Avec l’aimable autorisation de Daniel Heikalo.
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BROUSSEAU, LÉGER (baptisé Joseph), libraire, éditeur et imprimeur, né à Québec le 21 mai 1826, fils de Jean-Baptiste Brousseau et de Nathalie Doré ; le 12 juin 1860, il épousa à Québec Catherine Rose Bennett, puis, le 27 novembre 1866, Georgiana Carneau, de Cap-Santé, Bas-Canada, et ils eurent dix enfants, dont trois fils qui survécurent à leur père ; décédé à Québec le 8 février 1890.
On sait peu de chose sur la jeunesse de Léger Brousseau ; il aurait appris le métier de typographe au Quebec Mercury avant de devenir l’associé de son frère aîné Jean-Docile*, imprimeur officiel de l’archevêché de Québec depuis 1855 et propriétaire du Courrier du Canada depuis 1858, dont la librairie et l’imprimerie se trouvaient rue Buade. Léger Brousseau était responsable de la production de l’atelier typographique et il commença de signer comme éditeur lorsque son frère inaugura sa carrière politique en 1861. Compilateur des ordonnances synodales et épiscopales du diocèse de Québec, il publia en 1871 le Journal des jésuites [...], édité par les abbés Charles-Honoré Laverdière* et Henri-Raymond Casgrain*, et dont les exemplaires devinrent extrêmement rares, tout comme l’Histoire de cinquante ans (1791–1841), annales parlementaires et politiques du Bas-Canada, depuis la Constitution jusqu’à l’Union (1869) de Théophile-Pierre Bédard, à la suite de l’incendie de l’imprimerie en 1872. Brousseau se chargea de la deuxième édition du Mémorial de l’éducation du Bas-Canada (1876) du docteur Jean-Baptiste Meilleur* et édita des livres scolaires. Il imprima des journaux et des revues, entre autres, le Journal de l’Instruction publique, de 1871 à 1879, le Journal of Education for the Province of Quebec, de 1872 à 1879, et les Annales de la bonne Sainte-Anne-de-Beaupré, à compter de 1873. Éditeur des « Causeries du dimanche » du juge Adolphe-Basile Routhier*, publiées dans le Courrier du Canada en 1870 et 1871, il diffusa abondamment le jugement de ce dernier à propos de « l’influence indue », lors de la contestation de l’élection dans Charlevoix, en 1876, impliquant Hector-Louis Langevin* et Pierre-Alexis Tremblay*. Il imprima les livres et biographies écrits par Stanislas Drapeau*, polygraphe fécond, et édita les nombreuses brochures, qui se vendaient bien et à bon marché, de Narcisse-Eutrope Dionne*, autre polygraphe fécond.
Alors que durant les années 1860 les catéchismes, les brochures pieuses et les calendriers diocésains constituaient la majorité des ventes à sa clientèle cléricale, à qui Brousseau fournissait également vin, registres et objets de papeterie, il y eut à partir de 1875 multiplication de commandes pour des souvenirs de retraite et de pèlerinage, des cachets de communion et des images pieuses, témoins d’une inflation dévote. Devenu, pour cinq ans, imprimeur du calendrier du diocèse de Rimouski en 1880, Brousseau semble avoir atteint dans ces années le fonctionnement maximal de son atelier, qui avait des commandes pour quatre mois d’avance.
Membre du Cercle catholique de Québec, de l’Association des typographes de Québec, et membre honoraire de l’Union Allet des zouaves pontificaux en 1878, Brousseau était avant tout homme d’œuvres auprès des communautés religieuses pour qui on le sollicitait de fournir gratuitement des articles de papeterie. Ses bonnes relations avec Stanislas Drapeau, Joseph-Charles Taché*, fonctionnaires fédéraux, et Hector-Louis Langevin, ministre à Ottawa, lui valurent un rayonnement dans cette région, mais c’est surtout la présence comme ministre à Québec de son beau-frère, Pierre Garneau*, qui lui attira les contrats d’impression, à partir de 1875, des bills privés et publics de la législature, des Statuts de la province de Québec et d’autres venant des corporations professionnelles et municipales. À cette époque où les conflits d’intérêts passaient généralement inaperçus, il reçut, entre autres, en 1880 le contrat des annonces et des procès-verbaux de la ville de Québec, même si son frère Jean-Docile en était le maire.
