MIGNAULT, PIERRE-MARIE, prêtre catholique et grand vicaire, né le 8 septembre 1784 à Saint-Denis, sur le Richelieu, province de Québec, fils de Basile Mignault, cultivateur, et de Marie-Josephte Ledoux, lesquels étaient d’ascendance acadienne, décédé le 5 novembre 1868 à Montréal.

Après des études classiques au collège de Montréal (1798–1806), Pierre-Marie Mignault passa une première année de préparation au sacerdoce auprès du curé de sa paroisse, l’abbé François Cherrier*. Il entreprit l’année scolaire suivante au séminaire de Nicolet, où il continua ses études théologiques tout en exerçant les fonctions d’économe. Ordonné prêtre le 18 octobre 1812, il fut nommé vicaire par Mgr Joseph-Octave Plessis*, d’abord à Québec, puis, deux ans plus tard, à Halifax, qui faisait encore partie du diocèse de Québec. Comme son curé, Edmund Burke*, partit peu après pour l’Europe, Mignault eut à desservir seul les quelque 1000 catholiques irlandais. Sa correspondance avec Mgr Plessis fait état, entre autres, de ses contacts occasionnels avec le lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse, sir John Coape Sherbrooke*, ce qui lui permettra d’écrire plus tard : « Je connais bien le caractère du gouvernement britannique, par l’étude que j’en ai faite ici à Halifax. » Quand Burke revint de Rome, en 1817, après avoir été nommé à la tête du nouveau vicariat apostolique de la Nouvelle-Écosse, Mignault retourna dans le Bas-Canada.

Dès son retour, Mignault fut nommé curé de Chambly, paroisse qui comptait alors 3 000 paroissiens en plus de la garnison. La vie religieuse lui semblait peu enracinée et le dévergondage trop répandu. D’abord seul, puis avec l’aide d’un vicaire, il amena presque tous les catholiques à faire leurs Pâques. Jalousé par des curés voisins, il rétorquait qu’il « n’ a[vait] pas demandé la place », de fait importante pour un si jeune prêtre. Stimulé par les protestants qui construisaient une église-école, Mignault ouvrit en octobre 1818 deux écoles, l’une francophone et l’autre anglophone. Il voulut aussi faire signer une requête visant à favoriser l’enseignement de la langue française et de la religion catholique, mais Mgr Plessis l’en dissuada. En 1821 cependant, il souscrivit à l’Association pour faciliter les moyens d’éducation dans la Rivière-Chambly [V. Charles La Rocque*]. Bien plus, Mignault fonda, en 1825, le collège Saint-Pierre de Chambly, dont il sera supérieur jusqu’en 1844. Les obstacles ne manquèrent pas ; il aurait abandonné s’il n’avait eu de fortes convictions religieuses et patriotiques et s’il n’avait voulu « faire tomber cette vieille et toujours renouvelée calomnie que le clergé cherche à tenir le peuple dans l’ignorance ». Malgré son dévouement, l’institution, reconnue juridiquement en 1836, périclita. Des dettes, un corps professoral improvisé et peu nombreux, des élèves plus ou moins bien choisis, une autorité divisée entre le supérieur et les différents directeurs, et l’introduction d’un cours commercial en 1839 entraînèrent la fin du cours classique à Chambly en 1844. Mignault tenta à plusieurs reprises, mais en vain, de faire revivre les études classiques dans cet établissement qui ferma définitivement ses portes en 1862.

Pierre-Marie Mignault s’occupa aussi des Canadiens émigrés aux États-Unis et établis sur les rives du lac Champlain. Chaque année, de 1818 à 1850, il réserva une quinzaine de jours à cette population qui ne pouvait être desservie, faute de prêtres américains. S’y rendant à ses frais, Mignault y prêchait et y administrait les sacrements. En 1849, lors de l’enquête tenue par Mgr Ignace Bourget* sur l’émigration des Canadiens aux États-Unis, on fit appel à Mignault afin de connaître les conditions d’existence et les mœurs des émigrés.

Devenu successivement grand vicaire des diocèses de Boston, de New York et d’Albany vers 1830, Mignault s’attira la reconnaissance, entre autres, du premier évêque de Burlington, Mgr Louis de Goesbriand : « Je ne prononce qu’avec respect et reconnaissance le nom du Révérend Mignault, qui avait un vrai cœur de père pour les Canadiens immigrés. » En 1852, il reçut du pape Pie IX le titre d’aumônier apostolique.

Bien qu’ayant toujours soutenu l’autorité des évêques, Mignault se sentait assez à l’aise avec eux pour leur donner des conseils ou pour leur soumettre des projets. Avec 15 autres prêtres, il proposa à Mgr Bourget, en 1854, l’érection d’un nouveau diocèse qui couvrirait la rive sud du Saint-Laurent jusqu’au Richelieu. Les motifs s’avéraient sérieux : richesse et ressources matérielles assurées pour faire subsister un évêque, besoin de surveillance et de raffermissement de la foi, vu le grand nombre de protestants. Cependant, le second concile provincial de Québec, tenu en juin 1854, ne donna pas suite au projet.

Les dernières années de Mignault comme curé de Chambly furent entravées par la maladie et par la vieillesse. Il n’y fonda pas moins un couvent en 1855 et un hôpital en 1858. En 1866, il démissionna et se retira à l’hospice Saint-Joseph de Montréal où il mourut deux ans plus tard.

Lucien Lemieux

AAQ, 210A, V : 124, 225 ; IX : 113 ; 515CD, I :139–150.— Archives du diocèse de Saint-Jean-de-Québec (Longueuil), Saint-Joseph-de-Chambly, 1A/44s., 47s., 50–52, 54, 66, 84, 89, 128, 134, 137, 159, 162.— Archives paroissiales, Saint-Denis-sur-Richelieu (Saint-Denis-sur-Richelieu, Québec), Registres des baptêmes, mariages et sépultures, 9 sept. 1784.— L’Ami du peuple, de l’ordre et des lois (Montréal), 10 juin 1835, 13 sept. 1839.— L’Aurore des Canadas, 17 sept. 1839.— Mélanges religieux, 16 juill. 1841.— Allaire, Dictionnaire.— J.-A.-I. Douville, Histoire du collège séminaire de Nicolet, 1803–1903, avec les listes complètes des directeurs, professeurs et élèves de l’institution (2 vol., Montréal, 1903), II : 3, 5–7.— A. A. Johnston, A history of the Catholic Church in eastern Nova Scotia (2 vol., Antigonish, N.-É., 1960–1971), I : 348.— Lemieux, L’établissement de la première prov. eccl., 87–92.— Yvon Charron, Le collège classique de Saint-Pierre à Chambly, SCHÉC Rapport, 13 (1945–1946) : 19–38.— Adrien Verrette, La paroisse franco-américaine, SCHÉC Rapport, 15 (1947–1948) : 132.— Mason Wade, The French parish and survivance in nineteenth-century New England, Catholic Hist. Rev. (Washington), XXXVI (1950–1951) : 163–189.

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Lucien Lemieux, « MIGNAULT, PIERRE-MARIE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mignault_pierre_marie_9F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
Année de la révision:    1977
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