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CAMPBELL, sir ARCHIBALD, officier et administrateur colonial, né le 12 mars 1769 à Glen Lyon, Écosse, troisième fils du capitaine Archibald Campbell et de Margaret Small ; le 6 juillet 1801, il épousa Helen Macdonald of Garth, et ils eurent deux fils et trois filles ; décédé le 6 octobre 1843 à Édimbourg.
Archibald Campbell prit le métier des armes « comme un héritage de famille », pour reprendre une expression déjà utilisée, et devint le 28 décembre 1787 enseigne dans le 77th Foot en recrutant 20 hommes. Il passa les années 1788 à 1801 aux Indes orientales, où il fut promu lieutenant le 26 avril 1791 et capitaine le 24 mai 1799. Forcé de rentrer en Grande-Bretagne en 1801 pour des raisons de santé, il travailla surtout au service du recrutement, jusqu’en 1804. Après sa promotion au grade de major le 14 septembre de cette année-là, il servit dans diverses garnisons de Guernesey, d’Écosse et d’Irlande. En 1808, sous le commandement de sir John Moore, il prit part à la désastreuse campagne de La Corogne, en Espagne. Le 16 février 1809, on l’éleva au grade de lieutenant-colonel et on l’affecta à la réorganisation de l’armée portugaise, dans laquelle il devint par la suite major général. Il commanda une brigade à toutes les grandes batailles de la péninsule Ibérique et du midi de la France et reçut la croix militaire avec agrafe, l’ordre de la Tour et de l’Épée, des mains du roi du Portugal, puis le titre de chevalier le 28 avril 1814. Le 4 juin de la même année, il fut promu colonel honoraire dans l’armée britannique et devint l’un des aides de camp du prince régent. À compter de 1816, il commanda la division de Lisbonne dans l’armée portugaise mais démissionna après la révolution de 1820, avec laquelle il ne sympathisait pas. Peu après son retour en Angleterre, on le nomma lieutenant-colonel du 38th Foot, qu’il rejoignit dans la colonie du Cap (Afrique du Sud) et accompagna en Inde en 1822.
Campbell connut son heure de gloire à titre de commandant du corps expéditionnaire qui partit le 5 mai 1824 des îles Andaman pour conquérir la Birmanie. Les fonctionnaires britanniques ignoraient tout des embûches de la guerre tropicale, et un historien a décrit cette campagne comme « la plus mal dirigée de toutes les guerres coloniales du dix-neuvième siècle ». La faute en revient sûrement en partie à Campbell, qui fut maintes fois coupable d’optimisme excessif et de mauvaise préparation, mais grâce à un mélange de chance et d’audace il mena la campagne à bien en février 1826. Même l’historien militaire John William Fortescue, sévère envers l’expédition, reconnaissait que Campbell avait eu « des nerfs d’acier, une volonté à toute épreuve, une grande force morale et beaucoup de courage ». Devenu major général le 27 mai 1825, il obtint une pension annuelle de £1 000 de l’East India Company, la grand-croix (militaire) de l’ordre du Bain et un vote de remerciement de la part des deux chambres du Parlement britannique. De 1826 à 1829, il demeura à la tête des provinces cédées à la Grande-Bretagne par la Birmanie et agit en tant que commissaire civil auprès de ce royaume et du Siam (Thaïlande). À son retour en Grande-Bretagne, il chercha à être affecté de nouveau en Orient mais dut se contenter du poste de lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick, coup dur que son élévation au titre de baronnet, le 30 septembre 1831, l’aida sans aucun doute à supporter.
Campbell prit la suite de William Black* au gouvernement du Nouveau-Brunswick le 8 septembre 1831. Le premier problème qui se posa à lui fut un acte d’« agression injustifiable » du Maine : l’envoi (par les autorités de l’État, croyait-il) d’une députation qui devait organiser l’élection d’édiles municipaux dans les villages de la région du Madawaska, dont la possession faisait l’objet d’un litige avec le Nouveau-Brunswick. Campbell mena promptement un détachement militaire dans le secteur et arrêta plusieurs Américains. Même s’il relâcha par la suite ceux qui furent jugés coupables d’avoir déclenché les désordres dans la région du Madawaska, il soutint que pour prévenir de tels incidents il fallait renforcer les troupes régulières en poste au Nouveau-Brunswick. Il entreprit de construire la « route royale », entre Fredericton et Grand Falls, afin d’accélérer l’envoi de soldats et de colons britanniques dans le territoire en litige. Toutefois, il ne put convaincre les autorités militaires de Halifax de muter au Nouveau-Brunswick le nombre de soldats qu’il jugeait nécessaire.
Campbell n’eut guère de succès non plus lorsqu’il tenta d’améliorer l’efficacité de la milice, « mal organisée » selon lui. En 1831, la chambre d’Assemblée, qui ne partageait pas ses inquiétudes et tentait d’accroître son pouvoir sur la structure de la milice, sabra dans les salaires des officiers supérieurs de visite ; en 1832, elle ne leur accorda que de mauvais gré la même somme que l’année précédente. En 1833, elle demanda que les miliciens ne soient contraints qu’à un jour d’entraînement par an, au lieu de trois, et qu’on réduise de beaucoup la solde des adjudants et des sergents-majors. Campbell rejeta ces deux requêtes et persuada l’Assemblée de renouveler pour une autre année les fonds destinés aux officiers de visite. D’après lui, l’hostilité de la chambre était le signe d’un « jugement perverti ou [d’une] mauvaise disposition », et il protesta en voyant que le ministère des Colonies n’avait pas prévu de crédits pour la milice dans la liste civile permanente demandée à l’Assemblée. En mars 1834, on adopta les crédits annuels alloués aux officiers de visite « avec moins d’opposition que d’habitude », mais la nouvelle chambre qui se réunit en 1835 refusa de pourvoir au traitement des officiers de milice. Campbell fulmina contre « ces mesures contraires au patriotisme et [...] à la loyauté ». L’Assemblée restaura temporairement les crédits destinés aux adjudants et aux sergents-majors mais, en 1837, elle les rejeta de nouveau et suspendit la loi de milice. Campbell tenta bien de resserrer la discipline de la milice et d’avoir davantage la haute main sur les nominations, mais comme l’assistance financière de l’Assemblée était insuffisante et que la métropole ne lui apportait qu’un appui tiède (elle refusait de distribuer des armes aux miliciens), ses efforts de rationalisation ne réussirent guère.
Ce n’était là qu’un des fronts sur lesquels l’Assemblée et le nouveau lieutenant-gouverneur avaient tôt fait de s’opposer. Dans les premières années du xixe siècle, le Nouveau-Brunswick avait acquis une relative stabilité politique, qu’avait cependant compromise en 1824 la nomination de Thomas Baillie* au poste de commissaire des Terres de la couronne. La série de réformes introduite par Baillie avait eu pour conséquences de mécontenter les marchands de bois de la colonie et de gonfler les revenus provinciaux tout comme sa fortune personnelle. Toutefois, ces revenus servaient en bonne partie à éponger les frais d’administration de son bureau, qui ne cessaient de grossir. Campbell lui-même reconnaissait que « les énormes dépenses (non compensées par un profit suffisant en revenus imprévus) du département des Terres de la couronne fourniss[aient] un sujet tout indiqué d’indignation populaire ». Lorsque Baillie, au début de 1832, convainquit le ministère des Colonies d’abolir les postes de receveur général et de vérificateur général, devenus superflus selon lui, la concentration du pouvoir entre ses mains souleva un tel tollé que Campbell fit renverser la décision.
Malgré les irrégularités patentes observées dans le service de Baillie, Campbell n’apporta que des changements mineurs au régime de concession des terres et refusa avec véhémence de laisser à l’Assemblée quelque pouvoir en matière de politique foncière. Les détracteurs de Baillie, disait-il, étaient des « agitateurs » ; lorsqu’il scinda en deux le Conseil du Nouveau-Brunswick, en 1833, il lui donna le siège le plus important au Conseil exécutif, où il fit aussi entrer le beau-père de Baillie, William Franklin Odell, et George Frederick Street*, qui était très lié à Baillie. Devant les protestations de l’Assemblée, il allégua que les plaintes étaient attribuables aux ambitions déçues de « certains personnages très gênants et dangereux – deux frères du nom de Simonds [Charles* et Richard Simonds] ». En dépit des pressions du ministère des Colonies, il refusa de nommer au Conseil exécutif même un seul des députés influents. Son choix de candidats pour le Conseil législatif n’était pas plus judicieux. En 1832, il avait recommandé à peu près tous ceux qu’il proposait de faire entrer au Conseil exécutif plus un seul député, William Crane*, qui déclina son offre. En mai 1833, après la formation du Conseil législatif, il demanda d’y ajouter le procureur général, le solliciteur général et l’avocat général pour lui donner plus de poids, mais le ministère des Colonies refusa de sanctionner la nomination d’autres fonctionnaires à ce moment-là. Obligé de soumettre une nouvelle liste, Campbell y inscrivit plusieurs des mêmes noms, dont celui du procureur général. On confirma ces nominations en dépit du fait qu’elles n’étaient pas acceptables pour la majorité en chambre.
Campbell appréciait encore moins le désir de l’Assemblée d’avoir la mainmise sur les revenus imprévus et territoriaux de la couronne. Quand le ministère des Colonies envisagea en 1832 d’abandonner ces revenus en échange d’une liste civile permanente, il demanda qu’une grosse somme soit réclamée « advenant l’adoption, à [sont] regret, d’une telle mesure », pour parer aux dépenses imprévues et empêcher à jamais que le gouvernement ne dépende de l’Assemblée. L’année suivante, il refusa de remettre à la chambre une ventilation des recettes qui provenaient des revenus de la couronne et qualifia les principaux députés d’« agitateurs malfaisants ». Après que l’Assemblée eut envoyé Charles Simonds et Edward Barron Chandler* à Londres, en mai 1833, pour arrêter les modalités de cession des revenus imprévus et territoriaux, il proposa que le gouvernement britannique réclame une liste civile de £18 000 à £20 000, somme que le secrétaire d’État aux Colonies, Edward George Geoffrey Smith Stanley, jugea faramineuse. Campbell parvint néanmoins à persuader le ministère des Colonies d’exiger plus de concessions que l’Assemblée n’était prête à en faire, si bien que l’offre de Stanley fut rejetée. Campbell demeurait « convaincu que l’aménagement du pays [...] sera[it] retardé » par la cession des revenus de la couronne et il condamnait amèrement le régime de financement des routes et des ponts, régi par la chambre. Il procéda à la dissolution de l’Assemblée en novembre 1834, mais la nouvelle chambre continua d’exiger la mainmise sur tous les revenus de la province. Elle refusa un projet de loi sur la commutation des redevances, que Campbell avait commencé à percevoir, et se querella avec le Conseil législatif, de sorte qu’aucune loi de finances ne fut adoptée. Campbell prorogea le Parlement en mars 1835 mais le convoqua de nouveau le 15 juin ; l’Assemblée vota alors les crédits et accepta la commutation des redevances. Elle redemanda la cession des revenus imprévus et territoriaux, mais comme ces derniers montaient en flèche, Campbell s’opposa encore à toute entente sur le sujet.
Après avoir essuyé une nouvelle rebuffade à la session de 1836, l’Assemblée envoya à Londres une autre délégation, composée de William Crane et de Lemuel Allan Wilmot*. Campbell prétendit que l’envoi de cette délégation était « généralement désapprouvé dans toute la province », mais le secrétaire d’État aux Colonies, lord Glenelg, qui était whig, fut assez favorablement impressionné par Crane et Wilmot pour négocier une entente avec eux. Atterré par la décision de céder les revenus imprévus et territoriaux, Campbell fit tout pour retarder l’application de ses instructions à cet effet. L’Assemblée, réunie de nouveau en décembre 1836, écarta ses objections en disant, rapporta Campbell, qu’elles étaient « de piètre conséquence et inspirées de motifs indignes », puis adopta un projet de loi sur la liste civile, qu’il rejeta. Campbell envoya alors Street à Londres afin de justifier son opposition au projet de loi et offrit de démissionner si ses vues ne coïncidaient pas avec celles de lord Glenelg. Celui-ci accepta sa démission et, en mai 1837, muta sir John Harvey* de l’Île-du-Prince-Édouard au Nouveau-Brunswick pour qu’il négocie une entente avec l’Assemblée selon les modalités acceptées plus tôt par le ministère des Colonies.
