SUTHERLAND, GEORGE, chef de poste de la Hudson’s Bay Company, né vers 1755, probablement à Wick (Highlands), Écosse, décédé après 1799.
En 1774, George Sutherland commença sa carrière dans la Hudson’s Bay Company à titre d’employé personnel de Thomas Hutchins, agent principal au fort Albany (Fort Albany, Ontario) ; il s’engageait alors pour une période de cinq ans, au salair annuel de £10. Bien qu’il n’eût « guère reçu d’instruction », son maître jugea bientôt qu’il était un employé prometteur. Le 6 avril 1777, Hutchins nota qu’il l’avait envoyé « au nord [...] pour lui apprendre à faire des observations, au cas où [il devrait] l’envoyer à l’intérieur des terres ». Au mois de juin suivant, Sutherland s’était déjà rendu à l’intérieur avec un Indien du nom de Caupemartissue Winnekee. Eusebius Bacchus Kitchin, agent principal à Moose Factory (Ontario), pensait que cet Indien venait des environs de Basquia [Le Pas, Manitoba] ; au début de 1778, Hutchins exprimait l’espoir que, si c’était le cas, Sutherland pût, grâce à ce guide indien, « déterminer la distance d’ici à Cumberland House [Saskatchewan] ». C’était là une question importante touchant l’établissement éventuel de postes et de routes pour la traite à l’intérieur. Hutchins fut satisfait du travail et des observations de Sutherland au cours de cette année.
Inscrit comme manœuvre, au salaire annuel de £10, Sutherland passa l’hiver de 1779–1780 au lac Sturgeon (à l’est de Sioux Lookout, Ontario). En juillet 1779, il quitta le fort Albany avec quelques Canadiens que Germain Maugenest avait amenés au service de la compagnie. Passant par Gloucester House (lac Washi, Ontario) à la fin d’août, ils atteignirent le lac Sturgeon à la fin de septembre et découvrirent que les trafiquants de Montréal (rattachés à une compagnie de Montréal) y avaient incendié la maison de Maugenest. Ce dernier s’était en effet enfui avec des fourrures et devait encore 30 000# à Ezekiel Solomons, un marchand de Montréal qui, disait-on, avait assumé la direction de la traite locale [V. Lucius Levy Solomons]. Pendant qu’il bâtissait un nouvel abri, Sutherland se renseigna autant qu’il put auprès de ses rivaux sur leur trafic et leurs méthodes, et sur la région éloignée où il se trouvait. Une fois par mois, il portait dans son journal un relevé détaillé des trafiquants et de ses misères – dont, à la fin de l’hiver, un régime composé de souris, de cuir bouilli et autres « saletés ». Trois des hommes de Maugenest moururent ; les autres rallièrent les trafiquants de Montréal. Sutherland trouvait qu’il avait appris la langue des Indiens « au moins cinq fois mieux que quiconque à la baie (à l’exception de [ses] Supérieurs », mais sa santé était ébranlée, et la présence des trafiquants rivaux « dans chaque trou et dans chaque coin » le rendait mélancolique.
De retour au fort Albany à l’été de 1780, Sutherland prit, semble-t-il, un congé de maladie d’un an. En 1781, il devint commis aux vivres au fort Albany, au salaire de £20 par année. À l’été de 1785, il se rendit à Severn House (Fort Severn, Ontario) avec des dépêches, y fut peu de temps remplaçant et y resta l’hiver suivant. En 1786–1787, il fut muté à York Factory (Manitoba) pour y aider Joseph Colen* à titre de « linguiste et [de] trafiquant », au salaire de £30 ; il se fit pour Colen compilateur de « A Short Vocabulary of [...] the Northern Indian Language ». En 1793, son salaire monta à £40.
