FALCONBRIDGE, sir WILLIAM GLENHOLME, professeur, avocat et juge, né le 12 mai 1846 à Drummondville (Niagara Falls, Ontario), fils de John Kennedy Falconbridge et de Sarah Fralick ; le 15 avril 1873, il épousa à Toronto Mary Phœbe Sullivan (décédée en 1929), fille de Robert Baldwin Sullivan*, et ils eurent sept filles et deux fils (deux des filles et un garçon moururent bébés) ; décédé dans cette ville le 8 février 1920.

Le père de William Glenholme Falconbridge avait quitté le comté d’Antrim (Irlande du Nord) en 1837 et s’était établi à Drummondville chez un oncle qui était marchand et maître de poste du lieu. En 1845, il épousa Sarah Fralick, descendante de loyalistes. Après la naissance de William Glenholme, il se lança en affaires, d’abord à Bradford puis à Richmond Hill, au nord de Toronto. William Glenholme fit ses études aux grammar schools de Richmond Hill et de Barrie, puis à la Model Grammar School de Toronto. En 1862, il entra au University College de Toronto, où il obtint quatre ans plus tard une licence ès arts avec spécialisation en langues.

Convaincu qu’habiter près de la mer l’aiderait à se remettre d’un accident survenu avant l’obtention de son diplôme, Falconbridge accepta la chaire de langues modernes au Yarmouth Seminary, en Nouvelle-Écosse. Au bout d’un an, il retourna au University College à titre de chargé de cours d’espagnol et d’italien. Il exerça cette fonction durant un an tout en faisant un stage de droit auprès de George Morphy, du cabinet Morphy, Sullivan, and Fenton. Il termina son stage chez Patton, Osler, and Moss et fut admis au barreau le 17 mai 1871. Ensuite, il fut engagé chez Harrison, Osler, and Moss, où on lui confia les « litiges relevant de la common law » et où Robert Alexander Harrison* l’initia aux affaires criminelles et à la procédure des tribunaux. L’accession de son mentor à la magistrature en 1875 donna lieu à une nouvelle réorganisation du cabinet et à une diversification de son propre travail.

Malgré ses responsabilités plus nombreuses, Falconbridge ne délaissa pas ses autres champs d’intérêt, le monde universitaire par exemple. Récipiendaire d’une maîtrise ès arts de la University of Toronto en 1870, il fut, de 1872 à 1881, registraire de cet établissement. Sa participation à l’Irish Protestant Benevolent Society et sa présence au conseil consultatif du comité de secours formé après la catastrophe ferroviaire de la rivière Humber, survenue le 2 janvier 1884, le feraient connaître encore davantage. En avril de la même année, le conseil municipal de Toronto le nomma au conseil d’administration du Collegiate Institute de la rue Jarvis.

En 1879, Falconbridge s’était joint au cabinet Bethune, Osler, and Moss, qui se reconstitua peu après en coassociation sous la raison sociale de Moss, Falconbridge, and Barwick and Moss, Hoyles, and Aylesworth. En 1885, il devint conseiller de la reine et membre du conseil de la Law Society of Upper Canada. Le 21 novembre 1887, il fut nommé juge dans une subdivision de la Haute Cour de justice de l’Ontario, la Cour du banc de la reine. Le Canada Law Journal nota qu’aucun des magistrats nommés ce mois-là n’était « un avocat de premier plan », mais dit croire qu’ils administreraient la loi « avec honnêteté, conscience et application ». En dépit de cet appui mitigé, Falconbridge grandit peu à peu dans l’estime de ses collègues : il serait élevé au rang de juge en chef de la Cour du banc de la reine le 3 juillet 1900 et créé chevalier le 26 juin 1908.

Bien que sa réputation se soit bâtie lentement, Falconbridge fit des vagues en 1889 en signalant des délais inacceptables aux assises de Toronto, à la fois dans les procès devant jury et les procès devant juge seulement. « Il préféra toujours les tribunaux de première instance et les tribunaux itinérants aux tribunaux d’appel », a signalé un biographe. Falconbridge parcourait tout l’Ontario pour entendre des causes et aimait la compagnie des membres du barreau à l’extérieur de Toronto. D’après l’un de ses vieux amis de Napanee, l’avocat Walter Stevens Herrington, ce fut lui qui « présid[a] les premières assises jamais tenues dans l’un des districts éloignés » du Nord ontarien. Un canton situé près de Sudbury fut baptisé en son honneur en 1892, peut-être pour rappeler sa participation à l’administration de la justice en dehors de la métropole provinciale.

En 1900, quand Falconbridge devint juge en chef, le Canadian Law Times, tout en signalant ses qualités d’administrateur, le décrivit comme « un juge circonspect et solide » qui était « vénéré pour son bon sens » et avait des manières dignes et courtoises. Toutefois, l’allusion ultérieure du même périodique à ses « jugements lumineux » semble trop généreuse. Falconbridge était réputé surtout pour sa capacité de saisir les circonstances d’un litige et d’identifier précisément les arguments les plus pertinents. Selon le Canada Law Journal, « ses exposés juridiques [étaient] toujours clairs, ses jugements sans ambages et sa compréhension des faits peut-être inégalée, [et] sûrement pas dépassée, par celle de quiconque parmi ses confrères juges ».

Comme Falconbridge siégeait surtout comme juge de première instance, en présence d’un jury, il n’était pas souvent appelé à rédiger des jugements. En se basant sur certaines de ses observations en cour, on peut certainement dire qu’il était consciencieux, mais nullement audacieux ni novateur. Ainsi, dans un litige familial, Brennen c. Brennen et al. (1890), il nota : « Personne n’a cité de précédent à une poursuite comme celle-ci. À lui seul, ce fait constitue un argument puissant pour que je ne crée pas aujourd’hui un tel précédent. » En 1900, dans un procès relatif à une expropriation, qui opposa la municipalité de Toronto à la Metropolitan Street Railway Company (1900), il refusa de s’aventurer hors des sentiers battus : « Quel que soit, dans l’abstrait, le bien-fondé de la cause, tel que l’ont fait valoir les parties dans leurs avancés respectifs, l’affaire se présente à moi comme une pure et simple question de droit qu’il faut trancher à partir de l’explicitation et de l’interprétation des lois et ententes, sans tenir compte des motifs ou des intérêts allégués par les parties et sans non plus, probablement, mettre le bien public dans la balance. »

À la fin des années 1890 et au début du xxe siècle, Falconbridge se pencha sur diverses questions d’intérêt public à titre de commissaire ou de conseiller. En 1896, on le nomma à un comité chargé de refondre les lois de l’Ontario et, cinq ans plus tard, à un comité de la refonte des lois relatives aux droits civils dans la province. De juin 1900 à juin 1901, aux côtés de sir John Alexander Boyd, président de la Haute Cour, et de Duncan Byron MacTavish, juge d’un tribunal de comté, il appartint à une commission royale d’enquête sur des allégations de fraude relatives aux élections fédérales de 1896 dans Huron West et Brockville. En 1903, le premier ministre de l’Ontario, George William Ross, fit appel à Falconbridge et à Boyd pour qu’ils examinent un cas de corruption politique qui sentait beaucoup plus mauvais, l’affaire Gamey. À compter de 1902, la province confia aussi à Falconbridge la présidence d’enquêtes sur des litiges entre le conseil des écoles publiques et le conseil des écoles séparées de Windsor et de Sandwich (Windsor).

Entré au conseil universitaire de la University of Toronto tout de suite après avoir démissionné du poste de registraire en 1881, Falconbridge était demeuré actif dans les cercles universitaires. Cependant, il démissionna du conseil en mai 1896 dès qu’il apprit que, au cours d’une réunion où il était absent, ses collègues avaient approuvé la remise d’un doctorat honorifique en droit à l’anti-impérialiste Goldwin Smith*. Cette décision répugnait à Falconbridge à cause de ses antécédents nord-irlandais et loyalistes. « Il est inutile, protesta-t-il, de préciser pourquoi je m’oppose à l’attribution de cet honneur à M. Smith. Tous les Canadiens loyaux à la couronne comprendront mes raisons. » La réaction de Falconbridge à la décision du conseil universitaire fit tant de bruit et suscita une telle sympathie dans la population que Smith refusa le diplôme.

Au fil des ans, Falconbridge produisit des traductions respectées d’auteurs tels Horace, Catulle et Schiller. En 1901, il rédigea l’introduction d’une luxueuse édition canadienne des écrits et discours d’Edmund Burke. De 1905 à 1908, il fut simple membre et président du conseil d’administration de la Toronto Public Library. Par ailleurs, il appartenait au Royal Canadian Yacht Club et au Toronto Club, où il jouait souvent au bridge l’après-midi en revenant du tribunal. Depuis les débuts de sa carrière d’avocat, il était grand amateur de théâtre et « fin critique du jeu [des comédiens] ». Selon Hector Willoughby Charlesworth*, il « encouragea beaucoup les aspirations juvéniles » de l’actrice Margaret Mary Anglin*, belle-sœur de sa fille Madeline St George ; son gendre Cawthra Mulock fut l’instigateur de la construction du Royal Alexandra Theatre de Toronto. Fervent amateur de plein air, Falconbridge fut président de l’Ontario Fish and Game Protective Association. Sans aucun doute, il profitait de ses tournées de juge pour explorer de nouveaux coins de pêche et taquiner le poisson. En février 1915, il accepta la présidence de la section ontarienne du Secours national, qui recueillait des fonds pour les victimes de la guerre en France.

Le 8 février 1920, quelques jours après avoir présidé les assises de Toronto, Falconbridge mourut d’une pneumonie à sa résidence du 80, rue Isabella. Ses funérailles eurent lieu dans l’atrium de l’Osgoode Hall, avec toute la pompe due à un homme de loi, après quoi il fut inhumé au cimetière St James. Il avait laissé toute sa succession, d’ailleurs modeste, à la plus jeune de ses filles, Aimée Gertrude Young.

Sir William Glenholme Falconbridge était un érudit, un juriste de renom et un homme aux allures austères. Pourtant, Walter Stevens Herrington dit dans un éloge qu’il était « un homme des plus sociables à qui rien ne faisait autant plaisir qu’être entouré d’un groupe d’amis ». Certes, il adorait avoir un auditoire, mais comme il n’était nullement prétentieux, on l’aimait et on le respectait. La County of Hastings Law Association lui rendit hommage en évoquant de « délicieux souvenirs de cet homme charmant, cultivé et généreux dont le commerce était si agréable ». À une époque où les juges avaient de plus en plus de mal à être actifs dans autant de domaines que Falconbridge, il incarnait « toutes les vieilles traditions – littéraire, universitaire, sociale, professionnelle et judiciaire – qui ont fait honneur à la magistrature et au barreau britanniques ».

Jamie Benidickson

Le texte de protestation de W. G. Falconbridge contre la remise d’un diplôme honoraire à Goldwin Smith a paru sous le pseudonyme d’Academicus et sous le titre Two letters of resignation ([Toronto, 1896]). Cet opuscule a été microfilmé par l’ICMH et figure dans son Répertoire.

AO, RG 22-305, no 39940.— UTA, A73-0026/099 (01) ; B72-0031/007 ; B75-0007 ; B88-0002/016 (08) ; B88-0009.— Globe, 16 avril 1873.— J. D. Arnup, Middleton : the beloved judge (Toronto, 1988), 49.— Brennen v. Brennen et al. (1890), Ontario Reports (Toronto), 19 : 327–329.— Canada Law Journal (Toronto), 21 (1885) : 375 ; 23 (1887) : 401 ; 25 (1889) : 549 ; 36 (1900) : 397 ; 56 (1920) 54–56, 75s.— Canadian annual rev. (Hopkins), 1915 : 404 ; 1916 : 444.— Canadian Law Times (Toronto), 20 (1900) : 241 ; 40 (1920) : 83–85.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— E. M. Chadwick, Ontarian families : genealogies of United-Empire-Loyalist and other pioneer families of Upper Canada (2 vol., Toronto, 1894–1898 ; réimpr., 2 vol. en 1, Lambertville, N.J., [1970]), 2 : 47.— H. [W.] Charlesworth, More candid chronicles : further leaves from the note book of a Canadian journalist (Toronto, 1928), 324s.— City of Toronto v. Metropolitan R.W. Company (1900), Ontario Reports, 31 : 367–386.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 2.— Dominion annual reg., 1884 : 316.— Encyclopaedia of Canadian biography [...] (3 vol., Montréal et Toronto, 1904–1907), 2 : 77.— W. S. Herrington, « Sir Glenholme Falconbridge, c.j.k.b. », Canadian Bar Rev. (Toronto), 3 (1925) : 225–235.— J. E. Middleton, The municipality of Toronto : a history (3 vol., Toronto et New York, 1923), 3 : 66s.— Margaret Penman, A century of service : Toronto Public Library, 1883–1983 (Toronto, 1983).— Town v. Archer et al. (1904), Ontario Law Reports (Toronto), 4 : 383–394.

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Jamie Benidickson, « FALCONBRIDGE, sir WILLIAM GLENHOLME », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/falconbridge_william_glenholme_14F.html.

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Auteur de l'article:    Jamie Benidickson
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    28 novembre 2024