Campbell quitta Saint-Jean le 1er juin, « au milieu des regrets d’une grande foule de citoyens parmi les plus respectables », nota un journal. Peut-être les conservateurs de la colonie le voyaient-ils partir avec tristesse, mais une vaste majorité de Néo-Brunswickois étaient contents. Le 28 juin 1838, Campbell fut promu lieutenant général ; en août, il accepta le commandement en chef de Bombay. Des problèmes de santé qui l’avaient déjà affligé au Nouveau-Brunswick le forcèrent cependant à démissionner presque tout de suite. Il se retira à Édimbourg, où il mourut en 1843.
Sir Archibald Campbell, écrit James Hannay* dans History of New Brunswick, était un « vieux tyran militaire [...] tout à fait inapte » à occuper une charge publique. Par ses opinions conservatrices, il se distinguait peu de la majorité des officiers affectés au gouvernement des colonies de l’Amérique du Nord britannique après les guerres napoléoniennes. Cependant, il défendait ces opinions avec une rigidité exceptionnelle, peut-être parce qu’il avait passé la plus grande partie de sa vie en service outre-mer, surtout en Orient, où il n’avait guère acquis les vertus politiques indispensables dans une colonie dotée d’institutions représentatives. Il critiquait « les vues étroites, les connaissances et compétences extrêmement limitées des législateurs de la province », mais ses propres dépêches fourmillent d’exemples de préjugés. Il était sûrement sincère quand il disait n’avoir « pas de plus cher dessein que d’assurer l’inviolabilité de la prérogative » de la couronne et, comme l’affirme l’historien William Stewart MacNutt*, il avait toutes les raisons de douter que l’Assemblée ferait bon usage des revenus qui lui seraient cédés. Mais il était distant, inflexible, et aurait employé ces revenus à des fins aussi discutables : l’entretien du clergé anglican, le financement de l’impopulaire King’s College, l’augmentation des traitements de la coterie de fonctionnaires qui l’entourait. Quand il était manifeste, même aux yeux de ses supérieurs londoniens, qu’il faisait fausse route, il avait la sottise de confondre opposition et manque de loyauté. Comme le déclare Hannay : « Aucun gouverneur du Nouveau-Brunswick n’a été aussi peu au diapason de la population. »
Le National Army Museum (Londres) expose un portrait de sir Archibald Campbell.
La source principale pour l’étude de la carrière de Campbell est PRO, CO 188/41–56. Il existe une petite collection de documents de sir Archibald Campbell aux APC, sous la cote MG 24, A21, mais elle consiste principalement en reproductions de ce qui se trouve dans les dossiers du PRO, CO. Le New-Brunswick Courier, de 1831 à 1837, le Times (Halifax), 2 mai, 13, 20 juin 1837, et le Loyalist (Fredericton), 16 nov. 1843, sont également utiles. Les renseignements biographiques sont tirés de : PRO, CO 323/133 : fos 353–354 et WO 211/4 : fos 40–41 ; Burke’s peerage (1927) ; Robert Chambers, A biographical dictionary of eminent Scotsmen (nouv. éd., révisée et poursuivie par Thomas Thomson, 3 vol., Londres, 1870 ; réimpr., New York, 1971) ; Colburn’s United Service Magazine (Londres), 1843, part. iii : 440–443, 480 ; DNB ; G.-B., WO, Army list, 1788–1844 ; et W. A. Shaw, The knights of England ; a complete record from the earliest limes to the present day [...] (2 vol., Londres, 1906), 1 : 224 ; 2 : 313. Le rôle que Campbell a joué dans la première guerre birmane est étudié dans George Bruce, The Burma wars, 1824–1886 (Londres, 1973), et J. W. Fortescue, A history of the British army (13 vol. en 14, Londres, 1899–1930), 11. James Hannay critique sévèrement Campbell dans Hist. of N.B., tandis que William Stewart MacNutt, dans New Brunswick, lui est plus sympathique. Différents aspects de la carrière de Campbell sont traités dans D. R. Facey-Crowther, « The New Brunswick militia : 1784–1871 » (thèse de m.a., Univ. of N.B., Fredericton, 1965), 118–133 ; Charlotte Lenentine, Madawaska : a chapter in Maine-New Brunswick relations (Madawaska, Maine, 1975) ; et Buckner, Transition to responsible government. [p. s.]
Phillip Buckner, « CAMPBELL, sir ARCHIBALD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/campbell_archibald_7F.html.
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Auteur de l'article: | Phillip Buckner |
Titre de l'article: | CAMPBELL, sir ARCHIBALD |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1988 |
Année de la révision: | 1988 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |