GAULT, MATHEW (Matthew) HAMILTON, financier et homme politique, né le 18 juillet 1822 à Strabane (Irlande du Nord), fils aîné de Leslie Gault, marchand et propriétaire de navires, et de Mary Hamilton ; en mai 1854, à Montréal, il épousa Elizabeth J. Bourne, et ils eurent 16 enfants ; décédé à Montréal le 1er juin 1887.

Mathew Hamilton Gault fréquenta l’école privée du révérend Charles Allan, ministre presbytérien considéré comme l’un des plus grands humanistes de l’Irlande. À l’âge de 15 ans, il subit une blessure à la colonne vertébrale en tombant de cheval et dut interrompre ses études ; il garda le lit durant un an. À la suite des ennuis financiers que son père connut au début des années 1840 et qui furent causés par la perte d’un certain nombre de navires en mer, par le déclin du commerce des grains et par la suppression des droits d’entrée sur le bois du Nord, sa famille immigra au Canada. Les Gault arrivèrent au pays en 1842 et s’établirent à Montréal, mais la mère de Mathew tomba bientôt malade et retourna en Irlande, sur le conseil de ses médecins ; moins de neuf mois après leur arrivée, le père succomba au choléra. À 20 ans, Mathew Hamilton Gault se trouvait donc à la tête d’une famille nombreuse.

Durant les premières années qui suivirent son arrivée au Canada, la famille subsista grâce à la vente de biens en Irlande, en dépit des lourdes pertes subies lors de la faillite d’une banque d’épargne de Montréal. Mathew et ses frères tâtèrent de l’agriculture, mais ils abandonnèrent après avoir perdu environ $7 000 en trois ans, et, de 1844 à 1848, Mathew exerça le métier d’épicier à Montréal. En 1851, il devint mandataire de compagnies d’assurances à Montréal, où il représenta la Mutual Life Assurance Company of New York et la Compagnie d’assurance de l’Ouest dont le siège social était à Toronto ; l’année suivante, il devint également mandataire de la Compagnie d’assurance de l’Amérique britannique contre le feu et sur la vie, de Toronto. Au début des années 1860, il remplissait les fonctions de secrétaire-trésorier de la Société permanente de construction de Montréal (qui devint en 1875 la Compagnie de prêt et d’hypothèque de Montréal) ; nommé président en 1877 ou 1878, il occupa ce poste jusqu’à sa mort. Au sein du consortium qui dirigeait cette compagnie, un grand nombre de financiers allaient rester associés à Gault dans d’autres entreprises ; ils constituaient un échantillon représentatif des marchands, banquiers et industriels de Montréal. De 1866 à 1870, Gault fut directeur à Montréal de la Banque royale du Canada (Royal Canadian Bank) dont le siège social était à Toronto et, à compter de 1879, il fit partie du conseil d’administration de la Royal Insurance Company d’Angleterre.

En 1865, Gault réunit un groupe de banquiers et de marchands, parmi lesquels se trouvait Alexander Walker Ogilvie*, qui adressèrent une pétition à l’Assemblée en vue d’obtenir la reconnaissance juridique de la Compagnie d’assurance de Montréal, dite du Soleil. Le parlement accorda son autorisation le 18 mars 1865, mais les difficultés à recueillir des fonds aux conditions prescrites par la charte originale, ainsi que l’instabilité générale de l’économie, retardèrent au 27 décembre 1871 les véritables débuts de la compagnie, qui opéra sous le nom de Compagnie d’assurance mutuelle sur la vie, de Montréal, dite du Soleil (en 1882, elle deviendra la Compagnie canadienne d’assurance sur la vie, dite du Soleil – la Sun Life). Premier directeur-gérant de la compagnie, Gault, avec 500 actions valant environ $5 000, en était aussi le principal actionnaire. Une grande partie des premiers succès de l’entreprise fut le résultat de son habileté professionnelle, de son talent d’actuaire et de ses capacités d’organisation.

En 1873, Gault assuma la présidence de la Banque d’échange du Canada, fondée l’année précédente, et dont un grand nombre d’actionnaires siégeaient au conseil d’administration ou possédaient des actions de la Sun Life. Gault résigna ses fonctions de directeur-gérant de la Sun Life le 31 mars 1879, à la suite d’un désaccord avec le secrétaire, Robertson Macaulay*, au sujet de la politique d’investissement de la compagnie et notamment des titres en portefeuille dans la Banque d’échange et dans la Compagnie de prêt et d’hypothèque de Montréal ; le 10 septembre, toutefois, il devint vice-président de la Sun Life. Il lui fallut cependant démissionner de ce poste en 1883, lors de la faillite de la Banque d’échange et de l’effondrement momentané de la Compagnie de prêt et d’hypothèque de Montréal ; Gault avait amené la Sun Life à investir de fortes sommes dans ces deux sociétés, dont il était président, et Macaulay, alors directeur-gérant de la Sun Life, ainsi qu’un groupe d’actionnaires dissidents le forcèrent à remettre sa démission. Son frère, Andrew Frederick Gault*, qui exploitait à Montréal un gros commerce de « marchandises sèches » et une manufacture de textiles, le remplaça au poste de vice-président. En 1887, ayant échoué dans ses efforts pour avoir la haute main sur la compagnie, Andrew Frederick Gault vendit la totalité, moins 43, soit 1 300 des actions que la famille possédait dans la Sun Life, ce qui lui rapporta $39 000. Peu après la faillite de 1883, les actionnaires de la Banque d’échange avaient intenté un procès visant à tenir Mathew Gault responsable, en qualité de président, du recouvrement des fonds empruntés par les administrateurs de la banque. Les tribunaux, cependant, attribuèrent l’entière responsabilité au directeur de la banque, Thomas Craig, beau-frère de Gault, intéressé à l’activité de la Compagnie de prêt et d’hypothèque de Montréal, qui, au plus fort du scandale, s’enfuit à New York.

Gault fit également partie du conseil d’administration de diverses entreprises, telles que la Compagnie de Montréal pour l’exploitation des mines, dont il fut vice-président de 1872 à 1887, la Compagnie de navigation du Richelieu et d’Ontario [V. sir Hugh Allan], la Compagnie de télégraphe de la Puissance, la Windsor Hotel Company (l’hôtel fut ouvert en 1878), la Railway and News Advertising Company, la Compagnie canadienne de navigation et plusieurs compagnies de coton. En outre, dans sa jeunesse, il avait été membre actif de la milice et il prit sa retraite avec le grade de capitaine dans la Montréal Garrison Artillery Brigade. Durant de nombreuses années, il exerça les fonctions de juge de paix à Montréal et marguillier de la cathédrale Christ Church. Il fut l’un des fondateurs et le premier président de la Société de bienfaisance protestante irlandaise de Montréal et l’un des administrateurs de la Compagnie du cimetière du Mont-Royal ; il siégea aux conseils d’administration de la maison protestante d’industrie et de refuge de Montréal, du Montréal Général Hospital et de l’Institut maritime de Montréal.

Parmi ses intimes, Gault comptait un grand nombre de membres du parti conservateur, dont sir John Alexander Macdonald* et sir George-Étienne Cartier. Il prit une part active à plusieurs élections fédérales à Montréal et, en 1878, il se laissa convaincre de se présenter lui-même comme candidat conservateur. Connaissant l’importance du vote des ouvriers et le faible attrait qu’Alexander Mackenzie* exerçait sur eux, il mena une vigoureuse campagne dans les secteurs ouvriers de la circonscription de Montréal-Ouest où il se fit le défenseur de la Politique nationale. Fort de l’appui du maire de Montréal, Jean-Louis Beaudry, et de plusieurs hommes d’affaires de l’endroit, il battit son adversaire, le marchand William Darling. À la chambre des Communes, toutefois, il ne se mêla guère aux débats, son principal souci étant le maintien du tarif protectionniste. Il s’intéressait vivement aux affaires du parti et il eut de fréquents rapports avec Macdonald au sujet de la dispensation des faveurs politiques et des questions relatives à la prospérité de Montréal. En 1882, bien que malade, il se fit réélire dans Montréal-Ouest avec une forte majorité.

Après une longue maladie, Gault mourut le 1er juin 1887. De grande taille (six pieds, un pouce) et de belle apparence, avec ses favoris taillés en forme de côtelette, il était, malgré le désastre survenu à la Banque d’échange, un membre respecté et hautement estimé de la communauté des hommes d’affaires montréalais. Vers 1869, il avait acquis une grande maison appelée Braeside, dans la rue McTavish, sise en un point élevé de la montagne, près du McGill College, et d’où l’on avait une vue superbe sur la ville et la campagne environnante. Il possédait également une résidence d’été nommée Rockcliffe, à Cacouna, Québec.

Gladys Barbara Pollack et Gerald J. J. Tulchinsky

AC, Montréal, État civil, Anglicans, Christ Church Cathedral (Montréal), 4 juin 1887.— APC, MG 26, A.— Baker Library, R. G. Dun & Co. credit ledger, Can., 5 : 15, 293 ; 6 : 121.— Arch. de la Sun Life du Canada, compagnie d’assurance-vie (Montréal), Card index to minutes, 1870–1931 ; Directors’ files, M. H. Gault, « Notes on the subject of Leslie Gault » ; « First original list of shareholders, Sun Mutual Insurance Company of Montreal » ; « First 200 policy applications » ; Minutes, 29, 31 déc. 1883, 4, 11 mars 1884.— Canada, chambre des Communes, Debates, 1875–1887, spécialement 1879 : 1 435, 1 441 ; 1880 : 42, 215, 969, 1 295 ; 1884 : 1 215 ; 1885 : 49, 1 305 ; 1886 : 668, 704, 1 198 ; Parl., Sessional papers, 1878–1882 (rapports du surintendant des assurances, 1876–1880) ; Statutes, 1880, c.68 ; 1882, c.63, c.104.— Canada, prov. du, Statutes, févr.–mai 1863, c.61, c.62.— Québec, Statutes, 1873–1874, c.40 ; 1881, c.50.— Sun Life du Canada, compagnie d’assurancevie, Report of the directors (Montréal), 1876, 1883.— Gazette, 20, 29 août, 20 sept. 1878, 5, 7, 8 déc. 1883, 14 mai 1884, 2 juin 1887.— La Minerve, 2 juin 1887.— Monetary Times, 14, 24, 28 sept., 12 oct., 7, 14, 21 déc. 1883, 7, 14 mars 1884, 14 janv. 1887.— Montreal Daily Star, 12 mars 1884, 1er juin 1887.— Montreal Herald and Daily Commercial Gazette, 14 mars 1884.— Borthwick, Hist. and biog. gazetteer.— Canadian biog. dict., II : 400.— Canadian directory of parl. (J. K. Johnson).— CPC, 1880.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose), I : 431 s.— Montreal directory, 1852, 1854–1855, 1858–1859, 1863–1870, 1871–1875, 1877–1878, 1881–1883.— The yearbook and almanac of Canada [...] (Ottawa), 1873 : 43 ; 1875 : 73.— G. H. Harris, The president’s book ; the story of the Sun Life Assurance Company of Canada (Montréal, 1928).— Joseph Schull, Un astre centenaire : les cent premières années de Sun Life du Canada, compagnie d’assurance-vie (Québec, 1971).— « The founder of the company », Sunshine (Montréal), mars 1896 : 34.

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Gladys Barbara Pollack et Gerald J. J. Tulchinsky, « GAULT, MATHEW (Matthew) HAMILTON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/gault_mathew_hamilton_11F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
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