NOYELLES DE FLEURIMONT, NICOLAS-JOSEPH DE, officier dans les troupes de la Marine, né le 13 octobre 1695 à Quimper, France, fils de Pierre-Philippe de Noyelles, baron de Fleurimont, et de Marie Bridou, décédé à Rochefort, France, le 16 août 1761.

Nicolas-Joseph de Noyelles était issu d’une branche cadette d’une noble et illustre maison d’Artois. Son père était colonel dans un régiment de cavalerie français et chevalier de l’ordre ancien du Saint-Esprit de Montpellier. Les Noyelles étaient alliés à Henri-François d’Aguesseau ; l’influent chancelier s’intéressa de près à l’avancement des siens au Canada. On trouvera là, peut-être, la justification des faveurs dont Nicolas-Joseph et ses fils furent l’objet de la part du gouverneur Charles de Beauharnois.

La carrière militaire controversée de Nicolas-Joseph au Canada débuta en 1710 lorsqu’il débarqua dans la colonie avec le grade d’enseigne ; il n’avait pas encore 15 ans. On le nomma à Montréal où il élut domicile ; il y épousa en 1718 Marie-Charlotte, fille de Charles Petit* de Levilliers et alliée à une bonne partie de la noblesse coloniale. Noyelles servit en qualité de commandant par intérim à Détroit en 1720 et fut promu lieutenant en 1721. En 1725, il commanda en second, sous les ordres de Jacques-Charles Renaud* Dubuisson, un poste situé chez les Miamis ; l’année suivante, il en assuma le commandement et le conserva jusqu’en 1732. Il se lança dans la traite des fourrures en association avec Louis Marin et, à cette fin, emprunta en 1726 et en 1727 plus de 14 000# d’un négociant montréalais, Pierre de Lestage.

En 1730, à la tête de 40 Français et de quelque 600 Miamis, Ouiatanons et Peanquishas, Noyelles se joignit à Nicolas-Antoine Coulon* de Villiers, commandant du fort Saint-Joseph (probablement à Niles, Mich.), et à Robert Groston* de Saint-Ange, commandant du fort de Chartres (près de Prairie du Rocher, Ill.), pour se livrer à une expédition contre les Renards qui guerroyaient sans relâche contre les alliés des Français dans l’Ouest. Les Renards éprouvèrent de lourdes pertes : un grand nombre furent tués ou faits prisonniers, ce qui les empêcha de chercher refuge chez les Iroquois. Pour sa participation à l’expédition, expédition que Beauharnois a qualifiée « de la plus complette affaire de guerre qui soit arrivée dans la Nouvelle France du Regne du Roy », Nicolas-Joseph reçut une expectative de capitaine, grade qui lui fut accordé en 1733. En 1734 il aida Jean-Charles d’Arnaud, son successeur au poste des Miamis (à ou près de Fort Wayne, Ind.), à réinstaller les Miamis qui, s’étaient déplacés du côté des Anglais.

Une fois sa mission accomplie, Nicolas-Joseph se vit confier la direction de la dernière grande campagne contre les irréductibles Renards. Il quitta Montréal en octobre 1734 à la tête d’un bataillon et passa par Détroit et le pays des Miamis où il comptait recruter des renforts. Après s’être attardé et avoir erré inutilement dans les forêts enneigées, avec des provisions de bouche insuffisantes, le corps expéditionnaire déboucha inopinément sur les villages des Renards pour s’apercevoir que ceux-ci étaient beaucoup plus forts qu’on ne l’avait prévu. Les effectifs de Noyelles étaient maintenant moins considérables par suite de la défection d’un grand nombre de Hurons et d’Iroquois de la mission, qui avaient été froissés des instructions de Beauharnois leur enjoignant de faire grâce aux Sauks si ceux-ci consentaient à abandonner leurs alliés Renards. Après un engagement désordonné, Noyelles dut en venir à une entente. Il se retira après avoir reçu des Sauks la maigre assurance qu’ils quitteraient les Renards et se fixeraient à Baie-des-Puants (Green Bay, Wisc.). Le gouverneur attribua l’échec de l’expédition à l’inconstance des alliés indiens et soutint que des troupes françaises plus nombreuses obvieraient à leur position dépendante vis-à-vis ces Indiens. Toutefois, le ministre Maurepas prêta l’oreille à d’autres rapports qui imputaient à Noyelles l’ineptie avec laquelle les alliés indiens avaient été dirigés.

C’est donc avec une vive désapprobation que le ministre accueillit la décision de Beauharnois de confier à Noyelles le commandement de Détroit à partir de 1736. Les Hurons qui s’y trouvaient étaient ceux-là même que Noyelles avait eu tant de mal à manier lors de la campagne contre les Renards. Néanmoins, le gouverneur persista dans son dessein, et le ministre y consentit à regret. Pour sa part, il avait jeté son dévolu sur Pierre-Jacques Payen* de Noyan, que Beauharnois avait ignoré.

À Détroit, Noyelles fut aux prises avec des dissensions entre Outaouais et Hurons, lesquelles menaçaient de dégénérer en guerre générale entre les Indiens de l’Ouest. Séduits par les appas de la diplomatie et du commerce anglais, les Hurons avaient été amenés à conclure une alliance avec les Tsonnontouans et un traité de paix avec les Têtes-Plates du sud. Au printemps de 1738, un parti de pillards outaouais de Détroit tombèrent dans une embuscade préparée par des Têtes-Plates que les Hurons avaient prévenus [V. Armand de La Richardie]. Les Outaouais, en courroux, portèrent des accusations à Détroit contre les Hurons, qui sollicitèrent l’appui des Iroquois et des Indiens des missions canadiennes. Les Outaouais, eux, se tournèrent vers leurs alliés de l’Ouest. À Détroit, Noyelles interdit la vente d’armes à tous les Indiens et réussit, à force de généreux présents, à rétablir une trève précaire. Les Hurons, cependant, ne se sentaient plus en sécurité à Détroit et après avoir envisagé la possibilité de se joindre aux Indiens des missions du Sault-Saint-Louis (Caughnawaga, Québec), ou du Lac-des-Deux-Montagnes (Oka, Québec), un certain nombre d’entre eux finirent par s’établir à Sandoské (Sandusky), sur la rive sud-ouest du lac Érié. Lorsque Noyelles quitta Détroit en 1740, le calme régnait, mais déjà y germait la semence de difficultés à venir. Le ministre, peut-être influencé par les récriminations de Payen de Noyan, imputa également cette crise au peu de respect dont jouissait Noyelles auprès des tribus indiennes.

Les faveurs de Beauharnois semblaient illimitées. Lorsque Pierre Gaultier de Varennes et de La Vérendrye, oncle de Mme de Noyelles, perdit en 1744 le privilège de faire la traite des fourrures au cours de ses expéditions pour tenter d’atteindre la mer de l’Ouest, le gouverneur concéda cet avantage à Noyelles. Ce dernier ne tarda pas, avec ses associés, à se heurter aux difficultés qui entravaient le commerce, à savoir l’état de guerre entre les lointaines tribus de l’Ouest et les Sioux, la rareté ou le prix élevé des articles de traite pendant la guerre de la Succession d’Autriche, le coût excessif du transport des fourrures et des marchandises en raison des distances. Il en arriva à la conclusion qu’il était vain de poursuivre la recherche de la mer de l’Ouest. Noyelles démissionna en 1746 ; le ministre accepta sa démission en 1747, bien convaincu que Noyelles avait subordonné l’exploration au commerce d’une façon encore plus systématique que son prédécesseur.

Noyelles avait regagné Québec en 1747 ; cette même année, Beauharnois déclarait la guerre aux Agniers qui, profitant de la faiblesse de la Nouvelle-France durant la guerre de la Succession d’Autriche, se livraient à des incursions dans les établissements autour de Montréal. Noyelles prit la tête d’une formation de Français et d’Indiens et se rendit au lac Saint-François afin d’intercepter leurs partis de guerre. Il ne semble pas avoir pris part à d’autres campagnes, et on lui accorda la croix de Saint-Louis en 1749, après que Beauharnois l’eut maintes fois recommandé. On le nomma major de Trois-Rivières en 1751 et lieutenant de roi en 1759. Après la Conquête, il retourna en France avec sa famille, à l’exception d’un fils, et mourut à Rochefort le 16 août 1761. Sa femme, qui se déclara sans ressources et incapable même de le faire inhumer, reçut une pension de 600#. Il semble que la mort de Noyelles ait mis un terme à une enquête sur son intégrité, enquête qui avait débuté en 1760 pour un motif qu’on ignore.

Nicolas-Joseph eut huit enfants. L’aîné de ses fils, Charles-Joseph, servit dans les troupes de la Marine ; il fit la lutte aux Chicachas en 1739, combattit à Michillimakinac de 1745 à 1747 et commanda au fort Rouillé (Toronto) de 1754 à 1757. Un autre de ses fils, Pierre-Philippe, fit aussi partie des troupes de la Marine au Canada. Dans un rapport au ministre, daté de juin 1763, il est question d’un « Sieur Noyelles Fleurimont » reconnu coupable de s’être approprié des fonds destinés à l’armée. Si c’est bien de Pierre-Philippe qu’il s’agit, cette affaire expliquerait pourquoi il fut le seul de la famille à demeurer au Canada après la Conquête.

S. Dale Standen

AN, Col., B, 63, f.466v. ; 64, ff.430–430v., 441v.–442, 446v. ; 65, ff.407–408, 415v. ; 70, f.342v. ; Col., C11A, 61, ff.86–89 ; 63, ff.226–232v., 236–245v. ; 64, ff.162v.–166 ; 65, ff.142–149 ; 66, ff.150v.–153v. ; 67, f.171 ; 69, ff.125–130v. ; 70, ff.117–119, 188–195 ; 71, ff.103–104 ; 74, ff.3v., 81v.–84 ; Col., D2C, 49/5, 3e partie, p. 437 ; 49/6, 3e partie, pp. 480–485 ; 59, p. 4 (copies aux APC) ; Marine, C7, 228.— ANQ, AP, Famille de Noyelles.— Champagne, Les La Vérendrye, 319–323.— Kellogg, French régime, 314–341.— L.-A. Prud’homme, Les successeurs de La Vérendrye sous la domination française, MSRC, 2e sér., XII (1906), sect. : 65–68.

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S. Dale Standen, « NOYELLES DE FLEURIMONT, NICOLAS-JOSEPH DE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/noyelles_de_fleurimont_nicolas_joseph_de_3F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    28 novembre 2024