Alors que durant les années 1860 l’archevêché, par l’intermédiaire du grand vicaire Charles-Félix Cazeau, intervenait dans la rédaction du Courrier du Canada, se réservant en plus le droit « d’agréer » le rédacteur en chef, il semble que Brousseau disposa de toute la latitude voulue durant les années 1870. Propriétaire du journal à compter de 1872, il congédia le rédacteur Guillaume Amyot en novembre 1875, par suite d’un article où celui-ci attirait l’attention sur les contrats sans soumission accordés par la ville de Québec, alors que Jean-Docile Brousseau était membre du conseil municipal ; son remplaçant, Roch-Pamphile Vallée, fut aussi démis en 1879. À cette époque de sa prospérité, le Courrier du Canada avait un bon réseau d’agents d’abonnements, de correspondants et de lecteurs jusqu’aux États-Unis, mais il refusa le changement morphologique. Une édition trihebdomadaire s’ajouta cependant à la quotidienne, et Brousseau lança le Journal des campagnes en 1882. Il semble avoir abandonné graduellement le travail d’édition du Courrier du Canada à Thomas Chapais* à partir de 1884 pour devenir agent à Québec de Desclée, De Brouwer et Compagnie, de Bruges, Belgique, de Poursin-Escande, de Gustave Guérin & Compagnie, de Paris, et d’autres éditeurs européens prestigieux.
L’œuvre de la vie de Brousseau devait être démembrée peu de temps après sa mort. Le 27 janvier 1891, Chapais acquérait, pour la somme de $6 000, le Courrier du Canada et le Journal des campagnes. Mme Brousseau, légataire universelle, vendait en février 1891 à Léger Brousseau, fils, au prix de $22 000, la librairie et l’imprimerie mais, à la suite de difficultés financières, ce dernier se voyait dans l’obligation de s’en départir quelques années plus tard.
Fournisseur du clergé, imprimeur officiel de deux diocèses, de la législature et de la ville de Québec, administrateur méticuleux mais tolérant un crédit énorme d’une clientèle négligente et susceptible, Brousseau devait une partie de sa fortune à une conjoncture clérico-politique favorable et à une amélioration des communications et de la poste. Mais il la devait aussi à son métier, son labeur incessant et son talent d’homme d’affaires et d’œuvres.
AAQ, CD, Diocèse de Québec, IX : 2ss ; 20CG, II : 33CR, B : 19 ; I : 71.- AC, Québec, État civil, Catholiques, Sainte-Famille (Cap-Santé), 1882 ; Minutier, P.-É. Bélanger, 3 avril 1890, 27 janv., 4, 19 févr. 1891, 12 juin 1897.— ANQ-Q, AP-G-16 ; État civil, Catholiques, Notre-Dame de Québec, 21 mai 1826, 12 juin 1860 ; Sainte-Famille (Cap-Santé), 27 nov. 1866.— BE, Québec, Reg. B, 162, no 82 508.— Le Canadien, 10, 13 févr. 1890.— Beaulieu et J. Hamelin, Journaux du Québec, 185.— Claude Poirier, « Inventaire analytique du fonds Léger Brousseau », ANQ Rapport, 1972 : 159–253.— André Labarrère-Paulé, Les laïques et la presse pédagogique au Canada français au XIXe siècle (Québec, 1963).— Réjean Robidoux, « Les Soirées canadiennes et le Foyer canadien dans le mouvement littéraire québécois de 1860 » (thèse de d.e.s., univ. Laval, 1957).— Elzéar Lavoie, « La clientèle du Courrier du Canada », Culture (Québec), 30 (1969) : 299–309 ; 31 (1970) : 40–57.— Romain Légaré, « Apôtre de l’Évangile au Canada », Le Souvenir (Trois-Rivières), 17 (1970), no 1 : 4–10.— Raoul Renault, « Le journal des jésuites », BRH, 5 (1899) : 52.— Philippe Sylvain, « Les débuts du Courrier du Canada et les progrès de l’ultramontanisme canadien-français », Cahiers des Dix, 32 (1967) : 255–278.— R. G. Thwaites, « Le journal des jésuites », BRH, 5 (1899) : 22.
Elzéar Lavoie, « BROUSSEAU, LÉGER (baptisé Joseph) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/brousseau_leger_11F.html.
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Auteur de l'article: | Elzéar Lavoie |
Titre de l'article: | BROUSSEAU, LÉGER (baptisé Joseph) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |