BURNS, JOHN, ministre presbytérien et instituteur, baptisé le 12 février 1773 dans la paroisse de Fenwick, Ayrshire, Écosse, fils aîné de Thomas B. Burns, fermier, et d’Ann Tod ; il épousa une prénommée Jane, et ils eurent au moins six enfants ; inhumé le 27 février 1822 à Stamford (Niagara Falls, Ontario).
On sait peu de chose des premières années de John Burns. Il fit ses études à l’University of Glasgow et au Sécession Theological Hall, puis reçut l’autorisation de prêcher de l’Associate Synod of Scotland en 1803. Selon certaines sources, Burns vint dans le Haut-Canada en 1804, via la Pennsylvanie ; toutefois, d’après ses propres affirmations, il arriva dans le district de Niagara en 1805.
Dès 1792, Newark (Niagara-on-thé-Lake) comptait une congrégation presbytérienne nombreuse et prospère. Au cours des années qui suivirent, les fidèles eurent de la difficulté à s’assurer les services d’un ministre attitré pour leur congrégation, laquelle fut désignée plus tard sous le nom de St Andrew. Leur premier ministre, John Dun*, démissionna en 1796 ; son successeur, John Young, occupa la charge pendant quelque temps en 1802, puis remit sa démission pour cause d’alcoolisme. L’association de Burns avec cette congrégation commença en 1805 ; il exerça d’abord son ministère jusqu’en 1811, puis de 1816 à 1818 et, enfin, il présida des assemblées de conseillers presbytéraux jusqu’en 1820. À l’instar de Dun, Burns prêcha régulièrement à Stamford.
En 1805, la congrégation St Andrew accepta de verser à son ministre des appointements supplémentaires pour qu’il enseigne le latin, le grec et les mathématiques à 13 élèves, mais on ignore si c’est à ce moment-là que Burns commença son métier d’enseignant. Deux ans plus tard, le District School Act prévoyait la création de grammar schools régionales et un traitement annuel de £100 pour l’instituteur choisi, par les commissaires d’écoles de chaque district. À Niagara (Niagara-on-the-Lake), les commissaires locaux, dont Robert Hamilton*, Robert Kerr et William Dickson*, engagèrent Burns comme premier instituteur de l’école du district. Celui-ci assuma cette tâche de 1808 jusqu’à sa mort, et c’est alors que le révérend Thomas Creen lui succéda. Burns passe pour avoir enseigné à beaucoup d’enfants qui devinrent des hommes éminents ; parmi ceux-là figurent William Hamilton Merritt* et le propre fils de Burns, Robert Easton Burns*. Dans un rapport daté du 13 juillet 1821, Burns dit enseigner à 59 élèves : 20 abordent la lecture anglaise, 30 étudient « la lecture anglaise, l’écriture et l’arithmétique », tandis que les 9 autres sont à divers stades de l’étude des auteurs grecs et latins.
Durant la guerre de 1812, la frontière du Niagara fut exposée aux déprédations des rebelles [ V. Abraham Markle] et au va-et-vient des troupes. Comme tant d’autres habitants de la région, Burns eut beaucoup à souffrir de cette situation. À partir du printemps de 1813, l’armée américaine occupa le fort George (Niagara-on-the-Lake) et, plis tard, les envahisseurs saisirent la maison de Burns, décrite comme « une demeure très confortable ». Il tenta une fois de rentrer en possession de ses meubles, mais il en fut empêché par des officiers américains. Le 27 août, les Américains incendièrent l’église presbytérienne. La maison de Burns, qui se trouvait à proximité des ouvrages défensifs élevés à la hâte sur les terres publiques, fut détruite quelque temps avant que les troupes du général de brigade George McLure battent en retraite et qu’elles rasent Niagara au mois de décembre. Burns fut fait prisonnier et incarcéré pendant six mois, probablement dans l’état de New York. On dit que durant son séjour en prison il prêcha chaque dimanche à la garnison américaine. Les hostilités terminées, il entreprit de refaire sa vie et de recouvrer les pertes qu’il avait subies, pertes que sa femme évalua plus tard à £275 et pour lesquelles elle reçut £213 en dédommagement. En outre, Burns distribua des fonds de secours au nom de la Loyal and Patriotic Society of Upper Canada et demanda qu’on lui concède une terre. Il obtint une concession de 400 acres en 1819.
