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HAYS, CHARLES MELVILLE, administrateur ferroviaire, né le 16 mai 1856 à Rock Island, Illinois ; le 13 octobre 1881, il épousa à St Louis, Missouri, Clara J. Gregg, et ils eurent quatre filles ; décédé le 15 avril 1912 dans l’Atlantique Nord et inhumé à Montréal.
Charles Melville Hays grandit et étudia à St Joseph dans le Missouri. À 17 ans, il commença à travailler à St Louis pour l’Atlantic and Pacific Railroad. Nommé en 1878 secrétaire du directeur général de la Missouri Pacific, il accepta six ans plus tard un poste semblable dans une plus grande société ferroviaire, la Wabash, St Louis and Pacific. Il prit la direction générale de la Wabash Western en 1887, puis de tout le réseau Wabash en 1889.
Par suite de la réorganisation de la Compagnie du chemin de fer du Grand Tronc en 1895, Hays accéda à la direction générale de ce réseau le 1er janvier 1896 et s’installa à Montréal avec sa famille. Son prédécesseur, Lewis James Seargeant devint conseiller spécial auprès du conseil d’administration du Grand Tronc, installé à Londres. Sauf pendant une certaine période en 1901, Hays exercerait sa fonction jusqu’en 1909, année où il accéderait à la présidence. De 1904 à sa mort, il fut aussi président de la filiale du Grand Tronc dans l’Ouest canadien, la Grand Trunk Pacific Railway Company.
Hays était arrivé au Canada en pleine crise économique. Depuis des années, le rendement des chemins de fer était décevant, quoique la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique se soit mieux tirée d’affaire que la Compagnie du chemin de fer du Grand Tronc, plus grosse et plus endettée. Hays fut engagé pour faire des changements administratifs majeurs, particulièrement pour implanter les méthodes « américaines », plus dynamiques et moins empreintes de scrupules que celles des systèmes britanniques. Sa première tâche consista à restructurer l’administration et l’exploitation du Grand Tronc. Au lieu de s’appuyer uniquement sur les rapports et recommandations de l’administration supérieure en Grande-Bretagne, Hays sollicita l’avis du personnel exploitant au Canada. L’établissement de liaisons avec d’autres réseaux, la négociation de droits de circulation et la modernisation des méthodes comptables résolurent bon nombre des problèmes pratiques que le siège social avait négligés. Hays se montra même disposé à vendre, au chemin de fer canadien du Pacifique, des voies importantes entre Toronto et Hamilton, mais seulement après avoir obtenu pour le Grand Tronc une entente avantageuse sur les droits d’exploitation. Le gain en efficacité qui résulta de ces réformes coïncida avec une époque de croissance sans précédent, ce qui permit à Hays de sortir le Grand Tronc d’une situation de quasi-faillite et de le rendre passablement rentable. En cours de route, Hays – homme trapu qui se présentait toujours bien mis, avec la barbe bien taillée – acquit la réputation de ne tolérer aucune ingérence dans sa façon de diriger l’entreprise et de manifester aux syndicats un dédain implacable, surtout pendant un conflit en Ontario en 1905 et une dure grève qui frappa tout le réseau en 1910.
À compter de 1896, la prospérité du Canada reposa sur le peuplement des Prairies. Hays était convaincu que, pour concurrencer sérieusement le chemin de fer canadien du Pacifique, le Grand Tronc devait traverser cette région. En 1900, il avait présenté un projet grandiose qui consistait à prolonger de Chicago à Winnipeg, puis jusqu’au Pacifique, les lignes d’une filiale américaine, le Grand Trunk Western. Les administrateurs londoniens rejetèrent sa proposition et, à la fin de 1900, il démissionna pour occuper, à compter du 1er janvier 1901, la présidence de la Southern Pacific Railroad Company aux États-Unis. Malheureusement pour Hays, cette entreprise passa sous la coupe du magnat des chemins de fer Edward Henry Harriman. En désaccord avec les nouveaux propriétaires, Hays quitta son poste ; dès la fin de 1901, il occupait à nouveau son ancien emploi, en plus d’une vice-présidence, au Grand Tronc. Entre-temps, le conseil d’administration de cette société s’était laissé convaincre par son président, sir Charles Rivers Wilson, d’adopter un programme audacieux d’expansion vers l’Ouest. Autre fait important, le gouvernement fédéral de sir Wilfrid Laurier avait décidé de promouvoir la construction d’un deuxième transcontinental. Comme le Grand Tronc et la Canadian Northern Railway Company (société ferroviaire plus petite dont le siège social se trouvait dans les Prairies) n’arrivaient pas à s’entendre pour réaliser ce projet ensemble, Ottawa accorda son appui au Grand Tronc. Le 24 novembre 1902, Hays présenta officiellement les plans de construction d’un transcontinental.
Le Grand Trunk Pacific, le plus gros ouvrage de Hays au Canada et le plus controversé, se composerait de deux sections : une ligne partant de Winnipeg à destination de l’Ouest et une ligne construite par le gouvernement entre Winnipeg et Moncton, au Nouveau-Brunswick, qui serait reliée à l’ancien réseau du Grand Tronc. La construction et l’exploitation de la nouvelle ligne de l’Ouest relevaient de Hays. Cependant, à force de réclamer des subventions fédérales, il aggrava la discorde entre les membres du cabinet Laurier [V. Andrew George Blair*], qui n’arrivaient pas à s’entendre sur l’orientation à suivre. En mai 1903, le président du Grand Tronc, sir Charles Rivers Wilson, plus influent auprès du cabinet, associa ses efforts à ceux de Hays. Ils formaient ensemble une bonne équipe ; l’un était rigide, l’autre souple. Hays était prêt à promettre tout ce que Wilson jugeait nécessaire du point de vue diplomatique, mais il s’engagea seulement dans la mesure où le gouvernement n’avait pas réellement les moyens d’appliquer des modalités que le Grand Tronc pourrait trouver gênantes dans l’avenir. Néanmoins, les concessions de Hays eurent une importance vitale, car elles permirent à Laurier de surmonter des difficultés politiques précises pendant qu’il défendit le projet de transcontinental au Parlement, cet été et cet automne-là. En octobre, l’Acte du chemin de fer national transcontinental fut adopté et la Grand Trunk Pacific Railway Company fut constituée juridiquement.
