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MOUNTCASTLE, CLARA H. (connue aussi sous le pseudonyme de Caris Sima), peintre, institutrice et auteure, née le 26 novembre 1837 dans la Huron Tract, près de l’endroit qui allait devenir Clinton, Haut-Canada, fille de Sidney Harman Mountcastle et de Frances Laura Meikle ; décédée célibataire le 24 mai 1908 à Clinton.
Clara H. Mountcastle (on ignore à quoi correspondait l’initiale H.) naquit dans une famille d’artistes qui avait quitté Londres en 1832 pour le Haut-Canada dans l’espoir d’y connaître de meilleurs jours. Comme d’autres immigrants bien nés, les Mountcastle luttaient pour survivre dans une région à peine défrichée, Sidney cultivant la terre ou se lançant dans diverses entreprises commerciales. À l’instabilité de leurs moyens de subsistance et de leur situation financière s’ajoutait une autre précarité : seulement 5 des 12 enfants atteignirent l’âge adulte (Clara était la troisième fille survivante). Malgré la difficulté de ses premières années, elle célébra sa maison natale, une maison de bois rond, dans son poème A picture of the past : Mon Eden, le refuge de mon enfance. / Ferme basse, couverte de roses. Le côté pénible de la vie en forêt est présenté dans Lost !, qui parle d’enfants qui s’égarent dans les bois en ramenant les vaches. Cette aventure était arrivée à Clara, qui modifia à peine les noms dans son poème.
Instruite d’abord à la maison par sa mère, peintre amateur, Clara Mountcastle se perfectionna en prenant des leçons de son oncle, l’architecte John George Howard*, chez qui elle vécut à Toronto de 1855 à 1857. Pendant qu’elle était dans cette ville, elle passa un trimestre dans une école privée de filles et apprit à dessiner d’après nature avec un artiste anglais du nom de Chatterton. À une date inconnue, elle enseigna l’anglais dans une école de filles à St Catharines, et en juin 1868, elle retourna vivre chez son oncle, où elle continua à étudier le dessin et la couleur. En 1881, elle était de nouveau à Clinton.
Clara Mountcastle présentait ses œuvres chez elle et donnait des leçons de dessin à la bibliothèque publique. En outre, elle participa à plusieurs expositions. Ses aquarelles remportèrent deux premiers prix et trois deuxièmes prix dans la catégorie des amateurs à la Provincial Exhibition tenue en 1870 à Toronto. En 1888, elle exposa une autre aquarelle à l’exposition tenue conjointement à Toronto par l’Ontario Society of Artists [V. John Arthur Fraser* et l’Académie royale des arts du Canada [V. John Douglas Sutherland Campbell* ; Lucius Richard O’Brien*] et trois ans plus tard, une huile à l’Industrial Exhibition de Toronto. Bien que George Maclean Rose*, éditeur et biographe torontois, ait écrit en 1888 qu’« elle n’attei[gnait] pas encore cette finesse que seule peut donner l’étude auprès des meilleurs maîtres », l’auteur Henry James Morgan* loua en 1898 la qualité de ses marines : « on considère qu’elle rend très bien les mouvements de l’eau ». Elle tenta de participer à l’exposition tenue en 1897 par l’Ontario Society of Artists mais, bien que le secrétaire l’eut invitée à soumettre des œuvres, les jurés refusèrent ses deux paysages car ils voulaient encourager les artistes qui s’inspiraient de l’impressionnisme français. Elle a rendu compte de ce conflit dans un poème, The artist’s soliloquy :
Ne voyant point sur mes tableaux
De pâles et vaporeux coteaux
Étrangers, mais que les joyaux
De nos riches paysages
Ils dirent : « Fi de tout cela !
Vos feuilles d’automne ont trop d’éclat
Vos lacs ne sont pas assez plats
Des Français copiez les images. »
Sa candidature à la société ayant été écartée (« ils n’ont pas voulu de moi / les despotes de l’O.S.A. »), elle entra à la Women’s Art Association of Canada.
Même si Clara Mountcastle peignit et exposa durant de nombreuses années, ce fut en tant qu’écrivaine qu’elle se fit connaître de ses contemporains. Elle vint tard à la littérature en raison, disait-elle, d’une « longue maladie ». Ses deux premiers livres furent publiés par Rose : un recueil de poésie, The mission of love, en 1882, et un roman, A mystery, en 1886. Tous deux étaient signés Caris Sima (de l’italien carissima, « chérie entre toutes », comme l’appelait dans son enfance un ami de la famille). Son troisième livre, Is marriage a failure ?, parut en 1899 sous son propre nom. De plus, de 1889 à 1898, elle publia une douzaine de poèmes dans le Saturday Night, périodique torontois d’Edmund Ernest Sheppard*.
Sa fougue est manifeste dans l’attaque qu’elle livre aux privilèges conférés par la société aux gens mariés dans son essai « Is marriage a failure ? » (question à laquelle elle donne une réponse nuancée) et dans les épigrammes satiriques sur le même sujet que contient A mystery. En poésie aussi elle prenait parfois un ton polémique. Joseph Edmund Collins* ayant qualifié The mission of love de « jardin dans lequel quelques mauvaises herbes côto[yaient] des fleurs délicieuses », elle le prévint, dans un poème intitulé To a critic, de ne pas toucher à « [ses] roses, [sa] douce mignonette » quand il sarclerait son jardin, qui « s’était ensauvagé pendant qu[’elle] [s’]escrimai[t] à gagner [son] pain ».
Dans ce livre, on trouve aussi bien des poèmes de circonstance, dont un sur l’avironneur Edward Hanlan, que « The voice of the waters », triste histoire d’amour qui se déroule au bord du lac Huron et dans laquelle Collins voyait « une richesse d’imagination débridée, une belle musique fluide, une profusion d’épithètes et une maîtrise sans bornes de la rime ». Ses talents variés – elle s’essaya à la poésie en dialecte, aux souhaits de la Saint-Valentin, au cantique, au chant patriotique, à la protestation politique, à la méditation sur l’éphémère, le mythe, le paysage onirique – lui valurent les louanges de contemporains aussi reconnus que Rose, selon qui « aucun poète, vivant ou mort, n’a[vait] jamais écrit dans un style aussi diversifié ». On distingue dans son œuvre, à des degrés égaux, des réminiscences de Wordsworth, de Poe et des préraphaélites. Bien que « le trait d’esprit et l’humour caustique » caractérisent sa prose, la constante de sa poésie est le ton élégiaque du romantisme de la fin du xixe siècle. La maladresse de ses structures formelles et sa construction parfois bizarre déparent toutefois les deux genres. En outre, ses poèmes comportent des couplets aux rimes trop travaillées et sa fiction souffre de l’absence de suspense. Néanmoins, sa réputation débordait les frontières. Un recueil de biographies intitulé American women signalait dans son édition de 1897 qu’elle avait été nommée membre honoraire de la Trinity Historical Society de Dallas, au Texas, et que c’était une « lectrice puissante et émouvante ».
Selon la notice nécrologique de Clara Mountcastle, sa poésie était « fidèle à la nature et facile à comprendre ». Ces qualités, les lectrices et lecteurs d’aujourd’hui sont moins susceptibles de les goûter que ses contemporains, mais elles comptent lorsqu’il s’agit de vers destinés à la récitation. Or Clara faisait souvent des lectures chez elle ou ailleurs pour gagner un peu d’argent. Comme les sœurs Lindwood dans A mystery, elle-même et ses sœurs Ellen et Eliza vivaient dans une pauvreté décente et « grossiss[aient] leurs petits revenus par divers ouvrages de fantaisie appris comme divertissement au temps de leur prospérité ». Peut-être aussi Clara aidait-elle Eliza, qui tenait une école dans leur maison. Même si les lecteurs modernes s’intéresseront probablement à ses écrits pour des raisons plus historiques que littéraires, sans doute méditeront-ils sur un poème comme My sisters and I, qui brosse un portrait pathétique et intime de vieilles femmes dans le besoin
Les années filent. La jeunesse fuit.
L’âge, inlassable, nous poursuit
Et la pauvreté nous traque.
Mais souvent l’oppresseur plaque
Son dur talon sur nos blessures,
Car de tout cela il n’a cure.
En décrivant ainsi les épreuves du vieillissement, Clara H. Mountcastle réaffirme son engagement envers la poésie « forte, simple et touchante ». À l’instar de ses contemporains Archibald Lampman*, William Bliss Carman*, Charles George Douglas Roberts* et Duncan Campbell Scott*, elle croyait que la littérature avait une mission « civilisatrice » et pouvait contribuer à l’édification de la nation. Son œuvre apporte une touche féminine à l’effort déployé à la fin du siècle en vue de créer une « littérature nationale ».
Les œuvres publiées de Clara H. Mountcastle comprennent The mission of love ; Lost ; and other poems, with songs and valentines (Toronto, 1882), A mystery (Toronto, 1886), et Is marriage a failure ? Lost ! and many gems of verse (Toronto, 1899). Le récit de sa vie dans American women [...], F. E. Willard et M. A. [Rice] Livermore, édit. (éd. rév., 2 vol., New York, 1897 ; réimpr., Detroit, 1973) est accompagné d’une photographie ; la notice nécrologique d’Ellen Mountcastle dans le Clinton News-Record (Clinton, Ontario), 23 févr. 1922, comprend une photographie des trois sueurs âgées. Une photographie des sœurs figure aussi dans le magazine Star Weekly du Toronto Daily Star du 25 févr. 1922.
AN, RG 31, C1, 1881, Clinton.— AO, F 1401 ; RG 22, Ser. 298, n° 5623.— MTRL, J. G. Howard papers.— Clinton New Era, 25 janv. 1877, 16 oct. 1891, 28 mai 1908.—Clinton News-Record, 16, 25 févr. 1922.— Globe, 7 oct. 1870.— An index to Saturday Night ; the first fifty years, 1887–1937, G. F. Heggie et G. R. Adshead, édit. (Toronto, 1987).— ARAC exhibitions (McMann).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— Colborne Lodge, High Park, Toronto ; first occupied December 23, 1837, F. C. Parker, compil. ([Toronto, 1949]).— J. E. Collins, Life and times of the Right Honourable Sir John A. Macdonald [...] premier of the Dominion of Canada (Toronto, 1883), 492–494.— Cyclopœdia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1 ; 2.— Harper, Early painters and engravers.— History of Clinton and surrounding community, 1950 (Clinton, 1950).— Kathleen Lockhart, « The Mountcastle family », History of Clinton, 1875–1975 ([Clinon, 1975]), 70–71.
Barbara Godard, « MOUNTCASTLE, CLARA H. (Caris Sima) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mountcastle_clara_h_13F.html.
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Auteur de l'article: | Barbara Godard |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
Année de la révision: | 1994 |
Date de consultation: | 1 décembre 2024 |