HAZEN, WILLIAM, homme d’affaires, homme politique et fonctionnaire, né le 17 juillet 1738 à Haverhill, Massachusetts, dernier des fils de Moses Hazzen et d’Abigail White, et frère de Moses ; le 14 juillet 1764, il épousa Sarah LeBaron, de Plymouth, Massachusetts, et ils eurent au moins 16 enfants ; décédé le 23 mars 1814 à Saint-Jean, Nouveau-Brunswick.

Le père de William Hazen, décédé en 1750, avait laissé un petit héritage à chacun de ses cinq enfants. Neuf ans plus tard, quand Amherst* eut besoin de soldats pour aller faire campagne au Canada, William s’enrôla. Après la guerre, il s’établit comme marchand à l’endroit qui allait devenir Newburyport, dans la colonie du Massachusetts, et il plaça le reste de son héritage dans le commerce des produits de base, traditionnellement exploité par les marchands en gros ou « sédentaires » de la Nouvelle-Angleterre.

L’intérêt que porta Hazen à la Nouvelle-Écosse fut suscité, d’une part, par les activités de ses deux cousins James* et Richard Simonds qui, dès le début des années 1760, s’étaient mis à la recherche de débouchés commerciaux près de l’embouchure de la rivière Saint-Jean (Nouveau-Brunswick) et, d’autre part, par le fait qu’après la Proclamation royale de 1763 la Nouvelle-Angleterre n’eut plus accès au commerce de l’arrière-pays. Pour les marchands bien établis, la fin de la guerre de Sept Ans entraîna une diminution de l’activité commerciale, mais pour les marchands plus jeunes, comme Hazen, le retour à la paix et l’annulation des contrats de guerre menèrent souvent à la faillite. Les affaires de Hazen périclitant, il se tourna vers la Nouvelle-Écosse, en quête de nouveaux débouchés. En 1763, il était associé à James Simonds dans une entreprise commerciale et, l’année suivante, une société fut mise sur pied en vue de s’adonner à la pêche, à la traite des fourrures et à d’autres activités à Portland Point (Saint-Jean, Nouveau-Brunswick), où les frères Simonds avaient obtenu, du lieutenant-gouverneur Montagu Wilmot*, la permission d’occuper des terres.

La société créée le 1er mars 1764 comptait trois associés principaux : Samuel Blodget, marchand bien établi de Boston, James Simonds et Hazen, ainsi que trois associés en second : Richard Simonds, James White, autre cousin de Hazen, et Robert Peaslie, beau-frère de Hazen. La société transplanta en Nouvelle-Écosse un modèle commercial déjà existant dans les Treize Colonies : Hazen et Blodget demeuraient en Nouvelle-Angleterre, où ils exploitaient leur commerce surplace ; James Simonds et les associés en second établirent un poste de traite à Portland Point, lequel était typique des marchands de l’arrière-pays. Un examen attentif des livres de comptes de la société révèle comment on menait le commerce du poisson, des fourrures et des plumes de gibier. Ces produits de base étaient envoyés de la Nouvelle-Écosse à Hazen et Blodget qui vendaient les fourrures aux marchands britanniques, le poisson aux planteurs des Antilles et les plumes aux commerçants côtiers. Hazen et Blodget se procuraient les produits manufacturés et les provisions que Simonds et les associés en second utilisaient dans les transactions commerciales avec les colons qui vinrent s’établir en Nouvelle-Écosse avant la guerre d’Indépendance américaine [V. Israel Perley]. La maison exploitait aussi des carrières de pierre à chaux à Portland Point et fournissait la garnison du fort Frederick, situé non loin de là. Bientôt, une scierie vit le jour, on construisit des schooners, et le bois (dont une partie venait des colons comme acquittement de leurs dettes) ainsi que la chaux étaient exportés. Dans le but d’augmenter le chiffre d’affaires de la société, Simonds étendit ses services dans les terres à 60 milles de Portland Point sur la rivière Saint-Jean et à 70 milles au sud, à la baie de Passamaquoddy.

Au début de 1765, Richard Simonds mourut, et, quelques mois plus tard, Peaslie quitta la société. En mai 1766, Blodget démissionna également, et Hazen acheta sa part avec Leonard Jarvis qu’il avait associé à la maison en 1765. C’est ainsi que le 16 avril 1767 Hazen, Jarvis, James Simonds et White formèrent une nouvelle société. En tant que membres de la Saint John River Society [V. Beamsley Perkins Glasier*], les premiers sociétaires avaient acquis de vastes concessions de terre dans la vallée de la rivière Saint-Jean en 1765. Sept ans plus tard, Hazen décida de s’installer sur une de ses terres, mais il dut attendre jusqu’en 1775. Entre-temps, le conflit mettant aux prises les Treize Colonies et la Grande-Bretagne avait presque anéanti le commerce entre la Nouvelle-Écosse et la Nouvelle-Angleterre. Malgré tout, Hazen réussit à mener ses affaires quelque temps en prenant des voies détournées et en s’adonnant à des pratiques douteuses. La société continua le commerce avec les Antilles jusqu’à la fin de 1775, époque où celui-ci devint trop périlleux et trop onéreux.

À l’instar de plusieurs habitants de la Nouvelle-Angleterre, Hazen était partagé au sujet de la guerre d’Indépendance américaine. Son frère aîné Moses était général dans l’armée révolutionnaire et les liens familiaux se maintinrent ; toutefois, lorsque Hazen vit des soldats de la Nouvelle-Angleterre faire des incursions en Nouvelle-Écosse, il comprit qu’il ferait son avenir au sein de l’Empire britannique. Même si en 1776 la maison de commerce ne fut pas ennuyée par l’armée de va-nu-pieds de Jonathan Eddy qui attaqua sans succès le fort Cumberland (près de Sackville, Nouveau-Brunswick), pendant l’été de 1777, Hazen et White furent faits prisonniers pendant quelque temps par des troupes commandées par John Allan et, à l’automne de cette même année, les magasins de leur entreprise furent pillés par des corsaires maraudeurs des Treize Colonies. La société déposa une plainte amère auprès des autorités gouvernementales à Halifax, et, plus tard au cours de l’année, des troupes commandées par Gilfred Studholme* entreprirent la construction du fort Howe, dominant les entrepôts de la société à Portland Point. En 1778, la société seconda les Britanniques qui tentaient de convaincre les Micmacs et les Malécites de rester neutres, deux tribus qu’Allan encourageait à épouser la cause américaine. Comme adjoint de Michael Francklin*, surintendant des Affaires indiennes, James White avait une influence particulière ; à titre de commissaire au fort Howe, Hazen, pour sa part, était responsable de la distribution des approvisionnements aux Indiens.

Après que Jarvis eut quitté la société en 1773, Simonds, Hazen et White s’étaient entendus verbalement pour poursuivre leur activité commerciale. Cinq ans plus tard, comme les affaires étaient stationnaires à Portland Point, Simonds quitta le groupe et alla s’installer dans les terres. Cependant, en 1781, Hazen fonda une nouvelle société avec White et Francklin. Les contacts qu’avait Francklin avec le gouvernement à Halifax permirent à la société de décrocher un contrat de construction de mâts, et, en dépit de la rivalité de William Davidson*, l’entreprise prospéra. La nouvelle société faisait aussi le commerce des fourrures qu’elle expédiait à la maison de Brook Watson et Robert Rashleigh, à Londres. Francklin, en réalité, agissait comme marchand sédentaire au sein de la société, et Halifax devint le centre d’entreposage des marchandises destinées au commerce outre-mer.

Même si les Loyalistes qui arrivèrent sur les bords de la rivière Saint-Jean en 1783 manifestaient peu de sympathie pour ceux qui les avaient précédés, Hazen fut rapidement reconnu comme chef de file, étant donné sa position prééminente à Portland Point. Il exerça les fonctions de mandataire des Loyalistes et il fut le seul immigrant d’avant la Révolution américaine à être choisi en 1784 pour siéger au Conseil de la province du Nouveau-Brunswick nouvellement créée. Il continua de s’occuper activement de politique provinciale et fit partie de comités municipaux à Saint-Jean, occupant le poste de commissaire de la voirie et de directeur du bureau de bienfaisance de 1791 à 1797. L’afflux des Loyalistes activa grandement son commerce. Il put louer les quais et les bâtiments de la société et il approvisionna les nouveaux colons de bois et de produits manufacturés. Même si un grand nombre de ses premières concessions avaient été soumises à l’escheat, il avait en compensation reçu d’autres vastes terres et il put, comme propriétaire foncier, les faire fructifier en les louant à de nouveaux arrivants. À la fin des années 1780, il exploitait à Saint-Jean un moulin dont il était copropriétaire avec deux loyalistes, Ward Chipman* et Jonathan Bliss*. Lorsque les relations commerciales reprirent avec les États-Unis après la guerre, Hazen relança son commerce côtier et, dès que la guerre de course cessa, il put rétablir des liens commerciaux avec les Antilles. De nouveau il se lança dans la construction navale. Il lui arriva souvent de vendre un bateau et sa cargaison à des marchands d’outre-mer et il continua de fabriquer des mâts, même si la demande avait diminué après la guerre. Bien que prospères, les dernières années de Hazen furent troublées par un litige prolongé avec Simonds et White relativement aux terres que leur société avait acquises. Cette affaire ne fut finalement réglée qu’en 1810.

La carrière de William Hazen met en lumière l’habileté des hommes d’affaires du xviiie siècle. Ses entreprises dans les pêcheries, le bois, la construction navale et le commerce présageaient l’avenir du Nouveau-Brunswick. Ses talents d’entrepreneur orientèrent la nouvelle économie de la colonie et assurèrent l’avenir de sa famille. Ses enfants – au moins 11 fils et 5 filles – devinrent des piliers de la communauté. Une des filles épousa Ward Chipman et une autre, William*, fils d’Amos Botsford ; un petit-fils, Robert Leonard Hazen*, se fit remarquer comme avocat et homme politique du Nouveau-Brunswick.

Rod Campbell

Musée du N.-B., H. T. Hazen coll. ; Leavitt family papers ; Simonds, Hazen and White papers ; James White papers.— « Letters written at Saint John by James Simonds, A.D. 1764–1785», W. O. Raymond, édit., N.B. Hist. Soc., Coll., 1 (1894–1897), no 2 : 160–186.— « Selections from the papers and correspondence of James White, esquire, A.D. 1762–1783 », W. O. Raymond, édit., N.B. Hist. Soc., Coll., 1 (1894–1897), no 3 : 306–340.— « The James White papers, continued, A.D. 1781–88 », W. O. Raymond, édit., N.B. Hist. Soc., Coll., 2 (1899–1905), no 4 : 30–72.-Winslow papers (Raymond).— W. T. Baxter, The house of Hancock ; business in Boston, 1724–1775 (Cambridge, Mass., 1945 ; réimpr., New York, 1965).— J. B. Brebner, Neutral Yankees (1969) ; New England’s outpost : Acadia before the conquest of Canada (New York et Londres, 1927 ; réimpr., Hamden, Conn., 1965, et New York, [1973]).— R. C. Campbell, « Simonds, Hazen and White : a study of a New Brunswick firm in the commercial world of the eighteenth century » (thèse de m.a., Univ. of N.B., Saint-Jean, 1970).— Hannay, Hist. of N.B., 1. W. S. MacNutt, The Atlantic provinces : the emergence of colonial society, 1712–1857 (Toronto, 1965).— Raymond, River StJohn (1910).— A. M. Schlesinger, The colonial merchants and the American revolution, 1763–1776 (New York, 1957).— W. O. Raymond, « At Portland Point », New Brunswick Magazine (Saint-Jean), 1 (juill.– déc. 1898) : 6–20, 65–79, 132–145, 186–201, 263–279, 316–332 ; 2 (janv.– juin 1899) : 21–33, 78–91, 140–151, 205–222, 249–263, 311–325.

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Rod Campbell, « HAZEN, WILLIAM », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/hazen_william_5F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
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