À la tête de la Grand Trunk Pacific Railway Company, Hays traita quatre dossiers de manière particulièrement déplorable. Premièrement, il sous-estima grandement la Canadian Northern Railway Company : il crut que les propriétaires lui vendraient leur entreprise, mais en fait, ils lancèrent une offensive pour concurrencer la Grand Trunk Pacific Railway Company. Deuxièmement, ce qui eut des conséquences plus graves, il engagea le Grand Tronc envers la Grand Trunk Pacific Railway Company. Aucune liaison ferroviaire n’existait encore entre les deux réseaux et le conseil d’administration à Londres refusait d’appuyer sans réserve le projet de l’Ouest. En 1903 pourtant, sans l’autorisation formelle de Londres, Hays prit, au nom de la société mère, des engagements qui mèneraient finalement la Grand Trunk Pacific Railway Company et le Grand Tronc à la ruine. Troisièmement, Hays appuya en 1905 le choix de Prince Rupert, dans l’île Kaien, en Colombie-Britannique, comme terminus de l’Ouest. Il y avait peu de trafic local sur la portion de la ligne qui passait dans le nord de la Colombie-Britannique, et seulement 100 milles de cette ligne seraient construits en 1912, mais Hays soutenait qu’elle serait rentable puisqu’elle raccourcissait le trajet vers l’Asie.
Quatrièmement, Hays décida que le Grand Trunk Pacific serait construit selon les normes les plus élevées en Amérique du Nord, et ce même s’il n’y avait pas encore de réseau d’embranchements dans les Prairies. La priorité qu’il donna à cette directive eut des effets désastreux. Il fallut plus de temps pour achever le Grand Trunk Pacific, si bien que, n’ayant pas à rivaliser avec lui, la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique et la Canadian Northern Railway Company purent renforcer leur emprise sur le trafic dans les Prairies. En conséquence, ce qui était censé être la meilleure ligne principale de l’Ouest canadien n’attira pas un volume suffisant de fret pour être rentable.
Charles Melville Hays ne vécut pas assez longtemps pour assister à l’inauguration du Grand Trunk Pacific : il périt dans le naufrage du Titanic en 1912. Auréolé par cette fin tragique et par sa haute position sociale à Montréal, dont son appartenance à la congrégation American Presbyterian, il fut salué comme l’un des plus grands administrateurs ferroviaires du Canada. Le 25 avril 1912, le Grand Tronc lui rendit hommage en interrompant le travail et les déplacements pendant cinq minutes dans tout le réseau. Pourtant, Hays ne laissait pas derrière lui un héritage entièrement positif. Il dirigea le Grand Tronc pendant la période la plus prospère de son histoire, mais en tant que président de la Grand Trunk Pacific Railway Company, il prit des décisions et mit en œuvre des programmes qui conduisirent en 1919 à la mise sous séquestre de cette société et à une loi autorisant le gouvernement fédéral à se porter acquéreur du capital-actions du Grand Tronc. Au cours des délibérations de la commission chargée d’évaluer ces actions, on allégua que Hays avait trompé les administrateurs de Londres en 1903 et que ces derniers n’avaient jamais approuvé en toute connaissance de cause le plan qui avait mené tout le réseau à la faillite et à la nationalisation.
Une grande partie de l’information contenue dans la biographie qui précède a été tirée des papiers Hays aux AN, MG 30, A18 (transcriptions), ainsi que d’articles parus dans des revues de l’époque sur les chemin de fer, notamment le Railway and Shipping World (Toronto), 1898–1905, et la publication qui lui a succédé, Railway and Marine World, 1906–1912.
Gazette (Montréal), 19, 22–23, 26 avril 1912.— Canadian annual rev. (Hopkins).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— A. W. Currie, The Grand Trunk Railway of Canada (Toronto, 1957).— Encyclopaedia of Canadian biography [...] (3 vol., Montréal et Toronto, 1904–1907), 1.— Frank Leonard, A thousand blunders : the Grand Trunk Pacific Railway and northern British Columbia (Vancouver, 1996).— Donald MacKay, The people’s railway ; a history of Canadian National (Vancouver et Toronto, 1992).— Gavin Murphy, « Canada’s forgotten railway tycoon », Beaver, 73 (1993–1994), no 6 : 29–36.— T. D. Regehr, The Canadian Northern Railway, pioneer road of the northern prairies, 1895–1918 (Toronto, 1976).— Standard dict. of Canadian biog. (Roberts et Tunnell), 1.— G. R. Stevens, Canadian National Railways (2 vol., Toronto et Vancouver, 1960–1962), 2.
Theodore D. Regehr, « HAYS, CHARLES MELVILLE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hays_charles_melville_14F.html.
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Auteur de l'article: | Theodore D. Regehr |
Titre de l'article: | HAYS, CHARLES MELVILLE |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
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