MAGOWAN (McGowan), PETER, avocat, homme politique et fonctionnaire, né vers 1763, probablement en Irlande ; décédé le 19 juin 1810 à Charlottetown.
Peter Magowan, jeune avocat en disgrâce qui avait quitté Londres, après avoir fait l’objet de soupçons dans un scandale relatif à certains « embarras pécuniaires », immigra en 1789 à l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard). Il fut immédiatement inscrit comme attorney par la Cour suprême. L’année suivante, il était élu à la chambre d’Assemblée comme député de la circonscription de Kings. Après la mort de Phillips Callbeck*, en 1790, Magowan demeura pendant des années le seul avocat à exercer sa profession dans l’île, â part le procureur général Joseph Aplin. Inévitablement, tous ceux qui critiquaient le gouvernement devinrent ses clients. En 1791, par exemple, après que John Cambridge*, William Bowley et John Hill* eurent porté plainte devant le Conseil privé, accusant le lieutenant-gouverneur Edmund Fanning, le juge en chef Peter Stewart et d’autres fonctionnaires de malversation, Magowan devint le mandataire de Cambridge dans l’île et fit personnellement une déposition sous serment pour accuser Stewart de manque flagrant d’impartialité en cour. Rien d’étonnant alors à ce que ses talents juridiques aient constamment été discrédités par Fanning et Stewart et qu’il ait rarement gagné ses causes. Mais les clients se plaignaient aussi. Un membre de l’Assemblée allégua que Magowan, en modifiant le libellé d’un document, lui avait fait perdre une cause, et un marin soutint avec véhémence devant le Conseil de l’Île-du-Prince-Édouard que l’avocat avait enjolivé une déclaration sous serment qu’il avait signée sans savoir lire. De telles accusations étaient monnaie courante dans le contexte judiciaire et politique de l’île, et il est impossible d’en déterminer la véracité ou la portée.
Six ans après son arrivée dans la colonie, Magowan se vit enfin offrir un poste officiel. En 1795, on le nomma adjoint de Thomas Desbrisay dans l’exercice de ses fonctions de secrétaire et de greffier de l’île. Ce dernier gardant pour lui le traitement attaché au poste, Magowan l’avait accepté uniquement pour toucher les honoraires. Constatant que le salaire qu’il devait verser à un copiste excédait ses revenus, Magowan abandonna ce travail en 1800. Néanmoins, depuis 1795, il se rapprochait graduellement du gouvernement, tandis qu’Aplin s’en éloignait. En 1797, Magowan porta à l’attention de l’Assemblée une lettre « diffamatoire » que Fanning avait reçue du capitaine John MacDonald et qui accusait le lieutenant-gouverneur d’approuver les activités d’un « parti niveleur » déterminé à entraîner la confiscation des terres (escheat) des propriétaires fonciers de l’île. La même année, Magowan fit office de greffier pour le comité chargé de faire un rapport sur l’état des terres des propriétaires et qui présenta une requête à la couronne pour l’établissement d’un tribunal d’escheat. Cette prise de position populaire devait lui valoir d’être réélu â l’Assemblée en 1803. À la suite des accusations de mauvaise administration parlées par MacDonald, Magowan intenta en son propre nom un procès en diffamation à l’Écossais au franc-parler, lui réclamant £3 000. Le lieutenant-gouverneur Fanning témoigna personnellement en faveur de Magowan, et le jury accorda les frais et dépens au demandeur, plus £7 10 shillings en dommages intérêts. Magowan accrut ce petit montant en réclamant des honoraires élevés pour avoir plaidé sa propre cause. À peu près à la même période, il fut destitué comme enseigne de la milice de l’île par une cour martiale de Halifax qui enquêtait sur un débit illégal de boissons alcooliques mis sur pied pour « intoxiquer » les simples soldats, mais il persuada le tribunal qu’il ignorait tout de ces activités et on lui redonna son grade.
En 1798, Magowan contribua à rédiger des plaintes de négligence professionnelle contre le procureur général Aplin, et un des censeurs du gouvernement, James Douglas, le désigna comme « l’outil par excellence du gouverneur Fanning et du parti de Stewart ». Cette année-là, lorsque Aplin fut relevé de ses fonctions, Magowan devint pendant quelque temps procureur général par intérim. En 1800, il obtint le poste de façon permanente, succédant au remplaçant d’Aplin, John Wentworth, qui avait mis du temps à s’établir dans l’île. À l’annonce de sa nomination, Magowan se trouvait à Québec où il recherchait un emploi, mais son nouveau poste lui permit de rester dans l’île et lui assura une certaine sécurité. Après dix années tumultueuses, il put enfin vivre en paix pendant quelques années en occupant son poste de procureur général. En 1806, cependant, il critiquait déjà vertement le lieutenant-gouverneur Joseph Frederick Wallet DesBarres* et ses partisans, en particulier James Bardin Palmer*. Ce dernier avait participé à l’organisation d’une nouvelle association politique connue sous le nom de Loyal Electors, et Magowan, Charles Stewart, ainsi que d’autres membres de la clique officielle qui dominait depuis longtemps la politique locale, soupçonnaient son influence sur DesBatres. Magowan dénonça la façon dont les nominations se faisaient sous le gouvernement de DesBarres et était particulièrement agacé de ce que les charges de juge de paix fussent accordées à des gens qu’il jugeait inaptes. Il critiqua également la façon dont DesBarres publiait les décrets de convocation des électeurs, alléguant que cela ne favorisait pas le « vieux parti ». La politique partisane échauffa de nouveau les esprits, mais Magowan resta fidèle à la faction de Stewart jusqu’à son décès survenu inopinément en 1810.
La carrière de Peter Magowan, semée de remous et de polémiques, illustre bien la complexité et le caractère de la politique dans l’île à cette époque, laquelle politique était centrée sur des individus. Les conflits auxquels Magowan avait été mêlé continuèrent après sa mort. En fait, la vacance du poste de procureur général et le débat soulevé par le choix d’un remplaçant occasionnèrent le rappel de DesBarres et la révocation de Palmer de toute charge publique [V. Charles Stewart].
APC, MG 11, [CO 226] Prince Edward Island A, 17 : 439s.— PAPEI, Acc. 2702, Smith-Alley coll., pétition de Peter Magowan, 30 sept. 1803 ; RG 3, House of Assembly, Journals, 1791, 1797 ; RG 6, Supreme Court records.— PRO, CO 226/21.— SRO, GD293/2/19/6, 10.— G.-B., Privy Council, Report of the right honourable the lords of the committee of his majesty’s most honourable Privy Council, of certain complaints against Lieutenant Governor Fanning, and other officers of his majesty’s government in the Island of St. John ([Londres, 1792]).
J. M. Bumsted, « MAGOWAN (McGowan), PETER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/magowan_peter_5F.html.
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Auteur de l'article: | J. M. Bumsted |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
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