ROSS, JAMES GIBB, marchand, capitaliste et sénateur, né le 18 avril 1819 à Carluke (région de Strathclyde, Écosse), décédé le 1er octobre 1888 à Québec.

Fils de marchand, James Gibb Ross vint au Canada et s’établit à Québec à l’âge de 15 ans. Employé de bureau dans l’entreprise d’épicerie en gros et au détail de ses deux oncles, James* et Thomas Gibb, Ross travailla sans rémunération pendant la première année ; la deuxième année, il toucha un salaire de $200, qui fut par la suite augmenté à $400. Sous le nom de James Gibb and Company, ses deux oncles, associés à Elisha Lane, continuèrent d’exploiter leur commerce ensemble jusqu’à la fin de 1843, moment où James Gibb quitta la compagnie pour se joindre à John Ross, frère aîné de James Gibb Ross. La nouvelle société, qui prit le nom de Gibb and Ross, exploita elle aussi un commerce d’épicerie en gros et au détail, et James Gibb Ross fut à l’emploi de la compagnie dès sa fondation ; en avril 1858, il en devint l’un des associés. Reconnue comme la plus grosse firme importatrice de vins et d’articles d’épicerie de Québec, Gibb and Ross fit beaucoup d’affaires, et des affaires profitables.

Après la mort de James Gibb, à l’automne de 1858, les frères John et James Gibb Ross formèrent une société, qui prit le nom de Ross and Company, et poursuivirent leur activité commerciale. Restés les plus gros importateurs d’articles d’épicerie de Québec, ils cherchèrent bientôt d’autres secteurs où investir leurs capitaux, qui s’arrondissaient sans cesse. C’est ainsi que dès 1861 ils se lancèrent dans le commerce du bois équarri. Commissionnaires et « marchands généraux », les associés œuvrèrent ensemble jusqu’en 1868, année où John Ross laissa l’entreprise pour en créer une nouvelle spécialisée dans les articles d’épicerie, la John Ross and Company, qu’il établit tant à Québec qu’à Montréal. James Gibb Ross continua d’exploiter pour son compte la Ross and Company ; il diversifia rapidement ses intérêts, comme marchand général et commissionnaire, vendant du fer, du bois équarri et du bois scié, et faisant le commerce d’épicerie en gros ; il devint en outre le représentant de diverses compagnies britanniques et américaines de navires à vapeur. Au cours des décennies 1870 et 1880, son commerce l’amena à entrer sur les marchés de denrées de New York, de Chicago et de Milwaukee, Wisconsin ; on rapporte qu’il y investit parfois des millions de dollars dans des produits comme le thé, le sucre et les céréales. À un moment donné, un syndicat dont Ross était le principal bailleur de fonds réussit, apparemment, à accaparer le marché du porc à Milwaukee. Ses entreprises dans le secteur du bois équarri et du bois scié se multiplièrent si bien qu’il fut bientôt reconnu comme un des plus gros propriétaires de scieries du Québec et de l’Ontario. Une de ses scieries, située à Lakefield, Ontario, et détruite par le feu en 1880, était évaluée à $25 000. Au cours des années 1880, Ross et ses associés, Horace Jansen Beemer et Benjamin Alexander Scott, firent de grandes coupes de bois et d’importantes opérations de sciage dans la région du lac Saint-Jean, sous le nom de Ross, Beemer and Company. À l’époque de sa mort, il achevait, à la pointe Scott, la construction de la plus grande scierie de la région.

À partir de la fin des années 1850, Ross s’était intéressé à la construction navale. Au début, il avançait de l’argent à des constructeurs de navires ; bientôt, il se lança lui-même dans cette industrie. Dès le mois de juin 1859, le Leveu, navire à voiles de 676 tonneaux, le premier qu’il ait construit, quittait les cales sèches à Québec ; et, avant la fin de la même année, il en avait construit deux autres. En 1877, les annuaires de la ville présentaient Ross and Company comme constructeurs et propriétaires de navires, et comme courtiers ; au sommet de son activité maritime, vers la fin des années 1870, Ross, selon certains témoignages, possédait de par le monde une flotte de 80 navires.

À titre de capitaliste, Ross jouit d’une grande influence parmi les gens d’affaires de Québec, et son nom fut associé à celui d’un bon nombre des principaux hommes d’affaires du Canada. En 1861, avec Isaac Buchanan, James Bell Forsyth* et Jean-Baptiste Renaud, il occupait une place éminente dans le groupe qui créa la Compagnie de navigation du Saint-Laurent. Avec beaucoup d’associés de cette dernière compagnie, il fonda la Compagnie d’assurance maritime de Québec, en 1862, et la Compagnie de l’élévateur de Québec en 1863. Ross avait aussi placé beaucoup d’argent dans la Banque nationale (75 actions), la Banque d’Union du Bas-Canada ($12 000) et la Banque de Québec ($26 000), selon une liste gouvernementale des actionnaires des banques à charte canadiennes, de 1868. Particulièrement actif au sein de la Banque de Québec, il en fut vice-président de 1866 à 1869, et président de 1869 à sa mort.

Ross s’intéressa aussi au développement des chemins de fer. En mars 1873, il consentit à la Compagnie du chemin à lisses de Lévis à Kennebec une forte avance de fonds qui, financièrement, la sauva du désastre. L’année suivante, il fut nommé au nombre des fiduciaires chargés de veiller à la bonne gestion d’un fonds de $74 385, mis de côté par la compagnie pour garantir le paiement des intérêts sur les obligations qu’on devait vendre à Londres. En 1873, Ross joua un rôle actif au sein du groupe de capitalistes qui acquit de Joseph-Édouard Cauchon la majorité des actions de la Compagnie du chemin de fer de la rive nord, alors en mauvaise posture financière. Élu membre du conseil d’administration le 20 mai 1873, avec Jean-Baptiste Renaud, Élisée Beaudet, Andrew Thomson, Willis Russell, William Rhodes, Thomas McGreevy* et John Burstall*, Ross fut par la suite élu par ses collègues président de la compagnie. Malheureusement, les efforts du nouveau conseil en vue d’obtenir un financement solide échouèrent et, en 1875, le gouvernement de la province de Québec acquit la compagnie pour créer le chemin de fer de Québec, Montréal, Ottawa et Occidental, propriété de l’État. Ross n’en restait pas moins attiré par les perspectives qu’offrait cette ligne, et, quand elle fut mise en vente, en 1882, il fit partie d’un syndicat, formé de Louis-Adélard Senécal, Thomas McGreevy, Mathew Hamilton Gault, Jean-Baptiste Renaud, Charles William Carrier et Victor Hudon*, entre autres, qui offrit de louer la ligne, avec option d’achat. Après que le gouvernement dirigé par Joseph-Adolphe Chapleau* eut vendu la section ouest du Québec, Montréal, Ottawa et Occidental à la Compagnie du chemin de fer canadien du Pacifique, le syndicat modifia son offre et, à titre de Compagnie du chemin de fer de la rive nord, il négocia l’achat de la section est, au prix de $4 000 000 ; Ross en fut l’un des membres fondateurs siégeant au conseil d’administration. En décembre 1882, toutefois, la majorité des actions de la Compagnie du chemin de fer de la rive nord furent vendues au Grand Tronc. Au cours de ces années, Ross investit aussi beaucoup d’argent dans la Compagnie du chemin de fer de Québec et du lac Saint-Jean, dont il fut membre du conseil d’administration en 1877 et président à partir de 1878.

James Gibb Ross joua un grand rôle au sein de nombreuses associations commerciales et sociales de Québec. Périodiquement membre du conseil du Bureau de commerce, de 1856 à 1871, il en occupa la présidence en 1862–1863 ; en 1874, il fut nommé membre de la Commission du havre de Québec. Se joignant à un groupe de citoyens parmi les plus influents de Québec, tels les anciens maires Charles-Joseph Alleyn et sir Narcisse-Fortunat Belleau*, Joseph-Édouard Cauchon, James Bell Forsyth et David Edward Price, Ross participa à la fondation du Club Stadacona, en 1861. Situé au coin des rues Sainte-Anne et d’Auteuil, le club attira pendant de nombreuses années les marchands de Québec et les officiers en poste à la citadelle. En 1864, Ross s’occupa de la constitution juridique de la Société philanthropique du Canada, en compagnie de Pierre Garneau*, de Thomas D’Arcy McGee*, de Jean-Baptiste Renaud, de Georges-Honoré Simard* et d’Isidore Thibaudeau*. Le but de cette société était de récompenser les actes de bravoure destinés à sauver des vies humaines et de faire punir les actes de cruauté envers les animaux.

Lors des élections fédérales de 1872, Ross se présenta comme candidat conservateur indépendant dans le comté de Québec-Centre, en vue d’être le porte-parole de la minorité britannique et protestante de Québec. La lutte que Joseph-Édouard Cauchon, autre candidat indépendant, et lui se livrèrent dégénéra rapidement en une campagne acerbe centrée sur les différences de race et de religion. Le 5 août, jour des élections, une émeute éclata, mettant aux prises les partisans de chaque candidat, et, avant que le calme fût rétabli, l’un des belligérants fut mortellement atteint d’une balle. Le vétéran Cauchon l’emporta sur Ross par 330 voix. Se présentant de nouveau aux élections de 1878, Ross, une fois de plus, échoua dans cette circonscription, le cédant à l’indépendant Jacques Malouin. Le 11 janvier 1884, le gouvernement conservateur de sir John Alexander Macdonald* nomma Ross au sénat, pour y remplacer feu David Edward Price, comme représentant de la division des Laurentides. Assez peu actif dans son rôle de sénateur, Ross siégea à la Chambre haute jusqu’à sa mort, quatre ans plus tard.

Célibataire, James Gibb Ross mourut chez son frère, Francis*, le 1er octobre 1888. Il laissait des biens évalués, selon diverses sources, entre $5 000 000 et $10 000 000. Par testament, Ross léguait $525 000 à de nombreuses œuvres de charité, la plupart liées à la minorité anglaise de Québec, sauf qu’un fonds de £10 000 était mis de côté pour le soulagement des protestants pauvres de Carluke, sa ville natale. Le 4 octobre, il était enseveli au cimetière Mount Hermon, à Sillery, non loin de Québec.

En collaboration avec Kenneth S. Mackenzie

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En collaboration avec Kenneth S. Mackenzie, « ROSS, JAMES GIBB », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 1 déc. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/ross_james_gibb_11F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1982
Année de la révision:    1982
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