Thomas Fisher Rare Book Library, ms coll. 30 (J. N. Wallace).— Les Bourgeois de la Compagnie du Nord-Ouest (Masson).— Docs. relating to NWC (Wallace).— Simon Fraser, The letters and journals of Simon Fraser, 1806–1808, W. K. Lamb, édit. (Toronto, 1960).— HBRS, 1 (Rich) ; 2 (Rich et Fleming), 20, 23, 72, 75, 85, 92–93, 284–289 ; 24 (Davies et Johnson), 293, 305 ; 26 (Johnson), xxv, xxx, lxix, 9, 12, 57, 59, 65, 216–217 ; 30 (Williams).— Journals of Samuel Hearne and Philip Turnor, J. B. Tyrrell, édit. (Toronto, 1934 ; réimpr., New York, 1968), 358, 361, 364.— Select British docs. of War of 1812 (Wood).— La Gazette de Québec, 10 mai 1810.— Montreal Gazette, 14 mai 1810, 31 juill. 1832.— Caron, « Inv. de la corr. de Mgr Plessis », ANQ Rapport, 1927–1928 : 232, 236, 243, 251.— « Inventaire de la collection Dalhousie », APC Rapport, 1938 : 3.— « Liste générale d’associés, de commis et d’interprètes qui passent l’hiver au service de la Compagnie du Nord-Ouest ; dates et nature de leurs engagements respectifs, etc., etc. », APC Rapport, 1939 : 53–56.— É.-J.[-A.] Auclair, Saint-Jérôme de Terrebonne (Saint-Jérôme, Québec, 1934), 32.— J. S. H. Brown, Strangers in blood : fur trade company families in Indian country (Vancouver et Londres, 1980), 99–100, 173.— W. S. Wallace, The pedlars from Quebec and other papers on the Nor’Westers (Toronto, 1954).— Wallot, Un Québec qui bougeait, 58.— M. [E.] Wilkins Campbell, McGillivray, lord of the northwest (Toronto, 1962) ; NWC (1957).— Jean Bruchési, « George Heriot, peintre, historien et maître de poste », Cahiers des Dix, 10 (1945) : 204.— L. J. Burpee, « The Beaver Club », SHC Report, 1924 : 73.— É.-Z. Massicotte, « Une rencontre de bourgeois du Nord-Ouest », BRH, 36 (1930) : 717–718. — Victor Morin, « Clubs et Sociétés notoires d’autrefois », Cahiers des Dix, 13 (1948) : 130.

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Gratien Allaire, « SHAW, ANGUS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/shaw_angus_6F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1987
Année de la révision:    1987
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