ROBINAU DE BÉCANCOUR, RENÉ, baron de PORTNEUF (nommé Outsitsony par les Hurons), enseigne dans le régiment de Turenne, chevalier de l’ordre de Saint-Michel, membre de la Compagnie des Cent-Associés, premier grand voyer de la Nouvelle-France, né vers 1625, à Paris, de Pierre Robinau de Bécancour et de Renée Marteau, mort à Québec en 1699.
Son père, Pierre Robinau, secrétaire de la Chambre du roi, receveur provincial de la généralité de Paris puis receveur général des finances à Tours, trésorier de la cavalerie légère de France, membre des Cent-Associés, fut présenté au roi comme candidat au poste de gouverneur de la Nouvelle-France, avec Guillaume Guillemot et Jean de Lauson (père). Mais c’est ce dernier qui fut choisi, en 1651.
René Robinau, après avoir servi durant deux campagnes en qualité d’enseigne dans le régiment de Turenne, arriva à Québec en 1645. Il était à l’emploi du gouverneur Huault de Montmagny quand, en janvier 1646, il participa avec Nicolas Marsolet à la rébellion des « petits habitants » contre ceux « qui avoient les charges & offices » à la Communauté des Habitants. Il fut ensuite officier au camp volant de Québec. C’est en cette qualité qu’il accompagna, le 26 février 1652, le grand sénéchal Jean de Lauson (fils) et 15 Français dans une expédition à Trois-Rivières. Devant cette ville, le 2 juillet, il prit part à un combat contre les Iroquois et recueillit un Huron captif.
Il semble être passé en France à l’automne de 1656. Son séjour lui fut profitable : le roi le fit chevalier de l’ordre de Saint-Michel et la Compagnie de la Nouvelle-France lui accorda le petit fief de Bécancour « sur le chemin du grand Cap Rouge ». La compagnie le pourvut aussi en 1657 de l’office de grand voyer pour le Canada. Il devenait le premier à exercer cette charge qui, d’après P.-G. Roy, « était alors plutôt une sinécure ». En effet, les paysans canadiens préféraient la voie d’eau à la route de terre et détestaient les corvées nécessaires à l’établissement des chemins. Ce n’est qu’au xviiie siècle que la fonction de grand voyer acquit de l’importance et commença d’occasionner des soucis à son titulaire.
René Robinau semble surtout s’être occupé de commerce. En octobre 1659, il fit un voyage en France. Il y remplaça son père, avancé en âge, comme membre de la Compagnie des Cent-Associés. En cette qualité, il signa, le 5 février 1660, un traité commercial avec Toussaint Guenet et plusieurs marchands de Rouen, accordant à cette société le monopole de la traite des castors et des importations dans la colonie. Robinau semble être revenu au pays en 1661 pour en repartir en 1663. Il fut un des signataires, le 23 février 1663, de la lettre par laquelle les Cent-Associés abandonnaient le Canada au roi.
Ensuite, jusqu’en 1667, les documents sont muets sur René Robinau. Le recensement nominal de la Nouvelle-France pour 1666 ne faisant nulle mention de lui et de sa famille, P.-G. Roy suggère que les Robinau pouvaient être à ce moment en France. René Robinau réapparaît en 1667, quand, le 29 mars, la nouvelle Compagnie des Indes occidentales lui octroie « de nouveau [...] le dict office de Grand-Voyer ».
Le 10 octobre 1678, il fut appelé à donner son avis sur la vente de l’eau-de-vie aux Premières Nations. Il affirma « que ce trafic est nécessaire [...] et qu’il est d’un extrême besoin pour l’establissement du commerce et celuy de la Religion de [...] [leur] donner à boire ». Il était sans doute intéressé au commerce avec eux, puisqu’en 1679, l’intendant Duchesneau l’accusa de protéger les coureurs de bois. D’un autre côté, Sulte nous dit que Robinau « résidait souvent aux Trois-Rivières pour son commerce de pelleteries ».
D’ailleurs, il ne semble pas être dans les bonnes grâces de l’intendant. Celui-ci le dénonce de nouveau au ministre le 13 novembre 1680 : « Il y a encore un officier duquel je me plains qui est le sieur de Bécancourt, grand-voyer, qui depuis que je suis ici a toujours négligé de faire sa charge, quelques avertissements que je lui en ai donnés. Enfin dans mon dernier voyage de Montréal sur la clameur des peuples, j’ai été obligé de rendre mon ordonnance portant qu’il ferait ses visites avec défenses de payer aucun gage qu’il ne m’ait apporté les procès-verbaux, mais bien loin d’y satisfaire il est venu m’insulter avec un de ses enfants nommé Villebon » (Joseph Robinau de Villebon).
Toutefois, l’inimitié de Duchesneau n’eut pas beaucoup d’influence sur le roi qui, en mars 1681, érigeait la seigneurie de Portneuf en baronnie. René Robinau avait obtenu ce fief de son beau-père, Jacques Leneuf de La Poterie, le 7 juillet 1671. Le gouverneur de Buade de Frontenac lui concéda aussi, le 23 mars 1677, les îles Bouchard, « scituées prosche et attenant la grande isle qui porte le même nom, » qui avaient d’abord été concédées le 29 octobre 1672 à son frère François Robinau de Fortelle, qui n’est jamais venu au Canada.
À l’automne de 1693, René Robinau semble être reparti pour la France en vue de recueillir un héritage ; il en revint en 1694. Il fut inhumé le 12 décembre 1699 dans l’église des Récollets, selon le désir qu’il avait manifesté dans son testament.
Le 21 octobre 1652, à Trois-Rivières, il passa devant le notaire Ameau* un contrat de mariage avec Marie-Anne, fille de Jacques Leneuf de La Poterie et de Marguerite Legardeur ; le couple eut 12 enfants, dont Pierre*, baron de Portneuf, qui obtint le 24 mai 1689 des lettres de provisions en survivance de la charge de grand voyer, et Joseph Robinau de Villebon, gouverneur de l’Acadie.
AJM, Greffe de Bénigne Basset, 7 juillet 1671.— AJQ, Greffe de François Genaple, 23 oct. 1693, 4 avril 1699.— AJTR, Greffe de Séverin Ameau, 21 oct. 1652.— ASQ, Documents Faribault, 57, 112, 122, 125 ; Polygraphie, III : 141, IV : 8 ; Séminaire, XXXI : 7.— Coll. de manuscrits relatifs à la Nouv.-France, I : 82, 245.— Découvertes et Établissements des Français (Margry), I : 405, 409s.— Dollier de Casson, Histoire du Montréal, 265.— JR (Thwaites).— Jug. et délib., I–III.— Lettres de noblesse (P.-G. Roy), I : 95–102.— Papier terrier de la Cie des I. O. (P.-G. Roy).— Pièces et Documents relatifs à la tenure seigneuriale, demandés par une adresse de l’assemblée législative, 1851, I : 92s.— Recensement de 1681.— [René Robinau de Bécancour], Aveu et Dénombrement de Messire René Robineau, seigneur de Bécancour, grand voyer de la Nouvelle-France, pour le fief et seigneurie de Portneuf (3 sept. 1677), RAPQ, 1925–26 : 340–342.— P.-G. Roy, Inv. concessions, I–III, V ; Inv. ins. Cons. souv. ; Inventaire des procès-verbaux des grands voyers conservés aux archives de la province de Québec (6 vol., Beauceville, 1923–32), I, II.— E.-J. Auclair, Les De Jordy de Cabanac, histoire d’une ancienne famille noble du Canada (Montréal, 1930), 148s., 187–193.— BRH, I (1895) : 89 ; II (1896) : 140 ; V ; (1899) : 126 ; XIV (1908) : 160 ; XV (1909) : 179 ; XXI (1915) : 48, 168 ; XXVI (1920) : 37s., 68s. ; XXVII (1921) : 304 ; XXVIII (1922)— 376.— Ivanhoë Caron, Historique de la voirie dans la province de Québec, BRH, XXXIX (1933) : 198–215.— Thomas Chapais [Ignotus], Notes et Souvenirs, La Presse, 12 nov. 1898 : 9 ; 28 déc. 1901 : 4.— Claude de Bonnault, Le Canada militaire, état provisoire des officiers de milice, de 1641 à 1760, RAPQ, 1949–51 ; 293s.— Archange Godbout, Les Robineau de Bécancourt, MSGCF, IV (1951) : 158–162.— Lanctot, Histoire du Canada, I : 242, 295s., 319.— Henri Lorin, Le Comte de Frontenac : étude sur le Canada français à la fin du XVIIe siècle (Paris, 1895), 182.— P.-G. Roy, Le Premier Baron de Portneuf, Cahiers des Dix, XIV (1949) : 223–241 ; Le Premier Baron de Portneuf, dans Les Petites Choses de notre histoire (3e série, Lévis, 1922), 121–137 ; Les Grands Voyers de la Nouvelle-France et leurs successeurs, Cahiers des Dix, VIII (1943) : 181–196.— Benjamin Sulte, La Guerre des Iroquois, MSRC, III (1897), sect. i : 86 ; Mélanges historiques (Malchelosse), XVIII : 22s.— Les Ursulines de Québec II : 335–339.
Bibliographie de la version révisée :
Bibliothèque et Arch. nationales du Québec, Centre d’arch. de Québec, CE301-S1, 12 déc. 1699.
Jean-Guy Pelletier, « ROBINAU DE BÉCANCOUR, RENÉ, baron de PORTNEUF (Outsitsony) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 28 nov. 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/robinau_de_becancour_rene_1F.html.
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Auteur de l'article: | Jean-Guy Pelletier |
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Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 1 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1966 |
Année de la révision: | 2019 |
Date de consultation: | 28 novembre 2024 |