EASTON, ROBERT, ministre presbytérien, baptisé le 15 septembre 1773 à Selkirk, Écosse, aîné des quatre enfants de William Easton, jardinier, et de Nellie Thomson ; décédé le 2 mai 1831 à Montréal.
Robert Easton naquit près de Selkirk, plus précisément à Hawick où il fréquenta la grammar school. Il entra à l’University of Edinburgh et, en 1793, reçut le diplôme du séminaire de l’Associate Synod of Scotland à Selkirk ; puis, le consistoire burgher d’Édimbourg lui donna l’autorisation de prêcher. Cependant, ce n’est que le 2 août 1798, après avoir accepté un pastorat à Morpeth, en Angleterre, qu’il fut ordonné ministre. Le révérend John Mason, de New York, l’ayant invité à venir exercer son ministère en Amérique, Easton démissionna de son poste à Morpeth en 1802 et, avec Mason et cinq autres jeunes ministres, dont Robert Forrest, il s’embarqua à destination de New York en septembre.
Easton œuvra d’abord comme missionnaire aux États-Unis. Puis, en 1804, il arriva à Montréal pour desservir une congrégation que Forrest avait fondée avec d’anciens fidèles de l’église St Gabriel Street, après que sa candidature à la chaire de cette église eut été refusée en 1803 au profit de James Somerville*. Ayant accepté un poste à New York, Forrest avait persuadé Easton de venir le remplacer à Montréal. Privée d’église, la congrégation d’Easton tenait ses offices dans une salle de la rue Notre-Dame. La majorité des fidèles étaient des scissionnistes écossais et des presbytériens américains, pour la plupart « commerçants et artisans » au dire de James Leslie*. Selon ce dernier, son propre temple, l’église St Gabriel Street, était fréquenté « par la haute société presbytérienne » , Avec Easton, la nouvelle congrégation ne tarda pas à élire un conseil d’administration et songea à se construire une église. Elle acheta deux lots adjacents situés rue Saint-Pierre et, sur l’un d’eux, Easton posa la première pierre du nouveau temple le 15 octobre 1805. Étant donné la forte tension qui marquait les relations entre la Grande-Bretagne et les États-Unis, Easton s’appliqua, dans un discours prononcé lors de cette cérémonie, à souligner le fait que sa congrégation n’était pas moins loyale à la Grande-Bretagne que celle de l’église St Gabriel Street. À la même occasion, tout en déplorant la décision rendue par la Cour du banc du roi à Québec de n’accorder la garde des registres d’état civil qu’aux prêtres anglicans et catholiques [V. Clark Bentom*], il exhorta ses ouailles à faire preuve de patience. Vers la fin de 1806 ou en 1807, la construction de l’église St Peter Street était terminée. Elle avait coûté £1 500, dont £600 avaient été recueillies à New York par Easton, sous réserve que l’institution demeure scissionniste.
En mai 1808, Easton s’installa dans une maison de pierre que la congrégation avait acquise en achetant le lot attenant à celui sur lequel on avait construit l’église. De son salaire de £125 qui lui était toujours versé avec retard, le conseil d’administration soustrayait £18 pour son loyer. Peu de temps après, Easton épousa Mary Beattie, qui avait quitté Salem, dans l’état de New York, avec sa famille pour venir demeurer à Montréal. Des quatre enfants qui naquirent de leur mariage, deux moururent en bas âge.
La période qui s’écoula entre 1808 et 1818 fut la plus satisfaisante de la carrière d’Easton. La congrégation obtint finalement de tenir les registres d’état civil en 1815 et devint plus florissante. Par voie de conséquence, en 1818, les émoluments d’Easton avaient doublé, atteignant la somme de £250. Outre la responsabilité de sa propre congrégation, Easton exerçait son ministère auprès des immigrants irlandais et écossais de confession presbytérienne qui étaient de passage, ainsi qu’auprès des presbytériens qui étaient regroupés çà et là à l’extérieur de la ville. Sa réputation s’étendit et au moins deux de ses sermons furent publiés, l’un en 1815 et l’autre, prononcé devant la Female Benevolent Society de Montréal, en 1816. Il fut nommé cette année-là agent à Montréal de la British and Foreign Bible Society et, lorsqu’une section fut créée dans la ville en 1818, il en devint le premier secrétaire.
Easton avait tenté sans succès en 1805 de rattacher l’église St Peter Street à l’Associate Synod of Scotland. En juillet 1817, une autre tentative fut effectuée Easton, William Smart*, pasteur de l’église scissionniste de Brockville, dans le Haut-Canada, William Bell* et William Taylor, deux ministres arrivés depuis peu d’Écosse et qui furent probablement les instigateurs de cette démarche, demandèrent à l’Associate Synod l’autorisation de former un consistoire canadien qui serait affilié à cet organisme. Cependant, sans même laisser au synode le temps de répondre, Smart lança l’idée d’un consistoire indépendant qui réunirait tous les ministres des deux provinces, quelle que soit leur affiliation aux diverses Églises d’Écosse. En janvier 1818, Taylor, Smart et Easton, qui était devenu un partisan enthousiaste du projet, se réunirent et mirent sur pied le consistoire des Canadas, avec Easton comme modérateur, afin de procéder à une ordination. Il fut décidé de tenir une autre réunion en juillet à l’église St Peter Street, à laquelle tous les membres du clergé presbytérien seraient invités, dans le but d’établir une union plus solide. Bell, qui espérait une affiliation à l’Associate Synod, avait refusé de se rendre à la réunion de janvier, mais il assista à celle de juillet. Il avait déjà dit, en parlant d’Easton, que sa « prédication n’était pas jugée évangélique » et il l’avait pris en aversion. « Nous avons vite constaté, déclara-t-il, que M. Easton avait pris en main toutes les affaires du consistoire et avait agi avec toute l’autorité d’un évêque. » Easton continua à dominer les discussions au grand dam de Bell. Lorsque l’autorisation de former un consistoire arriva d’Écosse, Easton, craignant que cette autorisation ne compromette l’existence de l’organisme indépendant, tenta d’étouffer la nouvelle. Cependant, Bell et la presse en eurent connaissance et une vive controverse s’ensuivit. Easton parvint à ses fins et le consistoire des Canadas fut accepté.
En juin 1818, le conseil d’administration de l’église St Peter Street avait à contrecœur accordé à Easton un congé d’un an à plein salaire, afin qu’il aille recouvrer la santé en Grande-Bretagne et recruter des ministres pour la colonie. Il demeura absent près de deux ans, ce qui irrita sa congrégation. En 1819–1820, alors qu’Easton se trouvait encore à l’étranger, Bell fit transformer le consistoire des Canadas en synode des Canadas, et il insista, semble-t-il, pour qu’Easton et sa congrégation en soient exclus. De toute façon, la congrégation de St Peter Street, probablement insatisfaite de l’aide qu’elle recevait, désavoua le synode en février 1820, coupant ainsi ses liens avec le scissionnisme presbytérien du Canada, et elle imposa sa décision à Easton lors de son retour à l’automne. L’influence d’Easton sur sa congrégation s’en trouva affaiblie et la rupture avec le scissionnisme canadien divisa les paroissiens. Lorsque Easton présenta sa démission en 1822, la congrégation fit appel à John Burns, ministre de l’Église d’Ecosse, pour lui succéder, et décida d’adhérer à cette Église. Ces décisions provoquèrent le départ de la minorité américaine qui avait contribué à la construction de l’église sous réserve que la congrégation demeure une entité scissionniste. Les Américains fondèrent alors l’église American Presbyterian, et l’église St Peter Street devint l’église St Andrew.
Les centres d’intérêt d’Easton se diversifièrent progressivement. Avant de partir en congé en 1818, il avait proposé à sir John Coape Sherbrooke de réviser la politique britannique d’émigration et demandé au gouvernement une concession de terre dans le canton de Rawdon. À son retour, il fut de nouveau nommé secrétaire de la section montréalaise de la British and Foreign Bible Society et, en 1822, il proposa à la Church Missionary Society, organisme anglican, de fonder un collège indien dans le Bas-Canada. Il poursuivit aussi ses démarches pour obtenir une concession, mais sans succès.
Sa vue baissant, Robert Easton prit sa retraite avec une pension de £150, lorsque John Burns arriva finalement en 1824. Parlant d’Easton, Archibald Henderson, un ministre presbytérien arrivé dans le Bas-Canada en 1818, affirma que l’on ne pouvait pas rester longtemps en sa compagnie « sans remarquer qu’il avait tout d’un visionnaire ». Bien que sa carrière se soit terminée par un échec, la scission au sein de la congrégation qu’il avait formée fut à l’origine de deux des églises presbytériennes les plus importantes de Montréal.
Robert Easton est l’auteur de : A sermon, delivered before the members of the Female Benevolent Society, in Montreal, September 8, 1816 (Montréal, 1816) ; et de Reasons for joy and praise, A sermon preached April 6, 1815, being the day of general thanksgiving for peace with the United States (Montréal, 1815).
ANQ-M, CE1-125, 5 mai 1831.— APC, RG 1, L3-: 79841.— Arch. of the Mount Royal Cemetery Company (Outremont, Québec), Reg. of burials, mai 1831.— Church Missionary Soc. Arch. (Londres), C, C. 1/M, Mission books (incoming letters), 28 janv. 1822.— Mount Royal Cemetery Company (Outremont), Pierre tombale de Robert Easton.— St Andrew’s Presbyterian Church (Montréal), Minutes of the Church Committee, 1804–1824.— Canadian Courant and Montreal Advertiser, 22 déc. 1821, 4 mai 1831.— La Gazette de Montréal, 21 oct. 1805.— W. M. Glasgow, Cyclopedic manual of the United Presbyterian Church of North America [...] (Pittsburgh, Pa., 1903).— Scott et al., Fasti ecclesiæ scoticanæ, 7.— R. Campbell, Hist. of Scotch Presbyterian Church.— Gregg, Hist. of Presbyterian Church (1885).— E. A. [Kerr] McDougall, « The American element in the early Presbyterian Church in Montreal (1786–1824) » (thèse de m.a., McGill Univ., Montréal, 1965), 113–114, 152–153, 155 ; « The Presbyterian Church in western Lower Canada, 1815–1842 » (thèse de ph.d., McGill Univ., Montréal, 1969), 60–64, 307.— William MacKelvie, Annals and statistics of the United Presbyterian Church [...] (Édimbourg, 1873).— John McKerrow, History of the Secession Church (2 vol., Édimbourg, 1849), 2.— Isabel [Murphy] Skelton, A man austere : William Bell, parson and pioneer (Toronto, 1947).
Elizabeth Ann Kerr McDougall, « EASTON, ROBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/easton_robert_6F.html.
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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