HOUSTON, JOHN, journaliste, homme d’affaires et homme politique, né en novembre 1850 dans le canton de Caledon, Haut-Canada, troisième fils de William Houston et de Mary Thomas ; probablement en 1892, il épousa Edith May Keeley, et ils eurent une fille ; décédé le 8 mars 1910 à Quesnel, Colombie-Britannique.
John Houston quitta l’école à l’âge de 14 ans et partit pour Chicago, où il se fit apprenti typographe. Pendant 20 ans, il parcourut les États-Unis tout en s’initiant aux autres aspects du journalisme. Il arriva à Calgary après l’achèvement du chemin de fer canadien du Pacifique, mais il se remit bientôt en route pour Donald, en Colombie-Britannique. C’est là que, en juin 1888, il fonda son premier journal canadien, le Truth. L’année suivante, il partit pour New Westminster, où il publia son journal pendant environ neuf mois. En juin 1890, il lança le Miner à Nelson, petite localité, qui, sous l’action de deux réseaux ferroviaires concurrents, était en voie de devenir la plaque tournante de la région ouest de Kootenay. Bientôt, il se mit à vilipender la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, vraisemblablement parce qu’elle était propriétaire de la moitié des terrains de Nelson, ce qui limitait le bénéfice que lui-même retirait en vendant de l’immobilier. Ses affrontements avec les représentants de la « compagnie ferroviaire la plus cupide au monde » sont passés dans la tradition locale. À l’été de 1892, Houston quitta Nelson en abandonnant le Miner, peut-être pour faire l’une de ces virées auxquelles il ne renonça qu’en 1907, mais il y retourna en novembre pour fonder le Tribune et attaquer son ancien journal.
Houston s’employa, non sans mal d’ailleurs, à fournir de l’électricité à ses concitoyens, et c’est surtout en raison de cet aspect de sa carrière qu’on l’a qualifié de populiste. Il fit partie du premier conseil d’administration de la Nelson Electric Light Company. Dotée d’une charte provinciale en 1892, cette entreprise ne put se lancer tout de suite dans la production à cause de la difficulté d’acquérir, en amont de Nelson, un emplacement de barrage dont Gilbert Malcolm Sproat* était propriétaire. En 1893, un mouvement se dessina à Nelson en faveur de la constitution de la localité en municipalité, mais on ne présenta pas la requête par crainte que, si elle était agréée, Nelson ne soit contrainte d’assumer deux fardeaux, à savoir la compagnie d’électricité, encore improductive, et une compagnie de distribution d’eau dont la situation était précaire. Puis, en 1896, les turbines de la Nelson Electric Light Company se mirent enfin à tourner et la compagnie de distribution d’eau fit faillite. Houston et d’autres recueillirent alors assez d’appuis dans la localité pour obtenir, le printemps suivant, la constitution en municipalité. Le 15 avril 1897, Houston accéda à la mairie.
Dans le courant de ses deux premiers mandats (il fut réélu sans opposition en janvier 1898), Houston acheta, au nom de la municipalité, l’entreprise d’hydro-électricité et l’usine de distribution d’eau – ce qui l’obligea à se défendre, en justice et sur la scène politique, contre des allégations de conflit d’intérêts. Toutefois, l’usine hydro-électrique s’étant révélée insuffisante, il obtint en 1901 que la municipalité ait le droit de capter de l’eau aux chutes Bonnington. En 1905, au cours de son dernier mandat, il convainquit les électeurs d’approuver la construction d’une vaste centrale hydro-électrique à cet endroit. Il quitta la mairie au milieu de l’année parce que ses conseillers et lui ne s’entendaient pas sur une question d’engagement de personnel.
La participation de Houston aux affaires publiques ne se limita pas à la localité de Nelson. Candidat d’un groupe dirigé par Francis Lovett Carter-Cotton*, il avait été élu en 1900 dans la circonscription provinciale de West Kootenay-Nelson. Il appuyait le chef du gouvernement, James Dunsmuir*, mais la libéralité avec laquelle son cabinet concédait des terres aux compagnies ferroviaires finit par le décevoir. En mai 1902, enhardi par « quatre ou cinq bonnes rasades de scotch », il empêcha presque à lui seul l’adoption d’une motion sur des subsides, défia le président de la Chambre et réclama la dissolution de « cette Assemblée mal famée ». Puis, le lendemain, il affirma ne pas avoir voulu infliger la défaite à ses amis. Au scrutin de 1903, Houston, devenu président du Parti conservateur provincial de Richard McBride*, remporta la victoire dans la circonscription de la ville de Nelson. Cependant, le lieutenant-gouverneur, Henri-Gustave Joly de Lotbinière, s’opposa formellement à ce qu’il entre au cabinet de McBride. Houston, faisait-il valoir, s’était trop mal conduit à la session précédente, mais d’aucuns soupçonnaient le premier ministre d’avoir encouragé le lieutenant-gouverneur à se montrer sévère pour apaiser la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique. En 1907, Houston fut candidat indépendant dans la circonscription d’Ymir, mais il fut battu.
Après un bref séjour dans le Nevada, Houston fonda un journal à Prince Rupert, où se trouvait depuis peu le terminus du Pacifique de la Grand Trunk Pacific Railway Company. Prévoyant que cette compagnie, qui se prétendait propriétaire de toutes les terres de l’endroit, tenterait de lui faire échec, il fit imprimer les premiers numéros de l’Empire à Victoria. Effectivement, un ingénieur du port, au service de la compagnie, essaya d’empêcher le débarquement de sa presse. Usant de ses relations avec le gouvernement de la Colombie-Britannique, relations qui, il est vrai, étaient alors assez tendues, Houston persuada un policier provincial de laisser sortir la presse du hangar de la compagnie où elle était retenue. Ensuite, il installa son bureau sur un lot situé dans une réserve indienne voisine, et s’assura le droit d’y demeurer temporairement en présentant une demande de concession minière prétendument au nom d’une société qu’il baptisa facétieusement Grand Turk Fractional. S’il put ainsi défier la compagnie ferroviaire, ce fut en grande partie grâce à McBride, qui disputait à celle-ci et au gouvernement fédéral la propriété de la réserve. Dès lors, durant deux ans, Houston pourfendit la compagnie sans relâche tout en combattant pour les droits des squatters installés sur sa concession, pour l’exclusion des immigrants asiatiques et, avec le zèle d’un néophyte, pour la prohibition. Ses luttes attirèrent l’attention de la presse et des milieux politiques. Cependant, il fut impuissant lorsque la compagnie, après avoir réglé ses différends avec la province, lui retira tout droit sur la concession. Enfin, quand on mit en vente les lots qui formaient l’emplacement de la localité, en mai 1909, la compagnie l’empêcha d’en acheter. Voyant cela, il vendit son journal pour 10 000 $ et partit.
Houston regagna la Colombie-Britannique à l’automne, s’installa dans une localité voisine du confluent du Fraser et de la rivière Nechako et y lança le Fort George Tribune. La Grand Trunk Pacific Railway Company avait annoncé qu’elle installerait dans ce district un grand centre de commutation. Les rares numéros du journal qui subsistent révèlent que, pendant cette période, Houston s’attacha davantage à promouvoir la région qu’il ne s’attaqua à la compagnie. Tombé malade au début du printemps, il alla se faire soigner à Quesnel et y mourut le 8 mars 1910. On l’inhuma à Nelson avec les honneurs dus à un notable.
Au delà de sa propension à boire, notée par bien des historiens, il faut souligner que John Houston fut un virulent critique des grandes sociétés, ferroviaires surtout, installées en Colombie-Britannique. Sans être altruiste, il fit preuve d’un penchant populiste en se consacrant à l’occasion au développement des localités de la frange pionnière où il vécut.
La plus importante source d’information sur les activités de John Houston demeure la série de journaux qu’il a fondés et dirigés de 1888 jusqu’à la fin de 1910 : Truth (Donald, C.-B.), 2 juin 1888–13 juill. 1889 ; Truth (New Westminster, C.-B.), 5 sept. 1889–3 juin 1890 ; Miner (Nelson, C.-B.), du 21 juin 1890 jusqu’aux alentours de juin 1892 ; Tribune (Nelson), nov. 1892–11 nov. 1905 ; Rossland Miner (Rossland, C.-B.), 23 mars–16 août 1895 ; Empire (Prince Rupert, C.-B.), 20 juill. 1907–juill. 1909 ; et Fort George Tribune (Fort George [Prince George], C.-B.), 5 nov. 1909–mars 1910.
La seule étude déjà faite sur l’ensemble de la carrière de Houston au Canada est celle de Patrick Wolfe, « Tramp printer extraordinary : British Columbia’s John « Truth » Houston », BC Studies, no 40 (hiver 1978–1979) : 5–31. De l’information additionnelle sur les campagnes de Houston visant à fournir de l’électricité à la ville de Nelson figure dans David Scott et E. H. Hanic, Nelson : queen city of the Kootenays (Vancouver, 1972) ; on trouve une histoire plus systématique de la ville dans C.-B., Héritage Conservation Branch, Nelson : a proposal for urban heritage conservation (Victoria, 1981). Les activités de Houston à Prince Rupert sont détaillées dans notre thèse intitulée « A thousand blunders » : the Grand Trunk Pacific Railway Company and northern British Columbia, 1902–1919 » (thèse de ph.d., York Univ., North York [Toronto], 1988). [f. l.]
Frank Léonard, « HOUSTON, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/houston_john_13F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1994 |
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