PERLEY, sir GEORGE HALSEY, homme d’affaires, philanthrope, homme politique et diplomate, né le 12 septembre 1857 à Lebanon, New Hampshire, fils de William Goodhue Perley*, marchand de bois, et de Mabel Elvira Ticknor Stevens ; le 4 juin 1884, il épousa à Berlin (Kitchener, Ontario) Annie Hespeler Bowlby (décédée en 1910), et ils eurent une fille, puis le 11 juin 1913, à Ottawa, Emily Colby White (décédée en 1948), fille de Thomas White*, et de ce mariage ne naquit aucun enfant ; décédé le 4 janvier 1938 à Ottawa.

George Halsey Perley grandit au sein d’une famille financièrement à l’aise. Même si son père avait déplacé ses activités de sciage de la Nouvelle-Angleterre à la vallée de l’Outaouais en 1852, la famille resta à Lebanon durant plusieurs années. Au Canada, les marchands de bois profitaient du traité de réciprocité de 1854 ; William Goodhue put offrir à son fils une bonne éducation dans les meilleures écoles d’Ottawa et, plus tard, à la St Paul’s School de Concord, dans le New Hampshire. George Halsey entra à la Harvard University en 1874 et obtint une licence ès arts en 1878. Il se joignit rapidement à l’entreprise Perley and Pattee à Ottawa, dont son père et Gordon Burleigh Pattee étaient propriétaires. Il y fut d’abord commis et en devint le directeur cinq ans plus tard.

En 1890, Perley and Pattee comptait un troisième associé : Charles Berkeley Powell, gendre de Pattee. À la suite de la mort de son père, cette année-là, George Halsey prit le poste de ce dernier au sein de l’entreprise. Après la vente de Perley and Pattee au magnat de l’industrie du bois John Rudolphus Booth*, en 1894, George Halsey créa sa propre affaire, la G. H. Perley Company, qui récoltait du bois le long de la rivière Rouge, au Québec, et possédait plusieurs scieries, dont la principale se trouvait à Calumet (Grenville-sur-la-Rouge). Il étendit ses activités vers l’est en faisant l’acquisition d’une concession forestière de plus de 1 000 milles carrés le long des rivières du Diable et Le Boulé, dans la région des Laurentides. En 1895, il installa son siège social à Saint-Jovite (Mont-Tremblant), d’où il dirigerait le travail de l’entreprise durant près de 15 ans. En 1903, il était aussi actionnaire et vice-président de la Hull Lumber Company, dont les activités étaient concentrées dans la partie supérieure de la rivière des Outaouais. Lorsque l’industrie du sciage commença à décliner et que la demande de bois à pâte augmenta, son entreprise dans la région des Laurentides fusionna avec la Riordon Paper Mills Limited [V. Charles Alfred Riordon] pour former, en 1909, la Riordon Paper Company Limited, dont le capital autorisé s’élevait à 3 500 000 $. Il continuerait de travailler avec diverses compagnies de bois de sciage pendant de nombreuses années.

Citoyen très en vue, qui, selon le Droit d’Ottawa, était millionnaire à l’âge de 53 ans, Perley fut directeur de la Banque d’Ottawa à partir de 1910, sinon plus tôt, et fut durant nombre d’années vice-président de la Compagnie du chemin de fer Atlantique canadien, à la création de laquelle son père avait participé. Il avait été président du Rideau Club en 1896–1897, du Royal Ottawa Golf Club de 1900 à 1904 et de la Royal Canadian Golf Association en 1905–1906. Nommé président du comité de secours établi à la suite d’un feu de forêt qui dévasta en 1897 les comtés de Prescott et de Russell, en Ontario, il enquêta sur les pertes et distribua les sommes amassées grâce à un appel aux dons. Son travail efficace lui valut d’être nommé président de l’Ottawa and Hull Fire Relief Fund, mis sur pied après un terrible incendie qui, le 26 avril 1900, avait ravagé les deux communautés, laissé 15 000 personnes sans logis et causé aux scieries et au parc à bois de la Hull Lumber Company des dommages évalués à 400 000 $. Les administrateurs du fonds distribuèrent environ un million de dollars en aide. La réputation personnelle de philanthrope de Perley avait déjà été établie en 1897, lorsque ses frères, ses sœurs et lui avaient fait don de la maison de leur père pour ce qui deviendrait la Perley Home for Incurables. En 1912, sa seconde femme et lui offriraient un édifice à Ottawa afin d’en faire un hôpital pour traiter la tuberculose et, en 1920, ils donneraient un bâtiment au May Court Club pour sa maison de convalescence.

La philanthropie fournit à Perley une belle occasion de se lancer dans une nouvelle carrière. Aux élections fédérales de novembre 1900, il se présenta comme candidat conservateur dans Russell. Son père, qui avait représenté Ottawa City de 1887 jusqu’à sa mort en 1890, et ses associés Pattee et Powell avaient tous été de fervents conservateurs. Malgré les bonnes intentions suscitées par son travail humanitaire et ses relations politiques, Perley fut vaincu. En décembre 1902, il perdit une élection partielle dans la circonscription en partie anglophone et fortement libérale d’Argenteuil, au Québec. Cependant, aux élections générales de novembre 1904, il remporta Argenteuil par 176 voix.

Sérieux, habile et efficace, Perley eut tôt fait de gagner la confiance du chef de son parti, Robert Laird Borden, qui partageait et respectait ses qualités, et avait grand besoin d’alliés au sein d’un caucus profondément divisé. Aux élections d’octobre 1908, Perley augmenta sa majorité. En 1910, il était whip en chef du caucus conservateur ; il accompagna Borden dans sa tournée éclair dans l’Ouest canadien en juin et en juillet 1911. Aux élections générales qui suivirent, Perley fut responsable du succès de son parti dans la vallée de l’Outaouais. Le 21 septembre, les électeurs d’Argenteuil firent plus que doubler son avance. Le nouveau premier ministre nomma Perley ministre sans portefeuille au sein du cabinet le 10 octobre, montrant ainsi que celui-ci comptait parmi les quelques membres du parti en qui il avait pleine confiance. Loin de lui attribuer un titre insignifiant, Borden voulait que Perley soit libre d’entreprendre des tâches précises. En 1912 et en 1913, il fut premier ministre intérimaire pendant les absences de Borden. Quand lord Strathcona [Smith*], haut-commissaire du Canada en Grande-Bretagne, mourut subitement en janvier 1914, Perley se laissa convaincre de le remplacer temporairement. Sir Charles Tupper*, le prédécesseur de Strathcona, avait insisté pour que le poste soit confié à un ministre membre du cabinet, capable de faire acte d’autorité auprès du gouvernement britannique, et Perley, qui s’était rendu outre-mer en 1912 afin d’évaluer le rôle, avait donné son accord. En devenant membre du Committee of Imperial Defence, un ministre permettrait au Canada d’avoir voix au chapitre dans le forum qui traitait des problèmes de défense de l’Empire. Perley, qui partit pour Londres en juin avec sa femme, avait le mandat de réorganiser la représentation du Canada en Grande-Bretagne et de lui donner une autorité que la mère patrie serait peu disposée à reconnaître. Des événements imprévus forceraient les Perley à rester en Angleterre, à l’exception de brefs séjours au Canada, jusqu’en 1922.

Deux mois après l’arrivée de Perley, l’Empire britannique était en guerre contre l’Allemagne et ses alliés. Le Canada envoya immédiatement plus de 30 000 hommes et enrôlerait au total plus de 600 000 hommes pour approvisionner un Corps d’armée canadien composé de quatre divisions et de nombreuses autres unités. Contents de ne commander que les troupes engagées dans la bataille, les Britanniques laissèrent l’administration du Corps expéditionnaire canadien, même en Angleterre, aux Canadiens. Cet arrangement signifiait que les Britanniques n’étaient que rarement en contact avec le ministre de la Milice et de la Défense de Borden, Samuel Hughes*, mais Perley fut vite consterné par le désordre et la confusion causés par les politiques et la conduite de ce dernier [V. sir Samuel Hughes ; sir Samuel Benfield Steele*]. Fait chevalier commandeur de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges le 1er janvier 1915, Perley fit de son mieux pour résoudre les problèmes et protéger la réputation du Canada, que ternissait Hughes, à son avis. Pendant ce temps, l’énergique et sociable lady Perley faisait appel aux femmes canadiennes en Angleterre pour réconforter les troupes, mettre sur pied des maisons de convalescence et servir d’infirmières aux soldats canadiens malades et blessés.

Hughes et Perley s’étaient souvent affrontés au sein du caucus conservateur et du cabinet. En 1916, sur le conseil de Perley, Borden envoya Hughes en Angleterre pour en rapporter des idées afin d’améliorer le système de commandement. Lorsque Hughes contrevint à ses instructions et créa un conseil administratif dominé par ses acolytes, le premier ministre décida à contrecœur qu’il était temps que son collègue parte. Le conseil mis sur pied par Hughes devait être remplacé et on annonça la création du ministère des Forces militaires d’outre-mer, basé à Londres, le 30 octobre. Perley accepta d’en devenir le premier ministre et prêta serment le jour suivant. Quand Hughes découvrit les nouveaux pouvoirs dont était investi son rival, il laissa éclater son indignation dans une lettre injurieuse adressée à Borden. Le 11 novembre, lorsque le premier ministre finit par obtenir la démission de Hughes, Perley était presque trop occupé pour s’en soucier.

Responsable des forces canadiennes en Grande-Bretagne et au front, le nouveau ministère s’occupait aussi des négociations avec le gouvernement britannique. Comme ses fonctions étaient étroitement liées à celles du haut-commissaire, Perley demanda la permission de conserver ce poste, dont sa femme et lui préféraient nettement le prestige. Afin d’éviter l’élection partielle, qu’une nomination au cabinet requérait alors, il ne reçut aucun salaire pour son travail ministériel. Cette absence de rémunération ne gêna pas le riche Perley. Dès le début, sa politique fut de recruter pour son ministère des officiers issus du Corps d’armée canadien en France et qui avaient fait la preuve de leur compétence. Il leur confia la gestion de l’administration militaire de routine. Sur les instances de lady Perley et de beaucoup d’autres Canadiens en Angleterre, il abolit certaines des réformes médicales nationalistes recommandées par l’allié de Hughes, le colonel Herbert Alexander Bruce*, comme l’isolement des blessés canadiens dans des installations médicales uniquement canadiennes. De nombreuses suggestions de Bruce furent retenues pour leur valeur propre. Même s’il se rendit en France, Perley n’avait pas l’intention de s’immiscer dans les affaires du Corps d’armée canadien. Il noua des liens personnels avec sir Douglas Haig et les officiers supérieurs au quartier général principal du Corps expéditionnaire britannique.

Les doubles fonctions de Perley lui conférèrent un prestige et un statut social considérables à Londres durant la guerre, qui grandirent encore plus lorsque Borden et lui assistèrent aux réunions du cabinet de guerre impérial, au printemps de 1917. Malgré une campagne injurieuse orchestrée par Hughes et par des libéraux qui espéraient tirer parti de ses débordements, le Parlement approuva le nouveau ministère, dont l’autorité avait jusque-là reposé sur un décret, le 18 août. Parce que Perley tentait d’éliminer le favoritisme politique et d’assainir l’administration, on l’accusa d’être froid et de manquer d’humanité. Le gouvernement d’union fut formé en octobre ; en décembre, quand des élections générales devinrent imminentes, Borden proposa à Perley de conserver son poste de ministre. Au grand désarroi de Borden, Perley demanda plutôt à être reconduit dans ses fonctions de haut-commissaire. Briguer un poste qu’il avait forcément négligé et assumer l’énorme responsabilité de l’administration militaire représentaient un défi insurmontable. Borden acquiesça à contrecœur. Sir Albert Edward Kemp*, le successeur de Hughes au ministère de la Milice et de la Défense, traversa l’Atlantique pour prendre en charge le nouveau ministère. La récompense de Perley fut, le 12 octobre 1917, une nomination accordée avec réticence au poste de haut-commissaire.

Même s’il ne fut pas membre de la délégation canadienne à la conférence de paix de Paris, Perley signa, en tant que haut-commissaire, 3 des 6 traités importants et 11 des 25 autres traités, accords et déclarations auxquels le Canada fut associé. Il fut l’un des deux représentants canadiens à la réunion de la Société des nations qui se tint à Genève, en Suisse, en 1921. Son mandat à Londres se termina le 28 février 1922, peu après le retour au pouvoir des libéraux, sous la conduite de William Lyon Mackenzie King*.

À 65 ans, après une longue et épuisante carrière dans la fonction publique, Perley envisagea de prendre sa retraite, mais ne put s’y résoudre. Comme il s’y attendait, Argenteuil était tombée aux mains des libéraux en 1917. Il entreprit de reprendre la circonscription et, aux élections d’octobre 1925, il y parvint par 200 voix. Au beau milieu de la confusion suscitée par l’affaire King-Byng [V. Julian Hedworth George Byng ; William Lyon Mackenzie King], il servit, sans salaire, de secrétaire d’État et de ministre des Travaux publics au premier ministre Arthur Meighen*, du 29 juin au 12 juillet 1926. Après la dissolution du Parlement, Meighen reconstitua son cabinet, le 13 juillet, pour faire face à des élections générales, et Perley fut officiellement nommé secrétaire d’État. Il quitta ses fonctions le 24 septembre, dix jours après la défaite des conservateurs. Il avait survécu au gouvernement de Meighen et gardé Argenteuil par une majorité de 240 voix. Il gagna encore le 28 juin 1930, par 769 voix. Comme Borden, le premier ministre Richard Bedford Bennett* nomma Perley ministre sans portefeuille et celui-ci fut premier ministre intérimaire en l’absence de Bennett. En 1932, à Genève, Perley fut le délégué du Canada à la Conférence internationale sur le désarmement. L’année suivante, l’attribution des distinctions honorifiques britanniques ayant été momentanément rétablie, Perley fut élevé au rang de grand-croix de l’ordre de Saint-Michel et Saint-Georges. Deux ans plus tard, aux élections générales d’octobre 1935, ses fidèles électeurs d’Argenteuil lui accordèrent une majorité de 177 voix.

Sir George Halsey Perley allait régulièrement au travail à pied, restait de longues heures à son bureau et à la Chambre des communes, et était un fidèle de l’Église d’Angleterre. Il était apparemment en bonne santé, et avait des cheveux et une barbe foncés à peine parsemés de gris quand il mourut subitement chez lui dans l’après-midi du 4 janvier 1938. Les journaux du soir firent l’éloge de ce vétéran des affaires, de la politique et de la diplomatie. Durant ses années de service, en particulier comme ministre des Forces militaires d’outre-mer, il avait contribué, peut-être involontairement, à développer l’autonomie du Canada. Malgré les ravages de la grande dépression, il laissa une fortune de plus de deux millions de dollars, ce qui prouve qu’il ne perdit pas son sens des affaires au cours de sa longue carrière dans la fonction publique.

Desmond Morton

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Desmond Morton, « PERLEY, sir GEORGE HALSEY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/perley_george_halsey_16F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2016
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