OLIVIER DE VÉZIN (Vésin, Vézain), PIERRE-FRANÇOIS, maître de forges, directeur des forges du Saint-Maurice, grand voyer de la Louisiane, né le 28 avril 1707 à Aingoulaincourt (dép. de la Haute-Marne, France), fils d’Hugues Olivier et de Louise Le Roux, décédé en 1776 ou après.

Pierre-François Olivier de Vézin est maître de forges à Sionne (dép. des Vosges, France) lorsqu’il est engagé par le roi pour venir en Nouvelle-France examiner l’état des forges du Saint-Maurice ; depuis la mort en 1733 de leur premier propriétaire, François Poulin* de Francheville, les forges avaient été laissées presque à l’abandon. Ayant obtenu un salaire annuel de 2 400# et une gratification spéciale de 1 200#, Olivier de Vézin s’embarque sur le Héros et arrive à Québec le 3 septembre 1735. Après un périple de cinq semaines qui le conduit à Batiscan, Champlain et enfin à Saint-Maurice, en compagnie de Jean-Eustache Lanouillier* de Boisclerc, il rédige un mémoire, adressé au ministre Maurepas, dans lequel il évalue les avantages et désavantages de l’établissement de Poulin de Francheville, et y joint un « Projet des dépenses à faire pour l’établissement et exploitation des forges du fer en Canada » [V. François-Étienne Cugnet*]. Il offre de voir lui-même aux opérations, oubliant du coup sa forge de Sionne.

Deux anciens associés de Poulin de Francheville, Cugnet et Ignace Gamelin, préparent avec Vézin un projet de société. Ils reçoivent, au printemps de 1736, l’appui du roi qui accepte l’offre de Vézin et consent à fournir une avance de fonds considérable. Lorsque la société est formée, le 16 octobre 1736, elle compte deux membres de plus Thomas-Jacques Taschereau*, agent des trésoriers généraux de la Marine, et Jacques Simonet* d’Abergemont, maître de forges envoyé de France quelques mois auparavant pour aider Vézin à mettre les forges sur pied. Tous signent l’acte officiel instituant la « société et Compagnie pour L’Exploitation des [...] mines de fer » le 11 février 1737, mais, déjà en 1736, les travaux d’installation avaient été entrepris sous la direction d’un Vézin très enthousiaste. Il a la confiance des autorités de la colonie et bénéficie des largesses royales. Cependant, les travaux n’avancent pas aussi rapidement qu’il l’a promis et coûtent cher. L’intendant Hocquart commence à mettre en doute la compétence du maître de forges. Vézin, il est vrai, s’est rendu coupable d’une erreur technique en surestimant le débit du ruisseau devant faire fonctionner la forge, erreur qu’il cherche à masquer lorsque l’intendant vient visiter les installations en juillet 1738. Il faut attendre le mois suivant pour assister au premier allumage réussi du fourneau.

Vézin passe en France à la fin de 1739 et revient l’année suivante avec son frère, le sieur Darmeville, et plusieurs ouvriers. Simonet d’Abergemont l’avait remplacé pendant son absence. De violents conflits, cependant, opposent Olivier de Vézin et ses associés. Ceux-ci lui reprochent des dépenses excessives, la mauvaise conduite des ouvriers, la faible rentabilité de l’entreprise. Ces difficultés prennent une ampleur telle que la faillite de l’entreprise devient inévitable en 1741. Olivier de Vézin remet sa démission le 13 octobre et repasse immédiatement en France sur le Rubis afin d’y plaider sa cause. Dès le 13 mars 1742, dans une lettre au roi, il offre de reprendre la direction des forges du Saint-Maurice. On lui accorde plutôt, l’année suivante, la commission de grand voyer en Louisiane.

Les mémoires rédigés par les intéressés après la faillite des forges s’accordent tous à accabler Olivier de Vézin. Maurepas avait pourtant affirmé, à propos du choix de Vézin, que ses qualités de maître de forges étaient reconnues, mais elles furent fréquemment mises en doute par ses associés. Il est indéniable qu’il y eut de nombreuses autres causes à cette faillite ; la difficulté de recruter des ouvriers spécialisés vraiment compétents, leur indiscipline, pour ne nommer que celles-là, interdisent aujourd’hui de rejeter le blâme uniquement sur Vézin. Les succès mitigés que connurent les administrateurs subséquents prouvent que les raisons du mauvais fonctionnement de l’entreprise ne résidaient pas entièrement dans l’administration du maître de forges champenois.

Quoi qu’il en soit, Olivier de Vézin se retrouve en Louisiane en 1744. Ses nouvelles fonctions de grand voyer ne le comblent pas ; il manifeste très tôt le désir de relancer une entreprise de forges en exploitant les mines de fer de la Louisiane, mais ce projet n’a pas de suite. Il exerce les fonctions de grand voyer et celles d’arpenteur général de la Louisiane et, en 1749, il est de retour à Trois-Rivières où il épouse, le 14 juin, Marie-Joseph, fille de Jean-Baptiste Gastineau* Duplessis. Vézin n’a manifestement pas oublié ses premières attaches en Amérique : il fait inscrire dans son acte de mariage qu’il fut « Le premier Envoyé Par Le Roy En Ce Pais pour y Etablir Les forges Et fourneau de St Maurice dont il a Eté Le premier directeur ». Vézin regagne la Louisiane avec sa jeune épouse et, le 4 juillet 1754, il obtient la permission de passer en France sur le Rhinocéros afin de tenter lui-même de convaincre le roi de le disculper de toute responsabilité dans la faillite des forges du Saint-Maurice, dans lesquelles il a « perdu son temps, ses avances, sa jeunesse et ses appointements ». Il veut de plus avoir la certitude d’être libéré de toutes dettes.

Olivier de Vézin demeure en Louisiane, même après la cession de la colonie à l’Espagne en 1762. Vivant depuis près d’une vingtaine d’années dans ce pays où il a occupé des fonctions administratives importantes, il devait y avoir acquis une certaine notoriété ainsi que des avantages matériels satisfaisants. Il entre dans le nouveau gouvernement en 1769, lorsqu’est créé le Cabildo, conseil formé de six membres qui remplace le Conseil supérieur de l’ancienne colonie française, et occupe les fonctions de regidor perpetual (conseiller) et d’alcalde mayor provincial (juge de paix provincial en chef). En 1776, il démissionne en faveur de son fils, Charles-Honoré Olivier de Saint-Maurice.

On ne sait ce qu’il advint de Pierre-François Olivier de Vézin par la suite. Selon certaines sources, il serait mort lors d’un voyage en France. Son épouse devait être décédée depuis plusieurs années déjà puisque deux de ses fils, Pierre-Darmeville et Nicolas-Joseph-Godefroy, vécurent un certain temps à Trois-Rivières chez leur tante, Madeleine Duplessis, au cours des années 1760. Celle-ci leur laissa d’ailleurs un legs à sa mort, en 1768, ainsi qu’aux autres enfants du grand voyer. En janvier 1770, Olivier de Vézin fut élu tuteur de ses enfants restés au Canada, lors d’une assemblée de parents à La Nouvelle-Orléans. La même année, il se rendit une dernière fois à Trois-Rivières où il assista au mariage de son ami, Michel-Eustache-Gaspard-Alain Chartier* de Lotbinière. Il n’y retourna plus. C’est Jacques Perrault, dit Perrault l’aîné, qui s’occupa, en 1772 et en 1773, de vendre en son nom les legs de Madeleine Duplessis. La famille Olivier était désormais implantée en Louisiane. Un des fils d’Olivier de Vézin, Nicolas-Joseph-Godefroy, acquit une vaste plantation de canne à sucre à St Bernard, non loin de La Nouvelle-Orléans. Plusieurs de ses descendants furent des hommes en vue dans leur milieu.

M.-F. Fortier

AD, Haute-Marne (Chaumont), État civil, Aingoulaincourt, 29 avril 1707.— AN, Col., B, 62, p.56 ; 63/1, pp.237–239 ; C11A, 63, pp.45, 58 ; 65, pp.154–157 ; 72, p.29 ; 76, pp.68s. ; 100, pp.207–210 ; 110 ; 111 ; 112 ; C13A, 38, pp.8–11 ; 42, pp.81s. ; C13C, 4, pp.238s. (copies aux APC).— ANQ-MBF, État civil, Catholiques, Immaculée-Conception (Trois-Rivières), 14 juin 1749, 13 déc. 1770 ; Greffe de Paul Dielle, 4, 28 nov. 1768, 3 avril 1772, 6 mars 1773 ; Greffe de C.-L. Maillet, 3 avril, 5 nov. 1772, 6 mars 1773 ; Greffe de H.-O. Pressé, 28 sept. 1737.— Archives maritimes, Port de Rochefort (France), 1E, 122, f.334 ; S, 162, liasse 131, pièce 225.— New Orleans Public Library (La Nouvelle-Orléans), Department of Archives, Cabildo, 1769–1803, I : 3, 139–143, 242.— J.-N. Fauteux, Essais sur l’industrie, I : 55–124.— Jouve, Les franciscains et le Canada : aux Trois-Rivières.— J. S. Kendall, History of New Orleans (3 vol., New York et Chicago, 1922), III : 1 069s.— E. E. Long, Madaine Olivier’s mansion (La Nouvelle-Orléans, 1965), 11–18.— Sulte, Mélanges historiques (Malchelosse), VI.— Tessier, Les forges Saint-Maurice.

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M.-F. Fortier, « OLIVIER DE VÉZIN (Vésin, Vézain), PIERRE-FRANÇOIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/olivier_de_vezin_pierre_francois_4F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 4
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1980
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