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TESTARD DE MONTIGNY, JACQUES, officier des troupes du Canada, célèbre pour ses campagnes à Terre-Neuve, fils de Jacques Testard de La Forest et de Marie Pournin ; né à Montréal en 1663 et décédé dans cette ville en 1737.
Les Testard étaient une famille de marchands montréalais apparentée aux Le Moyne et aux Le Ber. Tôt orphelins, Jacques et son aîné, Gabriel Testard* de La Forest, furent élevés par leur beau-père, Jacques de La Marque, dont le nom semble avoir été porté, à certains moments, par le plus jeune des deux frères. Volontaire dans les troupes de la colonie, Testard de Montigny participe à l’expédition lancée par Frontenac [Buade*] du côté d’Orange (Albany, N. Y.) et au sac de Corlaer (Schenectady, N. Y.). Il fait un voyage en France en 1692, sur un des navires de Pierre Le Moyne d’Iberville, et est encore dans la métropole quand le gouverneur reçoit l’ordre de renforcer la garnison du fort Naxouat (Nashwaak) sur la rivière Saint-Jean où commande Robinau* de Villebon. Une compagnie est confiée au lieutenant Claude-Sébastien de Villieu et Montigny, devenu enseigne dans les troupes, y servira comme lieutenant. Les deux officiers rejoignent leur poste le 25 novembre 1693 et tous deux s’appliquent avec succès à mener des partis d’Abénaquis harceler les colons anglais. Le commerce et la traite auxquels chacun participe font naître des rivalités qui opposent le commandant aux frères Damours (Mathieu Damours* de Freneuse, Louis et René Damours), importants concessionnaires de la région avec lesquels Montigny et Villieu ont partie liée. En 1695, ceux-ci doivent venir s’expliquer à Québec et promettre une meilleure observance des règlements.
L’année suivante, avant de lancer sa grande offensive à Terre-Neuve, Iberville aborde en Acadie avec la mission de détruire le fort Pemaquid (fort William Henry) que les Anglais ont reconstruit à l’embouchure de la Kennebec. Montigny doit le seconder en Acadie puis rejoindre l’expédition de Terre-Neuve. Il part à l’avant-garde neutraliser quelques petits forts qui auraient pu donner l’alerte ; après quoi, les forces combinées des vaisseaux et des Abénaquis conduits par Saint-Castin [Jean-Vincent d’Abbadie] obtiennent sans difficulté la capitulation de Pemaquid. La campagne de Terre-Neuve s’ouvre au début de l’hiver. Montigny, rompu à toutes les tactiques de la guerre en forêt avec les Indiens, y apportera un précieux concours, souligné par l’abbé Baudoin* qui en a laissé la narration fidèle. Le gros des troupes conduit par Iberville et le gouverneur Jacques-François de Brouillan [Monbeton] s’empare de Saint-Jean le 30 novembre 1696, incendie la place puis regagne Plaisance (Placentia) où l’on dispose des prisonniers et partage le butin. Iberville confie un détachement à Montigny avec l’instruction de nettoyer la côte anglaise de tousses établissements. Saint-Jean n’était qu’un village et le reste n’est qu’habitations clairsemées de pêcheurs, avec quelques petites agglomérations d’entrepôts au fond des havres. Chaussés de raquettes, les Français vont d’une maison à l’autre, faisant prisonniers ceux qui n’ont pas pu s’enfuir à temps, saisissant les effets qui ne sont pas cachés dans les bois, vidant les magasins et entrepôts de morues et incendiant les barques. À la fin de mars, les Anglais ne conservent que Bonavista et l’île Carbonear et leurs pêcheries sont ruinées.
Iberville quitte Terre-Neuve sans pouvoir y consolider ses gains et Montigny repasse au Canada où il reçoit une lieutenance le 20 avril 1700. Quatre ans plus tard, Vaudreuil [Rigaud] le renvoie en Acadie où il mène quelques raids contre les établissements anglais et s’emploie à convaincre les Abénaquis de quitter cette région trop exposée pour venir s’établir au Canada.
La conquête d’Iberville avait été sans lendemain et très vite les Anglais réorganisèrent leurs établissements de Terre-Neuve [V. Gibsone]. Aussi, en 1705, Auger de Subercase entreprend-il une seconde campagne à laquelle Montigny prend part de nouveau. Cette fois, c’est lui qui nous a laissé le journal (5 mars–6 juin 1705) de cette expédition, menée avec autant de brio que la première. Après la levée du siège de Saint-Jean [V. Moody], bien secondé par François Picoté de Belestre et Étienne de Villedonné, il va par bois et par mer rabattre et désarmer tous les habitants des côtes. Dans les havres désertés, les maisons, barques et échafauds sont incendiés, le sel est jeté à la mer. À la nouvelle que Montigny mène cette campagne, Bonavista, suivant le conseil de George Skeffington, accepte la capitulation. La victoire est complète mais elle n’aura pas plus de conséquences que la première.
L’année suivante, Montigny passe en France pour présenter au roi et à la cour le chef abénaquis Nescambiouit, qui s’était distingué à ses côtés aux deux campagnes de Terre-Neuve. Capitaine en pied depuis le 23 juin 1706, Montigny reprend son service au Canada et seconde Ramezay dans l’expédition de 1709 à la Pointe-à-la-Chevelure (Scalping Point). Jusqu’à la fin de la guerre, il demeure attaché à l’armée que Vaudreuil maintient au sud de Montréal pour repousser l’invasion de Nicholson. En 1712, il reçoit la croix de Saint-Louis et l’année suivante ou lui accorde un congé pour rétablir sa santé. Veuf d’un premier mariage contracté en 1698 avec Marguerite Damours, il épouse en 1718 la jeune Marie-Anne de La Porte de Louvigny et ils auront sept enfants. La famille est établie à Montréal et sans doute Montigny sert-il dans une garnison de l’île ou des environs mais, à deux occasions encore et malgré son grand âge, il sera envoyé dans les postes éloignés, étant « craint et respecté des Sauvages. »
En 1721, Vaudreuil lui donne le commandement de la baie des Puants (Green Bay). Passant par Michillimakinac pour aller prendre son poste, il y rencontre Charlevoix* et tous deux descendent ensemble jusqu’à la baie. Durant ce voyage, Montigny entretient le jésuite des hauts faits de sa carrière et celui-ci les consignera plus tard dans son Histoire de la Nouvelle-France. Rien ne marque le séjour de l’officier à la baie si ce n’est un conseil avec les Renards, tenu en septembre 1722. L’année suivante, Nescambiouit, qui vivait chez les Renards depuis 1716, regagne la mission de Saint-François, peut-être sur les instances de Montigny, car ce dernier répond aux autorités de la fidélité indéfectible du chef abénaquis qu’on avait un instant soupçonné de trahison. À l’automne de 1723, Montigny est de retour à Montréal, mais en 1730 il remonte à Michillimakinac pour remplacer le commandant Dubuisson [Renaud]. Réformé en 1733, il meurt à Montréal le 9 juillet 1737. Le gouverneur et l’intendant invoquent ses services distingués pour obtenir une pension pour sa veuve laissée sans ressources.
AN, Col., B, 16, 19, 22, 27, 29, 34, 35, 44, 45, 47, 48, 50, 52–55, 57, 58 ; Col., C11A, 29, 32, 33, 42–67 ; Col., C11D, 2, 3, 4 ; Col., D2C, sur fiches (états de service des officiers) ; Marine, C7, 217 (dossier de Montigny).—Charlevoix, Histoire de la N.-F.— Correspondance de Frontenac (1689–1699), RAPQ, 1927–28, 1928–29.— L’expédition de M. de Montigny à Terreneuve en 1705, RAPQ, 1922–23 : 293–298.— Tanguay, Dictionnaire.— Frégault, Iberville.— Journal de l’abbé Beaudoin, Auguste Gosselin, édit. ( « Les Normands au Canada », Évreux, 1900).
Louise Dechêne, « TESTARD DE MONTIGNY, JACQUES », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/testard_de_montigny_jacques_2F.html.
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Auteur de l'article: | Louise Dechêne |
Titre de l'article: | TESTARD DE MONTIGNY, JACQUES |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 2 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1969 |
Année de la révision: | 1991 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |