MacDONELL OF SCOTHOUSE (Scotus), ALEXANDER (Alasdair MacDhòmhnuill), prêtre catholique, missionnaire, né vers 1740 dans les West Highlands, Écosse, probablement sur les terres traditionnelles du clan des MacDonell of Glengarry, fils d’Angus (Æneas) Macdonell of Scothouse et de Catherine McLeod of Bernera ; décédé le 19 mai 1803 à Lachine, Bas-Canada.

Issu d’un père catholique et d’une mère « hérétique », Alexander MacDonell entra au Scots College des jésuites, à Rome, le 23 novembre 1759. Il prononça ses vœux le 25 mai 1760 et fut ordonné prêtre le 19 mai 1767, après avoir fait sa philosophie et presque terminé sa théologie. Selon le registre du collège, il était « bien disposé » et faisait montre « d’un bon esprit et d’aptitudes ». Il retourna dans les Highlands en 1767 et fit du ministère dans la région de Knoydart, dans le Glengarry. Selon un document, il fut « presque certainement aumônier résidant à Scotos ». En 1779, il ambitionna la mitre ; ils étaient deux candidats, et ils obtinrent un nombre égal de suffrages. L’évêque, Mgr George Hay, fit part des résultats à Rome, en recommandant que le concurrent de MacDonell fût agréé, à quoi Rome se rallia.

La désintégration des anciens clans, déjà commencée avant la défaite jacobite de Culloden, en 1746, s’était accélérée par la suite. Peu de clans avaient souffert davantage que les Macdonell of Glengarry. En 1773, environ 600 d’entre eux immigrèrent dans la colonie de New York et s’établirent dans le domaine de sir William Johnson*, dans la vallée de la Mohawk. Au début des années 1780, les paroissiens de MacDonell, de la région de Knoydart, furent chassés de leurs terres, et, en 1786, ils se préparèrent à émigrer en compagnie de leur pasteur. Les lettres de MacDonell, à la veille de son départ, font allusion à des échecs mystérieux survenus dans le passé et à sa propre « banqueroute publique », mais l’évêque des Highlands, Mgr Alexander Macdonald, écrivait de MacDonell qu’il était « d’une famille respectable [...] et que ses talents tant naturels qu’acquis [étaient] à la hauteur de sa naissance ». L’expédition, forte de quelque 540 personnes, s’embarqua à Greenock ; elle débarqua à Québec le 7 septembre 1786. Les émigrants se proposaient de s’installer à Cataraqui (Kingston, Ontario), mais ils se laissèrent persuader de rejoindre plutôt les gens de leur clan, immigrés en 1773, qui, après la Révolution américaine, s’étaient établis dans les cantons de Charlottenburg et de Lancaster.

MacDonell était rien moins qu’enthousiaste à l’idée de résider de façon permanente dans un lieu éloigné et, à l’évêché de Québec, on commença une longue bataille pour le forcer à vivre avec ses compatriotes dans l’établissement loyaliste de New Johnstown (Cornwall, Ontario). Jugeant plus attrayante la vie au séminaire de Saint-Sulpice, à Montréal, il était peu disposé à rejoindre son troupeau. Le 1er septembre 1787, le supérieur de Saint-Sulpice, Henri-François Gravé de La Rive, faisait part au coadjuteur de Québec, Mgr Hubert*, de son désir que MacDonell partît pour sa mission, parce qu’« il ne rend[ait] aucun Service au Diocèse » en restant au séminaire. Mais le peu commode MacDonell ne se laissait pas facilement intimider : il exigea une paroisse et un vicaire, comme le lui avait promis le gouvernement. Le lieutenant-gouverneur de la province de Québec, Henry Hope*, intervint pour nier qu’on eût pris un tel engagement, et il pria l’évêché de supporter financièrement MacDonell en attendant que ses compatriotes fussent en mesure de le faire vivre. Plus tard, le même mois, l’évêque promit à ce dernier £25 par année, pendant quatre ans, dès qu’il serait installé dans sa mission. MacDonell ne fut pas satisfait de l’arrangement et se plaignit à l’évêque, qui ne voulut lui accorder, outre l’allocation promise, qu’une petite pension pour sa mère à l’Hôpital Général.

Pendant ce temps, les catholiques de New Johnstown étaient sans prêtre résidant ; le 11 décembre 1787, ils adressèrent une pétition à Mgr Hubert. Ils désiraient « par-dessus tout avoir un prêtre qui vécût parmi eux », mais, étant moins d’un millier et incapables de fournir une aide financière suffisante, ils suggéraient que les revenus d’une paroisse sans titulaire fussent affectés à l’entretien de leur pasteur. Quant au prêtre, ils arrêtaient leur choix sur MacDonell, « celui-ci étant le seul qui entendît la langue de [leur] pays [le gaélique] ». Le même mois, Mgr Hubert agréa leur requête en nommant MacDonell, et il lui accorda un salaire annuel de £25 pendant quatre ans. Peu après, MacDonell, présent à Québec, souleva la colère de la hiérarchie religieuse par des « reproches inciviles » et des plaintes qu’il adressa à ses protecteurs de Londres à propos de l’aide insuffisante qu’on lui accordait. Gravé de La Rive lui reprocha de vouloir « etre traité en mylord et affluer de richesses ». MacDonell rétorqua que « les pretres anglais [étaient traités] autrement et plus durement que les pretres Canadiens ». L’évêque refusa de lui avancer son salaire pour la première année, et MacDonell en emprunta effrontément le montant, indiquant au prêteur d’en réclamer le remboursement à Gravé de La Rive, qui ne le lui refusa pas. En mai 1788, MacDonell était de passage à New Johnstown. Au mois de septembre, lui et Roderic MacDonell, missionnaire auprès des Indiens de Saint-Régis, écrivirent à leur supérieur pour nier les rumeurs voulant qu’il y eût querelle entre eux au sujet des dîmes.

En octobre 1789, James Jones, missionnaire à Halifax et supérieur des missions de l’Est, fit valoir que MacDonell était le prêtre tout désigné pour les établissements des Highlanders et des Acadiens de l’île Saint-Jean (Île-du-Prince-Édouard), lesquels étaient sans prêtre depuis la mort de James MacDonald*, en 1785. Mgr Hubert discuta de la question avec son vicaire général de Montréal, Gabriel-Jean Brassier*, qui en parla à MacDonell. Peu après, ce dernier écrivit à Hubert et déclara n’avoir « pas la moindre inclination d’y aller. [...] monsieur MacDonald, [son] ancien camarade, y [étant mort] de misere. [... il] ne pourrai[t] jamais [se] resoudre d’accepter aucune place, ou [il] serai[t] dans l’impossibilité de jouir d’un acces praticable a des confreres. »

Hubert souleva aussi la question du salaire de MacDonell. Celui-ci admit avoir manqué « a l’attention pastorale, due a [sa] charge », mais ajouta : « il m’a été toujours impossible jusque ici de m’etablir parmi mes paroissiens Écossais, [...] a moins que l’on ne me donne de ressources plus abondants ». Il était réticent, aussi, à s’en aller vivre en permanence dans la région sauvage de New Johnstown, à cause des « avantages, et [d]es agremens » que lui assurait la vie au séminaire. Mgr Hubert répondit, le 18 décembre 1789, que son allocation serait retenue tant qu’il ne rejoindrait pas ses ouailles. La lettre obtint finalement l’effet désiré, et, en 1790, MacDonell commença à résider de façon permanente dans sa paroisse.

En 1791, la province de Québec fut divisée en Haut et Bas-Canada. Pendant une courte période, le ministère de MacDonell, dans ce qui devint en 1792 le comté de Glengarry, paraît n’avoir été marqué d’aucun conflit. Il s’occupait de sa mission et, à l’occasion, demandait des dispenses à son évêque, pour régulariser les liens matrimoniaux souvent enchevêtrés de ses paroissiens, dont les coutumes ne coïncidaient pas toujours avec celles de l’Église. Mais, en 1794, Mgr Hubert prenait de nouveau MacDonell à partie, en lui reprochant d’avoir présumé détenir des pouvoirs extraordinaires qui, en fait, ne lui avaient pas été conférés. Souvent, certains pouvoirs peu importants étaient accordés aux missionnaires pour leur permettre de régler certains problèmes, comme les mariages mixtes, qui, normalement, relevaient de la juridiction exclusive de l’évêque. Le 7 novembre 1794, Hubert accorda à MacDonell de semblables pouvoirs, qui lui furent renouvelés le 7 septembre 1797. Plus grave, la réprimande d’Edmund Burke (1753–1820), supérieur des missions du Haut-Canada, qui ordonna à MacDonell – « de porter son habit Ecclesiastique de ne rester à M[ont]real que dans le cas de necessité & de commencer à faire batir une Église & presbytere & d’y demeure[r] ». Mgr Hubert jugea que MacDonell avait été suffisamment négligent sur ces questions pour que fût annulée l’entente relative au support financier de sa mission, conclue le 18 décembre 1789. Dans une note datée du 7 novembre 1794, MacDonell déchargeait l’évêque « de toute obligation monétaire envers [lui] », et il ajoutait ces mots acidulés : « à supposer que ce soit mon droit ».

En 1801, MacDonell se trouva une fois de plus mêlé à une querelle. Des problèmes s’étaient élevés à la suite de ses diverses tentatives pour obtenir une aide suffisante de la part des habitants de Glengarry. Il avait demandé, en particulier, qu’on augmentât ses approvisionnements de bois, que la paroisse assumât les dépenses imprévues relatives à l’administration des sacrements et à ses vêtements, qui devaient être à la hauteur de ses fonctions, et qu’on lui fournît « un servent constant, & instruit ». Ce dernier lui était nécessaire pour l’assister comme servant de messe, car « il [lui] falloit souvent repondre la masse [messe] a [lui-] meme » ; ce serviteur pourrait aussi apporter son aide en s’occupant des « vieux », des « infirmes » et des « ecartés ». Ces tâches étaient particulièrement difficiles à remplir, la mission étant « vaste par l’etendue, & dispersee par de grandes separations de forets, & de Protestants », écrivait-il à Mgr Denaut, successeur de Mgr Hubert, dans une lettre du 20 avril 1801. MacDonell se plaignait qu’ « il n’y etoit point de divisions entre [lui] et les gens de [sa] mission tant qu’ils etoient si pauvres qu’ils ne pouvoient presque rien donner [...] Mais parceque ils [étaient] depuis quelques années un peu plus a leur aise [... lui-même devenait] de plus en plus embarrassé tous les ans [...] pour les desservir presque gratis. » II voyait, dans l’opposition de ses ouailles, non seulement le fruit des « caballes d’un demagogue, ou deux », mais une conséquence de l’hétérogénéité religieuse qui prévalait dans le Haut-Canada. En 1793, il s’était attiré la colère de John Stuart, ministre de l’Église d’Angleterre à Kingston, pour avoir « assidument [...] tenté de faire des prosélytes » et avoir distribué une brochure, dont on ne possède plus d’exemplaire et qui était, semble-t-il, intitulée « A Catholic’s reasons why he cannot become Protestant ». MacDonell prenait ombrage de « la nudité du culte Calviniste [... de] l’irrelligion, ou meme [du] paganisme des Americains [...] qui n’[avaient] aucun ministre de religion nommée Chretienne [... et de] la convoitise sordide si naturelle aux cœurs bas [qui] les [avaient] portes a tout [lui] refuser ». Accablé de dettes et « tellement en proie à une hospitalitée mal entendue », MacDonell avait été forcé de donner « une hipoteque sur [son] calice, [et sur] les autres ornements », sur ses livres, et sur une « petite quantitée d’argenterie » qui lui appartenait ; « fort plongé en toutes sortes de misere », MacDonell écrivait encore : « jai gate mon peuple et je me suis ruiné moi meme ». Il pressait Mgr Denaut de combiner les usages catholiques d’Écosse avec ceux du Bas-Canada et des missions indiennes, de manière à placer la religion « sur un pied solide et permanent ». En mai 1801, Mgr Denaut visita Glengarry, dans une tentative pour régler ces disputes qui duraient depuis si longtemps, et il nota que Macdonell avait été malade pendant un mois.

Ces querelles au sein de la mission atteignirent un point culminant en 1802, après que sept familles, courbées « sous le faix de l’oppression depuis quelque temps déjà, et privees de leurs droits ecclésiastiques [...] comme des hérétiques », eurent adressé à l’évêque une requête pour obtenir un autre confesseur. Ils en voulaient à MacDonell pour ses demandes extravagantes de bois et refusaient de supporter financièrement une chapelle éloignée et, à la fois, propriété personnelle du missionnaire. Ils prétendaient que la plupart des 170 familles avaient résisté au prêtre, mais qu’elles s’étaient ensuite soumises devant « les mots et les insultes les plus infamants » et les menaces de leur retirer l’accès aux sacrements. Seules ces sept familles – que, pour se venger, MacDonell appelait « schismatiques » – n’avaient pas cédé. Certaines personnes, parmi elles, avaient été privées des sacrements pendant près de trois ans. Le 27 février 1802, MacDonell proposa à Mgr Denaut que tous les arrangements précédents relatifs aux finances fussent continués et il le pressa en outre de fixer le taux de la dîme sur les produits de la terre. En retour, il consentait à remettre sa chapelle à la paroisse. Le 25 avril, Mgr Denaut répondit tant au prêtre qu’aux pétitionnaires par une lettre pastorale que, deux jours plus tard, il ordonnait à MacDonell de traduire en gaélique. En qualifiant les plaignants d’imprudents plutôt que de mal intentionnés, comme l’avait fait MacDonell, Denaut se trouvait à reconnaître la légitimité de leurs doléances. Toutefois, il recommanda l’affection filiale et le respect envers le prêtre et se montra très désireux d’établir la discipline ecclésiastique, essentielle au bon ordre. MacDonell allait continuer d’agir comme pasteur, et une paroisse serait formée sous le vocable de l’archange Raphaël – nom qui a subsisté depuis lors. Pour assurer la subsistance de MacDonell, Mgr Denaut ordonna que fût adopté l’usage qui prévalait au Bas-Canada relativement aux dîmes et aux droits casuels. Tout le temporel de l’église serait régi par 3 marguilliers, choisis par 12 électeurs nommés par les paroissiens ; le curé présiderait les délibérations des marguilliers. La paroisse commencerait sur-le-champ à tenir les registres appropriés, à observer toutes les cérémonies de l’Église qui seraient praticables dans une paroisse nouvelle comme celle-là et, en temps voulu, érigerait une église convenable.

MacDonell n’allait pas vivre longtemps sous le nouvel ordre de choses. Au cours de l’hiver de 1803, il tomba malade ; transporté à Lachine, il y mourut le 19 mai. Sa succession, qui comprenait 1 200 acres de terre qu’il avait demandées par une pétition du 7 août 1800, fut administrée par son parent, Miles Macdonell*. Trouver un successeur à MacDonell ne fut pas longtemps un problème. En octobre 1804, un homonyme illustre et compétent, Alexander McDonell*, prit la gouverne de la paroisse.

Homme plein de promesses dans ses jeunes années, Alexander MacDonell of Scothouse semble avoir été frustré dans ses ambitions alors qu’il était en Écosse. Décidé à jouir d’un revenu proportionné à son rang et réticent à abandonner la vie du séminaire, à Montréal, pour sa mission dans la sauvagerie, il se révéla constamment pendant son ministère comme une épine des Highlands au flanc de ses supérieurs canadiens.

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AAQ, 20 A, II : 161 ; III : 147 ; 210 A, I : ff.72, 78, 95, 111, 187 ; II : ff.46, 145, 166 ; IV : ff.78, 149, 198 ; V : f.221 ; VII : ff.3v., 4r. ; 1 CB, I : 42s., 57, 71, 73 ; VI : 50 ; 9 CM, VI : 2, 156b ; 90CM, I : 11b ; 312CN, III : 3 ; 320CN, I : 1 ; III : 3–8.— AO, MS 444, C–1–2 (histoires de Glengarry) ; RG 22, ser. 6–2, United Counties of Stormont, Dundas and Glengarry, administration of Alexander MacDonell.— APC, RG 1, L3, 331 : M5/33.— PRO, CO 42/18 : ff.11–12 ; 42/82 : ff.15–21.— Scottish Catholic Arch. (Édimbourg), Blairs letters, 19 juin 1786, Alexander MacDonell à George Hay ; 3 févr. 1788, MacDonell à John Geddes.— « Clergy lists of the Highland District, 1732–1828 », F. Forbes et W. J. Anderson, compil., Innes Rev. : Scottish Catholic Hist. Studies (Glasgow), 17 (1966) : 148.— Mandements, lettres pastorales et circulaires des évêques de Québec, Henri Têtu et C.O. Gagnon, édit. (18 vol. parus, Québec, 1887– ) ; 2 : 525–529.— Kingston before War of 1812 (Preston), 287s.— Records of the Scots colleges at Douai, Rome, Madrid, Valladolid and Ratisbon [...] (Aberdeen, Écosse, 1906), 138s.— « Roman Catholic Church in Upper Canada », APC Report, 1896 : 76s.— J. F. S. Gordon, Ecclesiastical chronicle for Scotland (4 vol., Glasgow, 1867), 4 : 177, 263, 591.— Alexander Mackenzie, History of the Macdonalds and lords of the isles ; with genealogies of the principal families of the name (Inverness, Écosse, 1881), 363.

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En collaboration, « MacDONELL OF SCOTHOUSE (Scotus), ALEXANDER (Alasdair MacDhòmhnuill) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/macdonell_of_scothouse_alexander_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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