Le moment le plus remarquable de la carrière de Burns fut la publication, en 1814, d’un sermon qu’il avait prononcé le 3 juin à Stamford lors d’une journée publique d’actions de grâces décrétée pour célébrer les victoires des Britanniques sur Napoléon Ier. En de telles occasions, la chaire devenait souvent une tribune politique ; cela permet d’avoir un aperçu de la pensée des hommes politiques du Haut-Canada au cours des premières années d’existence de cette province. Ce jour-là, Burns avait pris comme sujet de son sermon un verset du livre des Proverbes (chap. xxiv, 21) : « Mon fils, crains l’Éternel et le roi ; ne te mêle pas avec les hommes remuants. » À bien des égards, le sermon rappelait les thèmes développés par Edmund Burke dans son ouvrage intitulé Reflections on the revolution in France [...] (Londres, 1790), thèmes qui étaient devenus alors des lieux communs et qui avaient été à l’origine de l’attaque idéologique contre la Révolution française. Toutefois, le sermon de Burns différait de la théorie de Burke sur plusieurs points importants. Par exemple, alors que Burke avait pris soin de faire une distinction entre la légitimité de la Révolution américaine et l’illégitimité de la Révolution française, Burns, lui, ne faisait aucune différence entre les deux événements. Ayant à l’esprit les racines loyalistes des habitants du Haut-Canada et craignant l’allié républicain de la France en Amérique du Nord, Burns voyait les deux révolutions comme le produit du même esprit de destruction qui menaçait le monde de despotisme et d’agitation démocratique. Dans la lutte entre les tenants de la contre-révolution et ceux de la révolution, c’est-à-dire entre l’Angleterre et la France, le Haut-Canada devenait, à l’ouest, le bastion assiégé du royalisme. Burns n’était pas le seul au Haut-Canada à avoir cette mentalité typique de l’élite britannique à cette époque. Elle était également le fait d’hommes aussi différents qu’Isaac Brock*, John Beverley Robinson*, John Strachan* et William Dummer Powell.
Burns avait un langage politique bien particulier. Il puisait dans les théories royalistes qui avaient eu cours en Angleterre au xiie siècle et qui touchaient la nature divine de la royauté. Burns soutenait que « lorsque l’esprit téméraire d’anarchie et la confusion semblaient] régner dans le monde, il appart[enait] à chacun, qui en a[vait] l’occasion par sa situation sociale, de donner des leçons d’obéissance et de soumission ». Il préconisait la crainte de Dieu comme un « rempart de la conscience à une époque troublée et une noble protection contre l’infection envahissante et le poison insidieux des péchés dominants ou à la mode ». Poursuivant dans cette veine, il insistait sur le fait qu’il fallait craindre le roi, parce que les « rois [étaient] les représentants ou les vice-régents de Dieu sur terre ». Il dénonçait les doctrines modernes « qui étudi[aient] l’origine des gouvernements, qui délimitaient] les prérogatives des princes ou qui établissaient] les droits prétendument inaliénables des individus », plutôt que de prêcher la soumission aux décrets du roi pour l’amour de Dieu. Les institutions humaines avaient été consacrées du fait de leur origine divine et méritaient, par conséquent, d’être révérées. Burns fit allusion aux révolutions d’Oliver Cromwell et des Romains pour montrer que les peuples « n’avaient gagné qu’un fardeau de plus en plus lourd de souffrances et d’oppression ». Dans le Haut-Canada, il aurait été équitable de chercher « des moyens et des défenseurs », mais uniquement si la liberté et la propriété, garanties par la Constitution britannique, avaient été menacées. Enfin, Burns se fit l’écho d’un autre thème courant au début du xixe siècle, à savoir la conviction qu’une intervention de la Providence préservait la Grande-Bretagne et le Haut-Canada des affres d’une révolution. Il exhorta la population du Haut-Canada à défendre le pays avec un courage « inspiré par la religion » et fondé sur la piété personnelle.
John Burns succomba à une pleurésie en février 1822. Pendant plusieurs années après sa mort, un certain nombre de ministres du culte se succédèrent à Niagara ; cette période d’instabilité prit fin avec la nomination de Robert McGill* en 1829. Burns semble avoir été un homme réservé et un érudit qui aimait lire et s’instruire. Certes, peu de situations étaient porteuses d’une ironie aussi savoureuse que celle d’un royaliste inconditionnel qui, pendant sa captivité, prêchait ses doctrines à une garnison américaine.
John Burns est l’auteur de : True patriotism ; a sermon, preached in the Presbyterian Church in Stamford, Upper Canada, on the 3d day of June, 1814, being the day appointed by his honor the president, &c.&c.&c. of Upper Canada, for a provincial thanksgiving (Montréal, 1814).
AO, MS 522 ; RG 22, sér. 155.— APC, RG 1, E3, 100 : 214–221 ; L1, 29 : 178 ; L3, 42 : B12/117 ; 68 : B misc., 1793–1840/82 ; RG 5, A1 : 3324–3325, 26384–26385, 29129–29130, 30027–30032 ; RG 19, E5(a), 3741, claim 66.— [James Croil], A historical and statistical report of the Presbyterian Church of Canada, in connection with the Church of Scotland, for the year 1866 (Montréal, 1867).— Documentary history of education in Upper Canada from the passing of the Constitutional Act of 1791 to the close of Rev. Dr. Ryerson’s administration of the Education Department in 1876, J. G. Hodgins, édit. (28 vol., Toronto, 1894–1910), 1 : 30, 60–61.— « Early records of St. Mark’s and St. Andrew’s churches, Niagara », Janet Carnochan, compil., OH, 3 (1901) : 72.— The matriculation albums of the University of Glasgow from 1728 to 1858, W. I. Addison, compil. (Glasgow, Écosse, 1913), 152.— Read, Lives of the judges, 294.— Scott et al., Fasti ecclesiæ scoticanæ, 7 : 628.— An historical narrative of some important events in the life of First Church, St. Catharines, 1831–1931, J. A. Tuer, édit. (Toronto, [1931]), 3–4.— E. R. Arthur, St Andrew’s Church, Niagara-on-the-Lake (Toronto, 1938), 27.— Janet Carnochan, Centennial, St Andrews, Niagara, 1794–1894 (Toronto, 1895), 20–24.— Gregg, Hist. of Presbyterian Church (1885), 184.— History of St. Andrew’s Presbyterian Church, 1791–1975 ([Niagara-on-the-Lake, Ontario, 1975]), 4–6.— J. S. Moir, Enduring witness : a history of the Presbyterian Church in Canada ([Hamilton, Ontario, 1974]).— S. F. Wise, « God’s peculiar peoples », le Bouclier d’Achille : regards sur le Canada de l’ère victorienne. W. L. Morton, édit. (Toronto et Montréal, 1968), 36–61 ; « Upper Canada and the conservative tradition », Profiles of a province : studies in the history of Ontario [...] (Toronto, 1967), 20–33.— Janet Carnochan, « Early schools of Niagara », Niagara Hist. Soc., [Pub.], no 6 (1900) : 35 ; « Two frontier churches », no 7 (s.d.) : 13–14, 23–24, 26.— S. F. Wise, « Sermon literature and Canadian intellectual history », UCC, Committee on Arch., Bull. (Toronto), 18 (1965) : 3–18.
Robert Lochiel Fraser, « BURNS, JOHN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/burns_john_6F.html.
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
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