Après avoir séjourné un an en Grande-Bretagne, Sutherland devint membre du conseil d’York, au salaire de £80. Il y assuma la direction du poste au cours de la saison de traite de 1794–1795, en l’absence de Colen alors en Angleterre pour y discuter avec ses employeurs des difficultés survenues entre lui et William Tomison*, agent principal pour les postes de l’intérieur. Résultat, sans doute, de l’appui de Colen, Sutherland obtint la direction de Cumberland House en 1795–1796 et succéda à Tomison à la tête de la région de la Saskatchewan supérieure en 1796–1797. Résidant à Edmonton House (près de Fort Saskatchewan, Alberta), il cherchait à établir avec son concurrent de Montréal, Angus Shaw*, de meilleures relations que ne l’avait fait Tomison. En décembre 1796, des Indiens, les Falls, visitèrent Edmonton House ; Sutherland et Shaw les réprimandèrent conjointement pour avoir saccagé les postes de Manchester House (près de Pike’s Peak, Saskatchewan) et de South Branch House (près de Duck Lake), propriétés de la Hudson’s Bay Company. Au milieu de l’année 1797, Sutherland fut le premier à utiliser de grandes embarcations au lieu de canots pour le transport sur la rivière Saskatchewan. On construisit deux barques, de 30 pieds chacune, qui se révélèrent aussi utiles que celles que Sutherland avait vues dans le district d’Albany.
Hostile à Colen et à Sutherland, de même qu’à leurs projets concernant ces grandes embarcations, Tomison s’était rendu en Angleterre et avait regagné l’appui du comité de Londres. À la fin de 1797, il reprit la direction d’Edmonton House et de la région de la Saskatchewan. Le comité blâma Sutherland pour avoir écrit une « lettre téméraire et inconsidérée » à Tomison. Il hiverna à Buckingham House (près de Lindbergh, Alberta) sur la rivière Saskatchewan-Nord, mais, à l’été de 1798, il refusa de rester à l’intérieur, comme le lui demandait Tomison, et retourna à York. Là, il découvrit que Tomison avait écrit sur lui une lettre « des plus mesquines », et il lui adressa une réponse publique qui mit fin à tout espoir de les voir, un jour, travailler ensemble. Une lettre du comité de Londres l’informait que son frère était mort à la Jamaïque en lui laissant « un bien considérable ». Il saisit cette occasion de se retirer.
Une fois à Londres, Sutherland convainquit le comité des avantages qu’il y avait à utiliser des embarcations, plutôt que des canots, tout au long de l’importante route de l’intérieur menant à Edmonton House. En mai 1799, Tomison et le conseil d’York reçurent la directive d’adopter le plan de Sutherland, de façon à « diminuer les dépenses considérables de la compagnie » et à atténuer le problème de la rareté de main-d’œuvre et les difficultés administratives qui en découlaient. Les embarcations, faisait observer le comité, « requerront moins de la moitié du nombre d’hommes actuellement affectés aux canots ».
Sutherland eut au moins deux enfants à la baie d’Hudson. Sa fille se noya en juillet 1799 à York Factory, et son fils, John, fit du service comme apprenti de 1795 à 1799 ; à cette dernière date, la compagnie agréa la requête de son père pour qu’il allât le rejoindre en Angleterre. Les gens de la grande prairie, un groupe de Cris des Plaines, de sang mêlé, vivant près de Duck Lake, en Saskatchewan, se disent aussi les descendants d’un George Sutherland qui travaillait pour la Hudson’s Bay Company à cette période.
HBC Arch., A.6/16, ff.34, 55, 59, 81 ; A.11/116, f.178 ; A.11/117, ff.142, 171 ; A.15/15, p.467 ; A.30/1, ff.16, 42, 55, 72–73 ; A.30/2, ff.4, 40 ; A.30/3, ff.57, 65, 91 ; A.30/4, ff.23, 49 ; A.30/5, ff.48, 80 ; A.30/9, f.39 ; A.32/3, f.57 ; A.32/4, f.43 ; B.135/b/5, ff.24, 35 ; B.135/b/6, f.23 ; B.198/z/l, ff.129–136 ; B.211/a/1 ; B.239/a/101, ff.97, 98 ; B.239/f/3, f.15 ; B.239/f/5, f.11 ; B.239/f/6, ff.12, 66.— HBRS, XXVI (Johnson).— D. G. Mandelbaum, The Plains Cree, American Museum of Natural History, Anthropological Papers (New York), XXXVII (1941) : 167.
Jennifer S. H. Brown, « SUTHERLAND, GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/sutherland_george_4F.html.
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Auteur de l'article: | Jennifer S. H. Brown |
Titre de l'article: | SUTHERLAND, GEORGE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1980 |
Année de la révision: | 1980 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |