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McLENNAN, JOHN STEWART, homme d’affaires, historien, auteur, éditeur de journal et homme politique, né le 3 novembre 1853 à Montréal, fils aîné de Hugh McLennan* et d’Isabella Stewart ; le 7 avril 1881, il épousa à Evanston, Illinois, Louise Ruggles Bradley (décédée en 1912), et ils eurent quatre filles et un fils, puis le 7 janvier 1915, à New York, Grace Seely Henop (décédée en 1928), veuve de Robert de Peyster Tytus, et de ce second mariage naquit un fils ; décédé le 15 septembre 1939 à Ottawa et inhumé à Sydney, Nouvelle-Écosse.
John Stewart McLennan descendait d’immigrants écossais. Les parents de son grand-père paternel arrivèrent dans le Bas-Canada avec leurs enfants en 1802 ; l’année suivante, la famille était déjà établie dans le Haut-Canada. Sa grand-mère maternelle, qui était veuve, débarqua au Bas-Canada en compagnie de ses enfants en 1816. Le père de John Stewart cofonda une compagnie de transport à Montréal et à Chicago en 1853. Trois ans plus tard, la jeune famille, qui vivait à Montréal, alla s’installer à Chicago. Les McLennan revinrent à Montréal en 1867, époque où Hugh, d’après son fils, était « un homme riche ».
John Stewart McLennan fréquenta la High School of Montreal et le McGill College, où il termina ses études en philosophie en 1874. Se classant au premier rang des diplômés, il remporta la médaille Dufferin. En 1879, il obtint une deuxième licence, à la University of Cambridge, en Angleterre, où il s’était spécialisé en sciences morales. Ses études éveillèrent en lui un intérêt et un attachement pour l’histoire et la philosophie qu’il conserverait tout au long de sa vie. Sa nécrologie publiée dans la Gazette de Montréal mentionnerait que sa vision déficiente avait contrecarré son ambition de devenir professeur de philosophie, mais son fils cadet affirmerait qu’il avait une excellente vue.
Il y eut probablement plusieurs raisons qui poussèrent McLennan à entrer dans les affaires plutôt que dans le milieu universitaire à son retour de Cambridge, à l’âge de 26 ans. Il commença à travailler pour la firme de son père, la Montreal Transportation Company, qui faisait essentiellement le transport de céréales. En avril 1881, il épousa Louise Ruggles Bradley. Ils avaient vraisemblablement fait connaissance lorsque les McLennan vivaient à Chicago. Le contrat de mariage fut négocié avec précaution et contenait des clauses très précises sur la propriété des biens. Mme McLennan s’employait à exercer ses qualités de mère, d’hôtesse, de jardinière et de peintre, ce qui était normal pour une femme mariée et relativement riche au xixe siècle. Elle deviendrait une brillante aquarelliste, auteure de tableaux représentant le Cap-Breton et l’Europe qu’elle signait L. B. McLennan.
Le couple, qui avait alors une fille, semble s’être installé sur l’île du Cap-Breton en 1882, bien que McLennan ait lui-même affirmé dans deux de ses publications que c’était en 1884. Dans une biographie de son père, il écrivit qu’il avait déménagé parce que celui-ci lui avait demandé « d’aider à résoudre une difficulté liée à la Compagnie internationale de houille, récemment achetée par [lui-même] et certains de ses associés ». « Nous croyions que cela ne prendrait que quelques semaines », précisa-t-il. La nature de la « difficulté » est inconnue, mais elle amena les McLennan à s’établir au Cap-Breton. John Stewart McLennan devint directeur de la mine de la Compagnie internationale de houille à Bridgeport (Glace Bay) et, par la suite, administrateur délégué de la société. À Sydney, lui et sa famille, qui devenait de plus en plus nombreuse, habitèrent d’abord une maison appelée Ridgefield, puis une résidence nommée Brookdale. On dit qu’ils y auraient occasionnellement joué des pièces de théâtre, comme A midsummer night’s dream de Shakespeare.
L’industrie houillère du Cap-Breton connut une transformation majeure en 1893, année où Henry Melville Whitney*, de Boston, avec l’appui du gouvernement de la Nouvelle-Écosse, dirigea la fusion de huit houillères, dont celle de McLennan, pour former la Dominion Coal Company Limited. L’année suivante, McLennan s’installa à Boston, où il devint assistant à la direction de l’entreprise. Lui et sa famille demeureraient plusieurs années dans cette ville, mais passeraient chaque été au Cap-Breton, dans le village de Louisburg (Louisbourg). Celui-ci se développait en un important centre d’exportation de charbon depuis l’achèvement, en 1895, du chemin de fer qui le reliait à Sydney et aux terrains houillers. La construction d’énormes quais de chargement du charbon dans les ports de Sydney et de Louisburg joua un rôle majeur dans cette expansion.
Aussi lourde qu’ait été sa charge de travail pour la Dominion Coal Company Limited pendant les mois d’été, McLennan se passionnait de plus en plus, dans ses temps libres, pour les ruines qui se trouvaient de l’autre côté du port, en face des quais. Ces vestiges étaient ceux de la ville fortifiée française de Louisbourg, que les Britanniques avaient prise en 1758 [V. Jeffrey Amherst*]. Dans la première publication connue de McLennan, un article sur l’île du Cap-Breton rédigé avec Robert Murray* et publié à Toronto dans Picturesque Canada, il avait écrit qu’un monument commémoratif devait être érigé sur ce site historique. En marchant parmi les ruines dans les années 1890, McLennan commença certainement à imaginer qu’il écrirait l’histoire de cette colonie disparue qui était peu connue à l’époque. Il n’était d’ailleurs pas le seul à se passionner pour cette ancienne forteresse. En mai 1895, l’auteur et sénateur acadien Pascal Poirier protesta contre l’élévation d’un monument projetée par l’organisation américaine Society of Colonial Wars et continua d’exiger des mesures de protection de la part du gouvernement. Havenside, la maison que McLennan louait à Louisburg, appartenait à un autre féru d’histoire, l’industriel David Joseph Kennelly. Au début des années 1900, Kennelly stabiliserait les parties les plus proéminentes de la forteresse et persuaderait le gouvernement de la Nouvelle-Écosse d’adopter une loi pour protéger l’endroit. Cependant, la personne qui influença le plus McLennan, d’après Katharine*, sa fille cadette, fut Thomas Fraser Draper, l’archidiacre de l’Église d’Angleterre de la région.
En 1899, McLennan entra dans une nouvelle période de sa vie. Whitney et d’autres hommes d’affaires fondèrent la Dominion Iron and Steel Company Limited en construisant une aciérie, dans le but d’exploiter les gisements houillers du Cap-Breton et le minerai de fer du territoire voisin de Terre-Neuve. McLennan fut le premier trésorier de la nouvelle compagnie, puis siégea à son conseil d’administration et fut en pratique directeur général. En 1900, McLennan, qui n’avait pas encore 50 ans, quitta la société. Le fait qu’il se soit retiré un an après la mort de son père n’est probablement pas un hasard. Le décès de Hugh McLennan incita peut-être son fils à mettre fin à une carrière qui ne le passionnait pas pour se consacrer à des projets qui lui tenaient plus à cœur. McLennan avait aussi l’exemple de son frère cadet William*, un notaire qui s’était fait connaître pour ses romans historiques et ses traductions.
Après avoir abandonné l’industrie du charbon et de l’acier, McLennan entreprit des recherches sur Louisbourg, qu’il finança lui-même en entier. Chaque hiver, en compagnie de sa femme, et parfois de ses enfants, il passait plusieurs mois en Europe, principalement à Londres et à Paris. Il y cherchait des cartes, des plans et des documents sur l’époque où Louisbourg avait appartenu à la France. En 1908, il donna une conférence sur la forteresse à la Nova Scotia Historical Society ; elle fut publiée l’année suivante sous le titre A notable ruin. McLennan écrivit un chapitre sur le même sujet dans le premier volume de la collection Canada and its provinces, paru à Toronto en 1913, qui portait sur la Nouvelle-France. La même année, il envoya à la Champlain Society un manuscrit pratiquement terminé, de la longueur d’un livre. Refusé parce qu’il proposait une longue histoire narrative plutôt qu’un recueil de documents d’époque, il fut finalement publié à Londres en 1918 sous le titre Louisbourg from its foundation to its fall, 1713–1758. Ce livre demeure une œuvre capitale sur l’histoire chronologique de la ville coloniale française.
Après son retrait de l’industrie du charbon et de l’acier en 1900, McLennan exerça également la profession d’éditeur de journal. Il avait acheté en 1904 le Sydney Post, qui était associé au Parti conservateur. En 1933, il le fusionnerait avec son concurrent libéral, le Sydney Record, pour créer un journal indépendant, le Sydney Post-Record (qui deviendrait le Cape Breton Post). McLennan prenait ses responsabilités d’éditeur de journal au sérieux et espérait exercer une influence favorable sur sa communauté. Dans les dernières années de sa vie, époque où il résiderait à Sydney, il se rendrait quotidiennement au bureau de son journal.
La période de la Première Guerre mondiale apporta de grands changements dans la vie de McLennan, comme ce fut le cas pour la plupart des Canadiens. Il devint président de la division du Cap-Breton du Fonds patriotique canadien et ferait partie de la direction nationale de l’organisation jusqu’à ce qu’elle cesse ses activités en 1937. Sa première femme avait succombé à une perforation de l’appendice en 1912. Il épousa en janvier 1915 Grace Seely Henop, linguiste et auteure accomplie qui était la veuve de l’égyptologue Robert de Peyster Tytus. En mai, McLennan apprit que son fils, Hugh, était mort au combat pendant la deuxième bataille d’Ypres. Peu après, il écrivit au premier ministre sir Robert Laird Borden pour lui demander s’il pouvait faire davantage pour contribuer à l’effort de guerre. Samuel Hughes*, ministre de la Milice et de la Défense, reçut une lettre dans laquelle McLennan pressait le gouvernement de prendre des dispositions pour défendre Sydney, en raison de son grand port et de ses aciéries. Borden lui confia un poste à la Commission des hôpitaux militaires, constituée par décret le 30 juin 1915 et présidée par James Alexander Lougheed* ; les historiens Desmond Morton et Glenn Wright décriraient McLennan comme l’un des « membres les plus travailleurs » de la commission. Conservateur de longue date, McLennan fut nommé au Sénat le 10 février 1916. L’une de ses principales préoccupations était la façon dont le gouvernement fédéral préparerait le pays à l’après-guerre. Il prévoyait qu’il faudrait s’intéresser de près et consacrer des efforts au développement économique, à la réintégration des combattants (il était convaincu qu’il serait essentiel de recycler les hommes bien portants comme les invalides) et à l’évolution des relations entre le Canada et la Grande-Bretagne. McLennan prenait rarement la parole pendant les débats à la Chambre rouge, mais il siégea à plusieurs comités. Il en présida même un qui se penchait sur les fonctions et les procédures gouvernementales. Dans son rapport sur ce sujet, publié en 1919, il fit valoir la nécessité d’accroître l’efficacité pour surmonter les énormes obstacles auxquels se heurtait le pays et lança cet avertissement : « le temps viendra où le peuple canadien ne tolérera plus de la part de son gouvernement un degré d’efficacité largement inférieur à celui auquel il est habitué dans toute autre forme d’organisation ».
Après avoir perdu son fils en 1915, McLennan apprit en 1918 que son frère cadet Bartlett, qui était homme d’affaires à Montréal, avait été tué dans la bataille d’Amiens. Au cours des années suivantes, il endura le dépérissement de son second mariage, qui se termina par un divorce en 1927. L’entente conclue stipulait qu’il pouvait voir son enfant, John Stewart fils, seulement deux fois par année pendant de courtes périodes. Au point de vue public, McLennan fut une personnalité éminente dans l’est du Canada au cours des années 1920 et 1930. La McGill University lui remit un doctorat honorifique en droit en 1923 ; pendant l’hiver de cette année-là, il donna une série de conférences publiques au Mount Allison College du Nouveau-Brunswick sur « l’histoire et les problèmes actuels ». Il continua d’exercer une présence partisane au Sénat ; par exemple, en 1926, il s’opposa au projet de loi sur les pensions de vieillesse du gouvernement libéral de William Lyon Mackenzie King*. Au cours des étés qu’il passa à Petersfield, résidence de Sydney qu’il habitait avec sa famille depuis 1901, il reçut des sommités telles que l’aviateur Frederick Walker (Casey) Baldwin*, le poète Charles George Douglas Roberts*, le médecin missionnaire Wilfred Thomason Grenfell, lord et lady Baden-Powell, le premier ministre de Grande-Bretagne James Ramsay MacDonald, ainsi que les gouverneurs généraux lord Byng, lord Willingdon [Freeman-Thomas*] et lord Tweedsmuir [Buchan]. Dans le cadre de ses fonctions de sénateur, McLennan écrivit occasionnellement au premier ministre Arthur Meighen* à propos de divers sujets, comme il l’avait fait auparavant avec Borden et le ferait dans une moindre mesure avec Richard Bedford Bennett*. Meighen et Bennett lui rendirent également visite à Petersfield.
Grâce à ses connaissances approfondies sur l’histoire de Louisbourg, McLennan devint une source primordiale pour la Direction des parcs du dominion et son organisme consultatif, la Commission des lieux et monuments historiques du Canada, lorsque le gouvernement commença à prendre possession des ruines dans les années 1920. Il exerçait des pressions en faveur de la protection du site et promouvait sa valeur sur le plan éducatif. Il avait d’ailleurs affirmé dans A notable ruin qu’il était possible de « reconstruire la ville telle qu’elle était » et que ces travaux ne seraient « qu’une question d’intelligence et d’investissement ». Il estimait que tout ce qui serait fait à Louisbourg devrait refléter la première moitié du xviiie siècle et fit don d’un grand nombre de cartes, de plans et d’objets historiques au musée qui serait construit en 1935 et 1936. Il s’opposa à la création de tout monument qui aurait mis l’accent sur les causes de la destruction de la forteresse. Il écrivit : « Je pense que nous voulons éviter d’envisager que le moindre de nos travaux souligne la victoire des Britanniques sur les Français. » Il espérait que Louisbourg, une fois préservée, favoriserait le sentiment d’identité canadienne.
À plus de 80 ans, McLennan fut décrit par le Montreal Standard comme « l’un des plus beaux hommes de la Chambre rouge, doté des manières et du charme élégants d’un âge noble [...] il représent[ait] convenablement le type de Canadien le plus raffiné et le plus cosmopolite ». Après la mort de McLennan, qui fut emporté par une pneumonie en 1939, un de ses amis, le docteur John Clarence Webster*, termina par ces mots la notice nécrologique qu’il écrivit pour la Société royale du Canada, dont McLennan avait aussi été membre : « Peu d’hommes dans le milieu des affaires canadien ont égalé le sénateur McLennan [en ce qui concerne la façon de] concilier un sens aigu des affaires et un esprit d’initiative avec une culture continue de l’esprit et une passion pour les arts, la littérature ou d’autres domaines sans lien avec les questions matérielles. »
Le second fils de McLennan affirma que son père souhaitait avoir « une carrière utile, prospère et réputée », ce qu’il semble avoir réussi. Mieux connu pour la deuxième moitié de sa vie, en particulier pour ses contributions en tant qu’historien de Louisbourg, McLennan rêvait que la ville fortifiée française soit reconstruite un jour. Cette vision ne se concrétisa qu’après sa mort, mais les principes qu’il avait énoncés sont devenus les règles fondamentales de nombreux projets de conservation du patrimoine. Il considérait que ces travaux devaient être basés sur la recherche et dirigés par des experts, et qu’on devait en établir le bien-fondé en fonction de la postérité, et non des préoccupations de l’heure (les facteurs politiques, par exemple).
La fille de John Stewart McLennan, Katharine, fit don à la Dalhousie University de nombreux ouvrages qui faisaient partie de la bibliothèque de son père. Peintre et philanthrope, elle poursuivit la mission de son père à Louisbourg en y occupant le poste de conservatrice honoraire du musée jusque dans les années 1960. John Stewart fils devint quant à lui un éminent pianiste et compositeur américain.
Il n’existe aucune liste complète des écrits de John Stewart McLennan. Sa première publication connue, rédigée avec Robert Murray, s’intitule « Cape Breton », dans Picturesque Canada : the country as it was and is, G. M. Grant, édit. (Toronto, 1882–[1884]), 2 : 841–852. Voici les titres qui figurent parmi les ouvrages ultérieurs les plus importants de McLennan : Screening of soft coal (s.l., [1887 ?]) ; A notable ruin, Louisbourg : a paper read before the Nova Scotia Historical Society, November 10th, 1908 ([Halifax], 1909) ; « Louisbourg : an outpost of empire », dans Canada and its provinces : a history of the Canadian people and their institutions […], Adam Shortt et A. G. Doughty, édit. (23 vol., Toronto, 1913–1917), 1 : 201–227 ; The Canadian current, 1850–1914 : per angusta ad augusta (Sydney, N.-É., 1915) ; What the military hospitals commission is doing (s.l., 1918 ; exemplaire à BAC, fonds sir Robert Borden, R6113-0-X) ; Louisbourg from its foundation to its fall, 1713–1758 (Londres, 1918 ; 4e éd., Halifax, 1979 ; réimpr., 1983) ; « History and present problems », Argosy (Sackville, N.-B.), 2 (1924), no 2 : 77–132 ; Hugh McLennan, 1825–1889 (Montréal, 1936). On lui doit également, à titre de sénateur, le Report of the special committee on machinery of government (Ottawa, 1919) et le Report of the special committee on the fuel supply of Canada together with the evidence received by the committee (Ottawa, 1923).
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A. J. B. Johnston, « McLENNAN, JOHN STEWART », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/mclennan_john_stewart_16F.html.
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Auteur de l'article: | A. J. B. Johnston |
Titre de l'article: | McLENNAN, JOHN STEWART |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2014 |
Année de la révision: | 2014 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |